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17/10/2013 | FRANCE | N°11MA04805

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 8ème chambre - formation à 3, 17 octobre 2013, 11MA04805


Vu, I, sous le n° 11MA04805, la requête enregistrée le 28 décembre 2011 au greffe de la Cour, présentée par le préfet des Bouches-du-Rhône ;

Le préfet des Bouches-du-Rhône demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1105923 rendu le 5 décembre 2011 par le tribunal administratif de Marseille en tant que ce jugement :

- a annulé sa décision du 13 mai 2011 obligeant M. A... à quitter le territoire national ;

- lui a enjoint de réexaminer la situation de M. A...en lui délivrant une autorisation provisoire de séjour ;

- a mis à la char

ge de l'État la somme de 1 000 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
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Vu, I, sous le n° 11MA04805, la requête enregistrée le 28 décembre 2011 au greffe de la Cour, présentée par le préfet des Bouches-du-Rhône ;

Le préfet des Bouches-du-Rhône demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1105923 rendu le 5 décembre 2011 par le tribunal administratif de Marseille en tant que ce jugement :

- a annulé sa décision du 13 mai 2011 obligeant M. A... à quitter le territoire national ;

- lui a enjoint de réexaminer la situation de M. A...en lui délivrant une autorisation provisoire de séjour ;

- a mis à la charge de l'État la somme de 1 000 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

2°) de rejeter les conclusions de M. A...tendant à l'annulation de l'obligation de quitter le territoire français susmentionnée ;

Vu le jugement attaqué n° 1105923 ;

Vu, II, sous le n° 12MA02884, la requête, enregistrée le 16 février 2012 au greffe de la Cour, présentée par MeC..., pour M. B...A..., demeurant..., après réception par le greffe de la Cour de la décision du bureau d'aide juridictionnelle en date du 12 janvier 2012 accordant à M. A...le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

M.A..., de nationalité algérienne, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement susvisé n° 1105923 en tant que ce jugement a rejeté ses conclusions tendant :

- à l'annulation de la décision du préfet des Bouches-du-Rhône en date du 13 mai 2011 lui refusant l'admission au séjour ;

- à ce qu'il soit enjoint à cette autorité administrative de lui délivrer un certificat de résidence ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir ladite décision du 13 mai 2011 lui refusant l'admission au séjour ;

3°) d'enjoindre à titre principal à cette autorité administrative de lui délivrer un certificat de résidence portant la mention "vie privée et familiale", dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) d'enjoindre à titre subsidiaire à cette autorité administrative de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour, dans un délai de dix jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

5°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 500 euros au titre des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du

10 juillet 1991, son avocat renonçant à la part contributive de l'État ;

Vu le même jugement attaqué n° 1105923 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et la décision du bureau d'aide juridictionnelle du 12 janvier 2012 admettant M. A...au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables aux États membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu le décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 relatif au rapporteur public des juridictions administratives et au déroulement de l'audience devant ces juridictions ;

Vu le décret n° 2011-1950 du 23 décembre 2011 modifiant le code de justice administrative, notamment les dispositions de ses articles 1er à 11 relatives à la dispense de conclusions du rapporteur public et au déroulement de l'audience ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 24 septembre 2013 :

- le rapport de M. Brossier, rapporteur ;

1. Considérant que les deux appels susvisés n° 11MA04805 et n° 12MA02884 ont trait au même jugement attaqué ; qu'il y a lieu pour la Cour de les joindre pour y statuer par un seul arrêt ;

2. Considérant que M.A..., de nationalité algérienne, a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la décision du 13 mai 2011 du préfet des Bouches-du-Rhône lui refusant l'admission au séjour, ensemble la décision distincte prise le même jour par la même autorité l'obligeant à quitter le territoire national ; que dans l'appel n° 11MA04805, le préfet des Bouches-du-Rhône interjette appel du jugement susvisé en litige en tant qu'il a annulé pour insuffisante motivation ladite obligation de quitter le territoire français ; que dans l'appel croisé n° 12MA02884, M. A...interjette appel dudit jugement en tant qu'il a rejeté sa demande d'annulation du refus d'admission au séjour qui lui a été opposé ;

Sur l'appel n° 12MA02884 relatif à la décision portant refus d'admission au séjour :

En ce qui concerne la légalité interne :

3. Considérant, qu'aux termes du 5 l'article 6 de l'accord franco-algérien du

27 décembre 1968 susvisé : " Les dispositions du présent article ainsi que celles des deux articles suivants, fixent les conditions de délivrance et de renouvellement du certificat de résidence aux ressortissants algériens établis en France ainsi qu'à ceux qui s'y établissent, sous réserve que leur situation matrimoniale soit conforme à la législation française. Le certificat de résidence d'un an portant la mention "vie privée et familiale" est délivré de plein droit : (...) 5° au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus " ; et qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;

4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M.A..., né en 1983, célibataire sans charge de famille, est entré en France en juillet 2010, à l'âge de vingt-sept ans ; qu'il ne justifie pas d'aucune insertion particulière dans la société française ; qu'il a été élevé par son grand-père paternel lors du départ de ses parents en France en 1999, alors qu'il avait 16 ans, et qu'il est resté en Algérie sur la période courant du décès de ce grand-père, en 2004, jusqu'en 2010, soit de l'âge de 21 à 27 ans ; que dans ces conditions, eu égard à son âge et à la faible durée de son séjour en France, la décision litigieuse n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise, nonobstant les circonstances que ses parents aient obtenu entre-temps la nationalité française par réintégration, que ses deux frères et sa soeur l'aient également obtenue à la suite de ladite réintégration de leurs parents et que sa grand-mère maternelle, de nationalité française, vive aussi en France ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le préfet n'a méconnu, ni les stipulations de l'article 6 alinéa 5 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, ni celles de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que pour les motifs qui précèdent, l'administration n'a pas commis non plus d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences du refus attaqué sur la situation personnelle du requérant ;

En ce qui concerne la légalité externe de la décision portant refus d'admission au séjour :

6. Considérant qu'aux termes de l'article L. 312-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Dans chaque département, est instituée une commission du titre de séjour (...) " ; qu'aux termes de l'articles L. 312-2 : " La commission est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné aux articles L. 314-11 et L. 314-12, ainsi que dans le cas prévu à l'article L. 431-3. (...) " ;

7. Considérant, en premier lieu, que si l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié régit d'une manière complète les conditions dans lesquelles les ressortissants algériens peuvent être admis à séjourner en France et y exercer une activité professionnelle, ainsi que les règles concernant la nature et la durée de validité des titres de séjour qui peuvent leur être délivrés, il n'a toutefois pas entendu écarter, sauf stipulations incompatibles expresses, l'application des dispositions de procédure qui s'appliquent à tous les étrangers en ce qui concerne la délivrance, le renouvellement ou le refus de titres de séjour dès lors que ces ressortissants algériens se trouvent dans une situation entrant à la fois dans les prévisions de l'accord et dans celles prévues par le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

8. Considérant, en second lieu, qu'il résulte des dispositions de l'article L. 313-2 précité que le préfet est tenu de saisir la commission du cas des seuls étrangers algériens qui remplissent de façon effective les conditions prévues par l'accord franco-algérien du

27 décembre 1968 auxquels il envisage de refuser le titre de séjour sollicité, et non de celui de tous les étrangers algériens qui se prévalent de ses stipulations ; que l'appelant ne satisfaisant pas, comme il a été dit, aux conditions posées par les stipulations du 5 l'article 6 précité, le préfet des Bouches-du-Rhône n'était pas tenu, eu égard aux développements qui précèdent, de procéder à la consultation de la commission du titre de séjour ni, dès lors, de lui fournir un récépissé portant autorisation provisoire de séjour en attendant l'avis de ladite commission ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que l'appelant n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté ses conclusions à fin d'annulation de la décision lui refusant l'admission au séjour, ainsi que celles à fin d'injonction, dès lors que le jugement ne nécessitait aucune mesure d'exécution au regard des dispositions des articles L. 911-1 et suivants du code de justice administrative ; que, de même, il y a lieu de rejeter par voie de conséquence ses conclusions à fin d'injonction présentées en appel ; que l'appel n° 12MA02884 de M. A...doit donc être rejeté ;

Sur l'appel n° 11MA04805 relatif à l'obligation de quitter le territoire français :

10. Considérant qu'aux termes du sixième considérant introductif de la directive du 16 décembre 2008, dite "directive retour" : " Les États membres devraient veiller à ce que, en mettant fin au séjour irrégulier de ressortissants de pays tiers, ils respectent une procédure équitable et transparente. Conformément aux principes généraux du droit de l'Union européenne, les décisions prises en vertu de la présente directive devraient l'être au cas par cas et tenir compte de critères objectifs, ce qui implique que l'on prenne en considération d'autres facteurs que le simple fait du séjour irrégulier. Lorsqu'ils utilisent les formulaires types pour les décisions liées au retour, c'est-à-dire les décisions de retour et, le cas échéant, les décisions d'interdiction d'entrée ainsi que les décisions d'éloignement, les États membres devraient respecter ce principe et se conformer pleinement à l'ensemble des dispositions applicables de la présente directive " ; qu'aux termes de l'article 3 de cette directive : " Aux fins de la présente directive, on entend par : (...) 4) "décision de retour" : une décision ou un acte de nature administrative ou judiciaire déclarant illégal le séjour d'un ressortissant d'un pays tiers et imposant ou énonçant une obligation de retour ; 5) "éloignement" : l'exécution de l'obligation de retour, à savoir le transfert physique hors de l'État membre (...) " ; qu'aux termes de l'article 6, relatif à la fin du séjour irrégulier et à la décision de retour : " 1. Les États membres prennent une décision de retour à l'encontre de tout ressortissant d'un pays tiers en séjour irrégulier sur leur territoire, sans préjudice des exceptions visées aux paragraphes 2 à 5. / 2. Les ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier sur le territoire d'un État membre et titulaires d'un titre de séjour valable ou d'une autre autorisation conférant un droit de séjour délivrés par un autre État membre sont tenus de se rendre immédiatement sur le territoire de cet autre État membre. En cas de non-respect de cette obligation par le ressortissant concerné d'un pays tiers ou lorsque le départ immédiat du ressortissant d'un pays tiers est requis pour des motifs relevant de l'ordre public ou de la sécurité nationale, le paragraphe 1 s'applique. / 3. Les État membres peuvent s'abstenir de prendre une décision de retour à l'encontre d'un ressortissant d'un pays tiers en séjour irrégulier sur leur territoire si le ressortissant concerné d'un pays tiers est repris par un autre État membre en vertu d'accords ou d'arrangements bilatéraux existant à la date d'entrée en vigueur de la présente directive. Dans ce cas, l'État membre qui a repris le ressortissant concerné d'un pays tiers applique le paragraphe 1. / 4. À tout moment, les États membres peuvent décider d'accorder un titre de séjour autonome ou une autre autorisation conférant un droit de séjour pour des motifs charitables, humanitaires ou autres à un ressortissant d'un pays tiers en séjour irrégulier sur leur territoire. Dans ce cas, aucune décision de retour n'est prise. Si une décision de retour a déjà été prise, elle est annulée ou suspendue pour la durée de validité du titre de séjour ou d'une autre autorisation conférant un droit de séjour. / 5. Si un ressortissant d'un pays tiers en séjour irrégulier sur le territoire d'un État membre fait l'objet d'une procédure en cours portant sur le renouvellement de son titre de séjour ou d'une autre autorisation lui conférant un droit de séjour, cet État membre examine s'il y a lieu de s'abstenir de prendre une décision de retour jusqu'à l'achèvement de la procédure en cours, sans préjudice du paragraphe 6. / 6. La présente directive n'empêche pas les États membres d'adopter une décision portant sur la fin du séjour régulier en même temps qu'une décision de retour et/ou une décision d'éloignement et/ou d'interdiction d'entrée dans le cadre d'une même décision ou d'un même acte de nature administrative ou judiciaire, conformément à leur législation nationale, sans préjudice des garanties procédurales offertes au titre du chapitre III ainsi que d'autres dispositions pertinentes du droit communautaire et du droit national " ; qu'aux termes de l'article 7 de cette directive, relatif au "départ volontaire" : " 1. La décision de retour prévoit un délai approprié allant de sept à trente jours pour le départ volontaire, sans préjudice des exceptions visées aux paragraphes 2 et 4. Les États membres peuvent prévoir dans leur législation nationale que ce délai n'est accordé qu'à la suite d'une demande du ressortissant concerné d'un pays tiers. Dans ce cas, les États membres informent les ressortissants concernés de pays tiers de la possibilité de présenter une telle demande. / Le délai prévu au premier alinéa n'exclut pas la possibilité, pour les ressortissants concernés de pays tiers, de partir plus tôt. / 2. Si nécessaire, les États membres prolongent le délai de départ volontaire d'une durée appropriée, en tenant compte des circonstances propres à chaque cas, telles que la durée de séjour, l'existence d'enfants scolarisés et d'autres liens familiaux et sociaux (...) " ; qu'aux termes de l'article 8, intitulé "éloignement" : " 1. Les États membres prennent toutes les mesures nécessaires pour exécuter la décision de retour si aucun délai n'a été accordé pour un départ volontaire conformément à l'article 7, paragraphe 4, ou si l'obligation de retour n'a pas été respectée dans le délai accordé pour le départ volontaire conformément à l'article 7. (...) / 3. Les États membres peuvent adopter une décision ou un acte distinct de nature administrative ou judiciaire ordonnant l'éloignement (...) " ; qu'aux termes de

l'article 12 de la directive, paragraphe 1 : " Les décisions de retour (...) ainsi que les décisions d'éloignement sont rendues par écrit, indiquent leurs motifs de fait et de droit et comportent des informations relatives aux voies de recours disponibles ". ; et qu'aux termes de l'article L. 511-1 code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable à la date de la décision contestée : " I. L'autorité administrative qui refuse la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour à un étranger ou qui lui retire son titre de séjour, son récépissé de demande de carte de séjour ou son autorisation provisoire de séjour, pour un motif autre que l'existence d'une menace à l'ordre public, peut assortir sa décision d'une obligation de quitter le territoire français, laquelle fixe le pays à destination duquel l'étranger sera renvoyé s'il ne respecte pas le délai de départ volontaire prévu au troisième alinéa. L'obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation. (...) L'étranger dispose, pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, d'un délai d'un mois à compter de sa notification. Passé ce délai, cette obligation peut être exécutée d'office par l'administration (...) " ;

11. Considérant que tout justiciable peut faire valoir, par voie d'exception, qu'après l'expiration des délais impartis, les autorités nationales ne peuvent ni laisser subsister ni continuer de faire application des règles, écrites ou non écrites, de droit national qui ne seraient pas compatibles avec les objectifs définis par les directives communautaires ; qu'il peut également se prévaloir, à l'appui d'un recours dirigé contre un acte administratif non réglementaire, des dispositions précises et inconditionnelles d'une directive, lorsque l'État n'a pas pris, dans les délais impartis par celle-ci, les mesures de transposition nécessaires ; que, s'agissant de la directive du 16 décembre 2008, le délai imparti aux États membres pour la transposer expirait, en vertu du paragraphe 1 de son article 20, le 24 décembre 2010 ;

12. Considérant qu'une mesure portant obligation de quitter le territoire français constitue une décision de retour au sens des articles 3 et 6 de la directive du 16 décembre 2008 ; que les dispositions du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui prévoient que l'obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation, sont incompatibles avec les objectifs définis par l'article 12 de la directive, disposant qu'une décision de retour doit être motivée en fait et en droit ; que ces dernières dispositions, précises et inconditionnelles, peuvent être utilement invoquées à l'appui de la contestation d'une obligation de quitter le territoire français ;

13. Considérant qu'il résulte de la combinaison du sixième considérant introductif et de l'article 6 de la directive que les États membres prennent une décision de retour à l'encontre de tout ressortissant d'un pays tiers en séjour irrégulier sur leur territoire, après examen de la situation particulière de l'intéressé, sans que cette décision puisse être fondée sur le seul caractère irrégulier du séjour ; qu'ainsi, lorsque l'étranger ne fait pas l'objet d'une régularisation, l'édiction d'une décision de retour constitue la règle générale définie par le paragraphe 1 de l'article 6, sauf exceptions prévues aux paragraphes 2 à 5 du même article, lesquelles ne revêtent aucun caractère impératif ; qu'aucune disposition de la directive du 16 décembre 2008 ne fait obstacle à ce qu'une décision de retour accompagne un refus de séjour ; que ce dernier peut, le cas échéant, mettre fin au séjour régulier de l'étranger, notamment en abrogeant le récépissé de demande de carte de séjour, valant autorisation provisoire de séjour, qui lui avait été précédemment délivré ;

14. Considérant que, lorsqu'une obligation de quitter le territoire français assortit un refus de séjour, lequel, par nature, déclare implicitement illégal le séjour de l'étranger en France, la motivation de cette mesure se confond avec celle du refus de titre de séjour dont elle découle nécessairement et n'implique pas, par conséquent, dès lors que ce refus est lui-même motivé, de mention spécifique pour respecter les exigences de l'article 12 de la directive ; que, si le préfet doit tenir compte des dispositions de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, relatives aux catégories d'étrangers ne pouvant faire l'objet d'une mesure d'éloignement, ainsi que de celles des paragraphes 3 à 5 de l'article 6 de la directive, aucun texte n'impose une motivation spécifique indiquant que ces dispositions ne sont pas méconnues ; qu'en l'espèce, le refus d'admission au séjour opposé le 13 mai 2011 à M.A..., qui mentionne les textes sur lesquels il se fonde, comporte des motifs en fait non stéréotypés, et satisfait ainsi à l'obligation de motivation ;

15. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le préfet des Bouches-du-Rhône est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a annulé pour insuffisante motivation la décision attaquée portant obligation de quitter le territoire français ; qu'il y a lieu pour la Cour d'annuler le jugement attaqué, en tant qu'il a annulé cette décision et, par l'effet dévolutif de l'appel, de statuer sur les conclusions de M. A... tendant à l'annulation de ladite décision ;

16. Considérant, d'une part et ainsi qu'il a été dit, que M. A...n'est pas fondé à soutenir que la décision attaquée portant obligation de quitter le territoire français serait insuffisamment motivée ;

17. Considérant, d'autre part et pour les mêmes motifs que déjà exposés ci-dessus en ce qui concerne la décision refusant l'admission au séjour, qu'il ressort des pièces du dossier que la décision attaquée portant obligation de quitter le territoire français n'a pas méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

18. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à demander à la Cour d'annuler la décision du préfet des Bouches-du-Rhône en litige portant obligation de quitter le territoire français ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

19. Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation " ;

20. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'État, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à l'appelant la somme qu'il demande au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DECIDE :

Article 1er : La requête n° 12MA02884 de M. A...est rejetée.

Article 2 : Le jugement attaqué susvisé du tribunal administratif de Marseille en date du

5 décembre 2011 est annulé en tant qu'il annule la décision du préfet des Bouches-du-Rhône du 13 mai 2011 obligeant M. A...à quitter le territoire français.

Article 3 : Les conclusions de M. A...tendant à l'annulation de la décision du préfet des Bouches-du-Rhône du 13 mai 2011 portant à son encontre obligation de quitter le territoire français sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A..., au préfet des Bouches-du-Rhône et au ministre de l'intérieur.

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N° 11MA04805-12MA028845


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 8ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 11MA04805
Date de la décision : 17/10/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. GONZALES
Rapporteur ?: M. Jean-Baptiste BROSSIER
Rapporteur public ?: Mme HOGEDEZ
Avocat(s) : VINCENSINI ; VINCENSINI ; VINCENSINI

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2013-10-17;11ma04805 ?
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