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14/03/2014 | FRANCE | N°13MA01152

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 5ème chambre - formation à 3, 14 mars 2014, 13MA01152


Vu I, sous le n° 13MA1152, la requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille le 13 mars 2013, présentée pour Mme C...B..., demeurant au..., par MeA... ;

Mme B...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1203332 du 18 octobre 2012 du tribunal administratif de Montpellier qui a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de l'arrêté en date du 2 avril 2012 par lequel le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jou

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Vu I, sous le n° 13MA1152, la requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille le 13 mars 2013, présentée pour Mme C...B..., demeurant au..., par MeA... ;

Mme B...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1203332 du 18 octobre 2012 du tribunal administratif de Montpellier qui a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de l'arrêté en date du 2 avril 2012 par lequel le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé l'Arménie comme pays de destination et, d'autre part, à ce qu'il soit enjoint audit préfet, de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ou à défaut de réexaminer sa situation dans un délai de deux mois à compter du jugement à intervenir et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour ;

2°) d'annuler l'arrêté préfectoral susmentionné ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Hérault de lui délivrer un titre de séjour " vie privée et familiale ", à défaut de réexaminer sa situation, dans un délai de deux mois à compter de l'arrêt à intervenir ;

4°) dans l'attente, d'enjoindre au préfet de l'Hérault de lui délivrer, dans un délai de huit jours, une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, à verser à Me A...en application de articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridictionnelle ;

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Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 14 février 2014 :

- le rapport de Mme Ciréfice, premier conseiller ;

- et les observations de MeA..., pour MmeB... ;

1. Considérant que, par un arrêté du 2 avril 2012, le préfet de l'Hérault a refusé un titre de séjour à MmeB..., de nationalité arménienne, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé l'Arménie comme pays de destination ; que, dans l'instance n°13MA01152, Mme B...demande à la Cour d'annuler le jugement n° 1203332 du 18 octobre 2012 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté, et, dans l'instance n° 13MA02203, elle sollicite le sursis à l'exécution de ce jugement ;

Sur la jonction :

2. Considérant que les deux requêtes susvisées sont présentées par la même requérante et sont dirigées contre le même jugement ; que, par suite, il y a lieu de les joindre pour y statuer par un seul arrêt ;

Sur la requête enregistrée sous le n° 13MA01152 :

En ce qui concerne les conclusions à fin d'annulation :

Quant à la décision refusant un titre de séjour :

3. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 susvisée : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent ( ...) " ; qu'aux termes de l'article 3 de cette même loi : " La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision " ; que la décision attaquée, portant refus de titre de séjour, vise les textes dont il est fait application et mentionne de manière suffisamment précise les faits qui la motivent ; qu'il y est notamment précisé que MmeB..., ressortissante arménien, a fait l'objet le 29 juillet 2011 d'une décision de rejet de sa demande d'asile par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) , décision confirmée le 25 février 2011 par la Cour nationale du droit d'asile (CNDA), que Mme B...ne remplit pas les conditions pour se voir délivrer un titre de séjour et que la décision ne méconnaît pas les stipulations des articles 8 et 3 de la convention précitée ; qu'ainsi, et alors même qu'il n'a pas mentionné dans son arrêté la demande d'aide juridictionnelle de Mme B...devant la CNDA, le préfet a suffisamment motivé en droit et en fait cette décision au regard des dispositions précitées de la loi du 11 juillet 1979 ; que, par suite, les moyens tirés de l'insuffisance de motivation de la décision portant refus de titre de séjour et du défaut d'examen de sa situation particulière doivent être écartés en tant qu'ils manquent en fait ;

4. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article L. 723-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'office statue sur les demandes d'asile dont il est saisi. Il n'est toutefois pas compétent pour connaître d'une demande présentée par une personne à laquelle l'admission au séjour a été refusée pour le motif prévu au 1° de l'article L. 741-4. L'office statue par priorité sur les demandes émanant de personnes auxquelles le document provisoire de séjour prévu à l'article L. 742-1 a été refusé ou retiré pour l'un des motifs mentionnés aux 2° à 4° de l'article L. 741-4, ou qui se sont vu refuser pour l'un de ces motifs le renouvellement de ce document. " ; qu'aux termes de l'article L. 741-4 du même code : " Sous réserve du respect des stipulations de l'article 33 de la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés, l'admission en France d'un étranger qui demande à bénéficier de l'asile ne peut être refusée que si : (...) 4° La demande d'asile repos e sur une fraude délibérée ou constitue un recours abusif aux procédures d'asile ou n'est présentée qu'en vue de faire échec à une mesure d'éloignement prononcée ou imminente. (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 742-3 du même code : " L'étranger admis à séjourner en France bénéficie du droit de s'y maintenir jusqu'à la notification de la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou, si un recours a été formé, jusqu'à la notification de la décision de la Cour nationale du droit d'asile. (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 742-6 du même code : " L'étranger présent sur le territoire français dont la demande d'asile entre dans l'un des cas visés aux 2° à 4° de l'article L. 741-4 bénéficie du droit de se maintenir en France jusqu'à la notification de la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, lorsqu'il s'agit d'une décision de rejet. En conséquence, aucune mesure d'éloignement mentionnée au livre V du présent code ne peut être mise à exécution avant la décision de l'office. (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 723-3 du même code : " Lorsqu'il est saisi en application de la procédure prioritaire prévue au second alinéa de l'article L. 723-1, l'office statue dans un délai de quinze jours sur la demande d'asile (...). " ; que le droit constitutionnel d'asile, qui a le caractère d'une liberté fondamentale, a pour corollaire le droit de solliciter le statut de réfugié ; que si ce droit implique que l'étranger qui sollicite la reconnaissance de la qualité de réfugié soit en principe autorisé à demeurer sur le territoire jusqu'à ce qu'il ait été statué sur sa demande, ce droit s'exerce dans les conditions définies par l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui permettent de refuser l'admission en France lorsque la demande d'asile constitue un recours abusif aux procédures d'asile ou n'est présentée qu'en vue de faire échec à une mesure d'éloignement prononcée ou imminente ;

5. Considérant que Mme B...a présenté une première demande d'asile qui a été rejetée par une décision de l'OFPRA du 14 mai 2010, confirmée le 19 mai 2011 par la CNDA ; que la requérante s'est présentée le 23 juin 2011 au guichet de la préfecture de l'Hérault pour demander le réexamen de sa demande d'asile en arguant d'un élément nouveau ; qu'une convocation lui a été remise pour le 1er juillet, afin de permettre au préfet de procéder à l'instruction de sa demande d'admission au séjour au titre de ce réexamen ; que cependant le 23 juin 2011, le préfet de l'Hérault a pris à l'encontre de l'intéressée un arrêté lui refusant un titre de séjour et lui faisant obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois, qui a été notifié à Mme B...lorsqu'elle s'est présentée à la préfecture le 1er juillet pour déposer son dossier ;

qu'au vu d'une lettre de témoignage nouvellement produite, l'OFPRA a considéré qu'il y avait lieu de procéder au réexamen de sa demande d'asile ; que cependant, la seule circonstance du réexamen de la demande d'asile du requérant par l'OFPRA ne démontre pas l'absence de caractère dilatoire de cette demande ; que celle-ci, après avoir été instruite selon la procédure prioritaire visée à l'article L. 723-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, a d'ailleurs été rejetée par une décision de l'OFPRA en date du 29 juillet 2011 ; qu'ainsi, la décision portant admission à l'aide juridictionnelle prononcée le 28 septembre 2011, alors même qu'elle vaudrait recours formé devant la CNDA à l'encontre de la décision de l'OFPRA, ne lui permet pas, compte tenu des dispositions précitées de l'article L. 723-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de continuer à bénéficier du droit de se maintenir sur le territoire au titre de l'asile ; que la seule mention " a déposé un recours devant la CNDA le 22 août 2011 " portée sur l'autorisation provisoire de séjour valable du 2 avril au 1er mai 2012 ne pouvait, compte tenu de ce qui précède, avoir pour effet de placer Mme B...dans le cadre d'une procédure normale pour le réexamen de sa demande ; qu'ayant ainsi épuisé ses droits au titre de l'asile, elle n'est plus fondée à se prévaloir d'une atteinte au droit fondamental qu'est le droit d'asile ; que, par suite, le préfet de l'Hérault a pu légalement, en application des dispositions précitées de l'article L. 742-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, rejeter sa demande de titre de séjour sans attendre que la CNDA se soit prononcée sur le recours dont l'intéressée l'avait saisi en ce qui concerne sa demande d'admission au statut de réfugié ; que si le préfet mentionne dans l'arrêté attaqué du 2 avril 2012 que Mme B...n'a pas fait appel de la dernière décision de l'OFPRA, sans tenir compte de la demande d'aide juridictionnelle sollicitée le 22 août 2011 par MmeB..., il aurait pris la même décision au regard des autres motifs de l'arrêté ;

Quant à la décision portant obligation de quitter le territoire :

6. Considérant que, comme il a été dit au point 5., le préfet de l'Hérault pouvait légalement, sur le fondement de l'article L. 742-6 du même code, refuser de délivrer à Mme B... un titre de séjour et l'obliger à quitter le territoire français sans attendre l'expiration du délai de recours devant la cour nationale du droit d'asile, ni, le cas échéant, que celle-ci ait statué ; que, pour le même motif, l'obligation de quitter le territoire français n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation quant au droit de l'intéressée à voir sa demande d'asile faire l'objet d'un examen individuel et suspensif, du seul fait qu'elle est intervenue avant la décision de la cour nationale du droit d'asile ; que MmeB..., son mari et l'un de leurs enfants prénommé Usso, qui sont également tous deux de nationalité arménienne et dont la demande d'asile a été refusée, ayant fait de la part du préfet de l'Hérault des mêmes décisions, il n'y a pas d'obstacle à ce que la cellule familiale qu'ils forment se reconstitue en Arménie où résident toujours deux autres enfants du couple ;

Quant à la décision fixant l'Arménie comme pays de destination :

7. Considérant que Mme B...se borne à reprendre en appel ses moyens de première instance tirés de ce que la décision fixant l'Arménie comme pays de renvoi, serait entachée d'un défaut de motivation et méconnaitrait le droit au recours effectif lors du traitement de la demande d'asile ainsi que les dispositions des articles 3 et 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'en l'absence de toute circonstance de fait ou de droit nouvelle présentée à l'appui de ces moyens, auxquels le tribunal administratif a suffisamment et pertinemment répondu, il y a lieu de les écarter, par adoption des motifs retenus par les premiers juges ;

8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande ;

En ce qui concerne les conclusions à fin d'injonction :

9. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (...) prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. " ; qu'aux termes de l'article L. 911-2 du même code : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (...) prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé. " ; enfin, qu'aux termes de l'article L. 911-3 dudit code : " Saisie de conclusions en ce sens, la juridiction peut assortir, dans la même décision, l'injonction prescrite en application des articles L. 911-1 et L. 911-2 d'une astreinte qu'elle prononce dans les conditions prévues au présent livre et dont elle fixe la date d'effet. " ;

10. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation de MmeB..., n'implique aucune mesure d'exécution ; que les conclusions présentées à cette fin par la requérante doivent donc être rejetées ;

Sur la requête enregistrée sous le n° 13MA02203 :

11. Considérant que la cour statuant par le présent arrêt, sur les conclusions de requête de Mme B...tendant à l'annulation du jugement attaqué, les conclusions de sa requête n° 13MA02203 tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement et à la " suspension " de l'arrêté du 2 avril 2012, sont privées d'objet ; qu'il n'y a pas lieu, par suite, d'y statuer ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

12. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation " ;

13. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, verse à Mme B...quelque somme que ce soit au titre des frais qu'elle a exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête n° 13MA01152 de Mme B...est rejetée.

Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête n° 13MA02203 tendant au sursis à l'exécution de ce jugement et à la suspension de l'arrêté du 2 avril 2012.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...B...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.

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N° 13MA01152- 13MA02203

cd


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13MA01152
Date de la décision : 14/03/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. BOCQUET
Rapporteur ?: Mme Virginie CIREFICE
Rapporteur public ?: Mme MARZOUG
Avocat(s) : MAZAS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2014-03-14;13ma01152 ?
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