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03/04/2014 | FRANCE | N°11MA03735

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2ème chambre - formation à 3, 03 avril 2014, 11MA03735


Vu la requête, enregistrée le 26 septembre 2011, présentée pour l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM), par Me de la Grange ; l'ONIAM demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0903109 en date du 5 juillet 2011 en tant que le tribunal administratif de Marseille, d'une part, l'a déclaré responsable de la contamination par le virus de l'hépatite C alors qu'il intervient au titre de la solidarité nationale, d'autre part, a mis à sa charge une somme de 212 800 euros supérieure au montant

de l'allocation provisionnelle de 40 000 euros demandée par M. C......

Vu la requête, enregistrée le 26 septembre 2011, présentée pour l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM), par Me de la Grange ; l'ONIAM demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0903109 en date du 5 juillet 2011 en tant que le tribunal administratif de Marseille, d'une part, l'a déclaré responsable de la contamination par le virus de l'hépatite C alors qu'il intervient au titre de la solidarité nationale, d'autre part, a mis à sa charge une somme de 212 800 euros supérieure au montant de l'allocation provisionnelle de 40 000 euros demandée par M. C...et, enfin, a mis à sa charge les débours engagés par la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône ainsi que les charges patronales exposées par la commune d'Arles ;

2°) de limiter le montant de l'allocation provisionnelle à verser à M. C...à la somme de 40 000 euros et d'étendre la mission de l'expertise à l'organisme social ;

3°) de mettre à la charge de tout succombant la somme de 2 000 euros au titre des frais d'instance ;

.....................................

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré le 30 novembre 2011, présenté par la caisse des dépôts sans ministère d'avocat ;

Vu le mémoire, enregistré le 23 mars 2012, présenté pour les consorts C...par Me E... qui concluent, d'une part, à la confirmation du jugement en tant qu'il a alloué à M. B... C...la somme de 210 000 euros et réparé les préjudices des victimes par richochet, d'autre part, à la réformation du surplus du jugement et à la condamnation de l'ONIAM à payer à M. B...C...les sommes de 4 458,72 euros, 17 834,88 euros, 105 533,12 euros, 8 000 euros, 60 000 euros et 9 450 euros au titre de la perte de gains actuels et futurs, au titre de l'incidence professionnelle, des souffrances endurées, des troubles dans les conditions d'existence et du déficit fonctionnel temporaire et les succombants aux entiers dépens et, enfin, à ce que leur soit allouée la somme de 3 000 euros au titre des frais d'instance ;

....................................

Vu le mémoire, enregistré le 11 avril 2012, présenté pour l'Etablissement français du sang par Me G...qui demande à la Cour de juger que l'ONIAM est substitué à l'EFS dans la présente instance et de condamner la partie succombante aux entiers dépens ;

................................

Vu le mémoire, enregistré le 16 juillet 2013, présenté pour la commune d'Arles par Me A... qui conclut à la confirmation du jugement en tant qu'il lui a alloué la somme de 148 898,06 euros et à la condamnation de l'ONIAM à lui verser la somme complémentaire de 93 855,57 euros correspondant au montant versé à M. B...C...jusqu'à son décès en avril 2013 qui sera assortie des intérêts à compter du 3 mai 2013, outre une somme de 2 196 euros au titre des frais d'instance ;

.................................

Vu le mémoire, enregistré le 22 juillet 2013, présenté pour les consorts C...par Me E... qui persistent dans leurs précédentes conclusions en faisant, en outre, valoir que M. B... C...est décédé le 12 avril 2013 ;

Vu le mémoire, enregistré le 29 juillet 2013, présenté pour l'ONIAM par Me de la Grange qui persiste dans ses précédentes conclusions par les mêmes moyens en demandant, en outre, la réduction de l'indemnisation des proches de M. C...à de plus justes proportions et que la mission d'expertise soit étendue aux frais de l'organisme social ;

..............................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984, modifiée ;

Vu la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 ;

Vu la loi n° 2008-1330 du 17 décembre 2008, notamment le IV de son article 67 ;

Vu le décret n° 2010-251 du 11 mars 2010, notamment son article 8 ;

Vu le code de justice administrative ;

En application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, les parties ayant été informées que le jugement paraissait susceptible d'être fondé sur des moyens soulevés d'office ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 mars 2014,

- le rapport de Mme Massé-Degois, rapporteure ;

- les conclusions de Mme Chamot, rapporteure publique ;

- et les observations de Me H...du cabinet de la Grange pour l'ONIAM, de Me F... substituant Me A...pour la commune d'Arles et de Me G...pour l'EFS ;

1. Considérant que l'ONIAM, qui ne conteste ni la matérialité des transfusions des produits sanguins administrés à M. C...en 1982, ni leur imputabilité à la contamination de ce dernier par le virus de l'hépatite C, ni la mesure d'expertise ordonnée, relève appel du jugement n° 0903109 en date du 5 juillet 2011 en tant que le tribunal administratif de Marseille, d'une part, l'a déclaré responsable de la contamination par le virus de l'hépatite C alors qu'il intervient au titre de la solidarité nationale, d'autre part, a mis à sa charge une somme supérieure à l'allocation provisionnelle de 40 000 euros demandée par M. C...en l'état de ces dernières écritures et, enfin, a mis à sa charge les débours engagés par la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône ainsi que les charges patronales exposées par la commune d'Arles ;

Sur la recevabilité des conclusions de l'ONIAM tendant à l'annulation du jugement en ce qu'il l'a déclaré responsable de la contamination de M. B...C...par le virus de l'hépatite C :

2. Considérant que l'article 1er du jugement entrepris met hors de cause l'Etablissement français du sang ; que l'article 2 dudit jugement condamne l'ONIAM à payer à M. C...une somme de 212 800 euros, à Mme L...K...épouse C...une somme de 20 000 euros, à M. et Mme C...agissant en qualité de représentants légaux de leur fille Samantha C...une somme de 12 000 euros, à M. J...C...une somme de 8 000 euros et à Mme D... C...une somme de 6 000 euros ; que l'article 3 du même jugement condamne l'ONIAM à payer à la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône la somme de 71 336,79 euros assortie des intérêts au titre des débours exposés et à la commune d'Arles la somme de 148 898,06 euros assortie des intérêts ; que, par l'article 4, le jugement met à la charge de l'ONIAM les sommes de 1 500 euros, 1 000 euros et 1 500 euros au titre des frais d'instance exposés respectivement par les consortsC..., la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône et la commune d'Arles ; que, par les articles 5, 6, 7 et 8, ledit jugement ordonne et définit la mission d'expertise en vue de la détermination de l'étendue de l'aggravation de l'état de santé de M. B...C...; qu'enfin, après avoir précisé en son article 9 que tous droits et moyens des parties sur lesquels il ne s'est pas prononcé, le jugement, par son article 10, a rejeté le surplus des conclusions des parties ; que, dès lors qu'aucun des articles du dispositif du jugement contesté ne le déclare responsable de la contamination de M. C...par le virus de l'hépatite C, l'ONIAM est sans intérêt, et par là même irrecevable, à contester la pertinence des motifs du jugement qu'il attaque le déclarant responsable, même en l'absence de faute, de la contamination en litige alors qu'il est constant et non contesté que l'office intervient au seul titre de la solidarité nationale ;

Sur les autres conclusions de l'ONIAM, les conclusions incidentes de la commune d'Arles et les conclusions incidentes des consorts C...relatives aux indemnités allouées par le tribunal administratif à ces derniers :

3. Considérant que l'ONIAM soutient qu'en allouant, d'une part, à M. B...C...une somme supérieure à l'allocation provisionnelle de 40 000 euros demandée le dernier mémoire de ce dernier présenté le 11 mars 2011 et, d'autre part, à son épouse et à chacun de leurs trois enfants une indemnité qui n'était plus demandée dans leurs dernières écritures enregistrées le 11 mars 2011, les premiers juges ont statué ultra petita sur les conclusions indemnitaires des consorts C...;

4. Considérant qu'il résulte du dossier de première instance que les consorts C...dans leur requête introductive d'instance enregistrée le 20 mai 2009 ont sollicité du tribunal administratif de Marseille la condamnation de l'EFS à verser à M. C...la somme de 572 330,72 euros en réparation de sa contamination post-transfusionnelle par le virus de l'hépatite C, à Mme C..., son épouse, la somme de 25 000 euros, et à chacun de leurs trois enfants la somme de 10 000 euros ; qu'il résulte également du dossier de première instance, que les consorts C...ont produit un mémoire enregistré au greffe du tribunal le 11 mars 2011 intitulé "mémoire rectificatif et de demande d'expertise et de provision" qui constitue leurs dernières écritures de première instance et par lequel ils ont sollicité la nomination d'un expert médical, l'octroi d'une allocation provisionnelle de 40 000 euros à valoir sur l'entier préjudice de M. B...C...et une provision de 1 500 euros à valoir sur les frais d'expertise sans toutefois expressément abandonner leurs conclusions indemnitaires initiales ; qu'il résulte de ces dernières écritures que tant la demande d'une nouvelle mesure expertise médicale que la demande d'allocation provisionnelle se trouvent justifiées par la seule circonstance que M. C...a subi une greffe du foie au cours du mois de septembre 2010 dont il était allégué qu'elle se trouvait être à l'origine d'un traitement particulièrement lourd et de nouveaux postes de préjudices indemnisables ; que, dès lors, contrairement à ce que fait valoir l'ONIAM, le tribunal administratif ne peut être regardé ni comme ayant dénaturé les écritures des consortsC..., ni comme ayant statué au-delà des conclusions dont il était saisi en procédant, au vu des conclusions initiales, à l'indemnisation des préjudices constitués de M.C..., de son épouse et de ses trois enfants au cours de la période antérieure à la date de la greffe et en ordonnant, au vu des conclusions complémentaires, la mesure d'expertise sollicitée aux fins notamment de déterminer l'existence éventuelle d'une aggravation des préjudices intervenue postérieurement à la date de la greffe réalisée au mois de septembre 2010 ; qu'il y a toutefois lieu pour la Cour, par l'effet dévolutif de l'appel, de se prononcer sur les montants alloués par les premiers juges aux consorts C...contestés à titre subsidiaire par l'ONIAM ainsi que sur les sommes également contestées par l'office qu'il a été condamné à payer à la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône et à la commune d'Arles ;

5. Considérant, en premier lieu, que l'ONIAM soutient que les premiers juges ne pouvaient pas mettre à sa charge les frais exposés par la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône dans la mesure où les pièces produites au dossier ne permettaient pas d'établir un lien de causalité entre la contamination post-transfusionnelle par le virus de l'hépatite C et les dépenses alléguées ; que l'ONIAM demande à la Cour d'étendre la mission de l'expertise à l'imputabilité des dépenses engagées ;

6. Considérant que le tribunal a alloué la somme totale de 71 336,79 euros à la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône, dont 47 948,13 euros au titre des débours en lien avec la pathologie cancéreuse de M. B...C...consécutive à sa contamination post-transfusionnelle par le virus de l'hépatite C et 23 388,66 euros au titre du traitement administré au cours de la période d'août à décembre 2008 ; qu'il résulte de l'instruction et notamment du relevé des débours de la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône que la somme de 47 948,13 euros correspond à la différence entre le montant total des débours demandé par ladite caisse de 722 060,36 euros et le montant des frais futurs évalué à 674 112,23 euros expressément écarté par le tribunal ; qu'il résulte du relevé des débours de l'organisme social rapproché des éléments de l'expertise médicale qui confirment que M.C..., qui souffrait d'une cirrhose compliquée d'un cancer du foie consécutivement au virus de l'hépatite C, a subi notamment six cures de chimio-embolisation successives, des scanners et un traitement ablathermie à l'hôpital Saint-Joseph, que la somme de 47 948,13 euros se décompose en diverses hospitalisations entre le 24 octobre 2006 et le 16 novembre 2007 à l'hôpital Saint-Joseph, en divers actes de radiologie exposés au cours de la période du 18 octobre 2006 au 23 août 2007 ainsi qu'en des frais de transport engagés du 30 novembre 2006 au 20 août 2008 ; qu'également, il résulte du relevé des débours et notamment de l'évaluation des frais futurs rapprochée des éléments de l'expertise, que M. C...a subi un traitement par "Nexevar" à compter du mois d'août 2008 pendant une période approximative de cinq mois sur la base d'un coût de 3 898,11 euros par boîte avec une prescription annuelle de 14 boîtes ; qu'ainsi, et sans qu'il soit utile d'étendre la mesure d'expertise, l'ONIAM n'est pas fondé à soutenir que les premiers juges ont, à tort, mis à sa charge la somme de 71 336,79 euros au titre des frais exposés pour son assuré, M. C...en lien avec la contamination post-transfusionnelle de ce dernier par le virus de l'hépatite C ;

7. Considérant, en second lieu, que le tribunal a mis à la charge de l'ONIAM la somme de 148 898,06 euros correspondant aux rémunérations versées à M. C...par la commune d'Arles, comprenant la somme de 43 513,49 euros versée au titre des charges patronales ; que l'ONIAM soutient que cette dernière somme ne peut être mise à sa charge en faisant valoir que les dispositions de l'article 32 de la loi 85-677 du 5 juillet 1985 ne lui sont pas applicables dès lors qu'il n'est pas le "responsable" des dommages et qu'il intervient au seul titre de la solidarité nationale ;

8. Considérant, toutefois, qu'aux termes du dernier alinéa du 2° de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relative à la fonction publique territoriale : "La collectivité et subrogée dans les droits éventuels du fonctionnaire victime d'un accident provoqué par un tiers jusqu'à concurrence du montant des charges qu'elle a supportées ou supporte du fait de cet accident. Elle est admise à poursuivre directement contre le responsable du dommage ou son assureur le remboursement des charges patronales afférentes aux rémunérations maintenues ou versées audit fonctionnaire pendant la période d'indisponibilité de celui-ci par dérogation aux dispositions de l'article 2 de l'ordonnance n°59-76 du 7 janvier 1959 relative aux actions en réparation civile de l'Etat et de certaines autres personnes publiques " ; qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article L. 1142-22 du code de la santé publique dans sa rédaction issue du II de l'article 67 de la loi du 17 décembre 2008, entré en vigueur à la même date que le décret n° 2010-251 du 11 mars 2010 pris pour son application, soit le 1er juin 2010, l'ONIAM est chargé " de l'indemnisation des victimes de préjudices résultant de la contamination par le virus de l'hépatite C causée par une transfusion de produits sanguins ou une injection de médicaments dérivés du sang en application de l'article L. 1221-14 " ; qu'il résulte des dispositions de l'article L. 1221-14 issu du I du même article 67 de la loi du 17 décembre 2008 que la responsabilité de l'ONIAM est engagée dans les conditions prévues par l'article 102 de la loi du 4 mars 2002 et qu'aux termes du premier alinéa du IV du même article 67 : " A compter de la date d'entrée en vigueur du présent article, l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales se substitue à l'Etablissement français du sang dans les contentieux en cours au titre des préjudices mentionnés à l'article L. 1221-14 du code de la santé publique n'ayant pas donné lieu à une décision irrévocable " ; qu'il résulte de ces dernières dispositions que, dans les contentieux entrant dans leur champ d'application, l'ONIAM est substitué à l'EFS tant à l'égard des victimes que des tiers payeurs et que, quelles que soient ses clauses, un contrat d'assurance conclu par une structure reprise par l'EFS ne saurait faire obstacle à cette substitution ;

9. Considérant, qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions susmentionnées que le tribunal administratif de Marseille a, à bon droit, mis à la charge de l'ONIAM, substitué à l'EFS, la somme de 43 513,49 euros versée par l'employeur public de M.C..., la commune d'Arles, au titre des charges patronales exposées ;

10. Considérant que, par la voie de l'appel incident, la commune d'Arles sollicite la condamnation de l'ONIAM à lui verser la somme complémentaire de 93 855,57 euros correspondant au montant des salaires versé à M. B...C...jusqu'à la date de son décès en avril 2013 ;

11. Considérant, toutefois, que lorsque l'étendue réelle des conséquences dommageables d'un même fait n'est connue que postérieurement au jugement de première instance, la partie requérante est recevable à augmenter en appel le montant de ses prétentions par rapport au montant de l'indemnité demandée devant les premiers juges ; que ces dernières peuvent aussi être augmentées, le cas échéant, des prestations nouvelles servies depuis l'intervention du jugement de première instance ; que le montant de 93 855,57 euros se compose, au vu de l'état récapitulatif des salaires versés à M. C...du 1er juillet 2010 au 30 avril 2013 produit en appel en un montant de 72 725,47 euros au titre des salaires et en un montant de 21 130,40 euros au titre des charges patronales ; que si l'ONIAM ne conteste ni le montant ni la période, il résulte cependant du dossier de première instance que la somme de 148 898,06 euros allouée par le tribunal correspond aux salaires, y compris les cotisations patronales, versés à M. C...au cours de la période du 30 novembre 2006 au 17 juin 2010 ; que la commune d'Arles ne fait valoir aucune circonstance de nature à établir qu'elle se trouvait dans l'impossibilité devant le tribunal administratif d'obtenir les éléments lui permettant de déterminer l'étendue exacte de sa créance au titre des salaires versés à son employé pour la période du 1er juillet 2010 au 30 juin 2011 ; que l'étendue réelle des sommes engagées au titre de ce poste étant ainsi connue antérieurement au jugement du tribunal administratif de Marseille du 11 juillet 2011, la commune d'Arles n'est dès lors pas recevable à majorer en appel ses prétentions au titre du remboursement des salaires versés à son employé du 1er juillet 2010 au 30 juin 2011 ; que ses conclusions, dans cette mesure, présentées en appel, doivent être rejetées ; qu'il y a lieu, dès lors, de mettre à la charge de l'ONIAM la seule somme de 50 368,96 euros correspondant au montant des salaires augmenté du montant des cotisations patronales versés au titre de la période du 1er juillet 2011 au 30 avril 2013 et d'assortir cette somme des intérêts à compter de la date du 16 juillet 2013, date de l'enregistrement devant la Cour de l'appel incident et non à compter du 3 mai 2013 comme demandé ;

12. Considérant que devant la Cour les consorts C...sollicitent, dans leur mémoire incident enregistré le 23 mars 2012, au titre des préjudices patrimoniaux subis par M. B...C...les sommes de 4 458,72 euros au titre de la perte d'avantages financiers liés à l'évolution de sa carrière d'agent de maîtrise principal à la mairie d'Arles pour la période antérieure à la date de la consolidation de son état, de 17 834,88 euros au titre de la perte d'avantages financiers liés à l'évolution de sa carrière d'agent de maîtrise principal à la mairie d'Arles pour la période postérieure à la date de la consolidation de son état jusqu'en 2011, de 22 441,92 euros au titre de la perte d'avantages financiers liés à l'évolution de sa carrière d'agent de maîtrise principal à la mairie d'Arles pour la période de 2011 à 2015 ainsi qu'une somme de 83 091,20 euros au titre de la perte de pension de retraite à compter de l'année 2015 au cours de laquelle il aurait atteint 60 ans ; que le droit à la réparation d'un dommage, quelle que soit sa nature, s'ouvre à la date à laquelle se produit le fait qui en est directement la cause ; que si la victime du dommage décède avant d'avoir elle-même introduit une action en réparation, son droit, entré dans son patrimoine avant son décès, est transmis à ses héritiers ; que le droit à réparation du préjudice résultant des revenus futurs perdus par suite d'une mort précoce n'apparaît qu'au jour du décès de la victime et ne peut donner naissance à aucun droit entré dans son patrimoine avant ce jour ; que, par suite, il y a lieu de rejeter les conclusions tendant à ce que soit réparé le préjudice lié aux ressources postérieures à la date du décès de M. B...C..., un tel préjudice ne pouvait faire l'objet d'un droit à réparation susceptible d'avoir été transmis à son épouse et à ses enfants ; qu'en revanche, au titre de la période du 30 novembre 2006, date du placement en congé maladie de M. B...C..., à la date du 12 avril 2013, date de son décès, il sera fait une juste appréciation de l'incidence professionnelle de M. B...C..., dont le traitement d'agent communal a été maintenu jusqu'à la date de son décès, résultant de sa contamination post-transfusionnelle par le virus de l'hépatite C, en fixant ce poste de préjudice à la somme de 20 000 euros eu égard aux éléments versés à l'instance, notamment les bulletins de paie de l'intéressé du mois d'octobre 2006 au mois de mars 2009 précisant pour chacun le grade et l'échelon correspondant et les tableaux, non contestés par l'ONIAM, relatifs au passage d'échelons statutaires successifs des agents de la commune d'Arles et particulièrement celui attesté par la mairie d'Arles relatif à la situation d'un agent communal titulaire " agent de maîtrise principal " échelon 6 en 2007 applicable à la situation administrative de M.C... ;

13. Considérant, s'agissant des préjudices personnels réparables de M. C...pour la période antérieure à la date de la greffe du foie au cours de l'année 2010, qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport d'expertise que M. C...a commencé à partir du mois d'août de l'année 2006 à présenter une fatigue, que le virus de l'hépatite C a été diagnostiqué en novembre 2006 de même que les complications cancéreuses hépatiques ; que l'expert judiciaire, spécialisé en hépatogastro-entérologie, qui a précisé que l'annonce de ce diagnostic a été source pour M. C...d'une très grande angoisse et d'importantes douleurs tant morales que physiques, a fixé à 18 mois la période de déficit temporaire de travail qu'il a subi, soit du 30 novembre 2006 au 28 mai 2008, à 3 sur une échelle de 1 à 7 les souffrances physiques qu'il a endurées, a confirmé l'existence d'un préjudice d'agrément important compte-tenu de l'impossibilité que ce dernier avait de poursuivre ses activités sociales, physiques et sportives alors qu'il assurait les fonctions de secrétaire général d'un club de football, qu'il participait au comité de l'amicale laïque, qu'il pratiquait la pêche, la chasse, la pétanque et le bricolage, a exclu toute possibilité pour l'intéressé de reprendre une activité professionnelle et de poursuivre ses activités associatives, sociales et de loisirs malgré une relative stabilisation de son état de santé à la date du 16 janvier 2008 et a arrêté à un minimum de 60 % le taux du déficit fonctionnel permanent dont il est atteint ; qu'au vu des éléments qui précèdent, non sérieusement contestés, il sera fait une plus juste appréciation des préjudices personnels de M. C...en fixant à 9 000 euros le montant du préjudice lié à la période de déficit fonctionnel de 18 mois sur la base d'un montant mensuel de 500 euros, à 3 200 euros le montant réparant le pretium doloris subi entre les mois de septembre 2006 et septembre 2010, date de la greffe de foie, la somme de 75 000 euros au titre du déficit fonctionnel permanent de 60 % dont il a été atteint et qu'il a subi à compter du jour de la date de la stabilisation de son état de santé en janvier 2008 alors qu'il avait 53 ans jusqu'à la date de son décès, le 12 avril 2013, y compris le préjudice d'agrément l'accompagnant au titre de cette même période de cinq années ;

14. Considérant, enfin, que l'ONIAM soutient dans ses écritures que les indemnités allouées par le tribunal aux proches de la victime sont excessives et qu'une somme de 6 000 euros réparera justement le préjudice subi par Mme C...et qu'une somme de 4 000 euros réparera justement le préjudice subi par chacun des enfants du fait de la contamination par le virus de l'hépatite C de M. B...C...; que les consorts C...ne sollicitent pas devant la Cour la réévaluation des indemnités destinées à réparer leur préjudice personnel fixé, pour MmeC..., à la somme de 20 000 euros et, pour les enfants, aux sommes respectives de 12 000 euros, de 8 000 euros et de 6 000 euros selon qu'ils soient mineurs ou majeurs et vivant au foyer de leurs parents ; que si les premiers juges peuvent être regardés comme ayant procédé à la date du jugement attaqué à une évaluation excessive des préjudices que l'épouse et les enfants de M. C... ont respectivement subis en raison de la seule contamination post-transfusionnelle de leur époux et père, eu égard toutefois au décès survenu de M. B...C..., il y a lieu, dans ces circonstances particulières, de confirmer lesdits montants indemnisant également le préjudice d'affection lié au décès de ce dernier en lien avec la virémie ;

15. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que l'ONIAM est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a fixé le préjudice de M. C...en lien avec la contamination post-transfusionnelle par le virus de l'hépatite C à une somme supérieure à 107 200 euros réparant les dommages tels que constitués en septembre 2010, mois au cours duquel il a subi une greffe du foie qui a justifié une mesure d'expertise judiciaire aux fins de déterminer une éventuelle aggravation de son état de santé à compter de cette date ; que, par la voie de l'appel incident, la commune d'Arles est fondée à obtenir la seule somme de 50 368,96 euros correspondant au montant des salaires versés à M. B... C...augmenté des cotisations patronales jusqu'à la date de son décès assortie des intérêts à compter du 16 juillet 2013 ; que, par la voie de l'appel incident, la succession de M. B... C...n'est pas fondée à demander la réévaluation des sommes allouées par le tribunal au titre du préjudice de ce dernier constitué avant la date de la réalisation de la greffe de foie en septembre 2010 ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article R. 761-1 du code de justice administrative :

16. Considérant qu'en vertu de l'article R. 761-1 du code de justice administrative, les dépens comprennent la contribution pour l'aide juridique prévue à l'article 1635 bis Q du code général des impôts, ainsi que les frais d'expertise, d'enquête et de toute autre mesure d'instruction dont les frais ne sont pas à la charge de l'Etat ; que la présente instance n'a, à cette date, donné lieu à aucun dépens ; que, par suite, les conclusions présentées par les consorts C...et par l'EFS sur le fondement de ces dispositions ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

17. Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par l'ensemble des parties au litige ;

D E C I D E :

Article 1er : Le montant de l'indemnité fixée par l'article 2 du jugement n° 0903109 du 5 juillet 2011 du tribunal administratif de Marseille à verser à M. B...C...par l'ONIAM, substitué à l'EFS, est ramené à la somme de 107 200 euros.

Article 2 : L'article 2 du jugement n° 0903109 du 5 juillet 2011 du tribunal administratif de Marseille est réformé en ce qu'il a de contraire à l'article 1er du présent arrêt.

Article 3 : L'ONIAM versera à la commune d'Arles la somme de 50 368,96 euros assortie des intérêts à compter du 16 juillet 2013.

Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM), à l'Etablissement français du sang, à la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône, à la commune d'Arles, à la succession de M. B...C..., à Mme L...K...épouseC..., à Mme I...C..., à M. J...C...et à Mme D...C....

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N°11MA03735 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 11MA03735
Date de la décision : 03/04/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Procédure - Pouvoirs et devoirs du juge - Questions générales - Moyens - Moyens d'ordre public à soulever d'office.

Procédure - Voies de recours - Appel - Conclusions recevables en appel - Conclusions nouvelles.

Responsabilité de la puissance publique - Réparation - Préjudice.


Composition du Tribunal
Président : M. DUCHON-DORIS
Rapporteur ?: Mme Christine MASSE-DEGOIS
Rapporteur public ?: Mme CHAMOT
Avocat(s) : DE LA GRANGE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2014-04-03;11ma03735 ?
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