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23/12/2013 | FRANCE | N°11MA03001

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre - formation à 3, 23 décembre 2013, 11MA03001


Vu la requête, enregistrée le 28 juillet 2011, présentée par le préfet des Bouches-du-Rhône, qui demande à la Cour :

1°) d'annuler dans son entier le jugement n° 1101935 du 5 juillet 2011 par lequel le tribunal administratif de Marseille a annulé ses décisions du 17 février 2011 portant, à l'encontre de M.B..., obligation de quitter le territoire français et fixation du pays à destination duquel il sera renvoyé à défaut d'exécution volontaire dans le délai d'un mois ;

2°) de rejeter les demandes présentées par M. B...devant le tribunal administratif de Mars

eille ;

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Vu la requête, enregistrée le 28 juillet 2011, présentée par le préfet des Bouches-du-Rhône, qui demande à la Cour :

1°) d'annuler dans son entier le jugement n° 1101935 du 5 juillet 2011 par lequel le tribunal administratif de Marseille a annulé ses décisions du 17 février 2011 portant, à l'encontre de M.B..., obligation de quitter le territoire français et fixation du pays à destination duquel il sera renvoyé à défaut d'exécution volontaire dans le délai d'un mois ;

2°) de rejeter les demandes présentées par M. B...devant le tribunal administratif de Marseille ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-marocain en matière de séjour et d'emploi du 9 octobre 1987 ;

Vu la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les États membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979, relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000, relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu, au cours de l'audience publique du 3 décembre 2013, le rapport de M. Chanon, premier conseiller ;

1. Considérant que, par arrêté du 17 février 2011, le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé l'admission au séjour de M.B..., de nationalité marocaine, et assorti cette décision d'une obligation de quitter le territoire français fixant le pays à destination duquel l'intéressé sera renvoyé à défaut d'exécution volontaire dans le délai d'un mois ; que le préfet des Bouches-du-Rhône doit être regardé comme relevant appel du jugement du tribunal administratif de Marseille en date du 5 juillet 2011 en tant que ce jugement a annulé, par l'article 1er, l'obligation de quitter le territoire français et la décision fixant le pays d'éloignement, lui a enjoint, par l'article 2, de procéder au réexamen de la situation de M. B...et a mis à sa charge, par l'article 3, une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; qu'eu égard à l'ensemble de ses écritures, M. B...doit être entendu comme sollicitant, par la voie de l'appel incident, l'annulation du jugement en tant que celui-ci a rejeté ses conclusions dirigées contre le refus de séjour ;

Sur la légalité de l'arrêté préfectoral :

2. Considérant que l'article L. 111-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoit que les dispositions de ce code s'appliquent " sous réserve des conventions internationales " ; que l'article L. 313-14 du même code dispose : " La carte de séjour temporaire mentionnée (...) au 1° de l'article L. 313-10 sur le fondement du troisième alinéa de cet article peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir (...) " ; que l'article L. 313-10 définit les conditions de délivrance de la carte de séjour temporaire autorisant l'exercice d'une activité professionnelle ; qu'aux termes de l'article 3 de l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 : " Les ressortissants marocains désireux d'exercer une activité professionnelle salariée en France, pour une durée d'un an au minimum, et qui ne relèvent pas des dispositions de l'article 1er du présent Accord, reçoivent, après le contrôle médical d'usage et sur présentation d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes, un titre de séjour valable un an renouvelable et portant la mention "salarié" éventuellement assortie de restrictions géographiques ou professionnelles " ; que l'article 9 du même accord stipule que : " Les dispositions du présent accord ne font pas obstacle à l'application de la législation des deux Etats sur le séjour des étrangers sur tous les points non traités par l'Accord (...) " ;

3. Considérant qu'il résulte des termes mêmes de l'arrêté en litige que M. B...a présenté une demande d'admission exceptionnelle au séjour par le travail ; que les conditions dans lesquelles un ressortissant marocain peut être admis à séjourner en France pour y exercer une activité professionnelle salariée sont régies exclusivement par les stipulations précitées de l'accord franco-marocain ; que l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'institue pas une catégorie de titres de séjour distincte mais prévoit des modalités particulières de délivrance des titres de séjour prévus par les dispositions auxquelles il renvoie et, notamment, de la carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " prévue à l'article L. 313-10 du même code ; que, par suite, les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne sont pas applicables aux ressortissants marocains désireux d'exercer en France une activité professionnelle salariée ; qu'en faisant application de ses dispositions pour rejeter la demande de M.B..., le préfet des Bouches-du-Rhône a commis une erreur de droit ;

4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens soulevés sur ce point, que M. B...est fondé à demander l'annulation du jugement attaqué en tant que celui-ci a rejeté ses conclusions dirigées contre le refus de séjour ; que, par suite, le jugement, dans cette mesure, et la décision du préfet des Bouches-du-Rhône en date du 17 février 2011 portant refus de séjour doivent être annulés ;

5. Considérant que l'illégalité du refus de séjour entraîne, par voie de conséquence, celle des mesures portant obligation de quitter le territoire français et fixation du pays d'éloignement ; qu'ainsi, le préfet des Bouches-du-Rhône n'est pas fondé à se plaindre de ce que les premiers juges ont annulé ces décisions ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

6. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution " ; que selon l'article L. 911-2 de ce code : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé " ;

7. Considérant qu'au regard du motif d'annulation retenu, l'exécution du présent arrêt implique seulement que le préfet des Bouches-du-Rhône procède au réexamen de la situation de M. B...; que, dès lors, il y a lieu d'enjoindre au préfet de procéder à ce réexamen dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation " ;

9. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de l'Etat, partie perdante, le versement à M. B... de la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Marseille du 5 juillet 2011 est annulé en tant qu'il a rejeté les conclusions de M. B...dirigées contre le refus de séjour. La décision du préfet des Bouches-du-Rhône en date du 17 février 2011 portant refus de séjour est annulée.

Article 2 : Il est enjoint au préfet des Bouches-du-Rhône de procéder au réexamen de la situation de M. B...dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3: L'Etat versera à M. B...la somme de 2 000 (deux mille) euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La requête du préfet des Bouches-du-Rhône est rejetée.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié M. A... B...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône.

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N° 11MA03001

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 11MA03001
Date de la décision : 23/12/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03-04 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour. Motifs.


Composition du Tribunal
Président : M. BEDIER
Rapporteur ?: M. René CHANON
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : MOULINAS LE GO

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2013-12-23;11ma03001 ?
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