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06/05/2014 | FRANCE | N°11MA03215

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4ème chambre-formation à 3, 06 mai 2014, 11MA03215


Vu la requête, enregistrée le 8 août 2011, présentée pour la société anonyme (SA) Orchestra Kazibao dont le siège social est situé 400 avenue Marcel Dassault à Castelnau-le-Lez (34170), par Me A...;

La SA Orchestra Kazibao demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0904378 en date du 9 juin 2011 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contributions additionnelles auxquelles elle a été assujettie au titre des e

xercices clos les 31 décembre 2005 et 28 février 2007 ;

2°) de prononcer la déchar...

Vu la requête, enregistrée le 8 août 2011, présentée pour la société anonyme (SA) Orchestra Kazibao dont le siège social est situé 400 avenue Marcel Dassault à Castelnau-le-Lez (34170), par Me A...;

La SA Orchestra Kazibao demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0904378 en date du 9 juin 2011 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contributions additionnelles auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos les 31 décembre 2005 et 28 février 2007 ;

2°) de prononcer la décharge des impositions contestées et des pénalités y afférentes ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat les entiers dépens ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 8 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 15 avril 2014,

- le rapport de M. Emmanuelli, rapporteur ;

- et les conclusions de M. Guidal, rapporteur public ;

1. Considérant que par une décision du 20 novembre 2001 à effet du 1er janvier précédent, la société Kazibao a absorbé la société Orchestra ; qu'à l'issue d'une vérification de comptabilité de la nouvelle société anonyme (SA) Orchestra Kazibao, l'administration fiscale a remis en cause le report par cette société des déficits antérieurement constatés par la société Kazibao sur les résultats bénéficiaires de ses exercices clos le 31 décembre 2005 et le 28 février 2007 ; que la SA Orchestra Kazibao relève appel du jugement du 9 juin 2011 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contributions additionnelles auxquelles elle a été assujettie au titre desdits exercices clos les 31 décembre 2005 et 28 février 2007 ;

Sur la recevabilité des conclusions d'appel :

2. Considérant que la SA Orchestra Kazibao demande la décharge des impositions supplémentaires mises en recouvrement par les services fiscaux le 10 juillet 2009, dont le montant s'élève à 1 393 291 euros ; qu'il est constant, toutefois, que ce montant comprend deux amendes de 4 760 euros qui ont été acceptées par la société ; que la portée financière du litige s'élève donc à la somme totale de 1 388 531 euros (1 393 291 - 4 760), dont 150 867 euros d'intérêts de retard ; que les conclusions d'appel de la société sont donc irrecevables en tant qu'elles excèdent ladite somme ;

Sur la régularité du jugement :

3. Considérant que les premiers juges ont commis une erreur matérielle en considérant que la SA Orchestra Kazibao contestait les impositions supplémentaires mises à sa charge en ce qu'elles procédaient de la remise en cause du report sur les résultats de ses exercices clos les 31 décembre 2005 et 28 février 2007 des déficits subis par la société " Orchestra " alors qu'il s'agissait, en réalité, des déficits subis par la société Kazibao, société absorbante, antérieurement à la fusion opérée en 2001 ; que l'erreur commise par les premiers juges est restée sans incidence sur la solution du litige dès lors qu'ils ont considéré " que la société Kazibao a subi un changement d'une importance telle qu'elle devait être regardée comme emportant cessation de l'entreprise au sens des dispositions de l'article 221-5 du code général des impôts, ce qui ne pouvait rendre légalement possible le report des déficits antérieurement constatés " ; qu'ainsi, l'erreur commise par le tribunal administratif de Montpellier n'a en tout état de cause pas constitué un vice de nature à entacher d'irrégularité le jugement critiqué ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation (...) Lorsque l'administration rejette les observations du contribuable sa réponse doit également être motivée. " ; qu'aux termes de l'article R. 57-1 du même livre : " La proposition de rectification prévue par l'article L. 57 fait connaître au contribuable la nature et les motifs du redressement envisagé. L'administration invite, en même temps, le contribuable à faire parvenir son acceptation ou ses observations dans un délai de trente jours à compter de la réception de la proposition. " ; qu'il résulte de ces dispositions que, pour être régulière, une proposition de rectification doit comporter la désignation de l'impôt concerné, de l'année d'imposition et de la base d'imposition, et énoncer les motifs sur lesquels l'administration entend se fonder pour justifier les redressements envisagés, de manière à permettre au contribuable de formuler ses observations de façon utile ;

5. Considérant, en premier lieu, que la proposition de rectification que le service a adressée le 11 décembre 2008 à la SA Orchestra Kazibao relevait que ladite société avait imputé, à tort, sur les exercices clos les 31 décembre 2005 et 28 février 2007 des déficits pour un montant total de 4 896 123 euros (soit 2 476 654 euros de déficits ordinaires + 4 208 586 euros d'amortissements réputés différés - 1 789 117 euros correspondant au montant du bénéfice fiscal constaté au titre de l'exercice clos en 2004) alors qu'à l'ouverture de la période vérifiée, soit le 1er janvier 2005, le montant des déficits reportables après imputation s'élevait à 348 622 euros (soit 1 789 117 euros correspondant au bénéfice fiscal de l'exercice 2004 - 2 137 739 euros de déficits reportables retenus par l'administration au titre de 2003 après vérification) ; que le vérificateur a souligné dans la proposition de rectification que, dès lors, le différentiel de déficits rectifiés consécutif au précédent contrôle et non pris en compte par la société s'élevait à la somme de 4 547 501 euros (4 896 123 - 348 622) ; que de cette somme a été soustrait un complément de report déficitaire de 7 653 euros pour aboutir à des imputations de déficits opérés à tort de 4 539 848 euros ; que le vérificateur, après avoir rappelé les termes de l'article 209-1 du code général des impôts, a précisé dans la proposition de rectification que les reports déficitaires étaient annulés à concurrence de 4 170 721 euros au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2005 et de 369 127 euros au titre de l'exercice clos le 28 février 2007 (4 170 721 + 369 127 = 4 539 848 euros) ; que, par suite, le moyen selon lequel le vérificateur n'a pas clairement établi le montant du déficit non imputable doit être écarté ;

6. Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de l'instruction que lors d'un précédent contrôle, l'administration fiscale avait déjà remis en cause en 2004 le report des déficits de la société Kazibao nés avant la fusion susmentionnée ; que la société absorbante a toutefois considéré que la fusion n'avait pas entraîné de changement d'activité et a continué à reporter en avant ses déficits existant au 31 décembre 2000 pour les imputer sur les exercices clos les 31 décembre 2005 et 28 février 2007 ; que ces éléments ont été rappelés dans la proposition de rectification en date du 11 décembre 2008 ; que le moyen selon lequel aucun lien ne serait établi entre les procédures de rectification de 2004 et de 2008 manque donc en fait ;

7. Considérant, en troisième lieu, que la société requérante soutient que la proposition de rectification du 11 décembre 2008 ne se réfère à aucune des deux notifications qui ont fait suite au précédent contrôle, alors que les motifs des redressements qui y sont évoqués ne sont pas identiques ; qu'il est certes constant que seule la première proposition en date du 14 décembre 2004, portant sur l'exercice 2001, avait pour objet de remettre en cause le report des déficits de la société Kazibao nés avant la fusion absorption ; que, toutefois, cette circonstance est sans aucune incidence, dans la mesure où la proposition de rectification du 11 décembre 2008 se réfère très explicitement à d'autres pièces de procédure, à savoir un courrier de l'interlocuteur départemental du 7 juillet 2006 et un autre courrier du 27 mai 2008 émanant de la sous-direction du contrôle fiscal de la direction générale des finances publiques qui fixaient la position définitive de l'administration sur la question en litige tenant au changement d'activité et à la remise en cause des déficits reportables ; qu'il n'est pas soutenu que ces courriers seraient insuffisamment motivés et notamment qu'ils n'auraient pas comporté les raisons qui ont conduit l'administration à considérer qu'il y avait, au cas particulier, changement d'activité ;

8. Considérant, enfin, que contrairement à ce que soutient la société requérante, le montant des déficits reportables n'a nullement évolué entre la proposition de rectification du 15 décembre 2004 et la réponse de l'administration aux observations du contribuable de 10 février 2009 ; qu'en effet, la somme de 3 990 261 euros mentionnée dans la réponse aux observations du contribuable du 10 février 2009, invoquée par la SA Orchestra Kazibao, correspond au montant des rappels en base relatifs au report déficitaire erroné déterminé à l'issue de la seconde vérification et que la somme de 3 444 684 euros indiquée dans la proposition de rectification du 11 décembre 2008 correspond, quant à elle, à la part du rappel issu de la première vérification ;

Sur le bien-fondé des impositions :

9. Considérant qu'aux termes du I de l'article 209 du code général des impôts relatif à la détermination de la base de l'impôt sur les sociétés, dans sa rédaction applicable aux années d'imposition en litige : " (...) en cas de déficit subi pendant un exercice, ce déficit est considéré comme une charge de l'exercice suivant et déduit du bénéfice réalisé pendant ledit exercice. Si ce bénéfice n'est pas suffisant pour que la déduction puisse être intégralement opérée, l'excédent du déficit est reporté sur les exercices suivants (...) " ; qu'aux termes de l'article 221 du même code : " (...) 5. Le changement de l'objet social ou de l'activité réelle d'une société emporte cessation d'entreprise (...) " ; qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions que la mise en oeuvre du droit au report déficitaire est subordonnée notamment à la condition qu'une société n'ait pas subi, dans son activité, des transformations telles qu'elle n'est plus, en réalité, la même ; que de telles transformations dans l'activité d'une société, qui doivent être regardées comme emportant cessation d'entreprise, font obstacle à ce que celle-ci puisse reporter un déficit antérieur à son changement d'activité sur le bénéfice d'un exercice postérieur à ce changement ;

10. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société Kazibao exploitait un site internet à destination des enfants, tirait ses recettes des bandeaux publicitaires diffusés sur le site, de ses prestations d'hébergement, d'animations d'autres sites et des adhésions des internautes ; que cette société, qui employait dix-neuf personnes au service commercial et marketing et seize personnes au service informatique, détenait la société Kazibao Productions Inc qui exploitait un site internet équivalent destiné au public canadien ; que les associés de la société Orchestra, qui avait pour activité la fabrication et la commercialisation sous toutes ses formes d'articles d'habillement destinés en particulier aux enfants, ont apporté la totalité de leurs actions à la société Kazibao ; qu'il résulte des diverses constatations opérées par le service que la nouvelle entité, qui a absorbé la société Orchestra avec effet rétroactif au 1er janvier 2011 comme il a été dit ci-dessus, a cessé d'exercer l'activité qu'exerçait précédemment la société Kazibao, société absorbante ; que cet état de fait est confirmé par le rapport annuel 2000/2001 du groupe Orchestra-Kazibao ; que le personnel chargé du marketing et de l'informatique de la société Kazibao a été licencié en 2001, l'activité internet ayant été ensuite externalisée avant d'être abandonnée ; que la filiale canadienne a cessé toute activité en décembre 2001 et a été mise en liquidation ; que les locaux dont disposait la société Kazibao à Paris, Chalons-sur-Marne et Villeurbanne ont été fermés ; que le code " nomenclature des activités françaises (NAF) " apposé par l'Institut national des statistiques et des études économiques lors de l'enregistrement de la SA Orchestra Kazibao indique une activité de commerce de gros de textile ; que le chiffre d'affaires de la société requérante a été réalisé à hauteur de 39 081 998 euros, 65 395 666 euros et 75 885 366 euros respectivement au titre des exercices 2001, 2002 et 2003 par la vente de produits textiles, alors que celui tiré de l'activité internet n'a été que de 218 215 euros en 2001 et a été nul au cours des deux exercices suivants ; qu'ainsi, nonobstant la circonstance que la fusion opérée aurait été initiée afin de rapprocher deux entreprises aux activités complémentaires, et alors qu'il n'est pas démontré que l'interpénétration de l'activité traditionnelle et de l'activité par internet dont fait état la société requérante ait été la résultante de ladite fusion, la société Kazibao a subi un changement d'une importance telle qu'elle devait, dans les circonstances de l'espèce, être regardée comme emportant cessation de l'entreprise au sens des dispositions susmentionnées de l'article 221-5 du code général des impôts ; que, dès lors, la SA Orchestra Kazibao ne pouvait légalement prétendre au report des déficits antérieurement constatés par la société Kazibao sur les résultats bénéficiaires de ses exercices clos les 31 décembre 2005 et 28 février 2007 ;

11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SA Orchestra Kazibao n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande ; que ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent, par voie de conséquence, être rejetées ; qu'enfin, il ne ressort pas des pièces du dossier que des dépens auraient été exposés dans la présente instance ; que la SA Orchestra Kazibao n'est donc pas fondée à en demander le remboursement ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de la SA Orchestra Kazibao est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SA Orchestra Kazibao et au ministre des finances et des comptes publics.

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