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11/03/2014 | FRANCE | N°12MA03817

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 8ème chambre - formation à 3, 11 mars 2014, 12MA03817


Vu la requête enregistrée le 3 septembre 2012, présentée pour M. G...D...demeurant..., par Me C...E... ; M. D... demande à la Cour :

* d'annuler le jugement n° 1201785 rendu le 3 juillet 2012 par le tribunal administratif de Marseille ;

* d'annuler l'arrêté en date du 6 mars 2012 par lequel La Poste l'a exclu temporairement de ses fonctions pendant deux ans ;

* de mettre à la charge de La Poste le paiement d'une somme de 5 000 € en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient :

- que les di

spositions de l'article 8 du décret n° 84-961 du 25 octobre 1984 ont été méconnues dès l...

Vu la requête enregistrée le 3 septembre 2012, présentée pour M. G...D...demeurant..., par Me C...E... ; M. D... demande à la Cour :

* d'annuler le jugement n° 1201785 rendu le 3 juillet 2012 par le tribunal administratif de Marseille ;

* d'annuler l'arrêté en date du 6 mars 2012 par lequel La Poste l'a exclu temporairement de ses fonctions pendant deux ans ;

* de mettre à la charge de La Poste le paiement d'une somme de 5 000 € en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient :

- que les dispositions de l'article 8 du décret n° 84-961 du 25 octobre 1984 ont été méconnues dès lors que le président du conseil de discipline n'a pas mis aux voix toutes les sanctions ;

- que la lettre de Mme B...en date du 18 mars 2009 devait figurer dans son dossier disciplinaire ;

- que la sanction qui lui a été infligée est disproportionnée ;

- qu'il a été suspendu de ses fonctions dans des conditions illégales ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu l'ordonnance en date du 30 avril 2013, par laquelle le président de la 8ème chambre de la Cour a, en vertu des dispositions de l'article R. 613-1 du code de justice administrative, clos l'instruction de la présente affaire le 28 juin 2013 à midi ;

Vu le mémoire enregistré le 24 juin 2013 présenté pour M. D... par MeE... ; Il conclut aux mêmes fins par les mêmes moyens ;

Vu le mémoire en défense enregistré par télécopie le 27 juin 2013 et par courrier

le 1er juillet 2013, présenté pour La Poste, direction opérationnelle territoriale courrier des Bouches-du-Rhône, 7 rue Gaspard Monge à Marseille cedex 13 (13458), par

Me A...H...; La Poste demande à la Cour :

* de rejeter la requête de M. D... ;

* de mettre à la charge de M. D... le paiement d'une somme de 2 000 € en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que les moyens de la requête sont infondés ;

Vu, en application des dispositions de l'article R. 613-4 du code de justice administrative, l'ordonnance en date du 27 juin 2013 par laquelle l'instruction de l'affaire a été rouverte ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;

Vu la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat ;

Vu la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 modifiée relative à l'organisation du service de La Poste et des télécommunications ;

Vu le décret n° 84-961 du 25 octobre 1984 relatif à la procédure disciplinaire concernant les fonctionnaires de l'Etat ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 11 février 2014 :

- le rapport de Mme Vincent-Dominguez, rapporteur,

- les conclusions de Mme Hogedez, rapporteur public,

- les observations de Me E...pour M. D... et de MeF..., substituant

MeH..., pour La Poste ;

1. Considérant que M. D..., agent technique et de gestion de premier niveau de La Poste, exerçait, au moment des faits litigieux, ses fonctions d'agent de cabine au sein du " carré pro " de Montgrand sis dans le 6ème arrondissement de Marseille ; que, par une décision en date du 21 septembre 2009, M. D... a été révoqué de ses fonctions au motif d'un " comportement violent à l'encontre d'une collègue de travail se traduisant par une agression physique et des insultes pendant le service " ; qu'à la suite de l'avis émis le 5 octobre 2010 par la commission de recours du conseil supérieur de la fonction publique de l'Etat, lequel préconisait de substituer à ladite révocation une exclusion temporaire de fonctions de deux ans assortie d'un sursis de six mois, La Poste a néanmoins décidé, le 13 janvier 2011, de confirmer la sanction de la révocation ; que, par une ordonnance en date du 15 avril 2011, le juge des référés du tribunal administratif de Marseille saisi par M. D..., a suspendu l'exécution des décisions précitées en date des 21 septembre 2009 et 13 janvier 2011 ; que, le 16 mai 2011, La Poste a décidé, d'une part, de réintégrer M. D... à compter du 18 mai 2011 et, d'autre part, de le suspendre de ses fonctions ; que, par un arrêté en date du 30 août 2011, La Poste a, d'une part, retiré son précédent arrêté du 16 mai 2011 et, d'autre part, à nouveau suspendu de ses fonctions M. D... ; que, par une décision en date du 29 février 2012, La Poste a retiré les arrêtés en date des 21 septembre 2009 et 13 janvier 2011 portant révocation de M. D... ; que La Poste a, après avoir, le 17 janvier 2012, édicté à l'encontre de l'intéressé une sanction d'exclusion temporaire de fonctions de deux ans puis, le 28 février 2012, retiré cette sanction, de nouveau décidé, par arrêté en date du 6 mars 2012, d'exclure temporairement M. D...de ses fonctions pour une durée de deux ans ; que M. D... interjette appel du jugement en date du 3 juillet 2012 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté ses conclusions aux fins d'annulation de cette dernière sanction ;

Sur le bien-fondé du jugement :

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 8 du décret susvisé du

25 octobre 1984 relatif à la procédure disciplinaire concernant les fonctionnaires de l'Etat : " Le conseil de discipline, au vu des observations écrites produites devant lui et compte tenu, le cas échéant, des déclarations orales de l'intéressé et des témoins ainsi que des résultats de l'enquête à laquelle il a pu être procédé, émet un avis motivé sur les suites qui lui paraissent devoir être réservées à la procédure disciplinaire engagée./ A cette fin, le président du conseil de discipline met aux voix la proposition de sanction la plus sévère parmi celles qui ont été exprimées lors du délibéré. Si cette proposition ne recueille pas l'accord de la majorité des membres présents, le président met aux voix les autres sanctions figurant dans l'échelle des sanctions disciplinaires en commençant par la plus sévère après la sanction proposée, jusqu'à ce que l'une d'elles recueille un tel accord. / La proposition ayant recueilli l'accord de la majorité des membres présents doit être motivée et être transmise par le président du conseil de discipline à l'autorité ayant pouvoir disciplinaire. Lorsque cette autorité prend une décision autre que celle proposée par le conseil, elle doit informer celui-ci des motifs qui l'ont conduite à ne pas suivre sa proposition. /Dans l'hypothèse où aucune des propositions soumises au conseil de discipline, y compris celle consistant à ne pas prononcer de sanction, n'obtient l'accord de la majorité des membres présents, le conseil est considéré comme ayant été consulté et ne s'étant prononcé en faveur d'aucune de ces propositions. Son président informe alors de cette situation l'autorité ayant pouvoir disciplinaire. Si cette autorité prononce une sanction, elle doit informer le conseil des motifs qui l'ont conduite à prononcer celle-ci " ;

3. Considérant que si les actes administratifs doivent être pris selon les formes et conformément aux procédures prévues par les lois et règlements, un vice affectant le déroulement d'une procédure administrative préalable, suivie à titre obligatoire ou facultatif, n'est de nature à entacher d'illégalité la décision prise que s'il ressort des pièces du dossier qu'il a été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision prise ou qu'il a privé les intéressés d'une garantie ;

4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que lors du conseil de discipline qui s'est déroulé le 11 janvier 2012, la présidente a mis aux voix, en premier lieu, l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de deux ans ; que cette sanction n'a recueilli aucune majorité ; que la présidente a ensuite demandé aux membres du conseil de discipline s'ils étaient pour ou contre la proposition faite par les représentants du personnel au cours des débats de n'infliger aucune sanction ; que, là encore, aucune majorité ne s'est dégagée ; que s'il est constant que la présidente n'a pas mis aux voix les autres sanctions figurant dans l'échelle des sanctions disciplinaires en commençant par la plus sévère après la sanction proposée, cette circonstance n'a exercé, en l'espèce, aucune influence sur le sens de la décision prise ni privé l'intéressé d'une garantie dès lors qu'aucune majorité pour l'une quelconque des sanctions susceptibles d'être envisagées n'était, au regard de l'intention manifestée par les représentants du personnel, susceptible de se dégager ; que le moyen susmentionné doit, dès lors, être écarté ;

5. Considérant, en deuxième lieu, que la circonstance que la lettre en date du

18 mars 2009 par laquelle Mme B...a fait part à son employeur de ce que si elle ne souhaitait plus travailler aux côtés de M. D... à la suite de l'agression dont elle avait été victime le

9 février 2009, elle ne désirait cependant pas que celui-ci soit trop sévèrement sanctionné, n'ait pas figuré au dossier du requérant n'est pas de nature à entacher d'irrégularité la procédure disciplinaire suivie dès lors que le contenu de cette lettre, dont il n'est pas établi qu'il était susceptible d'exercer une influence sur le degré de la sanction a, en tout état de cause, été relaté et débattu lors de la séance du conseil de discipline ;

6. Considérant, en troisième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier et, notamment des témoignages précis et concordants des agents présents au moment des faits litigieux que, le

9 février 2009, M. D..., après avoir été interpellé par l'une de ses collègues de travail, Mme B..., qui était indisposée par le fait qu'il fumait dans la salle de repos, a violemment attrapé celle-ci par le cou, en serrant fort, et l'a insultée ; que l'agression n'a cessé, quelques minutes plus tard, que grâce à l'intervention d'un collègue ; que ces faits présentaient le caractère d'une faute particulièrement grave ; que si la commission de recours du conseil supérieur de la fonction publique de l'Etat avait recommandé, dans son avis du 5 octobre 2010, d'assortir la sanction d'exclusion temporaire de fonctions de deux ans d'un sursis de six mois, avis qui ne s'imposait nullement à La Poste, et si les faits reprochés à M. D..., précédemment bien noté, avaient été commis dans le contexte de difficultés familiales et présentaient un caractère isolé, l'administration n'a pas pris une sanction disproportionnée en décidant, eu égard à leur gravité, d'exclure le requérant de ses fonctions pendant une durée de deux ans ;

que M. D... n'est pas fondé à soutenir qu'il aurait, en réalité, été exclu de ses fonctions pendant 4 ans et six mois dès lors que les précédentes révocations en date des 21 septembre 2009 et 13 janvier 2011 ont été retirées par La Poste et que, par un arrêté en date du 29 février 2012, M. D... a été réintégré juridiquement dans ses fonctions avec reconstitution de sa carrière à compter du 30 septembre 2009 ;

7. Considérant, en dernier lieu, que le moyen tiré de ce que la suspension dont M. D... a fait l'objet le 30 août 2011 était illégale est sans incidence sur la légalité de la sanction infligée le 6 mars 2012 à l'intéressé ;

8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté ses conclusions aux fins d'annulation de la décision du 6 mars 2012 ;

Sur les conclusions tendant au bénéfice des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation " ;

10. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées par M. D... sur le fondement des dispositions précitées ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. D... le paiement d'une somme de 2 000 € qui sera versée à La Poste en application des mêmes dispositions ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.

Article 2 : M. D... versera à La Poste la somme de 2 000 € (deux mille euros) en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à La Poste et à M. G...D....

Délibéré après l'audience du 11 février 2014, à laquelle siégeaient :

- M. Gonzales, président de chambre,

- M. Renouf, président assesseur,

- Mme Vincent-Dominguez, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 11 mars 2014.

Le rapporteur,

A. VINCENT-DOMINGUEZLe président,

S. GONZALESLe greffier,

C. LAUDIGEOISLa République mande et ordonne au ministre de l'économie et des finances en ce qui le concerne et à tous les huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier,

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N° 12MA038173


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 8ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12MA03817
Date de la décision : 11/03/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-09-03-01 Fonctionnaires et agents publics. Discipline. Motifs. Faits de nature à justifier une sanction.


Composition du Tribunal
Président : M. GONZALES
Rapporteur ?: Mme Aurélia VINCENT-DOMINGUEZ
Rapporteur public ?: Mme HOGEDEZ
Avocat(s) : ACHILLI

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2014-03-11;12ma03817 ?
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