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30/09/2013 | FRANCE | N°12MA03452

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 6ème chambre - formation à 3, 30 septembre 2013, 12MA03452


Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille le 8 août 2012, sous le n° 12MA03452, présentée pour la commune de Cavalaire-sur-Mer, représentée par son maire, par la SCP Sur - Mauvenu et Associés ;

La commune de Cavalaire-sur-Mer demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°s 1001218 et 1002916 du 6 juillet 2012 du tribunal administratif de Toulon en tant qu'il l'a condamnée à verser à la société Socogim la somme de 2 489 817 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 25 septembre 2008 ;

2°) à t

itre principal, de rejeter la demande présentée par la société Socogim devant le tribuna...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille le 8 août 2012, sous le n° 12MA03452, présentée pour la commune de Cavalaire-sur-Mer, représentée par son maire, par la SCP Sur - Mauvenu et Associés ;

La commune de Cavalaire-sur-Mer demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°s 1001218 et 1002916 du 6 juillet 2012 du tribunal administratif de Toulon en tant qu'il l'a condamnée à verser à la société Socogim la somme de 2 489 817 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 25 septembre 2008 ;

2°) à titre principal, de rejeter la demande présentée par la société Socogim devant le tribunal administratif ;

3°) à titre subsidiaire, de désigner un expert afin notamment de déterminer le manque à gagner allégué par la société Socogim ;

4°) de mettre à la charge de la société Socogim une somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code des marchés publics ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision en date du 1er septembre 2013 du président de la cour administrative d'appel de Marseille portant désignation, en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative, de M. Laurent Marcovici, président assesseur, pour présider les formations de jugement en cas d'absence ou d'empêchement de M. Guerrive, président de la 6e chambre ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 septembre 2013 :

- le rapport de Mme Carotenuto, rapporteur,

- les conclusions de Mme Felmy, rapporteur public,

- et les observations de Me B...représentant la commune de Cavalaire-sur-Mer et de Me A...représentant la société Socogim ;

1. Considérant que la commune de Cavalaire-sur-Mer a lancé, en 2007, une opération d'aménagement comprenant la construction d'un parking public en infrastructure et de logements ; que le montage juridique choisi par la commune nécessitait de recourir à un contrat comportant, d'une part, un bail emphytéotique administratif pour le volume dédié au parking public et, d'autre part, la vente de volumes et de droits à construire y afférents pour la réalisation de logements et des places de parking correspondantes ; que le 24 mai 2007, la commune de Cavalaire-sur-Mer a consenti à la société Socogim une promesse unilatérale de vente portant sur l'ensemble des volumes constituant l'assiette destinée à la construction des logements ; qu'un bail emphytéotique administratif a été conclu, le même jour, pour une durée de 30 ans entre la commune et la société Cinergie, liée contractuellement à la société Socogim par un contrat de promotion immobilière portant sur l'ensemble des volumes destinés à la construction des logements ; que ce bail emphytéotique était assorti d'une convention de mise à disposition non détachable de l'ensemble contractuel ; que par une requête enregistrée le 16 juillet 2007, des contribuables de la commune ont saisi le tribunal administratif d'une demande tendant à l'annulation de la délibération du 15 mai 2007 par laquelle le conseil municipal de la commune de Cavalaire-sur-Mer a autorisé le maire à signer l'ensemble des documents contractuels relatifs à l'opération de restructuration urbaine du centre-ville portant sur la réalisation du parc de stationnement public souterrain et du programme mixte de logements en superstructure ; que le bail emphytéotique administratif et la promesse unilatérale de vente ont été signés sous conditions suspensives, dont notamment " la production d'une attestation du maire de la commune certifiant l'absence ou le désistement de tout recours gracieux, ou contentieux de l'administration ou de tiers, de déféré préfectoral ou de demande de retrait à l'égard de toute délibération de la commune ayant autorisé la réalisation de l'ensemble de l'opération " ; que ces contrats prévoient que " la réalisation de ces conditions suspensives devra intervenir au plus tard 12 (DOUZE) mois à compter de la signature des présentes " ; que dans la mesure où cette condition suspensive n'était pas satisfaite à l'expiration de la durée déterminée par les contrats en raison de la requête introduite par les contribuables de la commune à l'encontre de la délibération du 15 mai 2007, la commune de Cavalaire-sur-Mer, par une décision du 24 juillet 2008, a constaté la " caducité du montage contractuel dans son ensemble " ; que par une délibération en date du 29 janvier 2009, la commune de Cavalaire-sur Mer a retiré sa précédente délibération du 15 mai 2007 ; que par un jugement en date du 1er avril 2010, devenu définitif, le tribunal administratif de Toulon a annulé la délibération du 29 janvier 2009 ; que par un jugement du même jour, le tribunal administratif a annulé la délibération du 15 mai 2007, au motif que cette délibération avait autorisé la passation d'un bail emphytéotique sur un bien constituant une dépendance du domaine public routier en méconnaissance de l'article L. 1311-2 deuxième alinéa du code général des collectivités territoriales ; que par un jugement du 6 juillet 2012 le tribunal administratif a, dans son article 1er, déclaré nul l'ensemble contractuel complexe dont la conclusion a été autorisée par délibération du conseil municipal de la commune de Cavalaire-sur-Mer en date du 15 mai 2007 et dans son article 2, condamné la commune de Cavalaire-sur-Mer à verser à la société Socogim la somme de 2 489 817 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 25 septembre 2008 ; que la commune de Cavalaire-sur-Mer relève appel de ce jugement ;

Sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de la demande présentée par la société Socogim devant le tribunal administratif ;

2. Considérant que, comme il a été dit précédemment, par un jugement en date du 1er avril 2010, le tribunal administratif de Toulon a annulé la délibération du conseil municipal de la commune de Cavalaire-sur-Mer du 15 mai 2007 au motif que ladite délibération avait autorisé la passation d'un bail emphytéotique sur un bien constituant une dépendance du domaine public routier en méconnaissance de l'article L. 1311-2 deuxième alinéa du code général des collectivités territoriales ; que dans le jugement attaqué, le tribunal administratif a considéré que " eu égard à la nature de l'acte dont l'annulation a été prononcée par le jugement du 1er avril 2010, au motif qui fonde cette annulation et à l'absence d'intérêt général justifiant, dans les circonstances de l'espèce, le maintien en vigueur de ladite convention, il y a lieu de déclarer nul l'ensemble contractuel conclu le 24 mai 2007 " et dans l'article 1er dudit jugement, a déclaré nul " l'ensemble contractuel complexe dont la conclusion a été autorisée par délibération du conseil municipal de la commune de Cavalaire-sur-Mer en date du 15 mai 2007 " ;

3. Considérant que pour mettre à la charge de la commune de Cavalaire-sur-Mer la somme de 2 489 817 euros, après avoir déclaré nul l'ensemble contractuel dont s'agit, les premiers juges ont retenu, sur le fondement de la responsabilité quasi-délictuelle, la faute commise par la commune d'avoir passé des contrats en méconnaissance de l'article L. 1311-2 deuxième alinéa du code général des collectivités territoriales ; que toutefois, la Cour dans un arrêt du 29 octobre 2012, devenu définitif, a annulé le jugement du 1er avril 2010 par lequel le tribunal administratif de Toulon a annulé la délibération du conseil municipal de la commune de Cavalaire-sur-Mer du 15 mai 2007 et a rejeté la demande présentée devant le tribunal administratif tendant à l'annulation de cette délibération du 15 mai 2007 ; qu'il en résulte qu'aucune faute quasi-délictuelle ne pouvait être retenue contre la commune de Cavalaire-sur-Mer ; que par suite, cette dernière ne pouvait être condamnée à verser à la société Socogim la somme de 2 489 817 euros sur le fondement quasi-délictuel ;

4. Considérant qu'il existe une contradiction entre le présent arrêt, qui rejette les conclusions de la société Socogim fondées sur la responsabilité quasi-délictuelle de la commune de Cavalaire-sur-Mer dès lors que les contrats conclus étaient valides, et l'article 1er du jugement attaqué qui a déclaré nul l'ensemble contractuel ; qu'ainsi, et quand bien même la commune appelante ne serait pas recevable à solliciter l'annulation dudit article 1er, il y a lieu pour la Cour, en raison de cette contrariété, de déclarer nul et non avenu l'article 1er du jugement susmentionné ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la commune de Cavalaire-sur-Mer est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon l'a condamnée à verser à la société Socogim la somme de 2 489 817 euros sur le fondement quasi-délictuel ;

6. Considérant qu'il appartient à la Cour, saisie par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les demandes présentées par la société Socogim devant le tribunal administratif et devant la Cour ;

7. Considérant, en premier lieu, que la société Socogim invoque la faute contractuelle commise par la commune de Cavalaire-sur-Mer d'avoir prononcé la caducité du montage contractuel, et donc de la promesse unilatérale de vente que lui avait consentie ladite commune, de manière prématurée et injustifiée et d'avoir ainsi manqué à son obligation de loyauté en alléguant un prétendu constat de caducité des conventions passées ;

8. Considérant qu'aux termes du " Chapitre XI - Conditions suspensives " de la promesse unilatérale de vente consentie par la commune de Cavalaire-sur-Mer à la société Socogim : " (...) En tout état de cause, une des Parties ne pourra constater la caducité des présentes en cas de non réalisation d'une ou plusieurs conditions suspensives sans qu'auparavant les parties aient analysé ensemble le motif de non réalisation. Un délai de 3 mois est prévu dans ce cas avant que la caducité des présentes ne puisse être décidée (...) " ; que d'une part, comme il a été dit précédemment, le bail emphytéotique administratif et la promesse unilatérale de vente ont été signés sous conditions suspensives et qu'il est constant qu'une des conditions suspensives n'était pas satisfaite à l'expiration de la durée déterminée par les contrats en raison de la requête introduite par les contribuables de la commune à l'encontre de la délibération du 15 mai 2007 ; qu'ainsi, une des conditions suspensives, à savoir la production d'une attestation du maire de la commune certifiant l'absence ou le désistement de tout recours gracieux, ou contentieux de l'administration ou de tiers, de déféré préfectoral ou de demande de retrait à l'égard de toute délibération de la commune ayant autorisé la réalisation de l'ensemble de l'opération, n'ayant pas été réalisée avant l'échéance fixée au 24 mai 2008, l'ensemble contractuel est devenu caduc à cette même date ; qu'à cet égard, la société Socogim ne peut utilement se prévaloir de la circonstance que la " quasi-totalité des conditions suspensives a été réalisée en temps utile " dès lors qu'une au moins desdites conditions n'a pas été réalisée ; qu'en outre, si la société Socogim fait état de la délibération du conseil municipal en date du 28 février 2008 par laquelle, en raison de la non réalisation de l'une des conditions suspensives, " il a été décidé dans l'attente et pour permettre la régularisation du protocole d'accord susvisé, de proroger de 12 mois par voie d'avenant la durée de ladite promesse de vente avec la société Socogim ainsi que le délai quant à la prise d'effet du BEA/CMD avec la société Cinergie ", il résulte de l'instruction qu'une telle prorogation n'a pas été décidée, la société Cinergie ayant refusé de signer cet avenant ; que la société Socogim n'est donc pas fondée à soutenir que la caducité est injustifiée, alors même qu'elle n'a commis aucune faute ; que d'autre part, par une lettre en date du 24 juin 2008, la commune de Cavalaire-sur-Mer a invité les sociétés Cinergie et Socogim à participer à une réunion de concertation prévue le 16 juillet 2008 afin " de permettre aux parties d'analyser ensemble le motif de non réalisation d'une ou plusieurs conditions suspensives et cela dans un délai de trois mois avant que la caducité de la promesse unilatérale de vente puisse être décidée, sauf prorogation du délai de réalisation de la ou desdites conditions suspensives aux termes d'un avenant à ladite promesse " ; que par une lettre en date du 24 juillet 2008, la commune de Cavalaire-sur-Mer, faisant valoir que l'avenant prolongeant d'une année supplémentaire la durée de réalisation des conditions suspensives n'ayant pu être signé en raison du refus opposé par la société Cinergie ainsi que " l'absence de proposition de solution ", a informé la société Socogim qu'elle était " obligée " de " constater la caducité du montage contractuel dans son ensemble " ; que si la commune de Cavalaire-sur-Mer n'a pas respecté le délai de trois mois contractuellement prévu avant de constater la caducité de l'ensemble contractuel en litige, une telle méconnaissance n'ouvre pas droit à indemnité au profit de la société Socogim qui n'a subi aucun préjudice en raison d'un constat de caducité prématuré de l'ensemble contractuel ;

9. Considérant, en outre, que selon les stipulations de la promesse unilatérale de vente consentie par la commune de Cavalaire-sur-Mer à la société Socogim, et notamment du " Chapitre XI - Conditions suspensives ", dans le cas où une ou plusieurs " conditions suspensives ne seraient pas réalisées à l'expiration de la durée de la présente promesse, (...) la présente promesse sera caduque, à la demande de l'une ou l'autre des parties, sans indemnité de part et d'autre (...) " ; qu'il résulte de ces clauses, que toute indemnité en cas de constat de caducité est expressément exclue ; qu'au demeurant, il résulte des stipulations de l'article 6.2 du contrat de promotion immobilière signé entre la société Cinergie et la société Socogim, et auquel la commune n'est pas partie, que le montage contractuel prévoit, en cas de constat de caducité, une indemnisation de la société Socogim par la société Cinergie, à laquelle la commune de Cavalaire-sur-Mer est étrangère ; qu'il en résulte que la demande indemnitaire de la société Socogim présentée à l'encontre de la commune de Cavalaire-sur-Mer, au titre de la caducité de l'ensemble contractuel, ne peut qu'être rejetée ;

10. Considérant, en deuxième lieu, que pour fonder sa demande indemnitaire, la société Socogim ne peut utilement se prévaloir du protocole transactionnel conclu entre la commune de Cavalaire-sur-Mer et la société Crédit foncier de France, venant aux droits de la société Cinergie, qui n'a d'effet qu'entre les parties ;

11. Considérant, en dernier lieu, que la commune de Cavalaire-sur-Mer n'a, en tout état de cause, commis aucune faute au regard du principe de loyauté des relations contractuelles en s'abstenant de délivrer spontanément une autorisation d'occupation temporaire du domaine public afin de pallier l'illégalité du bail emphytéotique administratif jugée par le tribunal administratif et permettant de régulariser l'ensemble contractuel en litige ;

12. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le jugement attaqué doit être annulé et que la demande indemnitaire présentée par la société Socogim devant le tribunal administratif et devant la Cour doit être rejetée ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

13. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la commune de Cavalaire-sur-Mer qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse à la société Socogim la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'en revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société Socogim une somme de 2 000 euros, au titre des frais exposés par la commune de Cavalaire-sur-Mer et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Toulon du 6 juillet 2012 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par la société Socogim devant le tribunal administratif de Toulon et ses conclusions devant la Cour sont rejetées.

Article 3 : La société Socogim versera à la commune de Cavalaire-sur-Mer une somme de 2 000 euros (deux mille euros) au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Cavalaire-sur-Mer et à la société Socogim.

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N° 12MA03452 2

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12MA03452
Date de la décision : 30/09/2013
Type d'affaire : Administrative

Analyses

Marchés et contrats administratifs - Fin des contrats - Résiliation.

Procédure - Procédures de référé autres que celles instituées par la loi du 30 juin 2000.

Procédure - Voies de recours - Règlement de juges.


Composition du Tribunal
Président : M. MARCOVICI
Rapporteur ?: Mme Sylvie CAROTENUTO
Rapporteur public ?: Mme FELMY
Avocat(s) : SELARL D'AVOCATS LE ROUX - BRIN ET MORAINE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2013-09-30;12ma03452 ?
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