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05/05/2014 | FRANCE | N°12MA04788

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2ème chambre - formation à 3, 05 mai 2014, 12MA04788


Vu, enregistrée le 17 décembre 2012, la requête présentée pour Mme C...B..., demeurant ... par Me Bellaiche, avocat ; Mme B...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0906725 du 22 octobre 2012 du tribunal administratif de Marseille qui a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la communauté urbaine Marseille Provence Métropole à lui verser une indemnité de 95 400 euros, assortie des intérêts, au titre du préjudice qu'elle estime avoir subi résultant de sa chute le 10 novembre 2008 avenue Georges Braque à Marseille, dans le 14ème arrondissement ;
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Vu, enregistrée le 17 décembre 2012, la requête présentée pour Mme C...B..., demeurant ... par Me Bellaiche, avocat ; Mme B...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0906725 du 22 octobre 2012 du tribunal administratif de Marseille qui a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la communauté urbaine Marseille Provence Métropole à lui verser une indemnité de 95 400 euros, assortie des intérêts, au titre du préjudice qu'elle estime avoir subi résultant de sa chute le 10 novembre 2008 avenue Georges Braque à Marseille, dans le 14ème arrondissement ;

2°) de condamner la communauté urbaine Marseille Provence Métropole à lui verser la somme de 72 000 euros au titre de la réparation définitive de son préjudice ;

3°) de condamner la communauté urbaine Marseille Provence Métropole à lui verser la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

4°) de condamner la communauté urbaine Marseille Provence Métropole à rembourser les entiers dépens ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 avril 2014 :

- le rapport de Mme Carassic, rapporteure ;

- les conclusions de Mme Chamot, rapporteure publique ;

- et les observations de Me A... de la Selarl Abeille pour la communauté urbaine Marseille Provence Métropole ;

1. Considérant que Mme B...interjette appel du jugement du 22 octobre 2012 du tribunal administratif de Marseille qui a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la communauté urbaine Marseille Provence Métropole à lui verser une indemnité de 95 400 euros, assortie des intérêts, au titre du préjudice qu'elle estime avoir subi résultant de sa chute le 10 novembre 2008 avenue Georges Braque à Marseille, dans le 14ème arrondissement, tout en ramenant en appel sa demande indemnitaire à la somme de 72 000 euros, non assortie d'une demande d'intérêts ;

Sur la recevabilité de la requête d'appel de Mme B...:

2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 411-1 du code de justice administrative : " La juridiction est saisie par requête. La requête indique les noms et domicile des parties. Elle contient l'exposé des faits et moyens, ainsi que l'énoncé des conclusions soumises au juge (...). " ; que la requête d'appel présentée par Mme B...ne constitue pas la reproduction littérale de sa demande de première instance et demande l'annulation du jugement attaqué ; qu'elle répond ainsi aux exigences de motivation des requêtes d'appel prévues par les dispositions citées ci-dessus ; que, dès lors, la fin de non recevoir opposée par la communauté urbaine Marseille Provence Métropole doit être écartée ;

Sur la responsabilité de la communauté urbaine Marseille Provence Métropole :

3. Considérant qu'il appartient à l'usager, victime d'un dommage survenu sur une voie publique, de rapporter la preuve du lien de cause à effet entre l'ouvrage public et le dommage dont il se plaint ; que la collectivité en charge de l'ouvrage public doit alors, pour que sa responsabilité ne soit pas retenue, établir que l'ouvrage public faisait l'objet d'un entretien normal ou que le dommage est imputable à la faute de la victime ou à un cas de force majeure ;

4. Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment de l'attestation des marins pompiers de Marseille du 10 janvier 2009, et qu'il n'est d'ailleurs pas contesté, que Mme B...a chuté le 10 novembre 2008, vers 18 h, avenue Georges Braque à Marseille et qu'elle a été transférée aux services des urgences à l'hôpital Nord de Marseille ; que pour établir le lien de causalité entre sa chute et la présence d'un plot en béton d'une hauteur non contestée de 9 cms et d'une largeur de près de 16 cms, Mme B...produit, pour la première fois en appel, deux attestations, dont la teneur n'est pas contestée en défense, de deux témoins directs de son accident, qui affirment que la requérante a chuté en raison d'un plot en béton qui dépassait du sol et qui était présent sur un ilot de sécurité, ainsi que d'autres témoignages d'habitants du quartier qui attestent de l'existence de ce plot lors de la chute de Mme B...; qu'ainsi, le lien de causalité entre la chute de la requérante et l'ouvrage public est établi ; que les photographies produites par la requérante de ce plot, d'une hauteur non contestée de 9 cms et d'une largeur de 16 cms, montrent l'importance, au demeurant non contestée, de cet obstacle sur la chaussée ; que, si la communauté fait valoir qu'elle n'a pas été alertée de la présence de cet obstacle, elle n'établit pas que ce plot n'aurait été présent que peu avant la chute de Mme B...et que ses services auraient disposé d'un temps trop bref pour prendre des mesures de comblement de ce trou ou, à tout le moins, de signalisation nécessaire à cet endroit ; qu'il résulte de la demande de renseignements établie par la direction de l'espace public, de la voirie et de la circulation de la communauté urbaine et du croquis des lieux litigieux produit par la communauté que l'ilot où la requérante a chuté est situé dans le prolongement d'un premier passage piéton et permet de rejoindre le second passage piéton, constituant ainsi le seul passage nécessairement emprunté par les piétons pour traverser la voie en toute sécurité ; qu'ainsi, la présence de cette défectuosité non signalée sur un tel lieu de passage excède les sujétions normales auxquelles tout piéton normalement attentif doit s'attendre à rencontrer sur la voie publique ; que, dans ces conditions, et contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, la communauté urbaine Marseille Provence Métropole n'apporte pas la preuve qui lui incombe de l'entretien normal de la voie ; que ce défaut d'entretien normal est de nature à engager sa responsabilité ;

5. Considérant, toutefois, que la présence de cet obstacle, d'une hauteur et d'une taille significatives, était visible, dans un lieu éclairé par la présence d'un éclairage public, même à 18 heures en automne ; que la requérante connaissait nécessairement les lieux pour résider à proximité du lieu de sa chute ; qu'il sera fait une juste appréciation de l'influence de la faute d'imprudence de la victime sur son dommage en exonérant la communauté urbaine Marseille Provence Métropole de sa responsabilité à hauteur de 50 % ;

Sur le préjudice subi par Mme B...:

6. Considérant d'abord, que Mme B...a demandé l'indemnisation de son préjudice total, dans son mémoire enregistré le 19 juin 2012 au greffe du tribunal administratif de Marseille, pour la somme de 95 400 euros ; qu'en appel, sa demande indemnitaire est ramenée à la somme de 72 000 euros au titre de la réparation définitive de son préjudice ; que, par suite et en tout état de cause, la communauté urbaine n'est pas fondée à soutenir que l'augmentation alléguée de la réparation des chefs de préjudice invoqués par MmeB..., serait irrecevable pour ce motif ;

7. Considérant, ensuite, que si la communauté urbaine soutient que les opérations de l'expertise médicale ordonnée par le juge des référés du tribunal administratif de Marseille sont entachées d'irrégularité pour ne pas avoir été rendues à son contradictoire, elle n'établit pas, alors que le rapport du 4 février 2010 de l'expert mentionne que les parties ont été régulièrement convoquées, qu'elle n'a pas été informée des dates de réunions de cette expertise ; qu'en tout état de cause, ce rapport peut servir d'élément d'information du juge ;

En ce qui concerne les préjudices patrimoniaux :

8. Considérant que la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône soutient avoir exposé pour son assurée des frais d'hospitalisation, des frais de transport, des actes de radiologie et de massages pour un montant total de frais médicaux et de radiologie pour un montant total de 108 561,03 euros ; qu'il résulte du rapport de l'expert que Mme B...a présenté, à la suite de sa chute, une fracture du col du fémur gauche qui a nécessité une hospitalisation à l'hôpital Nord du 10 novembre 2008 au 18 novembre 2008, puis une rééducation au centre de rééducation fonctionnelle de Valmante du 18 novembre 2008 au 4 avril 2009, puis en externat du 7 avril 2009 au 14 août 209 et du 2 septembre 2009 au 6 octobre 2009 ; qu'elle a été hospitalisée du 1er novembre 2009 au 8 novembre 2009 à nouveau à l'hôpital Nord pour une mise en place d'une prothèse totale de hanche, puis a été dirigée en internat au centre de Valmante du 9 novembre 2009 au 8 décembre 2009 ; que ces frais d'hospitalisation, d'un montant de 70 237,60 euros, ainsi que les frais de transport du 18 novembre 2008 au 16 novembre 2010 d'un montant de 3 981 euros et les actes de radiologie, d'un montant de 669,01 euros pour la période du 14 avril 2009 au 22 septembre 2010 présentent, une fois rapprochés des éléments figurant dans le rapport d'expertise susévoqué, un lien direct avec sa chute ; qu'en revanche, la caisse n'établit pas, par la seule attestation d'imputabilité du médecin-conseil, que la nouvelle période d'hospitalisation du 7 novembre 2010 au 16 novembre 2010 pour changement de prothèse rendu nécessaire en raison d'une complication médicale liée à une hyperfixation au point d'insertion de la prothèse sur le fut fémoral, sa rééducation au centre de Valmante du 16 novembre 2010 au 25 décembre 2010, puis d'une nouvelle période d'hospitalisation en raison d'une autre chute du 27 décembre 2010 au 11 janvier 2011, ainsi que les frais médicaux pharmaceutiques, pour la période du 23 décembre 2008 au 19 octobre 2011 et les frais de massages du 24 mai 2011 au 28 juin 2011, sont en lien direct avec l'accident litigieux ; que, par suite, la caisse justifie du versement de la somme totale de 74 887,61 euros au titre des frais de santé de la patiente ; qu'en outre, la caisse justifie avoir versé à MmeB..., auxiliaire de vie salariée, du 10 novembre 2008 au 1er février 2010, des indemnités journalières pour un montant total de 7 769,32 euros ; qu'il y a lieu d'allouer à la caisse, compte tenu du partage de responsabilité susévoqué, la somme totale de 41 328,46 euros ; que Mme B...ne soutient pas avoir conservé des frais de santé à sa charge ;

9. Considérant que Mme B...ne soutient pas avoir subi des pertes de revenus du fait de son accident ;

10. Considérant que Mme B...justifie, par deux notes d'honoraires de son médecin du 25 janvier 2010 et 23 janvier 2012, avoir exposé des frais d'un montant total de 700 euros pour se faire assister par un médecin lors de l'expertise ordonnée par le juge des référés du tribunal administratif de Marseille ; que cette assistance a été utile à la solution du litige ; que compte-tenu du partage de responsabilité retenu, il y a lieu d'allouer à ce titre à Mme B...la somme de 350 euros ;

En ce qui concerne les préjudices personnels :

11. Considérant que l'expert a fixé le déficit fonctionnel temporaire total de la victime à 50 % pour la période du 10 novembre 2008 au 10 novembre 2009 et à 25 % du 11 novembre 2009 au 7 novembre 2010 ; que cette incapacité temporaire est en lien direct avec l'accident litigieux ; qu'en revanche, ainsi qu'il a été dit au point 8, ce lien n'est pas établi concernant le déficit fonctionnel temporaire fixé par l'expert à 50 % pour la période du 8 novembre 2010 au 20 novembre 2011 ; que, compte tenu de ce déficit fonctionnel temporaire en lien direct, d'un déficit fonctionnel permanent de 23 %, des souffrances endurées évaluées à 4,5/7, d'un préjudice esthétique de 2/7, il sera fait une juste appréciation de l'ensemble de ces préjudices en allouant à la requérante, compte-tenu du partage de responsabilité de 50 %, la somme globale de 21 300 euros ;

12. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme B...et la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône sont fondées à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont rejeté leur demande ; qu'il y a lieu de condamner la communauté urbaine Marseille Provence Métropole à verser à Mme B...la somme totale de 21 650 euros au titre de son entier préjudice et à la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône celle de 41 328,46 euros au titre de ses débours ;

Sur les frais d'expertise :

13. Considérant qu'il y a lieu de mettre la moitié des frais d'expertise, taxés à la somme de 450 euros, par ordonnance du 12 novembre 2009 du président du tribunal administratif de Marseille, soit la somme de 225 euros, à la charge de Mme B...et l'autre moitié, pour un même montant, à la charge de la communauté urbaine Marseille Provence Métropole ;

Sur l'indemnité forfaitaire de gestion :

14. Considérant qu'en vertu des dispositions du neuvième alinéa de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, la caisse d'assurance maladie à laquelle est affilié l'assuré social victime de l'accident recouvre une indemnité forfaitaire à la charge du tiers responsable et au profit de l'organisme national d'assurance maladie en contrepartie des frais qu'elle engage pour obtenir le remboursement des prestations servies à la victime ; qu'en application de ces dispositions, la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône a droit à la somme maximale de 1 015 euros au titre de cette indemnité ;

Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

15. Considérant que les dispositions de cet article font obstacle à ce que MmeB..., qui n'est pas la partie perdante à l'instance, soit condamnée à verser quelque somme que ce soit à la communauté urbaine Marseille Provence Métropole au titre des frais non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner la communauté urbaine à verser la somme de 2 000 euros à Mme B...au titre de ces dispositions ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du 22 octobre 2012 du tribunal administratif de Marseille est annulé.

Article 2 : La communauté urbaine Marseille Provence Métropole versera la somme de 21 650 (vingt et un mille six cent cinquante) euros à Mme B...au titre de son entier préjudice.

Article 3 : La communauté urbaine Marseille Provence Métropole versera à la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône la somme de 41 328,46 (quarante et un mille trois cent vingt huit euros et quarante six centimes) au titre de ses débours et celle de 1 015 (mille quinze) euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion.

Article 4 : Les frais d'expertise sont mis à la charge pour moitié, soit la somme de 225 (deux cent vingt cinq) euros, de Mme B...et pour l'autre moitié, pour une autre somme de 225 (deux cent vingt cinq) euros, de la communauté urbaine Marseille Provence Métropole.

Article 5 : La communauté urbaine Marseille Provence Métropole versera la somme de 2 000 (deux mille) euros à Mme B...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 6 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...B..., à la communauté urbaine Marseille Provence Métropole et à la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône.

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N° 12MA047882


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12MA04788
Date de la décision : 05/05/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

54-04-02 Procédure. Instruction. Moyens d'investigation.


Composition du Tribunal
Président : M. DUCHON-DORIS
Rapporteur ?: Mme Marie-Claude CARASSIC
Rapporteur public ?: Mme CHAMOT
Avocat(s) : BELLAICHE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2014-05-05;12ma04788 ?
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