La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

28/04/2014 | FRANCE | N°12MA00238

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 6ème chambre - formation à 3, 28 avril 2014, 12MA00238


Vu la requête, enregistrée le 18 janvier 2012 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille, sous le n° 12MA00238, présentée par le préfet des Bouches-du-Rhône ;

Le préfet des Bouches-du-Rhône demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0904255 du 6 décembre 2011 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la délibération n° 26-0209 du 4 février 2009 prise par la communauté d'agglomération du pays d'Aubagne et de l'Etoile et l'avenant n° 2 à la convention de délégation de service public d

e transport de voyageurs conclue entre ladite communauté d'agglomération et la socié...

Vu la requête, enregistrée le 18 janvier 2012 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille, sous le n° 12MA00238, présentée par le préfet des Bouches-du-Rhône ;

Le préfet des Bouches-du-Rhône demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0904255 du 6 décembre 2011 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la délibération n° 26-0209 du 4 février 2009 prise par la communauté d'agglomération du pays d'Aubagne et de l'Etoile et l'avenant n° 2 à la convention de délégation de service public de transport de voyageurs conclue entre ladite communauté d'agglomération et la société Autobus aubagnais ;

2°) de faire droit à ses demandes de première instance ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code des marchés publics ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 avril 2014 :

- le rapport de Mme Carotenuto, rapporteur,

- les conclusions de Mme Felmy, rapporteur public,

- et les observations de Me C...représentant la communauté d'agglomération du pays d'Aubagne et de l'Etoile et de Me D...représentant la société Autobus aubagnais ;

Après avoir pris connaissance de la note en délibéré enregistrée le 9 avril 2014, présentée pour la communauté d'agglomération du pays d'Aubagne et de l'Etoile, par Me A...et de celle enregistrée le 9 avril 2014 pour la société Autobus aubagnais, par MeB... ;

1. Considérant que, par un contrat conclu le 27 août 2007, la communauté d'agglomération du pays d'Aubagne et de l'Etoile a chargé le GIE Autobus aubagnais d'assurer, pour une durée de dix ans, le transport public de voyageurs sur le territoire de ses onze communes membres et sur les lignes Gémenos-Aubagne et La Treille - Aubagne ; que, par une délibération du 4 février 2009, le conseil communautaire a décidé d'instaurer la gratuité sur ce réseau de transport, a approuvé l'avenant n° 2 au contrat de délégation de service public et a autorisé son président à le signer ; que ledit avenant a été signé le 12 février 2009 ; que le préfet des Bouches-du-Rhône a saisi le tribunal administratif de Marseille d'une demande tendant à l'annulation de cette délibération et de cet avenant, au motif que la suppression par ce dernier de tout risque d'exploitation pesant sur le délégataire entraînerait d'une part, la requalification du contrat en marché public et, d'autre part, une modification substantielle du contrat, les deux hypothèses devant conduire à la passation d'un nouveau contrat ; que le préfet des Bouches-du-Rhône relève appel du jugement du 6 décembre 2011 par lequel le tribunal administratif a rejeté sa demande ;

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 1411-1 du code général des collectivités territoriales : " Une délégation de service public est un contrat par lequel une personne morale de droit public confie la gestion d'un service public dont elle a la responsabilité à un délégataire public ou privé, dont la rémunération est substantiellement liée aux résultats de l'exploitation du service " ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article 18.1 de la convention initiale de délégation de service public, le délégataire tire sa rémunération des recettes commerciales constituées du produit de la vente des titres de transport auprès des usagers, d'autres recettes annexes et accessoires et d'une contribution forfaitaire financière ; que cette contribution est égale à la différence entre l'engagement sur dépenses d'exploitation et l'engagement sur recettes d'exploitation, prévus aux articles 20 et 21 de la convention ; que l'article 24 prévoit par ailleurs un intéressement à la qualité représentant 22 % de la contribution forfaitaire financière ; qu'enfin, aux termes de l'article 18.2 de ladite convention, le délégataire supporte l'ensemble des dépenses correspondant à l'ensemble des missions qui lui sont confiées, à l'exception des charges d'investissement relatives aux biens mis à disposition par l'autorité organisatrice ;

4. Considérant que l'article 3.6 de l'avenant conclu a modifié l'article 18 de la convention relatif au régime financier du contrat ; que selon l'article 18.1 modifié, relatif à la rémunération du délégataire : " Le délégataire tire sa rémunération : - de la perception de la part de l'Autorité Organisatrice d'une compensation financière variable issue de la fréquentation, soit le nombre de voyages réalisés sur le réseau valorisé en euros, sur la base d'un prix au voyage de 0,40 euro. - de la perception des recettes accessoires telles que les indemnités d'assurance, les produits financiers de gestion, les subventions et indemnités attribuées au Délégataire par d'autres organismes que l'Autorité Organisatrice, - de la perception de la part de l'Autorité Organisatrice d'une contribution forfaitaire financière. Cette contribution est égale à la différence entre l'engagement sur dépenses d'exploitation et l'engagement sur fréquentation, valorisé en euros. A la somme ainsi obtenue, est ajoutée ou retranchée une partie variable égale à l'intéressement sur les résultats liés à la qualité de service, - de la perception de la part de l'Autorité Organisatrice d'une rémunération correspondant au coût de production des services à la demande, - de la perception, éventuellement, d'une somme compensant l'application des articles L. 223-1 et L. 223-2 du code de l'environnement " ; que ces stipulations ont remplacé la perception de recettes tirées du produit de la vente des titres de transport par la perception d'une compensation financière variable issue de la fréquentation, soit le nombre de voyages réalisés sur le réseau valorisés en euros, soit sur la base d'un prix au voyage de 0,40 euros ; que l'avenant a également prévu que le délégataire s'engage sur un niveau annuel de dépenses et sur un niveau annuel de voyages pendant toute la durée de la convention ; que cet engagement sur fréquentation, valorisé en euros, remplace l'engagement sur recettes et permet de calculer la contribution financière forfaitaire annuellement versée par l'autorité délégante au délégataire, égale à la différence entre l'engagement sur dépenses d'exploitation et l'engagement sur fréquentation ; que si le préfet se prévaut des articles 2.2 (relatif à l'entretien du matériel), 2.2.1.2 (relatif à la prise en charge de la gestion du parc de véhicules et de son équipement) et 2.2.2 (relatif aux moyens humains) de l'avenant en cause, qui sont dans l'article 2 " Période transitoire ", qui court du 15 mai 2009, date d'entrée en vigueur de la gratuité, au 15 mai 2011, ne sont pas de nature à supprimer tout risque d'exploitation qui dépend, à titre principal, du nombre d'usagers ; que le préfet expose également que selon l'annexe 11.2 de l'avenant, " le service à la demande " sera rémunéré en fonction de l'engagement prévisionnel du délégataire et régularisé annuellement en fonction de la production réelle du service, il ressort également de cette annexe que le délégataire tire une partie de sa rémunération au travers de sa capacité à faire progresser la fréquentation du service de transport à la demande ; qu'il ressort de l'avenant litigieux que d'une part, la contribution forfaitaire financière couvre le résultat d'exploitation qui n'est que prévisionnel, alors que le délégataire doit supporter, aux termes de l'article 18.2 de la convention non modifié, l'ensemble des dépenses correspondant à l'ensemble des missions qui lui sont confiées ; que l'actualisation de la contribution financière, des engagements sur les dépenses et sur la fréquentation valorisée n'a pas pour effet de supprimer un risque sur les résultats pour l'exploitant ; que d'autre part, l'avenant conclu n'a pas modifié le principe de l'intéressement à la qualité, lié à une augmentation de la fréquentation et à un niveau de qualité de service rendu aux usagers et à l'autorité délégante ; que la contribution forfaitaire financière est modulée à hauteur de 22 % en partie variable, correspondant au résultat de l'intéressement à la qualité et qui est donc pondérée en fonction des résultats liés à l'exploitation ; que la circonstance que le délégataire ne perçoive plus de recettes liées au paiement par les usagers de titres de transport est en l'espèce sans incidence sur l'économie globale du contrat et sur l'existence d'un risque d'exploitation pour le délégataire ; qu'ainsi, l'avenant n'a pas eu pour effet de modifier la rémunération du délégataire, qui reste substantiellement liée aux résultats de l'exploitation du service et n'a pas transformé la convention initiale en un marché public ;

5. Considérant, en second lieu, que le préfet des Bouches-du-Rhône se borne à soutenir que l'avenant en litige doit être annulé en raison de la modification substantielle du contrat résultant de la transformation du mode de rémunération du prestataire et d'une augmentation de la fréquentation, à hauteur de 50 % dans un premier temps puis de 80% à terme et devant conduire à une nouvelle mise en concurrence ; que toutefois, comme il a été dit précédemment, l'avenant n'a pas eu pour effet de supprimer tout risque d'exploitation pesant sur le délégataire ; que l'instauration de la gratuité sur le réseau de transport public de voyageurs ne change pas la nature des prestations ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que les modifications apportées à la convention initiale affectent la répartition des charges entre le délégant et le délégataire et que ce dernier bénéficie de conditions financières plus favorables ; qu'ainsi, l'avenant en litige, qui tend à l'amélioration d'un service rendu aux usagers, ne modifie pas substantiellement un des éléments essentiels de la convention de délégation de service public et n'entraîne pas un bouleversement de son économie ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le préfet des Bouches-du-Rhône n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la délibération du 4 février 2009 et de l'avenant n° 2 au contrat de délégation de service public signé le 12 février 2009 ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Considérant que dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par la communauté d'agglomération du pays d'Aubagne et de l'Etoile et non compris dans les dépens et une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par le GIE Autobus Aubagnais et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête du préfet des Bouches-du-Rhône est rejetée.

Article 2 : L'Etat versera à la communauté d'agglomération du pays d'Aubagne et de l'Etoile et au GIE Autobus aubagnais une somme de 2 000 euros, à chacun, au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur, à la communauté d'agglomération du pays d'Aubagne et de l'Etoile et à la société Autobus aubagnais.

Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône.

''

''

''

''

2

N° 12MA00238


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12MA00238
Date de la décision : 28/04/2014
Type d'affaire : Administrative

Analyses

39-01-03-03 MARCHÉS ET CONTRATS ADMINISTRATIFS. NOTION DE CONTRAT ADMINISTRATIF. DIVERSES SORTES DE CONTRATS. DÉLÉGATIONS DE SERVICE PUBLIC. - LA DÉLIBÉRATION INSTAURANT LA GRATUITÉ SUR LE RÉSEAU DE TRANSPORT PUBLIC DE VOYAGEURS SUR LES TERRITOIRES DES COMMUNES MEMBRES DE LA COMMUNAUTÉ D'AGGLOMÉRATION DU PAYS D'AUBAGNE ET DE L'ETOILE ET L'AVENANT À LA CONVENTION DE DÉLÉGATION DE SERVICE PUBLIC MODIFIANT LE RÉGIME FINANCIER DU CONTRAT N'ONT PAS POUR EFFET DE SUPPRIMER TOUT RISQUE D'EXPLOITATION PESANT SUR LE DÉLÉGATAIRE ET NE MODIFIENT PAS SUBSTANTIELLEMENT UN DES ÉLÉMENTS ESSENTIELS DE LA CONVENTION DE DÉLÉGATION DE SERVICE PUBLIC, NI N'ENTRAÎNENT UN BOULEVERSEMENT DE SON ÉCONOMIE.

39-01-03-03 Le GIE Autobus Aubagnais est délégataire du service public du transport public de voyageurs depuis 2007 sur le territoire de la communauté d'agglomération du pays d'Aubagne et de l'Etoile. Le 4 février 2009, le conseil communautaire de la communauté d'agglomération du pays d'Aubagne et de l'Etoile a décidé d'instaurer la gratuité sur ce réseau de transport et a approuvé l'avenant n° 2 au contrat de délégation de service public.,,,Les stipulations de l'avenant n°2 ont remplacé la perception de recettes tirées du produit de la vente des titres de transport par la perception d'une compensation financière variable issue de la fréquentation et ont également prévu que le délégataire s'engage sur un niveau annuel de dépenses et sur un niveau annuel de voyages pendant toute la durée de la convention. Cet engagement sur fréquentation remplace l'engagement sur recettes et permet de calculer la contribution financière forfaitaire annuellement versée par l'autorité délégante au délégataire, qui est un élément de rémunération du délégataire, égale à la différence entre l'engagement sur dépenses d'exploitation et l'engagement sur fréquentation.,,,D'une part, la circonstance que le délégataire ne perçoive plus de recettes liées au paiement par les usagers de titres de transport est, en l'espèce, sans incidence sur l'économie globale du contrat et sur l'existence d'un risque d'exploitation pour le délégataire. Ainsi, l'avenant n'a pas eu pour effet de modifier la rémunération du délégataire, qui reste substantiellement liée aux résultats de l'exploitation du service et n'a pas transformé la convention initiale en un marché public.,,D'autre part, l'instauration de la gratuité sur le réseau de transport public de voyageurs ne change pas la nature des prestations et il ne résulte pas de l'instruction, que les modifications apportées à la convention initiale affectent la répartition des charges entre le délégant et le délégataire et que ce dernier bénéficie de conditions financières plus favorables. L'avenant en litige, qui tend à l'amélioration d'un service rendu aux usagers, ne modifie pas substantiellement un des éléments essentiels de la convention de délégation de service public et n'entraîne pas un bouleversement de son économie.


Composition du Tribunal
Président : M. GUERRIVE
Rapporteur ?: Mme Sylvie CAROTENUTO
Rapporteur public ?: Mme FELMY
Avocat(s) : PERU

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2014-04-28;12ma00238 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award