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24/10/2014 | FRANCE | N°13MA02766

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 5ème chambre - formation à 3, 24 octobre 2014, 13MA02766


Vu la requête, enregistrée le 5 juillet 2013, sous le n° 13MA02766, présentée pour la commune de Lorgues, représentée par son maire, demeurant..., par Me A...;

La commune demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1102233 du 7 mai 2013 par lequel le tribunal administratif de Toulon a annulé, sur la demande de la société Transports Jean-Louis, l'arrêté du maire de Lorgues en date du 16 février 2010 portant règlement général de circulation, de stationnement, de sécurité et de salubrité sur le territoire communal en tant qu'il interdit, en son article 12

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Vu la requête, enregistrée le 5 juillet 2013, sous le n° 13MA02766, présentée pour la commune de Lorgues, représentée par son maire, demeurant..., par Me A...;

La commune demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1102233 du 7 mai 2013 par lequel le tribunal administratif de Toulon a annulé, sur la demande de la société Transports Jean-Louis, l'arrêté du maire de Lorgues en date du 16 février 2010 portant règlement général de circulation, de stationnement, de sécurité et de salubrité sur le territoire communal en tant qu'il interdit, en son article 12, la circulation des poids lourds de plus de 3,5 tonnes sur le chemin rural des Girards ainsi que la décision née le 20 juin 2011 par laquelle le maire de Lorgues a implicitement rejeté le recours de la société en date du 15 avril 2011 tendant à l'abrogation de l'arrêté litigieux ;

2°) de débouter la société de ses demandes ;

3°) de condamner ladite société à lui payer la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 octobre 2014 :

- le rapport de M. Pecchioli, rapporteur,

- les conclusions de M. Revert, rapporteur public ;

- et les observations de Me B...de la SELARL Mauduit Lopasso, pour la SAS Transports Jean-Louis ;

1. Considérant que, le 16 février 2010, le maire de la commune de Lorgues a pris un arrêté interdisant, sauf exceptions limitées aux véhicules chargés de la collecte d'ordures ménagères, de verre ou de recyclable, à ceux chargés de l'entretien des voiries, réseaux ainsi que des véhicules d'incendie et de secours, la circulation des transports routiers d'un poids supérieur ou égal à 3,5 tonnes sur le chemin rural des Girards ; que la société Transports Jean-Louis, qui souhaite exploiter une carrière dont l'accès exclusif se fait par le chemin litigieux, a formé un recours pour excès de pouvoir contre cet arrêté et le rejet implicite du recours gracieux devant le tribunal administratif de Toulon, qui, par le jugement attaqué en date du 7 mai 2013, a fait droit à sa demande en annulant les décisions en cause ; que la commune de Lorgues relève appel de ce jugement ;

Sur le motif d'annulation retenu par le Tribunal administratif :

2. Considérant que lorsqu'un tribunal administratif a fait droit à une demande en se fondant sur un moyen inopérant, et que, pour contester le jugement de ce tribunal, l'appelant n'a pas invoqué le caractère inopérant du moyen retenu par les premiers juges, il appartient au juge d'appel de relever d'office cette inopérance pour censurer le motif retenu par le tribunal, après en avoir préalablement informé les parties en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le Tribunal s'est fondé sur le moyen tiré de l'absence d'incompatibilité de l'état général du chemin des Girards avec l'usage des véhicules de plus de 3,5 tonnes pour annuler l'arrêté litigieux alors même que celui-ci ne fait aucune référence à la qualification de chemin rural, ne vise pas non plus les dispositions du code rural mais seulement celles du code général des collectivités territoriales et du code de la route et enfin n'est pas motivé par des raisons en lien avec les caractéristiques des voies concernées mais seulement par des considérations de circulation " urbaine " justifiant vouloir assurer, d'une part, " le bon ordre et la sécurité de la circulation urbaine rendue de plus en plus difficile et dangereuse en raison de l'accroissement du nombre de véhicules de leur vitesse et de leur encombrement ", et, d'autre part, " la sécurité, la salubrité, le bon ordre et la tranquillité " ; qu'en faisant droit à la demande de la société requérante en se fondant sur ce moyen inopérant pour annuler l'arrêté municipal litigieux du 16 février 2010 et, à la suite la décision implicite née le 20 juin 2011, le tribunal administratif doit être regardé comme ayant entaché son jugement d'une erreur de droit ;

4. Considérant toutefois qu'il appartient à la Cour, saisie par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens de la demande présentée par la SAS Transports Jean-Louis devant le tribunal administratif et devant la Cour ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

5. Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article R. 411-8 du code de la route

" les dispositions du présent code ne font pas obstacle au droit conféré par les lois et règlements aux (...) maires de prescrire, dans la limite de leurs pouvoirs, des mesures plus rigoureuses dès lors que la sécurité de la circulation routière l'exige. Pour ce qui les concerne, les préfets et les maires peuvent également fonder leurs décisions sur l'intérêt de l'ordre public " ; qu'aux termes de l'article L. 2212-1 du code général des collectivités territoriales : " Le maire est chargé, sous le contrôle administratif du représentant de l'Etat dans le département, de la police municipale, de la police rurale et de l'exécution des actes de l'Etat qui y sont relatifs " ; qu'aux termes de l'article L. 2212-2 du même code : " La police municipale a pour objet d'assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques. Elle comprend notamment : 1° Tout ce qui intéresse la sûreté et la commodité du passage dans les rues, quais, places et voies publiques (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 2213-2 du code général des collectivités territoriales : " Le maire peut, par arrêté motivé, eu égard aux nécessités de la circulation et de la protection de l'environnement : / 1° Interdire à certaines heures l'accès de certaines voies de l'agglomération ou de certaines portions de voie ou réserver cet accès, à certaines heures, à diverses catégories d'usagers ou de véhicules (...) " ; qu'enfin aux termes de l'article L. 2213-4 du même code : " Le maire peut, par arrêté motivé, interdire l'accès de certaines voies ou de certaines portions de voies ou de certains secteurs de la commune aux véhicules dont la circulation sur ces voies ou dans ces secteurs est de nature à compromettre soit la tranquillité publique, soit la qualité de l'air, soit la protection des espèces animales ou végétales, soit la protection des espaces naturels, des paysages ou des sites ou leur mise en valeur à des fins esthétiques, écologiques, agricoles, forestières ou touristiques. Dans ces secteurs, le maire peut, en outre, par arrêté motivé, soumettre à des prescriptions particulières relatives aux conditions d'horaires et d'accès à certains lieux et aux niveaux sonores admissibles les activités s'exerçant sur la voie publique, à l'exception de celles qui relèvent d'une mission de service public. Ces dispositions ne s'appliquent pas aux véhicules utilisés pour assurer une mission de service public et ne peuvent s'appliquer d'une façon permanente aux véhicules utilisés à des fins professionnelles de recherche, d'exploitation ou d'entretien des espaces naturels " ;

6. Considérant que s'il appartenait au maire de la commune de Lorgues, faisant usage des pouvoirs de police que lui confèrent tant les dispositions du code général des collectivités territoriales que celles du code de la route, de réglementer et au besoin d'interdire la circulation des véhicules dont le passage aurait été de nature à rendre difficile et dangereuse la circulation sur le chemin des Girards, il ne ressort d'aucune pièce produite aux débats que le passage d'un unique camion, fût-il de 26 tonnes, génèrerait un accroissement et un encombrement de la circulation tel que celle-ci s'avèrerait dangereuse pour la sécurité publique, ni que les problèmes allégués liés à la vitesse sur le chemin litigieux, à les supposer avérés, ne puissent être résolus par une simple limitation, notamment par l'installation de panneaux de signalisation ou de ralentisseurs, la commune ne faisant d'ailleurs état d'aucun accident, ni même d'études relatives à des risques d'accidents ; qu'ainsi, eu égard à l'ensemble de ces éléments qui ne permettent pas de tenir pour établi les risques allégués, il n'appartenait pas au maire de la commune de Lorgues de faire usage des pouvoirs qu'il tenait des dispositions sus-rappelées, pour interdire de manière permanente, générale et absolue, ainsi qu'il l'a fait par son arrêté du 16 février 2010, l'accès au chemin des Girards de tout véhicule d'un poids total supérieur à 3,5 tonnes non chargé d'une mission de service public, et alors même que le chemin litigieux constitue l'unique accès, pour la société Transports Jean-Louis, à la carrière dont elle souhaite la reprise d'activité ; que, par suite, en décidant cette interdiction sur le fondement retenu le maire de la commune de Lorgues a excédé ces pouvoirs ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête tant en première instance qu'en appel, que la commune de Lorgues n'est pas fondée à se plaindre de ce que par le jugement querellé, le tribunal administratif de Toulon a annulé les décisions litigieuses des 16 février 2010 et 20 juin 2011;

Sur les conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Considérant que les termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la société Transports Jean-Louis, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, verse quelque somme que ce soit au titre des frais exposés par la commune de Lorgues dans l'instance et non compris dans les dépens ;

9. Considérant, en revanche, qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Lorgues une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la société Transports Jean-Louis et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de la commune de Lorgues est rejetée.

Article 2 : La commune de Lorgues versera à la société Transports Jean-Louis une somme de 1 500 (mille cinq cents) euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Lorgues et à la société Transports Jean-Louis.

Copie en sera adressée au préfet du Var.

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N° 13MA02766


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13MA02766
Date de la décision : 24/10/2014
Type d'affaire : Administrative

Analyses

49-04-01-01-01 Police. Police générale. Circulation et stationnement. Réglementation de la circulation. Mesures d'interdiction.


Composition du Tribunal
Président : M. BOCQUET
Rapporteur ?: M. Jean-Laurent PECCHIOLI
Rapporteur public ?: M. REVERT
Avocat(s) : SCP D'AVOCATS SCHRECKI

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2014-10-24;13ma02766 ?
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