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10/02/2014 | FRANCE | N°11MA01391

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 6ème chambre - formation à 3, 10 février 2014, 11MA01391


Vu la requête, enregistrée le 8 avril 2011 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille, sous le n° 11MA01391, présentée pour le groupement Léon Grosse - Cari, dont le siège est rue de l'Avenir BP 605 à Aix-les-Bains (73100), par Me L...et Me A...de la CMS Bureau Francis Lefebvre ;

Le groupement Léon Grosse - Cari demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0601927 du 1er février 2011 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat, ministre de l'intérieur, à lui payer la somme de 2 300 00

8,16 euros HT, augmentée de la TVA, et assortie des intérêts moratoires à co...

Vu la requête, enregistrée le 8 avril 2011 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille, sous le n° 11MA01391, présentée pour le groupement Léon Grosse - Cari, dont le siège est rue de l'Avenir BP 605 à Aix-les-Bains (73100), par Me L...et Me A...de la CMS Bureau Francis Lefebvre ;

Le groupement Léon Grosse - Cari demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0601927 du 1er février 2011 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat, ministre de l'intérieur, à lui payer la somme de 2 300 008,16 euros HT, augmentée de la TVA, et assortie des intérêts moratoires à compter du 15 septembre 2003 et d'une majoration supplémentaire de 2 % sur le montant de l'ensemble des intérêts moratoires par mois de retard à compter de la même date, en réparation du préjudice subi dans le cadre de l'exécution du lot n° 1 du marché portant sur la construction d'un double cantonnement destiné aux compagnies républicaines de sécurité et au commissariat à Nice dans le quartier de l'Ariane ;

2°) de faire droit à sa demande de première instance ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les entiers dépens ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code des marchés publics ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 janvier 2014 :

- le rapport de Mme Carotenuto, rapporteur,

- les conclusions de Mme Felmy, rapporteur public,

- et les observations de Me A...représentant le groupement Léon Grosse - Cari ;

Après avoir pris connaissance de la note en délibéré enregistrée le 14 janvier 2014 pour le groupement Léon Grosse - Cari ;

1. Considérant que, par un marché conclu le 23 janvier 2001, le ministre de l'intérieur a confié au groupement conjoint d'entreprises Léon Grosse - Nicoletti le lot n° 1 d'un marché portant sur la construction d'un double cantonnement destiné aux compagnies républicaines de sécurité et au commissariat, à Nice dans le quartier de l'Ariane, pour un montant initial de 6 966 832,97 euros HT ; que le groupement d'entreprises soutient que, dès le démarrage des travaux, des actes de violence commis par une partie de la population opposée au projet de construction du cantonnement destiné aux compagnies républicaines de sécurité et au commissariat de police ont affecté le déroulement du chantier ; que l'exécution du marché a été marquée par un grave climat d'insécurité nécessitant l'intervention des forces de l'ordre et un renforcement des mesures de surveillance ; qu'eu égard à ces conditions de réalisation des travaux, le groupement Léon Grosse - Cari (ex Nicoletti) affirme avoir subi un important préjudice et a saisi le tribunal administratif de Marseille d'une demande tendant à la condamnation du ministre de l'intérieur à lui payer, dans le dernier état de ses écritures, la somme de 2 147 559,14 euros HT en réparation de ce préjudice ; que par le jugement attaqué du 1er février 2011, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant que les premiers juges, qui ont considéré que le décompte général modificatif signé le 20 juin 2005 par le groupement appelant correspondait à la décision du maître de l'ouvrage répondant à la contestation par le groupement du décompte général du marché au sens des stipulations de l'article 50-23 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux et non à une proposition intermédiaire, ont indiqué les motifs pour lesquels la requête du groupement Léon Grosse - Cari devait être rejetée pour tardiveté ; qu'ainsi, le jugement attaqué est suffisamment motivé ;

Sur la procédure de règlement des différends :

3. Considérant qu'aux termes du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux, lequel constitue une pièce contractuelle conformément aux stipulations de l'article 2 du cahier des clauses administratives particulières du marché conclu entre le ministre de l'intérieur et le groupement Léon Grosse - Nicoletti : " (...) 13.42. Le décompte général, signé par la personne responsable du marché, doit être notifié à l'entrepreneur par ordre de service avant la plus tardive des deux dates ci-après : - quarante-cinq jours après la date de remise du projet de décompte final ; - trente jours après la publication de l'index de référence permettant la révision du solde. (...) 13.44. L'entrepreneur doit, dans un délai compté à partir de la notification du décompte général, le renvoyer au maître d'oeuvre, revêtu de sa signature, sans ou avec réserves, ou faire connaître les raisons pour lesquelles il refuse de le signer. Ce délai est de trente jours, si le marché a un délai d'exécution inférieur ou égal à six mois. Il est de quarante-cinq jours, dans le cas où le délai contractuel d'exécution du marché est supérieur à six mois. (...) Si la signature du décompte général est refusée ou donnée avec réserves, les motifs de ce refus ou de ces réserves doivent être exposés par l'entrepreneur dans un mémoire de réclamation qui précise le montant des sommes dont il revendique le paiement et qui fournit les justifications nécessaires en reprenant sous peine de forclusion, les réclamations déjà formulées antérieurement et qui n'ont pas fait l'objet d'un règlement définitif ; ce mémoire doit être remis au maître d'oeuvre dans le délai indiqué au premier alinéa du présent article. Le règlement du différend intervient alors suivant les modalités indiquées à l'article 50. (...) 50.23. La décision à prendre sur les différends prévus aux 21 et 22 du présent article appartient au maître de l'ouvrage. / Si l'entrepreneur ne donne pas son accord à la décision ainsi prise, les modalités fixées par cette décision sont appliquées à titre de règlement provisoire du différend, le règlement définitif relevant des procédures décrites ci-après. (...) 50.32. Si, dans le délai de six mois à partir de la notification à l'entrepreneur de la décision prise conformément au 23 du présent article sur les réclamations auxquelles a donné lieu le décompte général du marché, l'entrepreneur n'a pas porté ses réclamations devant le tribunal administratif compétent, il est considéré comme ayant accepté ladite décision et toute réclamation est irrecevable. (...) " ;

4. Considérant qu'il résulte de l'instruction que le groupement Léon Grosse - Cari a renvoyé, le 1er février 2005, le décompte général signé avec réserves accompagné d'un mémoire en réclamation au maître de l'ouvrage ; que ce dernier a répondu à ce mémoire sous la forme d'un " décompte général définitif modificatif ", qui a été reçu le 20 mai 2005 et signé le 20 juin 2005 par le groupement appelant ;

5. Considérant d'une part, que ce " décompte général définitif modificatif " a été signé par M. G...B..., ingénieur des travaux divisionnaire, chef du bureau des affaires immobilières ; que par un arrêté du 5 janvier 2005, publié au recueil des actes administratifs de la préfecture n° 2005-13 du 7 janvier 2005, M. I...E..., préfet de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur, préfet de la zone de défense sud, préfet des Bouches-du-Rhône, a délégué sa signature à M. D...K..., préfet délégué pour la sécurité et la défense ; que selon cet arrêté : " Article 1er : En ce qui concerne la zone de défense sud, délégation est donnée à M. D... K...(...) à l'effet de signer (...) tous documents à l'exclusion des instructions générales et des décisions à caractère réglementaire ; (...) Article 8 : En ce qui concerne le secrétariat général pour l'administration de la police (SGAP), délégation de signature est donnée à M. D...K...à l'effet de signer les actes et décisions dans les matières énumérées ci-après : (...) gestion administrative et financière, du fonctionnement, du matériel et des locaux de la police nationale. (...) " ; que, par ailleurs, l'article 10 du même arrêté habilite M. C...H..., directeur de la logistique, en cas d'absence ou d'empêchement simultané de M. D...K...et M. F...J...à signer " les documents établis par leur direction ou service, à l'exception des arrêtés ou marchés " ; qu'enfin, en cas d'absence ou d'empêchement de M. C...H..., l'article 13 du même arrêté consent une délégation de signature à M. G...B... ; que contrairement à ce que soutient le groupement appelant, le marché en litige, portant sur la construction d'un double cantonnement destiné aux compagnies républicaines de sécurité et au commissariat à Nice, est bien relatif à la gestion administrative et financière des locaux de la police nationale et s'inscrit donc dans une des matières énumérées à l'article 8 dudit arrêté ; que par ailleurs, il ne ressort pas des pièces du dossier que M.K..., M. J...et M. H...n'aient pas été absents ou empêchés ; qu'enfin, si la délégation de signature est consentie pour les documents " à l'exception des arrêtés ou marchés ", une telle disposition doit être regardée comme concernant la signature des marchés et non les actes relatifs à leur exécution ; qu'ainsi, le signataire du décompte général définitif modificatif, M.B..., était compétent au sens de l'article 13.42 du cahier des clauses administratives générales ; que, par voie de conséquence, le moyen tiré de ce que la notification du décompte n'aurait pas été de nature à faire courir le délai de réclamation prévu à l'article 13.44 précité doit être écarté ;

6. Considérant d'autre part, qu'en notifiant ce décompte général modificatif, le maître de l'ouvrage a entendu faire savoir au groupement qu'en réponse à son mémoire de réclamation, il n'était pas donné une suite favorable à la demande d'indemnisation au titre des préjudices subis en raison du climat d'insécurité et des perturbations des conditions d'exécution du marché ; que le maître de l'ouvrage a modifié le décompte définitif en faisant droit partiellement à certains chefs de réclamation et en rejetant le surplus et a, ainsi, pris définitivement parti sur la réclamation du groupement ; qu'ainsi, le décompte général modificatif constitue une décision de rejet expresse de cette réclamation et n'a pas le caractère d'une proposition intermédiaire ; que par suite, ledit décompte constitue la décision du maître de l'ouvrage répondant à la contestation par le groupement Léon Grosse - Cari du décompte général du marché au sens des stipulations de l'article 50-23 du cahier des clauses administratives générales ; que si le groupement a été informé, par une lettre notifiée le 16 juin 2005, qu'" une réunion de mise au point sur les termes financiers " du contrat était organisée le 27 juin 2005, aucune précision n'est donnée quant à la tenue de cette réunion et ses suites ; que ce courrier ne pouvait donc être interprété comme le renoncement du maître de l'ouvrage au caractère définitif du rejet de la réclamation notifié aux termes du " décompte général modificatif " ; que la notification du décompte général modificatif a donc fait courir à l'encontre du groupement appelant le délai de six mois dont il disposait en vertu des stipulations précitées de l'article 50-32 dudit cahier pour le contester, devant le tribunal administratif ; que ce délai de six mois a commencé à courir à la date de réception par le groupement du décompte général modificatif, soit le 20 mai 2005 ; que si le groupement appelant a contesté ce décompte général modificatif et a adressé au maître de l'ouvrage un autre mémoire en réclamation daté du 20 juin 2005, ce nouveau mémoire n'a pas eu pour effet de suspendre ou d'interrompre le délai de six mois ; que le groupement intéressé n'a saisi le tribunal administratif que le 20 mars 2006, soit après l'expiration dudit délai ; que sa demande était donc tardive ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre de l'intérieur, que le groupement Léon Grosse - Cari n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande pour tardiveté ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation " ;

9. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que le groupement Léon Grosse - Cari demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête du groupement Léon Grosse - Cari est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié au groupement Léon Grosse - Cari et au ministre de l'intérieur.

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N° 11MA01391


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 11MA01391
Date de la décision : 10/02/2014
Type d'affaire : Administrative

Analyses

39-05 Marchés et contrats administratifs. Exécution financière du contrat.


Composition du Tribunal
Président : M. MARCOVICI
Rapporteur ?: Mme Sylvie CAROTENUTO
Rapporteur public ?: Mme FELMY
Avocat(s) : CMS BUREAU FRANCIS LEFEBVRE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2014-02-10;11ma01391 ?
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