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06/05/2014 | FRANCE | N°12MA01889

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre - formation à 5, 06 mai 2014, 12MA01889


Vu la requête, enregistrée le 11 mai 2012, présentée pour M. B... D..., demeurant..., par MeA..., de la SCPA... ;

M. D... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1102127 du 9 mars 2012 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de deux délibérations du 11 avril 2011, par lesquelles le conseil municipal de Leucate a décidé, d'une part, de déclasser la place des Arènes du domaine public communal et, d'autre part, d'autoriser le maire à procéder à la vente des parcelles à un promoteur privé ;

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°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ces deux délibérations ;

3°) de déclarer illéga...

Vu la requête, enregistrée le 11 mai 2012, présentée pour M. B... D..., demeurant..., par MeA..., de la SCPA... ;

M. D... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1102127 du 9 mars 2012 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de deux délibérations du 11 avril 2011, par lesquelles le conseil municipal de Leucate a décidé, d'une part, de déclasser la place des Arènes du domaine public communal et, d'autre part, d'autoriser le maire à procéder à la vente des parcelles à un promoteur privé ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ces deux délibérations ;

3°) de déclarer illégale, " par voie d'exception ", la délibération du 15 avril 2010 décidant d'engager la procédure de déclassement de la place des Arènes ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Leucate le versement de la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.....................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code de la voirie routière ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 15 avril 2014 :

- le rapport de M. Chanon, premier conseiller ;

- les conclusions de M. Deliancourt, rapporteur public ;

- et les observations de Me C...pour la commune de Leucate ;

Après avoir pris connaissance de la note en délibéré, enregistrée le 16 avril 2014, présentée pour la commune de Leucate ;

1. Considérant que, par jugement du 9 mars 2012, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté la demande de M. D...tendant à l'annulation de deux délibérations du 11 avril 2011, par lesquelles le conseil municipal de Leucate a décidé, d'une part, de déclasser la place des Arènes du domaine public communal et de la classer dans le domaine privé et, d'autre part, d'autoriser le maire à procéder à la vente des parcelles correspondantes à un promoteur privé ; que M.D... relève appel de ce jugement ;

Sur la régularité du jugement :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 5 du code de justice administrative : " L'instruction des affaires est contradictoire (...) " ; que l'article R. 611-1 du même code dispose : " (...) La requête, le mémoire complémentaire annoncé dans la requête et le premier mémoire de chaque défendeur sont communiqués aux parties avec les pièces jointes (...). Les répliques, autres mémoires et pièces sont communiqués s'ils contiennent des éléments nouveaux " ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier de première instance que la commune de Leucate a produit un second mémoire en défense le 16 novembre 2011, la clôture de l'instruction ayant préalablement été fixée au 18 novembre 2011 ; que les premiers juges ont visé et analysé ce mémoire, qui comprenait des observations en défense nouvelles en réponse aux moyens soulevés par M. D...dans son dernier mémoire, sans le communiquer au demandeur ; que, dans ces conditions, le jugement, qui est notamment fondé sur ces observations, a été rendu en méconnaissance de la procédure contradictoire prévue par les dispositions des articles L. 5 et R. 611-1 du code de justice administrative ; que, par suite, M. D... est fondé à soutenir que le jugement est irrégulier et doit, pour ce motif, être annulé ;

4. Considérant qu'il y a lieu pour la Cour d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. D...devant le tribunal administratif de Montpellier ;

Sur la légalité de la délibération du 11 avril 2011 portant déclassement du domaine public :

5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 141-3 du code de la voirie routière : " Le classement et le déclassement des voies communales sont prononcés par le conseil municipal (...). Les délibérations concernant le classement ou le déclassement sont dispensées d'enquête publique préalable sauf lorsque l'opération envisagée a pour conséquence de porter atteinte aux fonctions de desserte ou de circulation assurées par la voie. A défaut d'enquête relevant d'une autre réglementation et ayant porté sur ce classement ou déclassement, l'enquête rendue nécessaire en vertu du deuxième alinéa est ouverte par l'autorité exécutive de la collectivité territoriale ou de l'établissement public de coopération intercommunale, propriétaire de la voie, et organisée conformément aux dispositions du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique " ;

6. Considérant que, par la délibération en litige, le conseil municipal de Leucate a approuvé le déclassement du domaine public communal et le classement dans son domaine privé des parcelles cadastrées section DN n° 212-215 et n° 213-216, situées place des Arènes, dans le cadre d'une opération de réhabilitation de la place, notamment par la construction de bâtiments destinés à des habitations et des commerces ;

7. Considérant, en premier lieu, que M. D...ne conteste pas que le dossier soumis à enquête publique précisait quelles étaient les parcelles de terrains devant être déclassées ; que tant le rapport du commissaire enquêteur que la délibération contestée mentionnent que les deux parcelles en cause sont cadastrées section DN n° 212-215 et n° 213-216 ; que la seule circonstance que l'arrêté du 4 février 2011 prescrivant l'enquête publique, qui précisait que ces parcelles se situaient place des Arènes, n'indique pas les références cadastrales n'est pas de nature à démontrer que les parcelles déclassées ne seraient pas précisément identifiées ;

8. Considérant, en deuxième lieu, que le rapport du commissaire enquêteur, malgré certaines approximations juridiques, est suffisamment clair quant à l'objet et les conclusions de l'enquête publique ; qu'il résulte des termes mêmes de ce rapport, en particulier dans la partie intitulée " Conclusions et avis du commissaire enquêteur ", que l'enquête publique a porté " sur le projet de déclassement de deux parcelles du domaine public communal (...) situées place des Arènes à Port-Leucate ", le déclassement ayant " pour objet la cession des parcelles aux fins de réalisation d'une opération immobilière ", ce qui est conforme à l'objet de la délibération critiquée ; que le commissaire enquêteur a finalement émis " un avis favorable à la réalisation de l'opération projetée " ; que, dans ces conditions, alors même qu'il ajouté que cette opération consistait en la " cession de deux parcelles communales aux fins d'édification d'un programme immobilier ", le commissaire enquêteur doit être regardé, contrairement à ce qui est soutenu, comme ayant émis un avis personnel et motivé sur le projet de déclassement ; que, dès lors, le moyen tiré du vice de procédure dont serait entachée l'enquête publique doit être écarté ;

9. Considérant, en troisième lieu, que M. D...soutient que le déclassement est illégal au regard de la convention du 8 avril 1965 liant l'Etat et la commune de Leucate ainsi que du cahier des charges correspondant relatif à l'opération d'aménagement de la zone d'urbanisation préférentielle de Leucate, qui feraient obstacle à toute sortie du domaine public de la place des Arènes ; que le moyen doit être écarté comme inopérant dès lors qu'il n'est pas contesté que la propriété de la place a depuis lors été transférée de l'Etat à la commune ;

10. Considérant, en quatrième lieu, qu'une décision de déclassement porte par elle-même désaffectation ; que, par suite, la circonstance, à la supposer établie, que la place des Arènes, alors au demeurant que la délibération en litige ne porte pas sur la totalité de l'emprise de la place, ne serait pas désaffectée de fait, est dépourvue d'influence sur la légalité du déclassement ;

11. Considérant, en cinquième lieu, que M. D...ne peut utilement se prévaloir, par la voie de l'exception, de l'illégalité de la délibération du 15 avril 2010, par laquelle le conseil municipal de Leucate a approuvé le projet de déclassement des parcelles de terrain considérées dès lors qu'il ne conteste pas que cette décision a disparu de l'ordonnancement juridique à la suite de son retrait ultérieur ;

12. Considérant, en sixième et dernier lieu, que le moyen tiré de ce que la commune aurait dû proposer aux propriétaires riverains de se porter acquéreurs des biens déclassés est inopérant au regard de l'objet de la délibération en litige ; qu'il en va de même des moyens tirés de la méconnaissance de la réglementation en matière d'urbanisme ou des risques d'inondations des parcelles ;

Sur la légalité de la délibération du 11 avril 2011 relative à la cession des parcelles déclassées :

13. Considérant qu'aux termes de l'article L. 112-8 du code de la voirie routière : " Les propriétaires riverains des voies du domaine public routier ont une priorité pour l'acquisition des parcelles situées au droit de leur propriété et déclassées par suite d'un changement de tracé de ces voies ou de l'ouverture d'une voie nouvelle. Le prix de cession est estimé, à défaut d'accord amiable, comme en matière d'expropriation. Si, mis en demeure d'acquérir ces parcelles, ils ne se portent pas acquéreurs dans un délai d'un mois, il est procédé à l'aliénation de ces parcelles suivant les règles applicables au domaine concerné (...). Les mêmes dispositions s'appliquent aux délaissés résultant d'une modification de l'alignement " ;

14. Considérant qu'il ressort des pièces produites par M. D...en première instance que, par cette délibération, le conseil municipal de Leucate a approuvé un avenant ayant pour objet de décaler le calendrier de la réalisation des conditions suspensives d'une promesse de vente des parcelles déclassées, précédemment conclue avec la société immobilière Cardi ;

15. Considérant qu'il n'est pas établi, ni même allégué par M.D..., que le déclassement en cause résulterait d'un changement de tracé de la voie publique ou de l'ouverture d'une voie nouvelle ; qu'ainsi et en tout état de cause, M. D...ne peut se prévaloir des dispositions de l'article L. 112-8 du code de la voirie routière pour soutenir que la commune de Leucate aurait dû proposer, préalablement à la délibération critiquée, aux propriétaires riverains de se porter acquéreurs des biens déclassés ;

16. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non-recevoir opposées par la commune de Leucate, que M. D...n'est pas fondé à demander l'annulation des deux délibérations du 11 avril 2011 contestées ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

17. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation " ;

18. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Leucate, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. D... demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l'espèce, les conclusions de la commune de Leucate présentées au même titre doivent être rejetées ;

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Montpellier en date du 9 mars 2012 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. D...devant le tribunal administratif de Montpellier et le surplus des conclusions d'appel sont rejetés.

Article 3 : Les conclusions de la commune de Leucate tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... D...et à la commune de Leucate.

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N° 12MA01889

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre - formation à 5
Numéro d'arrêt : 12MA01889
Date de la décision : 06/05/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

71-02-002 Voirie. Régime juridique de la voirie. Déclassement d'une voie.


Composition du Tribunal
Président : M. BEDIER
Rapporteur ?: M. René CHANON
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : SCP D'AVOCATS EMERIC VIGO

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2014-05-06;12ma01889 ?
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