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27/11/2014 | FRANCE | N°12MA02089

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3ème chambre - formation à 3, 27 novembre 2014, 12MA02089


Vu la requête, enregistrée le 25 mai 2012, présentée pour l'association Yachting Club de la Pointe Rouge, dont le siège est Port de la Pointe Rouge à Marseille (13008), représentée par son président en exercice, par MeA... ;

L'association Yachting Club de la Pointe Rouge demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement nos 1005094, 1005095 du 27 mars 2012 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été assignés au titre de la période du 1er janvier 2005 au 31 dé

cembre 2007 et des cotisations de taxe professionnelle auxquelles elle a été as...

Vu la requête, enregistrée le 25 mai 2012, présentée pour l'association Yachting Club de la Pointe Rouge, dont le siège est Port de la Pointe Rouge à Marseille (13008), représentée par son président en exercice, par MeA... ;

L'association Yachting Club de la Pointe Rouge demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement nos 1005094, 1005095 du 27 mars 2012 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été assignés au titre de la période du 1er janvier 2005 au 31 décembre 2007 et des cotisations de taxe professionnelle auxquelles elle a été assujettie dans les rôles de la commune de Marseille au titre des années 2005 à 2007 ;

2°) de prononcer la décharge de ces rappels de taxe sur la valeur ajoutée et de ces cotisations de taxe professionnelle ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.........................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 novembre 2014 :

- le rapport de M. Sauveplane, premier conseiller,

- les conclusions de M. Maury, rapporteur public,

- et les observations de Me Hazan, avocat de l'association Yachting Club de la Pointe Rouge ;

1. Considérant que l'association Yachting Club de la Pointe Rouge a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur les exercices 2005 à 2007, à l'issue de laquelle l'administration a considéré qu'elle devait être assujettie aux impôts commerciaux ; qu'elle a, en conséquence, rappelé les droits de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er janvier 2005 au 31 décembre 2007 et l'a assujettie à des cotisations de taxe professionnelle pour les années 2005 à 2007 en suivant la procédure de rectification contradictoire prévue à l'article L. 55 du livre des procédures fiscales ; que l'association Yachting Club de la Pointe Rouge relève appel du jugement du 27 mars 2012 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces rappels de taxe sur la valeur ajoutée et de ces cotisations de taxe professionnelle ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant qu'à supposer que l'association Yachting Club de la Pointe Rouge puisse être regardée comme critiquant la régularité du jugement du tribunal administratif de Marseille, il résulte de l'instruction que, si les premiers juges n'ont pas répondu à tous les arguments avancés par l'association, ils ont en revanche répondu aux trois moyens soulevés par elle et relatifs à la motivation insuffisante de la proposition de rectification du 18 décembre 2008, à l'absence d'assujettissement aux impôts commerciaux et à l'absence d'assujettissement à la taxe sur la valeur ajoutée ; que les premiers juges n'avaient pas l'obligation de répondre à tous les arguments soulevés par l'association ; qu'ainsi le moyen tiré de l'irrégularité du jugement de première instance doit être écarté ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 57-1 du même livre : " La proposition de rectification prévue par l'article L. 57 fait connaître au contribuable la nature et les motifs du redressement envisagé. L'administration invite, en même temps, le contribuable à faire parvenir son acceptation ou ses observations dans un délai de trente jours à compter de la réception de la proposition. " ; qu'il résulte de ces dispositions que, pour être régulière, une proposition de rectification doit comporter la désignation de l'impôt concerné, de l'année d'imposition et de la base d'imposition, et énoncer les motifs sur lesquels l'administration entend se fonder pour justifier les redressements envisagés, de façon à permettre au contribuable de formuler ses observations de façon entièrement utile ;

4. Considérant que l'association Yachting Club de la Pointe Rouge soutient que la proposition de rectification du 18 décembre 2008 est insuffisamment motivée dès lors qu'elle ne comporte pas de comparaison tarifaire pour les activités de plongée et de pêche et aucun véritable comparatif des tarifs pratiqués ;

5. Considérant que la proposition de rectification du 18 décembre 2008 mentionne, outre les textes de droit applicables, notamment les articles 261-7-1, 206-1 et 1147 du code général des impôts, les circonstances de fait qui ont amené l'administration à considérer que l'association Yachting Club de la Pointe Rouge exerçait son activité selon des modalités de gestion similaires à celles des entreprises commerciales à travers l'analyse du produit proposé par l'association, du public visé, des prix pratiqués et des opérations de communication réalisées ; que, pour estimer que les prix pratiqués étaient similaires à ceux des entreprises commerciales, l'administration a exercé son droit de communication auprès de six établissements ayant une activité similaire à celle de l'association ; que ces informations ont été jointes à la proposition de rectification dans les annexes 1 et 2 ; que cette motivation était suffisante pour permettre à l'association de formuler utilement ses observations ; que, dès lors, le moyen doit être écarté ;

Sur le bien-fondé de l'imposition :

6. Considérant que l'association Yachting Club de la Pointe Rouge, dont la gestion désintéressée n'est pas contestée, est titulaire d'un contrat d'occupation de terre plein signé avec la communauté urbaine de Marseille Provence-Métropole, qui lui octroie la jouissance et la gestion de 1 633 m² de surfaces bâties et de 8 621 m² de surfaces non bâties ; que ces terrains permettent l'accès au port de plaisance de la Pointe Rouge, dont les 750 places à l'eau étaient gérées en régie par la communauté urbaine de Marseille Provence-Métropole jusqu'en 2007 ; que l'association gère, outre les activités sportives relevant de diverses sections, telles que voile, pêche ou plongée, une activité directement liée au port de plaisance de la Pointe Rouge, consistant en la mise à disposition d'emplacements à terre, le gardiennage et l'accès à l'eau ; qu'à la suite de la vérification de comptabilité dont elle a fait l'objet, l'administration a estimé que s'agissant tant de l'activité liée au port de plaisance de la Pointe Rouge et du plan d'eau que de l'activité sportive de l'association, celle-ci relevait d'une gestion commerciale en raison d'une situation de concurrence avec le secteur commercial, de modalités de gestion similaires à celles des entreprises commerciales et de l'existence de relations privilégiées avec des entreprises commerciales ;

7. Considérant qu'aux termes de l'article 206 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux années en litige : " 1... sont passibles de l'impôt sur les sociétés, quel que soit leur objet, ... toutes ... personnes morales se livrant à une exploitation ou à des opérations de caractère lucratif. (...) 1 bis. Toutefois, ne sont pas passibles de l'impôt sur les sociétés prévu au 1 les associations régies par la loi du 1er juillet 1901, (...), dont la gestion est désintéressée, lorsque leurs activités non lucratives restent significativement prépondérantes et le montant de leurs recettes d'exploitation encaissées au cours de l'année civile au titre de leurs activités lucratives n'excède pas 60 000 euros. " ; qu'aux termes de l'article 207 du même code : " 1. Sont exonérés de l'impôt sur les sociétés : (...) 5° bis. Les organismes sans but lucratif mentionnés à l'article 261-7-1°, pour les opérations à raison desquelles ils sont exonérés de la taxe sur la valeur ajoutée " ; qu'aux termes de l'article 261 du même code, dans sa rédaction applicable : " Sont exonérés de la taxe sur la valeur ajoutée : 4- 9° Les prestations de service ... fournies à leurs membres .... par les organismes légalement constitués agissant sans but lucratif dont la gestion est désintéressée et qui poursuivent des objectifs de nature philosophique, religieuse, politique, patriotique, civique ou syndicale, dans la mesure où ces opérations se rattachent directement à la défense collective des intérêts moraux ou matériels des membres " ;

8. Considérant que pour l'application de ces dispositions, les associations ne sont exonérées de l'impôt sur les sociétés, de la taxe professionnelle et de la taxe sur la valeur ajoutée que si, d'une part, leur gestion présente un caractère désintéressé, et, d'autre part, les services qu'elles rendent ne sont pas offerts en concurrence dans la même zone géographique d'attraction avec ceux proposés au même public par des entreprises commerciales exerçant une activité identique ; que toutefois, même dans le cas où l'association intervient dans un domaine d'activité et dans un secteur géographique où existent des entreprises commerciales, elle reste exclue du champ de l'impôt sur les sociétés et de la taxe professionnelle et continue de bénéficier de l'exonération de taxe sur la valeur ajoutée si elle exerce son activité dans des conditions différentes de celles des entreprises commerciales, soit en répondant à certains besoins insuffisamment satisfaits par le marché, soit en s'adressant à un public qui ne peut normalement accéder aux services offerts par les entreprises commerciales, notamment en pratiquant des prix inférieurs à ceux du secteur concurrentiel et à tout le moins des tarifs modulés en fonction de la situation des bénéficiaires, sous réserve de ne pas recourir à des méthodes commerciales excédant les besoins de l'information du public sur les services qu'elle offre ;

9. Considérant que, pour soutenir qu'elle n'était pas assujettie aux impôts commerciaux pendant les années en litige, l'association Yachting Club de la Pointe Rouge fait valoir notamment qu'elle ne gérait pas, ni en fait ni en droit, le plan d'eau de la Pointe Rouge et que seuls les membres de l'association détenaient à titre personnel une autorisation d'occupation temporaire délivrée par la communauté urbaine Marseille-Provence-Métropole, que les droits d'entrée ne peuvent à eux seuls justifier l'assujettissement aux impôts commerciaux dès lors qu'ils s'analysent comme une participation à l'actif et aux prestations fournies par l'association, que les activités nautiques et de loisirs ne sont que l'accessoire des activités du club qui a en réalité une véritable vocation de club sportif, que les recettes de restauration ne sont pas l'activité prépondérante de l'association et que l'affectation des résultats traduit une gestion non commerciale ;

10. Considérant, s'agissant de l'activité liée au port de plaisance de la Pointe Rouge, que s'il n'est pas contesté que l'association requérante ne gérait pas pendant les années en litige ce port et que les membres de l'association détenaient à titre personnel une autorisation d'occupation temporaire délivrée par la communauté urbaine Marseille-Provence-Métropole, il résulte néanmoins de l'instruction que cette activité a entraîné la perception de recettes, d'un montant de 311 963 euros en 2005 et 340 115 euros en 2006, relatives aux droits d'entrée avec ou sans place à l'eau, à des prestations de gardiennage et une part d'admission, soit 21,75 p. cent et 23,88 p. cent du chiffre d'affaires des exercices clos respectivement au 30 septembre 2005 et 30 septembre 2006 ; que cette activité ne peut donc être considérée comme marginale ; que le public des membres dits " actifs " de l'association, n'est pas constitué par une catégorie sociale défavorisée ; que les tarifs ne sont pas modulés en fonction de la situation sociale du membre mais de la taille du bateau ; qu'enfin, les tarifs ne sont pas nettement inférieurs à ceux pratiqués par les autres acteurs intervenant dans le secteur lucratif ; que si l'association requérante soutient que les droits d'entrée s'analysent comme une participation à l'actif et aux prestations fournies par l'association, elle ne remet pas en cause l'analyse qui vient d'être développée au terme de laquelle il apparaît que l'association Yachting Club de la Pointe Rouge n'exerce pas son activité dans des conditions différentes de celles des entreprises commerciales ; qu'il en va de même de la circonstance, avancée par l'association requérante, que les recettes de restauration ne sont pas l'activité prépondérante de l'association et que l'affectation des résultats traduirait une gestion non commerciale ; que, dès lors, c'est à bon droit que l'administration a assujetti l'association aux impôts commerciaux pour cette activité ;

11. Considérant, s'agissant de l'activité sportive, qu'il résulte de l'instruction que les tarifs pratiqués par l'association ne diffèrent pas sensiblement de ceux pratiqués par des entreprises du même secteur, ainsi que le montrent les annexes 1 et 2 de la proposition de rectification ; qu'en outre, l'association ne prévoit aucune modulation destinée à des populations défavorisées, ou tenant compte notamment du quotient familial des personnes ayant recours à ses services ; que si certaines activités éducatives donnent lieu à des subventions publiques, et correspondent ainsi à une activité de nature non lucrative, il résulte de l'instruction qu'elles ne représentent qu'une part secondaire de l'activité générale et qu'au surplus, l'administration a admis de distraire les ressources correspondantes de la base d'imposition ;

12. Considérant, en dernier lieu, s'agissant de l'assujettissement à la taxe sur la valeur ajoutée, que l'association soutient qu'ayant une gestion désintéressée et non une activité lucrative, elle doit être exonérée de taxe sur la valeur ajoutée en conséquence du 7 1° a) de l'article 261 du code général des impôts ;

13. Considérant qu'aux termes du 7 1° a de l'article 261 du code général des impôts : " Sont exonérés de taxe sur la valeur ajoutée : (...) les services de caractère social, éducatif, culturel ou sportif rendus à leurs membres par les organismes légalement constitués agissant sans but lucratif, et dont la gestion est désintéressée " ;

14. Considérant qu'ainsi qu'il a été dit aux points 10 et 11, l'activité principale de la requérante ne peut qu'être regardée comme de nature lucrative, et n'entre pas ainsi dans les prévisions de l'article 261 du code général des impôts ; que ses prestations ne peuvent davantage être regardées comme de nature philosophique, religieuse, politique, patriotique, civique ou syndicale ; qu'ainsi, et dès lors que l'administration a distrait des bases d'imposition les recettes découlant d'activités subventionnées par des collectivités publiques, l'association n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort qu'elle a été assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée ;

15. Considérant, enfin, s'agissant de la taxe professionnelle à laquelle elle a été assujettie, que l'association Yachting Club de la Pointe Rouge demande la décharge de ces cotisations par voie de conséquence ; que, toutefois, ainsi qu'il vient d'être dit, c'est à bon droit que l'administration a assujetti l'association à la taxe sur la valeur ajoutée ; que, dès lors, les conclusions tendant à la décharge des cotisations de taxe professionnelle par voie de conséquence doivent être rejetées ;

16. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que l'association Yachting Club de la Pointe Rouge n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande ; que doivent être également rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de l'association Yachting Club de la Pointe Rouge est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à l'association Yachting Club de la Pointe Rouge et au ministre des finances et des comptes publics.

Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Est.

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N° 12MA02089 2


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