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12/11/2013 | FRANCE | N°12MA00930

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 8ème chambre - formation à 3, 12 novembre 2013, 12MA00930


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour par télécopie le 5 mars 2012

sous le n° 12MA00930, régularisée le 7 mars 2012, présentée par MeC...,

pour Mme A... D..., demeurant... ; MmeD..., de nationalité ukrainienne, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1107159 du 13 février 2012 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté ses demandes tendant :

- à l'annulation de la décision du préfet des Bouches-du-Rhône du 6 octobre 2011 lui refusant l'admission au séjour et de la décision distincte prise par la même autorit

é le même jour l'obligeant à quitter le territoire national ;

- à ce qu'il soit enjoint sous...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour par télécopie le 5 mars 2012

sous le n° 12MA00930, régularisée le 7 mars 2012, présentée par MeC...,

pour Mme A... D..., demeurant... ; MmeD..., de nationalité ukrainienne, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1107159 du 13 février 2012 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté ses demandes tendant :

- à l'annulation de la décision du préfet des Bouches-du-Rhône du 6 octobre 2011 lui refusant l'admission au séjour et de la décision distincte prise par la même autorité le même jour l'obligeant à quitter le territoire national ;

- à ce qu'il soit enjoint sous astreinte à cette autorité administrative de réexaminer sa demande d'admission au séjour en lui délivrant une autorisation de travail ;

- à ce que soit mise à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir les deux décisions susmentionnées en litige ;

3°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône, à titre principal, de lui délivrer le titre de séjour demandé dans un délai de 15 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 150 euros de retard, à titre subsidiaire, d'ordonner à cette autorité administrative de réexaminer sa demande dans le même délai de 15 jours sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu le jugement attaqué ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu l'arrêté du 18 janvier 2008 fixant par région une liste de métiers ouverts aux étrangers non ressortissants d'un pays membre de l'Union Européenne, d'une autre partie à l'Espace Economique Européen ou de la Confédération Suisse ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code du travail ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu le décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 relatif au rapporteur public des juridictions administratives et au déroulement de l'audience devant ces juridictions ;

Vu le décret n° 2011-1950 du 23 décembre 2011 modifiant le code de justice administrative, notamment les dispositions de ses articles 1er à 11 relatives à la dispense de conclusions du rapporteur public et au déroulement de l'audience ;

Le rapporteur public ayant, sur sa proposition, été dispensé de prononcer des conclusions à l'audience par le président de la formation de jugement ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 17 octobre 2013 :

- le rapport de M. Brossier, rapporteur ;

1. Considérant que MmeD..., de nationalité ukrainienne et qui n'est pas de ce fait ressortissante de l'Union européenne, a demandé en septembre 2010 son admission au séjour en qualité de salariée, sur le fondement de l'article L. 313-10 précité ; que le préfet des Bouches-du-Rhône a rejeté cette demande de titre de séjour le 6 octobre 2011, ensemble a pris le même jour une décision portant obligation de quitter le territoire français ;

Sur la légalité externe des décisions attaquées :

2. Considérant, d'une part, qu'il ressort de la lecture même de la décision attaquée, en tant qu'elle porte refus d'admission au séjour, qu'elle vise les textes sur lesquelles elle se fonde, notamment l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et comporte des motifs de fait non stéréotypés, faisant notamment état de l'âge de l'intéressée et de l'absence de délivrance de l'autorisation de travail prévue par l'article L. 5221-2 du code du travail du fait du refus du directeur du travail en date du 19 mai 2011 ; qu'ainsi, en tant qu'elle porte refus d'admission au séjour, la décision attaquée est suffisamment motivée au regard des exigences des articles 1er et 3 de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

3. Considérant, d'autre part, qu'il ressort de la lecture même de la décision attaquée, en tant qu'elle porte obligation de quitter le territoire français, qu'elle vise le texte sur lequel elle se fonde, l'article L. 511-1-I du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'elle est en outre motivée en fait par la motivation en fait de la décision attaquée en tant qu'elle porte refus d'admission au séjour, dont il a été dit qu'elle n'était pas stéréotypée ;

4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'appelante n'est pas fondée à invoquer une insuffisante motivation des décisions attaquées ;

Sur la légalité interne des décisions attaquées :

En ce qui concerne l'admission au séjour de Mme D...en qualité de salariée :

5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : "La carte de séjour temporaire autorisant l'exercice d'une activité professionnelle est délivrée : 1° A l'étranger titulaire d'un contrat de travail visé conformément aux dispositions de l'article L. 341-2 du code du travail. Pour l'exercice d'une activité professionnelle salariée dans un métier et une zone géographique caractérisés par des difficultés de recrutement et figurant sur une liste établie au plan national par l'autorité administrative, après consultation des organisations syndicales d'employeurs et de salariés représentatives, l'étranger se voit délivrer cette carte sans que lui soit opposable la situation de l'emploi sur le fondement du même article L. 341-2. (...)" ;

6. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que le motif de la décision du 6 octobre 2011 refusant l'admission au séjour est tiré de ce que, le 19 mai 2011, le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi a refusé de délivrer une autorisation de travail au motif que le contrat de travail de secrétaire bilingue qui lui a été présenté, émanant de la SARLE..., faisait état d'une rémunération brute mensuelle de 1 300 euros, inférieure au salaire minimum interprofessionnel de croissance (SMIC) d'un montant mensuel brut alors de 1 337,65 euros, et que le futur employeur n'avait pas répondu à une demande de renseignements complémentaires à cet égard ; qu'il ne ressort d'aucun élément versé au dossier que le préfet des Bouches-du-Rhône se soit cru lié, au regard des exigences de la législation du travail en matière de rémunération minimale, par la position du directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi ;

7. Considérant, en deuxième lieu, que Mme D...produit désormais devant le juge un contrat de travail à durée déterminée proposé cette fois par la société SARL SVN07, daté du 31 août 2011, qui fait état d'une rémunération brute de 1 365,03 euros pour 35 heures par mois, effectivement au niveau du SMIC ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier que le gérant de cette société SARL SVN07 est M. B...et que l'objet de ce nouveau contrat est le remplacement d'une salariée en congé parental, sur un emploi de vendeuse, dans un commerce de détail non alimentaire situé dans une galerie commerciale à Arles, sans faire état d'une spécificité relative à un bilinguisme franco-ukrainien ;

8. Considérant, en troisième et dernier lieu, que s'il est versé au dossier une attestation de M. E...indiquant que dans le cadre du développement de ses sociétés SARL E...et EURL Alina, s'agissant notamment de l'activité de vente en ligne de lingerie à l'étranger et dans les pays de l'Est, il a besoin des compétences linguistiques particulières de l'appelante, toutefois, cette attestation n'est pas datée et ne saurait remplacer la production d'un contrat de travail faisant état d'une rémunération supérieure ou égale au SMIC ;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le contrat de travail proposé par la société SARL SVN07, s'il est rémunéré à hauteur du SMIC, ne concerne pas l'exercice d'une activité professionnelle salariée dans un métier et une zone géographique caractérisés par des difficultés de recrutement ; qu'aucun contrat de travail n'est produit en ce qui concerne la société EURL Alina ; qu'enfin, le contrat de travail proposé par la société SARL E...n'était pas rémunéré à hauteur du SMIC et que ce seul motif a pu justifier le refus préfectoral, nonobstant la circonstance que l'activité professionnelle en cause présentait des spécificités linguistiques particulières ;

En ce qui concerne la vie privée et familiale :

10. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : "1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir d'ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui." ;

11. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que l'appelante est entrée en France en 2007 à l'âge de 21 ans, munie d'un visa portant la mention "étudiant", et a bénéficié d'une admission au séjour en qualité d'étudiante jusqu'au 23 septembre 2010, afin de suivre des études de langues étrangères appliquées à l'université d'Avignon ; qu'elle ne justifie ainsi que de quatre années de séjour en France à la date des décisions attaquées ; que si elle allègue une relation de concubinage avec M.E..., de nationalité française, elle n'apporte aucune précision quant à la durée de cette relation ; qu'elle ne conteste pas être dépourvue d'attaches familiales en Ukraine ; que dans ces circonstances, l'appelante n'est fondée à soutenir, ni que les décisions attaquées auraient porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels elles ont été prises et auraient ainsi méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne, ni que le préfet aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation de leurs conséquences sur sa situation personnelle ;

12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que l'appelante n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté ses conclusions susvisées à fin d'annulation, ainsi que celles à fin d'injonction, dès lors que le jugement ne nécessitait aucune mesure d'exécution au regard des dispositions des articles L. 911-1 et suivants du code de justice administrative ; que, de même, il y a lieu de rejeter par voie de conséquence ses conclusions à fin d'injonction présentées en appel ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

13. Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : "Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation" ;

14. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à l'appelante la somme qu'elle demande au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête n° 12MA00930 de Mme D...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...D...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône.

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N° 12MA009302


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 8ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12MA00930
Date de la décision : 12/11/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. GONZALES
Rapporteur ?: M. Jean-Baptiste BROSSIER
Rapporteur public ?: Mme HOGEDEZ
Avocat(s) : RAYBAUD

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2013-11-12;12ma00930 ?
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