Vu la requête, enregistrée par télécopie le 20 octobre 2011 et régularisée par courrier le 24 octobre 2011, présentée pour Mme C...A..., élisant domicile..., par MeB... ;
Mme A...demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1100831 en date du 19 septembre 2011 par lequel le tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions portant obligation de quitter le territoire français, fixation du pays de renvoi et interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an contenues dans l'arrêté du préfet de la Haute-Corse du 15 septembre 2011, ainsi que de l'arrêté du 15 septembre 2011 ordonnant son placement en rétention administrative ;
2°) d'annuler les décisions précitées ;
3°) de condamner l'Etat à verser à son conseil une somme de 2 000 euros par application des articles 37, alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative, après renonciation par celui-ci à la part contributive au titre de l'aide juridictionnelle ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;
Vu la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 17 décembre 2013, le rapport de M. Emmanuelli, rapporteur ;
1. Considérant que MmeA..., de nationalité marocaine, est entrée en France, selon ses déclarations, au mois d'octobre 2010 munie d'un visa Schengen délivré par les autorités consulaires italiennes ; qu'elle a été placée en garde à vue le 15 septembre 2011 dans le cadre d'une procédure ouverte pour violence volontaire avec arme de 6ème catégorie sur son compagnon ; que, par arrêté du 15 septembre 2011, le préfet de la Haute-Corse lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai de départ volontaire, a fixé le Maroc comme pays de renvoi et a prononcé une interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée d'un an ; que, par décision du même jour, le préfet l'a placée en rétention administrative pour une durée de cinq jours ; que Mme A...relève appel du jugement en date du 19 septembre 2011 par lequel le tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du 15 septembre 2011 précitées ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Considérant que Mme A...a demandé au tribunal d'ordonner la production par le préfet de la Haute-Corse de son dossier et reproche aux premiers juges d'avoir omis de statuer sur cette demande ; qu'il est constant, toutefois, que le tribunal administratif de Bastia a souligné dans son jugement que " le moyen tiré de ce que les droits de la défense ont été méconnus faute pour l'administration d'avoir communiqué le dossier de Mme A...n'est pas assorti des précisions suffisantes permettant d'en apprécier le bien-fondé " ; qu'au demeurant, aucun dossier afférent à Mme A... n'a été établi par la préfecture de la Haute-Corse, l'intéressée n'ayant jamais déposé de demande de titre de séjour ; qu'il est constant que les seuls documents en possession de l'administration se composent des mesures de police prises à l'encontre de Mme A...et qui lui ont été régulièrement notifiées ; que, par suite, la requérante n'est pas fondée à soutenir que les droits de la défense et le principe du contradictoire n'ont pas été respectés, au seul motif que les premiers juges n'ont pas enjoint au préfet de la Haute-Corse de produire son dossier ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
En ce qui concerne les moyens communs aux décisions attaquées :
3. Considérant, en premier lieu, que les arrêtés attaqués, qui visent les articles du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dont il est fait application, ainsi, notamment, que la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, précisent les circonstances de fait portées à la connaissance de l'administration, et notamment le placement en garde à vue dans les locaux du commissariat de Bastia, comportent l'énoncé des motifs de droit et de fait justifiant, selon le préfet, que Mme A...soit obligée de quitter le territoire français sans délai à destination du Maroc, qu'elle fasse l'objet d'une interdiction de retour en France d'un an et qu'elle soit placée en rétention administrative ; que, par suite, la requérante n'est pas fondée à soutenir que le préfet n'aurait pas explicité les raisons l'ayant conduit à exiger son départ immédiat et l'interdiction de son retour en France ;
4. Considérant, en second lieu, que le moyen de Mme A...relatif à la " déloyauté de la préfecture " retient, en fait, des éléments relatifs à la procédure judiciaire qui ne relèvent pas du juge administratif ;
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français sans délai :
5. Considérant que Mme A...soutient que l'obligation de quitter le territoire français enfreint les dispositions de l'article L. 313-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et celles de l'instruction ministérielle n° NOR ICL1124524C du 9 septembre 2011 relatives au droit de séjour des victimes de violences conjugales ainsi que des avis de la Commission Nationale de Déontologie de la Sécurité (CNDS) ;
6. Considérant, toutefois, que la requérante, qui n'a pas la qualité de conjointe de ressortissant français et qui n'a déposé aucune demande d'admission au séjour, ne peut se prévaloir des dispositions de l'article L. 313-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui concerne le renouvellement d'un titre de séjour attribué au conjoint d'un ressortissant français ; qu'elle ne saurait, en outre, utilement se prévaloir des indications de la circulaire ministérielle du 9 septembre 2011 et des avis de la CNDS qui sont dépourvus de valeur réglementaire ;
7. Considérant, par contre, que MmeA..., célibataire et sans charge de famille, qui n'a jamais sollicité la délivrance d'un titre de séjour et qui s'est maintenue en France en situation irrégulière après l'expiration, le 26 mars 2011, du visa Schengen D délivré par les autorités italiennes le 27 septembre 2010, entrait dans le champ d'application des dispositions du c) du 3° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui prévoient que l'étranger peut être obligé de quitter sans délai le territoire français s'il existe un risque qu'il se soustraie à cette obligation, risque regardé comme établi, sauf circonstances particulières, si l'étranger s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après l'expiration de son titre de séjour, de son récépissé de demande de carte de séjour ou de son autorisation provisoire de séjour, sans en avoir demandé le renouvellement ;
En ce qui concerne le moyen relatif à la dénaturation de la directive dite " retour " :
8. Considérant qu'aux termes de l'article 7.4. de la directive du 16 décembre 2008 susvisée : " S'il existe un risque de fuite, ou si une demande de séjour régulier a été rejetée comme étant manifestement non fondée ou frauduleuse, ou si la personne concernée constitue un danger pour l'ordre public, la sécurité publique ou la sécurité nationale, les États membres peuvent s'abstenir d'accorder un délai de départ volontaire ou peuvent accorder un délai inférieur à sept jours. " ; qu'aux termes de l'article 3.7 de la même directive : " on entend par (...) "risque de fuite" : le fait qu'il existe des raisons, dans un cas particulier et sur la base de critères objectifs définis par la loi, de penser qu'un ressortissant d'un pays tiers faisant l'objet de procédures de retour peut prendre la fuite " ;
9. Considérant que la transposition en droit interne des directives communautaires, qui est une obligation résultant du Traité instituant la Communauté européenne, revêt, en outre, en vertu de l'article 88-1 de la Constitution, le caractère d'une obligation constitutionnelle ; que, pour chacun de ces deux motifs, il appartient au juge national, juge de droit commun de l'application du droit communautaire, de garantir l'effectivité des droits que toute personne tient de cette obligation à l'égard des autorités publiques ; que tout justiciable peut, en conséquence, demander l'annulation des dispositions règlementaires qui seraient contraires aux objectifs définis par les directives et, pour contester une décision administrative, faire valoir, par voie d'action ou par voie d'exception, qu'après l'expiration des délais impartis, les autorités nationales ne peuvent ni laisser subsister des dispositions réglementaires, ni continuer de faire application des règles, écrites ou non écrites, de droit national qui ne seraient pas compatibles avec les objectifs définis par les directives ; qu'en outre, tout justiciable peut se prévaloir, à l'appui d'un recours dirigé contre un acte administratif non réglementaire, des dispositions précises et inconditionnelles d'une directive, lorsque l'Etat n'a pas pris, dans les délais impartis par celle-ci, les mesures de transposition nécessaires ;
10. Considérant qu'en estimant, dans les cas énoncés par le paragraphe II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qu'il existe, sauf circonstance particulière, des risques que l'étranger se soustraie à l'obligation qui lui est faite de quitter le territoire, le législateur a retenu des critères objectifs qui sont compatibles avec les dispositions précitées de la directive du 16 décembre 2008 ainsi qu'avec l'objectif de proportionnalité qu'elle énonce ; que le moyen tiré de ce que les dispositions nationales précitées seraient contraires à l'article 7.4. de la directive doit donc être écarté ;
Sur la décision de placement en rétention administrative :
11. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit que le moyen tiré de ce que la décision de placement en rétention administrative devrait être annulée en conséquence de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire doit être écarté ;
12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme A...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande ; que ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent, par voie de conséquence, être rejetées ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête de Mme A...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...A...et au ministre de l'intérieur.
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N° 11MA03925