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27/12/2013 | FRANCE | N°11MA03697

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 8ème chambre - formation à 3, 27 décembre 2013, 11MA03697


Vu la requête, enregistrée le 20 septembre 2011, présentée pour M. A... D... demeurant au..., par Me E... ; M. D...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0908231 rendu le 13 juillet 2011 par le tribunal administratif de Marseille qui a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune de Rognac à lui verser la somme de 66 332,52 euros au titre des rappels de salaire pour la période du 31 juillet 2003 au 30 juin 2009 ;

2°) de condamner la commune de Rognac à le réintégrer sans délai, sous peine d'astreinte de 150 euros par jour de retard à compte

r de la notification de l'arrêt à intervenir ;

3°) de condamner la commune ...

Vu la requête, enregistrée le 20 septembre 2011, présentée pour M. A... D... demeurant au..., par Me E... ; M. D...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0908231 rendu le 13 juillet 2011 par le tribunal administratif de Marseille qui a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune de Rognac à lui verser la somme de 66 332,52 euros au titre des rappels de salaire pour la période du 31 juillet 2003 au 30 juin 2009 ;

2°) de condamner la commune de Rognac à le réintégrer sans délai, sous peine d'astreinte de 150 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

3°) de condamner la commune de Rognac à lui verser la somme de 10 314 euros au titre des traitements non versés, la somme de 1 560 euros au titre de la reconstitution de carrière, la somme de 15 000 euros de dommages-intérêts au titre des préjudices moral et troubles dans les conditions d'existence ;

4°) de condamner la commune de Rognac au versement de la somme de 2 000 euros par application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu le jugement attaqué ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 84-5387 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;

Vu la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 26 novembre 2013 :

- le rapport de M. Angéniol, rapporteur,

- les conclusions de Mme Hogedez, rapporteur public,

- les observations de Me E...pour M.D...,

- et les observations de MeC..., substituant MeB..., pour la commune de Rognac ;

1. Considérant que M.D..., agent contractuel de la commune de Rognac, a fait l'objet, par arrêté du 11 juillet 2003, d'une mesure de licenciement prenant effet le 31 juillet 2003 ; que par arrêt du 18 mars 2008, la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté l'appel interjeté contre le jugement en date du 25 octobre 2006, par lequel le tribunal administratif de Marseille a annulé l'arrêté du 11 juillet 2003 et enjoint au maire de Rognac de procéder à la réintégration de l'intéressé dans les services municipaux jusqu'à la date d'échéance de son contrat ; que par un arrêté en date du 24 novembre 2009, le maire de la commune de Rognac a réintégré M. D...dans ses fonctions d'ouvrier d'entretien de la voie publique non titulaire, à temps non complet à compter du 31 juillet 2003 jusqu'au 14 avril 2006 ; que par jugement du 13 juillet 2011, le tribunal administratif de Marseille a rejeté la demande de M. D...tendant à la condamnation de la commune à lui verser la somme de 66 332,52 euros au titre des rappels de salaire dont il estime avoir été illégalement privé depuis la date de son licenciement, le 31 juillet 2003 ; que, M. D...interjette appel de ce dernier jugement et demande à la Cour de condamner la commune de Rognac à le réintégrer sans délai, sous peine d'astreinte de 150 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, de condamner la commune de Rognac à lui verser la somme de 10 314 euros au titre des traitements non versés, la somme de 1 560 euros au titre de la reconstitution de sa carrière, la somme de 15 000 euros de dommages-intérêts au titre d'un préjudice moral et de troubles dans ses conditions d'existence ;

Sur la recevabilité des conclusions d'appel tendant à la réintégration de l'appelant :

2. Considérant que les conclusions de M. D...tendant à ce que la commune de Rognac le réintègre sans délai, sous peine d'astreinte de 150 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, qui n'ont pas été soumises aux premiers juges, ont le caractère de conclusions nouvelles en cause d'appel et sont, par suite, irrecevables ;

Sur les demandes indemnitaires de l'appelant :

3. Considérant que la commune de Rognac fait valoir que, faute d'avoir été contesté dans le délai de recours contentieux, l'arrêté du 24 novembre 2009, procédant à la réintégration de M.D..., est devenu définitif ; que, toutefois, le caractère définitif de cet arrêté ne fait pas obstacle à l'action en responsabilité de l'appelant, qui n'est pas exclusivement fondée sur l'illégalité de cette décision à objet purement pécuniaire devenue définitive, et a par ailleurs été introduite avant que ne soit pris cet arrêté ; que, par conséquent, les demandes indemnitaires de M. D...sont recevables ;

En ce qui concerne les demandes indemnitaires relatives à l'absence de traitements versés pour la période du 31 juillet 2003 au 14 avril 2006 :

4. Considérant que M. D...se fonde sur les termes d'un contrat passé entre son employeur et la mutuelle nationale territoriale pour soutenir, que c'est à tort que les premiers juges ont estimé qu'il ne pouvait prétendre qu'à la moitié de son traitement du 14 avril 2004 au 14 avril 2006, en application des dispositions de l'article 8 du décret du 15 février 1988 susvisé, qui prévoit que l'agent en congé de grave maladie voit son traitement réduit de moitié pendant les vingt-quatre derniers mois de son congé de trois ans ; que, toutefois, si ledit contrat prévoyait le maintien d'un plein traitement pendant la totalité de la durée du congé de grave maladie d'un agent, les droits que M. D...peut faire valoir au titre du contrat passé avec cette mutuelle et auquel il a adhéré, relèvent d'un contentieux distinct ; que, par suite, les demandes indemnitaires de l'appelant présentées sur ce fondement, ne peuvent qu'être rejetées ;

En ce qui concerne les demandes indemnitaires relatives à l'absence de traitements versés pour la période postérieure au 14 avril 2006 :

5. Considérant, qu'il ressort des pièces du dossier que l'arrêté du 4 juin 1981 par lequel le maire de la commune de Rognac a décidé de recruter M. D...en qualité d'ouvrier d'entretien de voie publique, ne fixait aucun terme à la durée de l'embauche de l'intéressé ; que, la commune soutient que cet engagement est entaché d'irrégularité, en ce qu'il a permis l'embauche par voie contractuelle de l'appelant sur un emploi permanent d'ouvrier d'entretien de la commune sans condition de durée, en méconnaissance des dispositions de l'article 3 de la loi du 26 janvier 1984 ; qu'il appartenait à l'administration, qui invoque l'irrégularité de ce contrat et dans la limite des droits résultants du contrat initial, de proposer à l'agent un emploi de niveau équivalent, ou, à défaut d'un tel emploi et si l'intéressé le demandait, tout autre emploi, afin de régulariser sa situation ; qu'à défaut d'une telle possibilité de régularisation, l'administration était tenue de licencier M. D...; que lorsque, par son arrêté en date du 24 novembre 2009, le maire de la commune de Rognac a, à la suite de l'annulation de la décision ayant procédé à son licenciement pour abandon de poste, réintégré M. D...dans ses fonctions d'ouvrier d'entretien de la voie publique non titulaire, à temps non complet à compter du 31 juillet 2003 et jusqu'au 14 avril 2006 seulement, il doit être regardé, non comme ayant seulement satisfait à l'injonction de réintégration de l'appelant, mais comme ayant également procédé à son licenciement à compter du 14 avril 2006 ; que, cependant, un tel licenciement à titre rétroactif ne pouvait se fonder sur la circonstance qu'à partir du 14 avril 2006, l'appelant percevait une rente d'invalidité, alors que l'état de santé de M. D..., atteint d'une invalidité de catégorie 1, ne faisait pas obstacle à l'exercice d'une activité salariée, et qu'aucune recherche d'emploi compatible avec l'état de santé de l'appelant n'a été effectuée ; que, c'est donc au plus tôt à compter de la date d'édiction de l'arrêté du 24 novembre 2009, que M. D...peut être regardé comme ayant été licencié ; que, l'appelant est donc fondé à obtenir la réparation du préjudice que lui a causé l'absence de versement de ses traitements au titre de son contrat de 15 avril 2006 au 24 novembre 2009, date à laquelle il doit être considéré comme ayant été licencié ; qu'il résulte de l'instruction que, pendant 43 mois il n'a pas perçu son salaire d'un montant de 1 275 euros net ; qu'ainsi l'appelant, en l'absence de tout autre revenu de remplacement et en application de son contrat, était en droit de percevoir la somme de 54 825 euros dont seront déduits les 21 930 euros (43 mois x 510 euros) déjà perçus au titre de sa rente d'invalidité au cours de cette même période ; que, par conséquent, M. D...est fondé à obtenir la réparation de ce chef de préjudice dont le montant ainsi calculé est de 32 895 euros ;

En ce qui concerne le préjudice né de l'absence d'évolution de carrière depuis la date du licenciement de l'appelant :

6. Considérant que M. D...soutient qu'il est droit d'être indemnisé du préjudice né de l'absence d'évolution de sa carrière, du fait de la non-application de son contrat ; que, cependant, d'une part, les agents contractuels ne peuvent prétendre, sauf clauses particulières de leur contrat, au principe d'une évolution de carrière qui n'est applicable qu'aux seuls fonctionnaires et, d'autre part, les indices de revalorisation de la sécurité sociale dont se prévaut l'appelant pour fonder sa demande indemnitaire au titre de l'évolution de sa carrière, sont sans rapport avec les évolutions indiciaires successives dont son contrat avait fait l'objet ; que, par suite, les conclusions indemnitaires de l'appelant tendant à la condamnation de la commune de Rognac au versement de la somme de 1 560 euros, au titre de la reconstitution de sa carrière, ne peuvent qu'être rejetées ;

En ce qui concerne les troubles dans les conditions d'existence et le préjudice moral :

7. Considérant qu'il n'est pas utilement contesté que l'absence de versement de traitement à M. D...pendant une période de plusieurs années, a nécessairement entraîné des troubles dans les conditions d'existence ; qu'il sera fait une juste appréciation de ces troubles en en fixant le montant de la réparation à la somme de 8 000 euros ; que, par ailleurs, l'attitude fautive de la commune qui a tardé à réintégrer l'appelant à l'issue de l'annulation de la décision procédant à son licenciement pour abandon de poste a également causé à l'appelant un préjudice moral dont le montant sera fixé à la somme de 8 000 euros ;

8. Considérant qu'il résulte de ce tout ce qui précède, que M. D...est fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont rejeté sa demande indemnitaire ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : "Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation" ;

10. Considérant qu'en application des dispositions susmentionnées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, il y a lieu de mettre à la charge de la commune de Rognac, la somme de 2 000 euros ;

D E C I D E :

Article 1er : La commune de Rognac versera à M. D...la somme de 32 895 euros (trente deux mille huit cent quatre vingt quinze euros) au titre de ses salaires non perçus depuis le 14 avril 2006 jusqu'au 24 novembre 2009, ainsi que la somme de 16 000 euros (seize mille euros) au titre des troubles subis dans ses conditions d'existence et de son préjudice moral, sommes dont seront déduits les 38 895 euros (trente huit mille huit cent quatre vingt quinze euros) d'indemnité prévisionnelle déjà perçus par M.D....

Article 2 : La commune de Rognac versera la somme de 2 000 euros (deux mille euros) à M. D... en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3: Le surplus de conclusions de la demande de M. D...est rejeté.

Article 4 : Les conclusions présentées par la commune de Rognac au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le jugement du tribunal administratif de Marseille rendu le 13 juillet 2011 est réformé, en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...D...et à la commune de Rognac.

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N° 11MA036972


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 8ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 11MA03697
Date de la décision : 27/12/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-12-03-01 Fonctionnaires et agents publics. Agents contractuels et temporaires. Fin du contrat. Licenciement.


Composition du Tribunal
Président : M. GONZALES
Rapporteur ?: M. Patrice ANGENIOL
Rapporteur public ?: Mme HOGEDEZ
Avocat(s) : MILHE-COLOMBAIN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2013-12-27;11ma03697 ?
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