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02/10/2014 | FRANCE | N°13MA00429

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2ème chambre - formation à 3, 02 octobre 2014, 13MA00429


Vu I°), sous le n° 1300429, la requête, enregistrée le 1er février 2013, présentée pour la caisse primaire d'assurance maladie de l'Hérault, dont le siège est 29, cours Gambetta à Montpellier Cedex 9 (34934), par la SCP d'Avocats Cauvin - Leygue ; la caisse primaire d'assurance maladie de l'Hérault demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement n° 1004134 du 18 décembre 2012 par lequel le tribunal administratif de Montpellier, sur requête de M. B...A..., n'a que partiellement fait droit à sa demande tendant à la condamnation du centre hospitalier universitaire de Mon

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Vu I°), sous le n° 1300429, la requête, enregistrée le 1er février 2013, présentée pour la caisse primaire d'assurance maladie de l'Hérault, dont le siège est 29, cours Gambetta à Montpellier Cedex 9 (34934), par la SCP d'Avocats Cauvin - Leygue ; la caisse primaire d'assurance maladie de l'Hérault demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement n° 1004134 du 18 décembre 2012 par lequel le tribunal administratif de Montpellier, sur requête de M. B...A..., n'a que partiellement fait droit à sa demande tendant à la condamnation du centre hospitalier universitaire de Montpellier à lui rembourser l'ensemble des débours d'un montant de 315 622,41 euros, qu'elle a exposés pour le compte de M.A... ;

2°) de faire droit à sa demande ;

............................

Vu II°), sous le n° 13MA00739, la requête, enregistrée le 18 février 2013, présentée pour M. B... A..., demeurant..., par la Selarl Chatel et Associés ; M. A... demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement n° 1004134 du 18 décembre 2012 par lequel le tribunal administratif de Montpellier, n'a que partiellement fait droit à sa demande tendant à la condamnation du centre hospitalier universitaire de Montpellier et de son assureur la SHAM à lui payer une somme globale de 143 564,94 euros, en réparation des préjudices subis du fait de l'infection nosocomiale contractée le 3 mai 2005 ;

2°) de faire droit à ses conclusions de première instance ;

3°) de mettre à la charge du centre hospitalier universitaire de Montpellier la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

...................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 11 septembre 2014 :

- le rapport de Mme Menasseyre, rapporteure,

- les conclusions de Mme Chamot, rapporteure publique,

- et les observations de Me C...substituant Me D...pour le centre hospitalier universitaire de Montpellier et la SHAM ;

1. Considérant que les requêtes n° 13MA00739 présentée pour M. A... et n° 13MA00429 présentée pour la caisse primaire d'assurance maladie de l'Hérault présentent à juger des questions semblables et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;

2. Considérant que M. A...a été victime d'une infection nosocomiale consécutive à une reprise chirurgicale sur une prothèse de hanche droite réalisée le 3 mai 2005 au centre hospitalier universitaire de Montpellier ; que, par le jugement contesté du 18 décembre 2012, le tribunal administratif de Montpellier a condamné solidairement, d'une part, cet établissement et la Société hospitalière d'assurances mutuelles (SHAM), son assureur, à verser à M. A...une somme de 33 000 euros et, d'autre part, le seul centre hospitalier à verser une somme de 245 159,58 euros à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Hérault, dont il dépend ; qu'estimant que leurs préjudices n'ont pas été suffisamment réparés, M. A... et l'organisme social relèvent respectivement appel de ce jugement ;

3. Considérant que seuls sont en cause, dans le cadre de la présente instance, les montants des réparations accordées par le tribunal ;

Sur les préjudices à caractère patrimonial :

En ce qui concerne les dépenses de santé :

4. Considérant que les premiers juges ont entièrement fait droit aux prétentions présentées par la caisse primaire d'assurance maladie de l'Hérault au titre des frais d'hospitalisation, des frais médicaux et pharmaceutiques et des dépenses de santé futures ; qu'ainsi que le fait valoir le centre hospitalier, elle n'est plus recevable à demander devant le juge d'appel le remboursement des frais exposés antérieurement au jugement du tribunal alors qu'elle a été mise à même de faire valoir ses droits devant le tribunal administratif mais a simplement omis de demander en temps utile les sommes en cause ;

En ce qui concerne les pertes de gains professionnels :

5. Considérant que, pour les motifs qui viennent d'être exposés, la caisse primaire d'assurance maladie de l'Hérault n'est pas recevable à augmenter ses prétentions au titre des indemnités journalières, exposées antérieurement au jugement, les premiers juges ayant entièrement fait droit aux conclusions qui leur étaient soumises en première instance ;

6. Considérant que les premiers juges ont, en revanche, refusé de faire droit aux conclusions de la caisse présentées au titre des arrérages passés et à venir d'une rente d'accident du travail, en indiquant que l'imputabilité d'une partie de ces arrérages aux conséquences de l'accident survenu le 14 février 2003 ne résultait pas de l'instruction ; que pour établir en appel cette imputabilité partielle, la caisse se réfère à un rapport d'expertise déposé en octobre 2012 pour évaluer les conséquences d'une infection sur port-à-cath survenue en mai 2010, infection dont les parties ne se prévalent à aucun moment à l'appui de leurs prétentions indemnitaires et invoque la circonstance que l'expert saisi après consolidation a retenu un déficit fonctionnel permanent de 9 % au titre de l'infection ;

7. Considérant que la rente d'accident du travail en cause est servie à M. A...depuis le 26 juin 2008 au titre de l'accident du travail survenu le 14 février 2003 à l'origine d'une première reprise totale de sa prothèse de hanche et d'un taux d'incapacité de 25 % fixé par un jugement du tribunal du contentieux de l'invalidité du 1er juillet 2009 qui n'est pas produit ; qu'aucune des pièces du dossier, pas même le rapport d'expertise déposé en octobre 2012, ne montre qu'en son montant, cette pension prendrait, même pour partie, en compte les séquelles de l'infection nosocomiale, elle-même à l'origine d'une incapacité permanente partielle de 9 % ; que si l'organisme social invoque également une attestation du médecin conseil du recours contre tiers selon laquelle " la part imputable à l'accident de l'infection nosocomiale peut être estimée à 9 % ", chiffre qui correspond en fait au taux d'IPP fixé par l'expert en tenant dûment compte, pour moitié, d'un état antérieur constitué par de multiples épisodes de luxation de hanche, cette formule confuse et ambiguë ne peut suffire à démontrer que, dans la rente versée à M. A...au titre d'un accident du travail survenu en 2003, une part de 9 % devrait être regardée comme imputable aux conséquences de l'infection nosocomiale en cause ; qu'en se référant aux mêmes éléments qu'en première instance, la caisse ne démontre pas davantage en appel l'imputabilité d'une fraction de la rente d'accident du travail servie à l'infection nosocomiale survenue à la suite de l'intervention réalisée le 3 mai 2005 ;

8. Considérant que les premiers juges ont également refusé de faire droit aux conclusions présentées par M. A...au titre de la réparation de l'incidence professionnelle de l'infection, qui lui aurait fait perdre une chance de promotion et d'avancement, avec une perte induite du montant des pensions de retraite à venir, en observant qu'il résultait de l'instruction que si l'infection nosocomiale était directement responsable d'un arrêt de travail de deux ans, celui-ci s'intégrait dans un arrêt de travail de près de cinq ans et que, dans ces conditions, M. A... qui ne justifiait ni du salaire invoqué ni des possibilités d'avancement alléguées, n'établissait pas l'existence d'une incidence professionnelle en lien avec l'infection nosocomiale ; que la motivation retenue par le tribunal n'est pas utilement combattue par M. A... par la simple reprise de ses prétentions, qui ne sont pas plus étayées qu'en première instance ;

9. Considérant enfin que M. A...ne justifie pas plus qu'en première instance, par la production de copie d'actes d'achat de biens immobiliers en 2001, 2002 et 2004 et d'un descriptif de son projet de création d'une agence immobilière, la réalité de la perte de chance, dont il demande réparation, de mettre en oeuvre ce projet et d'en retirer les revenus qu'il allègue, ni a fortiori l'imputabilité d'un tel préjudice à l'infection nosocomiale en cause ;

En ce qui concerne l'assistance par tierce personne :

10. Considérant que le tribunal a écarté les prétentions de M. A...au titre de l'assistance d'une tierce personne, qui portaient sur la période du 26 août 2006 au 16 octobre 2007 en relevant que si, au cours de cette période, il séjournait à son domicile et se déplaçait essentiellement en fauteuil roulant, une rééducation avec une reprise progressive de la marche, avec cannes jusqu'en décembre 2006 avait été menée au cours de cette période et en relevant que ce poste de préjudice n'avait pas été retenu par les experts ; que toutefois M. A...fait à juste titre valoir que l'expert qui l'a examiné après consolidation a relevé que son état avait nécessité des déplacements en fauteuil roulant pendant six semaines et une marche avec cannes pendant deux mois ; que si l'expert a également indiqué que M. A...n'avait bénéficié d'aucune aide humaine ou matérielle spécifique en dehors des soins médicaux de kinésithérapie ou de soins infirmiers pris en compte dans les dépenses de santé, il ressort de ses propres constatations que l'état de M.A..., qui après six semaines d'alitement se déplaçait en fauteuil roulant, impliquait nécessairement l'assistance d'une tierce personne, au moins à raison de deux heures par jour, pour les besoins essentiels de la vie courante ; qu'il n'est d'ailleurs pas sérieusement contesté que cette assistance lui a alors été apportée par son épouse ; que cette dernière circonstance ne saurait le priver de son droit à se voir allouer une indemnité à ce titre ; que celle-ci doit être fixée, compte tenu d'une durée quotidienne de deux heures durant une période de six semaines et d'un taux horaire de douze euros cinquante correspondant au salaire minimum augmenté des charges sociales, à la somme de 1 050 euros, à laquelle M. A...est en droit de prétendre ;

Sur les préjudices à caractère extrapatrimonial :

11. Considérant, en premier lieu, que, s'agissant des préjudices à caractère temporaire, les premiers juges ont retenu, en lien avec l'infection, une période d'incapacité temporaire totale du 16 au 18 août 2005 puis du 1er septembre 2005 au 25 août 2006, et des périodes d'incapacité temporaire partielle, de 50 % du 26 août 2006 au 16 octobre 2007, de 20 % du 17 octobre au 18 décembre 2007 et de 18 % du 19 décembre 2007 au 13 mars 2008 ; qu'ils ont relevé que le pretium doloris avait été évalué à 5 sur une échelle de 1 à 7 par l'expert et qu'il y avait lieu également de prendre en compte les difficultés induites sur la vie familiale de M.A..., que celui-ci qualifiait de " préjudice esthétique temporaire " et ont estimé qu'au regard des souffrances tant physiques que morales endurées compte tenu de la nature et de la durée des soins, interventions, périodes de rééducation rendues nécessaires par la survenue de l'infection, il y avait lieu d'évaluer les troubles temporaires dans les conditions d'existence du requérant à la somme de 28 000 euros ; qu'ils ont, ce faisant procédé à une appréciation qui n'est pas insuffisante des préjudices à caractère temporaire consécutifs à l'infection ;

12. Considérant, en deuxième lieu, que, s'agissant des préjudices permanents, les premiers juges ont retenu une date de consolidation, en ce qui concerne l'infection, au 14 mars 2008 et un déficit fonctionnel permanent imputable à l'infection estimé à 9 % ; que pour écarter les prétentions de M.A..., qui soutenait que ce taux de 9 % était insuffisant faute de prendre en compte la perte auditive qu'il estime en lien avec l'un des antibiotiques prescrits, ils ont relevé qu'il n'apportait aucun argument médico-légal de nature à contredire la position argumentée des experts et à justifier la nécessité de l'expertise complémentaire qu'il sollicitait sur ce point ; que cette motivation n'est pas utilement contredite par l'appelant, qui se borne à réitérer ses prétentions sur ce point ; qu'en tenant également compte de la boiterie consécutive à l'infection nosocomiale à l'origine d'un préjudice esthétique évalué par l'expert à 1,5 sur une échelle de 1 à 7, et d'un préjudice d'agrément modéré, eu égard à l'état antérieur de M.A..., les premiers juges ont arrêté à la somme de 14 000 euros la réparation des préjudices permanents de M. A... ; que cette évaluation n'apparaît pas insuffisante ;

13. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la caisse primaire d'assurance maladie de l'Hérault n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier n'a que partiellement fait droit à ses prétentions ; que ses conclusions accessoires présentées au titre des articles L. 376-1 du code de la sécurité sociale et L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées par voie de conséquence ; que M. A...est, pour sa part, seulement fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont refusé d'indemniser le chef de préjudice correspondant à la nécessité dans laquelle il s'est trouvé d'avoir recours à l'assistance d'une tierce personne ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge des intimées la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par M. A...et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La somme de 33 000 euros que le centre hospitalier universitaire de Montpellier et la société hospitalière d'assurance mutuelle ont été condamnés, par l'article 1er du jugement du 18 décembre 2012, à verser solidairement à M. A...est portée à 34 050 (trente-quatre mille cinquante) euros.

Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 18 décembre 2012 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Le centre hospitalier universitaire de Montpellier et la société hospitalière d'assurance mutuelle verseront solidairement à M. A...une somme de 2 000 (deux mille) euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de l'ensemble des parties est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Hérault, à M. B... A..., au centre hospitalier universitaire de Montpellier et à la Société hospitalière d'assurances mutuelles.

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N°13MA00429 - 13MA00739 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13MA00429
Date de la décision : 02/10/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

60-02-01-01-02 Responsabilité de la puissance publique. Responsabilité en raison des différentes activités des services publics. Service public de santé. Établissements publics d'hospitalisation. Responsabilité pour faute médicale : actes médicaux.


Composition du Tribunal
Président : M. VANHULLEBUS
Rapporteur ?: Mme Anne MENASSEYRE
Rapporteur public ?: Mme CHAMOT
Avocat(s) : SCP D'AVOCATS CAUVIN - LEYGUE ; SCP D'AVOCATS CAUVIN - LEYGUE ; SCP D'AVOCATS CAUVIN - LEYGUE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2014-10-02;13ma00429 ?
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