La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

01/10/2013 | FRANCE | N°12MA00506

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 8ème chambre - formation à 3, 01 octobre 2013, 12MA00506


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 8 février 2012, sous le n° 12MA00506, présentée par Me D...pour M. B...A..., demeurant ... ; M. A...demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement n° 1001507 du 16 décembre 2011 par lequel le tribunal administratif de Toulon a limité à la somme de 14 000 euros la condamnation qu'il a prononcée à l'encontre de l'Etat (ministère de la défense) en réparation des conséquences dommageables de l'accident de service survenu le 26 novembre 2004 ;

2°) de condamner l'Etat (ministère de la défense) à lui verser une

indemnité totale de 94 700 euros en réparation de l'ensemble des préjudices qu'il...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 8 février 2012, sous le n° 12MA00506, présentée par Me D...pour M. B...A..., demeurant ... ; M. A...demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement n° 1001507 du 16 décembre 2011 par lequel le tribunal administratif de Toulon a limité à la somme de 14 000 euros la condamnation qu'il a prononcée à l'encontre de l'Etat (ministère de la défense) en réparation des conséquences dommageables de l'accident de service survenu le 26 novembre 2004 ;

2°) de condamner l'Etat (ministère de la défense) à lui verser une indemnité totale de 94 700 euros en réparation de l'ensemble des préjudices qu'il estime avoir subis du fait de l'accident de service dont il a été victime le 26 novembre 2004 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat (ministère de la défense) la somme de 10 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

--------------------------------------------------------------------------------------------------------

Vu le jugement attaqué ;

--------------------------------------------------------------------------------------------------------

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 72-662 du 13 juillet 1972 portant statut général des militaires ;

Vu la loi n° 2005-270 du 24 mars 2005 portant statut général des militaires ;

Vu le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ;

Vu le code de la défense ;

Vu le code civil ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 septembre 2013 :

- le rapport de M. Brossier, rapporteur,

- et les conclusions de Mme Hogedez, rapporteur public ;

1. Considérant qu'il résulte de l'instruction que M.A..., second maître de la marine nationale, a été blessé le 26 novembre 2004 au centre d'instruction naval de Saint-Mandrier par l'explosion d'une ogive d'obus manipulée dangereusement par le quartier-maîtreC... ; qu'après avoir demandé la condamnation de son employeur à réparer les conséquences dommageables de cet accident de service devant le tribunal de grande instance de Toulon, lequel s'est déclaré incompétent le 31 mars 2010, et après avoir saisi le 16 juin 2010 le tribunal administratif de Toulon d'une requête indemnitaire, à laquelle le ministre de la défense a d'abord opposé l'absence de liaison du contentieux, il a formulé en cours de première instance, le

15 octobre 2010, une réclamation à laquelle le ministre de la défense a répondu par un courrier non daté, enregistré au greffe du tribunal le 15 décembre 2010, admettant l'engagement de sa responsabilité à hauteur de 13 450 euros, en échange d'un désistement de l'intéressé ; que par le jugement attaqué, qui n'est pas contesté sur ce point par la voie de l'appel incident, le tribunal administratif de Toulon, en écartant l'absence de liaison du contentieux, a retenu la faute de l'Etat (ministère de la défense) de nature à engager sa responsabilité en estimant à cet égard que les dispositions l'article L. 2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ne faisaient pas obstacle à ce qu'une action de droit commun pouvant aboutir à la réparation intégrale de l'ensemble du dommage soit engagée contre l'Etat dans le cas notamment où l'accident serait imputable à une faute et qu'en l'espèce, les agissements fautifs du quartier-maîtreC..., non dépourvus de tout lien avec le service, engageaient la responsabilité de l'Etat à l'égard de M.A... ; que M.A..., par son appel principal, conteste le quantum de 14 000 euros alloué par le jugement attaqué à titre indemnitaire ;

En ce qui concerne les préjudices patrimoniaux :

2. Considérant que M. A...réclame les sommes de 40 000 euros au titre du préjudice professionnel et 5 000 euros au titre de la perte de revenus qu'il estime avoir subie lors de trois périodes d'incapacité temporaire de travail (2,5 mois puis 4 jours puis 8 jours) ;

Quant au préjudice professionnel :

3. Considérant que l'appelant invoque un préjudice professionnel qu'il évalue de façon forfaitaire à la somme de 40 000 euros, sans autre détail ni calcul, en soutenant que l'accident de service en litige l'aurait privé d'une carrière militaire et qu'il a été contraint de conclure des contrats à durée déterminée dont le niveau de rémunération était inférieur à sa solde antérieure d'engagé ; qu'il résulte toutefois de l'instruction, notamment des fiches de solde versées au dossier, que l'intéressé a continué, après la date de consolidation médicale fixée au 29 novembre 2006, à être employé par l'administration militaire à un niveau de rémunération contractuel équivalent à celui qu'il percevait avant son accident, autour de 1 700 euros nets par mois en moyenne ; qu'il ne fait état d'aucun droit à titularisation, ne disposait d'aucun droit au renouvellement de son contrat, et n'invoque aucune promesse non tenue à ce titre ; que si son engagement a été renouvelé de façon épisodique au cours de l'année 2008, puis n'a pas été renouvelé à compter de l'année 2009, aucun élément versé au dossier n'établit toutefois un lien de causalité suffisamment direct et certain entre, d'une part, ces renouvellements épisodiques suivis d'un non-renouvellement, d'autre part, l'accident de service dont s'agit ; qu'il s'ensuit que l'appelant n'est pas fondé à réclamer la somme de 40 000 euros qu'il invoque ;

Quant à l'incapacité temporaire de travail :

4. Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'appelant a été placé, à la suite de son accident de service, en situation d'incapacité temporaire de travail pendant trois périodes, de 2,5 mois d'abord, puis de 4 jours et de 8 jours ; que, s'il estime qu'il a alors subi une perte de revenus qu'il évalue forfaitairement à la somme de 5 000 euros au titre des pertes de revenus, les fiches de solde versées au dossier indiquent, comme le soutient le ministre intimé, que l'intéressé a été rémunéré sur ces périodes d'arrêt pour 30 jours par mois, traitement et prime inclus, ce qu'a retenu le tribunal qui n'est pas sérieusement contesté sur ce point ; que si le tribunal a admis par ailleurs, par une interprétation qui n'est pas contestée devant la Cour, la somme de

1 000 euros en réparation des troubles dans les conditions d'existence de l'intéressé liés à ces incapacités temporaires de travail, ce montant de 1 000 euros reflète une juste appréciation des circonstances de l'espèce ;

En ce qui concerne les préjudices extra-patrimoniaux :

5. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction que M. A...a pu reprendre le travail à compter du 7 février 2005 pendant 3 mois, exempt de sport et défilé, qu'il a présenté ensuite plusieurs arrêts de travail pour une date de consolidation fixée au 29 novembre 2006 ; qu'il résulte du rapport d'expertise médical, remis le 16 juin 2009, que les séquelles après consolidation consistent en une orchidectomie gauche sans prothèse, une paresthésie des deux derniers doigts de la main gauche, des douleurs du poignet gauche avec baisse légère de la force motrice, une gêne de la cuisse gauche à l'effort, une persistance d'un discret syndrome anxiophobique, diverses cicatrices et la persistance de petits éclats d'obus sans incidence fonctionnelle apparente ; que compte-tenu de l'ensemble de ces éléments, l'expert a fixé le déficit fonctionnel permanent à 8 % ; que l'appelant ne conteste pas les conclusions de cette expertise ;

6. Considérant, en deuxième lieu et s'agissant du préjudice esthétique, fixé par l'expert à un niveau de 4 sur une échelle de 7 pour le préjudice esthétique temporaire et à un niveau de 3 sur une échelle de 7 pour le préjudice esthétique permanent, qu'il résulte de l'instruction que le tribunal a fait une juste appréciation des circonstances de l'espèce en évaluant ce préjudice à hauteur de 7 000 euros ;

7. Considérant, en troisième lieu et s'agissant du pretium doloris, fixé par l'expert à un niveau de 4 sur une échelle de 7, qu'il résulte de l'instruction que le tribunal a fait une juste appréciation des circonstances de l'espèce en évaluant ce préjudice à hauteur de 6 000 euros ;

8. Considérant, en quatrième lieu et s'agissant du préjudice d'agrément, que l'appelant réclame la somme de 8 000 euros ; qu'il résulte toutefois de l'instruction qu'il n'établit pas de façon suffisamment sérieuse devant la Cour, pas plus que devant le tribunal, qu'il ne pourrait plus, à la suite de son accident de service, pratiquer les loisirs qu'il pratiquait assidûment ;

9. Considérant, en cinquième lieu et s'agissant du déficit fonctionnel permanent, fixé ainsi qu'il a été dit par l'expert à un taux de 8 %, que le tribunal a évalué ce poste de préjudice à hauteur de 8 000 euros, montant admis par le ministre intimé, mais contesté par l'appelant qui l'évalue à 12 000 euros ; qu'il résulte de l'instruction que l'intéressé, né en 1972, avait 34 ans à la date de la consolidation et qu'il sera fait une juste appréciation des circonstances de l'espèce en estimant à hauteur de 8 000 euros les divers troubles dans les conditions d'existence découlant de son déficit fonctionnel permanent ; que l'intéressé bénéficie toutefois d'une pension militaire d'invalidité depuis le 25 mai 2005 ; que la rente temporaire d'invalidité a déjà donné lieu au versement de la somme totale de 3 729,60 euros, en trois arrérages, sur la période courant jusqu'en 2007 ; que la rente définitive d'invalidité, fixée au taux de 20 % à compter du 26 mai 2008 pour un montant annuel de 1 323 euros, a déjà donné lieu, sur la période courant de 2008 à la date du présent arrêt, au versement de la somme de 5 292 euros ; que dans ces conditions, M. A...n'est pas fondé à demander une indemnité complémentaire réparant les divers troubles dans les conditions d'existence découlant de son déficit fonctionnel permanent ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que l'appelant n'est pas fondé à demander à la Cour de réformer le montant de 14 000 euros (1 000 + 6 000 + 7 000) alloué par le jugement attaqué à titre indemnitaire ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

11. Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : "Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation" ;

12. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que la partie intimée, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamnée à payer à l'appelant la somme qu'il demande au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête n° 12MA00506 de M. A...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A...et au ministre de la défense.

Copie en sera adressée à la caisse militaire de sécurité sociale.

''

''

''

''

N° 12MA005062


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 8ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12MA00506
Date de la décision : 01/10/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-13-03 Fonctionnaires et agents publics. Contentieux de la fonction publique. Contentieux de l'indemnité.


Composition du Tribunal
Président : M. GONZALES
Rapporteur ?: M. Jean-Baptiste BROSSIER
Rapporteur public ?: Mme HOGEDEZ
Avocat(s) : SCOGNAMIGLIO

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2013-10-01;12ma00506 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award