Vu, sous le n° 13MA03383, la requête, enregistrée le 13 août 2013, présentée pour la société d'exercice libéral à responsabilité limitée Studio 21, anciennement société civile professionnelle Hugues et Caudrelier, prise en la personne de son représentant légal, domicilié..., par Me A... ; la société Studio 21 demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1102567 du 28 juin 2013 du tribunal administratif de Toulon qui la condamne, solidairement avec la SARL Entreprise Vollono, à payer à la commune de Plan-d'Aups-Sainte-Baume la somme de 73 912,46 euros ;
2°) de la mettre hors de cause ;
3°) de constater que la provision a été réglée à hauteur de 20 000 euros par elle ;
4°) subsidiairement, en cas de condamnation in solidum, de condamner la société Vollono à la relever et garantir de toutes condamnation prononcées à son encontre ou, à tout le moins, de ramener à de plus justes proportions la quote-part qui lui est imputable, et de limiter à la somme de 23 023 euros les travaux de reprise susceptibles d'être mis à la charge des constructeurs ;
5°) en toutes hypothèses, de condamner tous succombants à lui payer la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, et de condamner tous succombants aux dépens ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 octobre 2014 :
- le rapport de M. Thiele, rapporteur,
- et les conclusions de Mme Felmy, rapporteur public.
1. Considérant que la commune de Plan-d'Aups-Sainte-Baume, souhaitant construire une école maternelle, a attribué le marché de maîtrise d'oeuvre de cette école à la société Studio 21 ; que le lot n° 10, concernant la plomberie-chauffage, les sanitaires et la ventilation, a été attribué à la société Vollono, suivant acte d'engagement du 18 novembre 2002 ; que ces travaux ont été réceptionnés le 25 août 2004 sans réserves ; que, le 14 septembre 2011, la commune de Plan-d'Aups-Sainte-Baume a saisi le tribunal administratif de Toulon d'une demande tendant à la condamnation de la société Studio 21 et de la société Entreprise Vollono à lui payer la somme de 74 940,69 euros toutes taxes comprises en réparation du préjudice résultant des désordres et malfaçons constatées, ainsi qu'une somme de 10 000 euros pour le préjudice résultant des retards dans la livraison de l'ouvrage et des troubles dans la jouissance de l'école maternelle ; que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a condamné solidairement la société Studio 21 et la société Entreprise Vollono à payer à la commune la somme de 73 912,46 euros, et condamné la société Vollono à garantir la société Studio 21 à hauteur de 50 % de cette somme, déduction faite des sommes déjà versées à la commune au titre de la provision ordonnée par le tribunal administratif le 7 novembre 2011 ;
Sur la régularité du jugement :
2. Considérant que la société appelante soutient que " le tribunal a limité à 50 % le recours en garantie formé par l'exposante, et ce sans qu'il ait été mentionné une quelconque motivation permettant de fixer cette quote-part " ; que, toutefois, il ressort du jugement attaqué que les premiers juges ont fixé cette quote-part en se référant aux " circonstances de l'espèce ", et après avoir précisé, dans le même considérant, la nature des manquements respectivement reprochés à l'entrepreneur et au maître d'oeuvre ; que l'article L. 9 du code de justice administrative qui prévoit que " Les jugements sont motivés " n'a donc pas été méconnu ;
Sur la responsabilité :
En ce qui concerne la mise en oeuvre de la responsabilité décennale :
3. Considérant qu'il résulte des principes dont s'inspirent les articles 1792 et suivants du code civil que la responsabilité décennale du constructeur peut être recherchée pour des dommages survenus sur des éléments d'équipement dissociables de l'ouvrage s'ils rendent celui-ci impropre à sa destination ; que le maître d'oeuvre est un constructeur au sens de ces principes ;
4. Considérant qu'il résulte de l'instruction que les travaux de plomberie et chauffage réalisés par la société Vollono ont été réceptionnés sans réserve le 25 août 2004 ; que, toutefois, dès la mise en pression des réseaux d'eau froide, eau chaude et chauffage, le sol situé sous le carrelage s'est gorgé d'eau ; que, le 3 juin 2006, la commune de Plan-d'Aups-Sainte-Baume a fait établir par MeB..., huissier de justice à Saint-Maximin, un procès-verbal constatant les faits suivants : " Le bas des murs [de la salle de restauration et de la réserve] présente des traces de moisissures. Le mur de droite [du bureau de la direction] et la cloison commune avec le couloir présentent des traces de moisissure et d'infiltration d'eau sur une hauteur allant jusqu'à 80 cm. Il en est de même des murs de la réserve située en face de ce bureau " ; que, par procès-verbal du 30 août 2007, le même huissier a constaté : " la façade [sud] est humide sous la fenêtre. Deux trous ont été percés dans la façade côté préau. / Du liquide s'est écoulé par ces trous. Devant ces trous le sol est mouillé. L'un des trous est encore rempli d'eau " ; qu'aux termes d'un rapport d'expertise amiable commandé par la société d'assurance mutuelle MAAF le 22 août 2006 : " Les désordres sont très importants. Ils affectent le bloc maternelle et réfectoire Ouest. Toutes les cloisons sont atteintes par les remontées humides avec déstructuration des plâtres de certaines parois, les convecteurs sont descellés et posés au sol. L'humidité donne une saturation complète sur toutes les parois et au sol " ; que le rapport déposé le 19 novembre 2008 par l'expert désigné par le juge des référés du tribunal de grande instance de Draguignan a conclu ainsi : " d'importantes infiltrations en provenance de canalisations encastrées défectueuses ont provoqué des dommages significatifs. Aucun travaux de réparation des causes du sinistre n'ayant été mis en oeuvre, les dommages se sont renouvelés durant plusieurs années. Les fuites étaient avérées. Les investigations pratiquées pour en déterminer l'origine nous paraissent élémentaires. Nous recherchons encore les fondements des motivations qui ont entraîné une telle accumulation de solutions palliatives. Les préjudices subis sont importants et indéniables " ; que, pendant l'été 2008, la commune de Plan-d'Aups-Sainte-Baume a été amenée à remplacer les tubes encastrés dans le sol par des tubes apparents ;
5. Considérant que la société Studio 21 et la société Entreprise Vollono ne mettent pas en cause la réalité des désordres affectant les canalisations de l'ouvrage, et ne contestent pas que ces désordres étaient de nature à rendre l'ouvrage impropre à sa destination ; qu'elles soutiennent en revanche que, ces désordres étant consécutifs à des actes de vandalisme, leur responsabilité ne peut être engagée au titre de la responsabilité décennale ; que, toutefois, ainsi que l'a jugé le tribunal administratif de Toulon, la circonstance que ces sociétés, qui ont la qualité de constructeurs, n'auraient commis aucune faute n'est pas de nature à les exonérer de leur responsabilité au titre de la garantie décennale, en l'absence de tout indice permettant d'affirmer que les fuites auraient été causées par un tiers non intervenant sur le lot n° 11, circonstance d'ailleurs improbable s'agissant de désordres affectant des canalisations encastrées dans le bâtiment ; qu'à cet égard, la société Studio 21 fait valoir, sans que cette allégation soit sérieusement démentie par la société Entreprise Vollono, que les actes de vandalisme dont l'expert soupçonne l'existence seraient imputables à un sous-traitant de cette société ;
En ce qui concerne la faute de la commune :
6. Considérant que la société Studio 21 et la société Entreprise Vollono soutiennent que la commune n'a pas correctement géré son bien en bon père de famille, s'étant contentée, pendant cinq ans, de refaire les peintures sans chercher et traiter la cause du sinistre ; qu'elles estiment que la commune ayant, par son comportement, laissé perdurer les désordres, et ainsi contribué à leur aggravation, a commis une faute exonératoire de responsabilité ;
7. Considérant, toutefois, qu'ainsi que l'a jugé le tribunal administratif, la commune de Plan-d'Aups-Sainte-Baume a, à compter de 2006, fait procéder à de multiples investigations, rappelées au point 4, pour déterminer l'origine des infiltrations et la nature des travaux de reprise nécessaires ; que, si elle n'a pris aucune mesure avant 2006, alors qu'il est constant que les désordres sont apparus dès la rentrée de l'année scolaire 2004 / 2005, ce délai, qui n'est pas déraisonnable, ne révèle, de sa part, aucune négligence de sa part de nature à justifier que soit laissée à sa charge tout ou partie du préjudice ;
Sur le préjudice :
8. Considérant que la société Studio 21 et la société Entreprise Vollono ne contestent pas le jugement en ce qui concerne le montant des travaux de réparation, d'un montant de 23 023 euros toutes taxes comprises, et le montant des travaux de réfection du sol et des peintures et revêtements muraux, ainsi que les frais de location des humidificateurs, pour un montant total de 44 960 euros toutes taxes comprises ; qu'elles contestent en revanche les autres préjudices ;
En ce qui concerne les opérations de recherche de fuites :
9. Considérant que la société Entreprise Vollono estime que la dépense d'un montant de 1 376 euros, engagée par la commune pour la recherche de fuites, est sans rapport avec la fuite sur réseau et devra être déduite du montant réclamé ; que, toutefois, cette dépense a été exposée en conséquence des désordres litigieux et doit donc donner lieu à indemnisation ;
En ce qui concerne le trouble de jouissance :
10. Considérant, par ailleurs, que le tribunal administratif a condamné solidairement la société Studio 21 et la société entreprise Vollono à payer à la commune de Plan-d'Aups-Sainte-Baume une somme de 4 000 euros en estimant que la commune justifiait avoir subi des troubles de jouissance, du fait des désordres survenus qui ont, à certaines périodes, nécessité la fermeture de la cantine et contraint à la réalisation de travaux à plusieurs reprises, en perturbant le fonctionnement normal de l'école ; que la société Studio 21 soutient que la commune ne justifie pas des troubles de jouissance allégués, dès lors que les travaux qu'elle a fait réaliser ont pu être effectués pendant les périodes de vacances scolaires ; que toutefois, s'il est exact que la commune de Plan-d'Aups-Sainte-Baume ne justifie pas avoir été contrainte de réaliser des travaux en dehors des périodes de vacances scolaires, la seule existence des désordres litigieux lui a causé un préjudice de jouissance dont il sera fait une juste appréciation en l'évaluant, pendant la période considérée, au montant de 4 000 euros retenu par le tribunal administratif ;
En ce qui concerne le préjudice moral :
11. Considérant que le tribunal administratif a rejeté la demande de condamnation à indemniser la commune de Plan-d'Aups-Sainte-Baume du préjudice moral que celle-ci estimait avoir subi ; que l'argumentaire de la société Studio 21 sur ce point est donc inopérant ;
12. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que ni la société Studio 21, ni l'entreprise Vollono, par la voie de l'appel provoqué, ne sont fondées à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon les a condamnées solidairement à verser à la commune de Plan d'Aups la somme de 73 912 euros ;
Sur les conclusions à fin de garantie :
13. Considérant qu'il ressort du rapport d'expertise, en pages 11 à 12, que les désordres en litige résultent de l'absence d'étanchéité des réseaux de distribution d'eau froide et de chauffage, et de la conduite d'évacuation d'un water-closet ; que l'expert, qui n'a pu recueillir les explications d'un sachant ayant participé ou assisté aux opérations de pose des tubes, en l'absence de tout représentant de la société Entreprise Vollono, dûment convoquée, lors des opérations d'expertise, relève que " les explications recueillies, notamment de M.C..., responsable de la société Massibat (montage des cloisons et doublage) nous ont incité à attribuer l'origine de ces infiltrations à des actions intentionnellement destructrices qui ont vraisemblablement été perpétrées par des acteurs du chantier du bloc de la cantine " ;
14. Considérant, d'une part, qu'ainsi qu'il a été dit au point 5, la société Studio 21 indique, sans être sérieusement contredite par la société Entreprise Vollono - laquelle se borne à indiquer que l'auteur des actes de vandalisme n'a pu être identifié -, que les fuites dans les canalisations auraient été volontairement causées par un sous-traitant de la société Entreprise Vollono ; que ces allégations sont rendues vraisemblables par le fait que, s'agissant de canalisations encastrées dans l'ouvrage, de tels actes de malveillance n'ont normalement pu être commis que par un intervenant du lot n° 10 ; que la société Entreprise Vollono, qui ne peut utilement se prévaloir de la faute de son propre sous-traitant, a manqué à ses obligations contractuelles en livrant une installation défectueuse, alors qu'il lui incombait en tout état de cause de vérifier le bon fonctionnement de son installation ; qu'à cet égard, l'expert relève qu'il était aisé, à partir d'un simple relevé du compteur d'eau, de constater l'existence des fuites ;
15. Considérant, d'autre part, qu'ainsi que l'a jugé le tribunal administratif, la société Studio 21, dans le cadre de ses missions de surveillance et de direction des travaux de construction de l'ouvrage qu'il a conçu, et notamment au regard de l'article 9 du cahier des clauses administratives particulières du lot n°10 du marché en litige, était tenue de procéder aux essais et contrôles d'ouvrage ou parties d'ouvrage prévus dans le marché en cause ;
16. Considérant, toutefois, que la société Entreprise Vollono, en qualité d'homme de l'art, était responsable au premier chef de la livraison, dans un bon état de fonctionnement, des canalisations ; que, dans ces conditions, il y a lieu de condamner la société Entreprise Vollono à supporter la charge définitive, non pas de 50 % du montant total de la condamnation solidaire, mais de 70 % de ce montant, en tenant compte des provisions qui auront été versées par cette société ; que, par voie de conséquence et sans qu'il soit besoin de statuer sur leur recevabilité, les conclusions de la société Vollono tendant à ce qu'une fraction plus importante de la condamnation soit laissée à la charge définitive de la société Studio 21 doivent être rejetées ;
Sur le bien-fondé de l'article 6 du jugement en tant que celui-ci rejette les conclusions reconventionnelles de la société Entreprise Vollono :
17. Considérant la société Vollono, qui demande la compensation entre la condamnation prononcée à son encontre et le solde du marché dû, d'un montant de 8 500 euros, ne conteste pas utilement le jugement attaqué, qui a rejeté comme irrecevables ces conclusions reconventionnelles au motif qu'elles soulevaient un litige distinct ; qu'il y a donc lieu d'adopter les motifs du jugement sur ce point ;
Sur les dépens et l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
18. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce qu'une somme quelconque soit mise à la charge de la société Studio 21 ou de la commune de Plan-d'Aups-Sainte-Baume, qui ne sont pas les parties perdantes dans la présente instance, laquelle n'a par ailleurs pas occasionné de dépens ; qu'en revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société Entreprise Vollono deux sommes de 1 500 euros à verser à la société Studio 21 et à la commune de Plan-d'Aups-Sainte-Baume-Sainte Baume à ce titre ;
D E C I D E :
Article 1er : L'article 3 du jugement n° 1102567 du 28 juin 2013 du tribunal administratif de Toulon est annulé.
Article 2 : La charge définitive des condamnations prononcées par le jugement n° 1102567 est laissée, pour 70 %, à la société Entreprise Vollono.
Article 3 : La société Entreprise Vollono versera deux sommes de 1 500 euros (mille cinq cents euros) à la commune de Plan-d'Aups-Sainte-Baume et à la société Studio 21 en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions des différentes parties à l'instance est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la société d'exercice libéral à responsabilité limitée Studio 21, à la commune de Plan-d'Aups-Sainte-Baume et à la société Entreprise Vollono.
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N° 13MA03383 2