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02/10/2014 | FRANCE | N°12MA03827

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2ème chambre - formation à 3, 02 octobre 2014, 12MA03827


Vu la requête, enregistrée le 13 septembre 2012, présentée pour Mme C...B..., demeurant..., par Me A...; Mme B...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1203060 du 5 juillet 2012 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 20 mars 2012 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, la décisi

on susmentionnée ;

3°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de réexaminer ...

Vu la requête, enregistrée le 13 septembre 2012, présentée pour Mme C...B..., demeurant..., par Me A...; Mme B...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1203060 du 5 juillet 2012 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 20 mars 2012 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision susmentionnée ;

3°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de réexaminer sa situation dans le délai d'un mois aux fins de lui délivrer un titre de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, qui sera versée à Me A...en contrepartie de sa renonciation à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle ;

.......................................................................................

Vu le jugement attaqué ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle du tribunal de grande instance de Marseille, en date du 2 octobre 2012, admettant Mme B...au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu la convention des Nations Unies contre la torture du 10 février 1984 ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

Vu la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979, relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la 2ème chambre de la Cour dispensant le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 11 septembre 2014 le rapport de M. Firmin, rapporteur ;

1. Considérant que MmeB..., de nationalité kosovare, interjette appel du jugement du 5 juillet 2012 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 20 mars 2012 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ;

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

Sur les moyens communs aux décisions attaquées :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 susvisée : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui (...) constituent une mesure de police(...) " ; qu'aux termes de l'article 3 de ladite loi : " La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision. " ; qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne (...) et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (... ) / 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré ; (...) La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I, sans préjudice, le cas échéant, de l'indication des motifs pour lesquels il est fait application des II et III. " ;

3. Considérant que l'arrêté attaqué vise notamment les I et II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ainsi que les articles L. 512-1, L. 513-2, L. 742-3 du même code et les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et mentionne notamment que Mme B... déclare être entrée en France le 5 mai 2010 et a sollicité son admission au séjour le 11 mai 2010 dans le cadre des dispositions de l'article L. 741-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qu'après un examen approfondi de sa demande la Cour nationale du droit d'asile a refusé de lui reconnaître le statut de réfugiée le 28 février 2012, qu'après examen de sa situation l'intéressée n'entre dans aucune des catégories de plein droit définies aux articles L. 313-11 et L. 314-11 du code précité, qu'elle ne justifie pas du visa long séjour prévu à l'article L. 311-7 du même code pour obtenir la délivrance d'une carte de séjour temporaire, qu'elle n'établit pas qu'elle serait exposée à des peines ou traitements contraires à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour dans son pays d'origine (ou de résidence habituelle où elle est effectivement réadmissible) et qu'elle n'établit par ailleurs pas être dépourvue d'attaches familiales dans son pays ou hors de France où elle aurait vécu jusqu'en mai 2010 ; que le préfet n'était pas tenu de faire mention dans l'arrêté en litige de l'ensemble des éléments de fait relatifs à la situation personnelle de la requérante ; qu'ainsi, la décision de refus d'admission au séjour critiquée comporte de façon suffisamment circonstanciée les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement et qui permettent de vérifier que l'administration préfectorale a procédé à un examen de la situation particulière de l'intéressée ; qu'il résulte des termes mêmes des dispositions précitées de l'article L. 511-1-I que la décision prononçant l'obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision refusant la délivrance d'un titre de séjour lorsque, comme en l'espèce, la mesure d'éloignement entre dans le cas prévu au 3° dudit article ; que la décision fixant l'Etat de destination qui se réfère aux dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, à la nationalité de la requérante et indique qu'à défaut d'exécution volontaire la mesure d'éloignement sera exécutée d'office à destination, notamment, de l'Etat dont la requérante a la nationalité, comporte l'énoncé des circonstances de droit et de fait qui en constituent le fondement en faisant état de la situation personnelle de l'intéressée ; que, par suite, les moyens tirés par MmeB..., d'une part, de l'absence d'examen particulier de sa situation personnelle, à l'égard duquel la requérante ne présente au demeurant aucun élément probant et, d'autre part, de l'insuffisance de motivation des décisions contenues dans l'arrêté attaqué ne sauraient être accueillis ; qu'il ne ressort par ailleurs pas de l'examen de la décision contestée que le préfet se serait cru en situation de compétence liée pour rejeter, à la suite de la décision précitée de la Cour nationale du droit d'asile, la demande de l'intéressée sur le fondement des articles sus rappelés du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

En ce qui concerne le refus de titre de séjour :

4. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " et qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République " ;

5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la requérante est entrée en France le 5 mai 2010 ; qu'elle a déposé une demande d'asile le 11 mai 2010 définitivement rejetée le 28 février 2012 ; que si elle fait état de la présence en France d'un de ses cousins qui a acquis la nationalité française et de deux autres de ses cousins qui sont titulaires de titres de séjour, ainsi que sa tante et du fait, d'ailleurs non établi, qu'elle bénéficierait de l'appui de plusieurs associations, ces circonstances ne sont pas de nature, eu égard à la brièveté et aux conditions de son séjour en France, à faire regarder l'arrêté attaqué comme ayant porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; que si elle fait également valoir qu'elle réside en France aux côtés de son mari, d'ailleurs lui-même en situation irrégulière et de ses quatre enfants, lesquels sont scolarisés, il ne ressort d'aucune des pièces du dossier, et il n'est pas même allégué d'ailleurs, que la cellule familiale ne puisse se reconstituer dans le pays d'origine ; que le droit au respect de la vie privée et familiale ne saurait s'interpréter comme comportant pour un Etat l'obligation générale de respecter le choix, par les couples mariés, de leur domicile commun et d'accepter l'installation de conjoints non nationaux dans le pays ; qu'elle n'est par suite pas fondée à soutenir que la décision attaquée méconnaît les dispositions précitées du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ou les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, pour les mêmes motifs, elle n'est pas fondée à soutenir que le préfet aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de son arrêté sur sa situation personnelle ;

En ce qui concerne la décision l'obligeant à quitter le territoire français :

6. Considérant que pour les motifs ci-dessus exposés la requérante n'est pas fondée à soutenir que la décision attaquée méconnaît les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

7. Considérant que si Mme B...soutient que la décision l'obligeant à quitter le territoire français méconnaît également l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors qu'un retour au Kosovo l'exposerait à des atteintes à sa vie privée du fait de son appartenance à la communauté rom, il est constant, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, que sa demande d'asile n'a pas été admise ; que les pièces qu'elle produit sont insuffisantes à établir que des menaces graves et personnelles pèseraient sur elle en cas de retour dans l'Etat de renvoi ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à soutenir que la décision fixant le pays de destination est illégale par voie de conséquence de l'illégalité de la décision l'obligeant à quitter le territoire français ;

9. Considérant qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. " ; qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants " ;

10. Considérant, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, que MmeB..., qui se borne à se référer à son récit des mauvais traitements, au demeurant anciens, qu'elle aurait subis dans son pays d'origine, déjà produit devant l'Office français de protection des réfugiés et apatrides qui a rejeté sa demande par décision du 20 janvier 2011, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 28 février 2012, n'établit pas par les pièces qu'elle produit qu'elle serait exposée à des traitements inhumains ou dégradants en cas de retour dans son pays d'origine où en Serbie où elle allègue avoir résidé, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que ce moyen ne peut qu'être écarté ;

11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...B..., au ministre de l'intérieur et à Me A....

Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12MA03827
Date de la décision : 02/10/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. VANHULLEBUS
Rapporteur ?: M. Jean-Pierre FIRMIN
Rapporteur public ?: Mme CHAMOT
Avocat(s) : BERRY

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2014-10-02;12ma03827 ?
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