Vu la requête, enregistrée le 30 juillet 2012, présentée pour Mme A...C..., demeurant " ..., par Me D...B... ; Mme C...demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1001039 du 30 mai 2012 par lequel le tribunal administratif de Marseille n'a que partiellement fait droit à sa demande tendant à la condamnation solidaire de la société Sacer Sud Est et de la SMABTP à l'indemniser de ses préjudices personnels tels qu'ils ont été évalués par expertise et à lui verser la somme de 500 euros en remboursement des honoraires payés au médecin recours et limité le montant de son indemnisation à la somme de 2 600 euros au titre de la réparation des différents préjudices subis ;
2°) de faire droit à sa demande ;
3°) de mettre à la charge de la société Sacer Sud Est la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu le jugement attaqué ;
Vu, enregistré le 11 septembre 2012, le mémoire en intervention présenté pour la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône, dont le siège social est sis 56, chemin Joseph Aiguier à Marseille (13297), représentée par son directeur en exercice domicilié... ; elle conclut :
- à la condamnation de la Société Sacer Sud Est à lui verser la somme de 6 374,45 euros en remboursement de ses débours avec intérêts de droit, ainsi qu'au paiement de toute note ultérieure qu'elle pourrait être amenée à régler ;
- à la condamnation de la société Sacer Sud Est à lui verser la somme de 997 euros au titre du 5ème alinéa de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale ;
Vu, enregistré le 25 septembre 2012, le mémoire présenté pour la société Sacer Sud Est, dont le siège social est sis 2, avenue Tony Garnier à Lyon (69007), prise en la personne de son représentant légal, domicilié... ; la société Sacer Sud Est conclut, à titre principal, au rejet de la requête, à titre subsidiaire, à la réduction de moitié du droit à indemnisation de Mme C...en considération de sa faute d'imprudence, à la limitation du montant de l'indemnisation qui pourrait être allouée au titre du déficit fonctionnel temporaire partiel, de la gêne dans les activités de la vie courante, des souffrances endurées et du préjudice esthétique, au rejet de la demande de Mme C...relative à la réparation de son préjudice matériel et à la mise à la charge de Mme C...de la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu le courrier du 18 octobre 2013 dont il résulte que, par application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office tiré de ce que les premiers juges n'ont pas complètement rempli leur office en ne statuant pas sur l'attribution de la charge définitive des frais d'expertise ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la sécurité sociale ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 14 novembre 2013 :
- le rapport de M. Firmin, rapporteur ;
- les conclusions de Mme Chamot, rapporteure publique ;
- et les observations de Me B...pour Mme C...;
1. Considérant que, le 19 juin 2006, alors qu'elle s'apprêtait à traverser le boulevard Chave à Marseille, Mme C...a fait une chute dont elle attribue la cause à la présence, sur l'emplacement du passage protégé pour piétons qu'elle empruntait, d'un goudronnage récent et encore brûlant, réalisé par la société Sacer Sud Est dans le cadre des travaux de réalisation du tramway de Marseille ; qu'elle soutient que cette chute lui a causé plusieurs blessures consistant en une plaie sur l'arcade du nez ayant nécessité des points de suture, des dermabrasions du genou gauche, des arcades droite et gauche, des brûlures de la lèvre inférieure et de l'avant bras droit et une contusion du coude droit ; qu'elle allègue, en outre, avoir perdu une couronne dentaire et que ses lunettes et son téléphone portable ont été cassés et ses vêtements et son sac à main ont été endommagés ; qu'elle relève appel du jugement du 30 mai 2012 par lequel le tribunal administratif de Marseille n'a que partiellement fait droit à sa demande tendant à la condamnation solidaire de la société Sacer Sud Est et de la SMABTP, son assureur, à l'indemniser de ses préjudices personnels tels qu'ils ont été évalués par expertise et à lui verser la somme de 500 euros en remboursement des honoraires payés au médecin recours et limité le montant de son indemnisation à la somme de 2 600 euros au titre de la réparation des différents préjudices subis ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Considérant que le tribunal ne s'est pas prononcé sur la dévolution des frais de l'expertise ordonnée par le juge des référés et a ainsi méconnu la règle, applicable même sans texte, à toute juridiction administrative, qui lui impartit, sauf dans le cas où un incident de procédure y ferait obstacle, d'épuiser son pouvoir juridictionnel ; que, par suite, il y a lieu d'annuler dans cette mesure le jugement attaqué, d'évoquer sur ce point et de statuer sur la charge des frais d'expertise ;
Sur la responsabilité :
3. Considérant qu'en cause d'appel, Mme C...ne recherche plus la responsabilité de la SMABTP, assureur de la société Sacer Sud Est ; qu'au moment de son accident Mme C..., qui traversait le boulevard Chave à Marseille en empruntant un passage protégé pour piéton, avait la qualité d'usager de la voie publique ; que, dès lors, la responsabilité de la société Sacer Sud Est à son égard obéit au régime qui s'applique aux usagers des ouvrages publics et non pas des tiers ou sur un fondement quasi délictuel, comme le soutient à tort la société Sacer Sud Est ;
4. Considérant que l'usager d'une voie publique est fondé à demander réparation du dommage qu'il a subi du fait de l'existence ou du fonctionnement de cet ouvrage ou du fait des travaux publics qui y sont réalisés tant à la collectivité gestionnaire de la voie qu'à l'auteur du dommage ; qu'il doit, pour cela, démontrer d'une part, la réalité de son préjudice et d'autre part, l'existence d'un lien de causalité direct entre les travaux publics et le dommage ; que les personnes ainsi mises en cause ne peuvent dégager leur responsabilité, sauf cas de force majeure ou faute de la victime, qu'en établissant que l'ouvrage était normalement entretenu ;
5. Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment du témoignage et de l'attestation produits par MmeC..., que les premiers juges ont pu prendre en considération alors même qu'ils ne satisferaient pas aux conditions posées par l'article 202 du code de procédure civile, mais qui établissent de façon suffisamment précise les circonstances de l'accident de MmeC..., que celui-ci a été provoqué par la présence, sur le passage protégé pour piétons que celle-ci voulait emprunter pour traverser le boulevard Chave à Marseille, d'une nappe de goudron encore chaud, récemment épandue par la société Sacer Sud Est dans le cadre de l'exécution des travaux du tramway de Marseille ; que la zone où Mme C...a chuté ne présentait aucune signalisation particulière ni barrière de protection susceptibles d'attirer l'attention des usagers sur la présence de cet obstacle ; que, dans ces conditions, c'est à bon droit que les premiers juges ont estimé qu'en n'apportant pas la preuve qui lui incombait de la signalisation adéquate du danger que comportait la portion de chaussée en cause, la société Sacer Sud Est a engagé sa responsabilité à l'égard de Mme C...;
6. Considérant, toutefois, que Mme C...a chuté à 16 heures 30, alors que l'obstacle en cause était parfaitement visible, et dans un secteur qu'elle connaissait bien pour être celui du lieu de son travail ; qu'elle ne pouvait donc ignorer l'existence du chantier de création d'une ligne de tramway et les dangers potentiels qu'il comportait pour les usagers de la voie publique ; que, dans ces circonstances, sa chute est due également à un manque d'attention et de vigilance de sa part, constitutif d'une faute de nature à exonérer pour un quart de sa responsabilité la société Sacer Sud Est ;
Sur les préjudices :
En ce qui concerne MmeC... :
7. Considérant que, contrairement à ce que soutient la requérante, les premiers juges ont fait une juste appréciation de ses différents chefs de préjudice en les évaluant à la somme globale de 5 200 euros, dont 500 euros au titre du montant des honoraires du médecin conseil qui l'a assistée lors des opérations d'expertise, 500 euros au titre de la période d'incapacité temporaire partielle à 30 %, du 19 juin 2006 au 24 septembre 2006, 300 euros au titre des troubles dans les conditions d'existence et du préjudice d'agrément résultant de la diminution des activités ludiques et sportives, 2 400 euros au titre des souffrances évaluées à 3 sur une échelle de 7, et 1 500 euros au titre du préjudice esthétique évalué à 2 sur une échelle de 7 ; que toutefois, compte tenu du partage de responsabilité indiqué au point 6 ci-dessus, c'est la somme globale de 3 900 euros qui doit lui être allouée dès lors que le préjudice matériel allégué n'est justifié par aucune des pièces versées au dossier ;
En ce qui concerne la caisse primaire centrale d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône :
8. Considérant qu'aux termes de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale : " Lorsque, sans entrer dans les cas régis par les dispositions législatives applicables aux accidents du travail, la lésion dont l'assuré social ou son ayant droit est atteint est imputable à un tiers, l'assuré ou ses ayants droit conserve contre l'auteur de l'accident le droit de demander la réparation du préjudice causé, conformément aux règles du droit commun, dans la mesure où ce préjudice n'est pas réparé par application du présent livre./(...) Cependant, si le tiers payeur établit qu'il a effectivement et préalablement versé à la victime une prestation indemnisant de manière incontestable un poste de préjudice personnel, son recours peut s'exercer sur ce poste de préjudice (...) /En contrepartie des frais qu'elle engage pour obtenir le remboursement mentionné au troisième alinéa ci-dessus, la caisse d'assurance maladie à laquelle est affilié l'assuré social victime de l'accident recouvre une indemnité forfaitaire à la charge du tiers responsable et au profit de l'organisme national d'assurance maladie. Le montant de cette indemnité est égal au tiers des sommes dont le remboursement a été obtenu, dans les limites d'un montant maximum de 910 euros et d'un montant minimum de 91 euros. A compter du 1er janvier 2007, les montants mentionnés au présent alinéa sont révisés chaque année, par arrêté des ministres chargés de la sécurité sociale et du budget (...) " ;
9. Considérant que la caisse primaire centrale d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône, laquelle a produit une notification cohérente en ses dates et son contenu avec les conclusions du rapport d'expertise, a exposé une somme de 6 374,45 euros, dont les trois quarts doivent être mis à la charge de la société Sacer Sud Est, soit la somme de 4 780,83 euros ; qu'elle a également droit à se voir allouer la somme de 1 015 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion prévue par l'article L. 376-1 précité du code de la sécurité sociale ;
Sur l'application de l'article R. 761-1 du code de justice administrative :
10. Considérant qu'en vertu de l'article R. 761-1 du code de justice administrative, les dépens comprennent la contribution pour l'aide juridique prévue à l'article 1635 bis Q du code général des impôts, ainsi que les frais d'expertise, d'enquête et de tout autre mesure d'instruction dont les frais ne sont pas à la charge de l'Etat ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre les frais d'expertise à la charge définitive de la société Sacer Sud Est ;
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
11. Considérant que les dispositions de cet article font obstacle à ce que MmeC..., qui n'est pas la partie perdante à l'instance, soit condamnée à verser quelque somme que ce soit au titre des frais d'instance non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner la Société Sacer Sud Est à lui verser la somme de 2 000 euros au titre de ces dispositions ;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nice du 4 novembre 2011 est annulé en tant qu'il a omis de statuer sur les frais de l'expertise.
Article 2 : Les frais de l'expertise diligentée en première instance sont mis à la charge définitive de la société Sacer Sud Est.
Article 3 : La somme que la société Sacer Sud Est a été condamnée à verser à Mme C...au titre de la réparation de ses préjudices est portée à la somme de 3 900 euros.
Article 4 : La somme que la société Sacer Sud Est a été condamnée à verser à la caisse primaire centrale d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône est portée à la somme de 4 780,83 euros en remboursement de ses débours ainsi qu'à la somme de 1 015 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion prévue par l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale.
Article 5 : Le jugement du tribunal administratif de Marseille est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 6 : La société Sacer Sud Est est condamnée à verser à Mme C...la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 7 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
Article 8 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...C..., à la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône et à la société Sacer Sud Est.
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N° 12MA03189