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10/07/2013 | FRANCE | N°10MA02624

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 6ème chambre - formation à 3, 10 juillet 2013, 10MA02624


Vu la requête, enregistrée le 12 juillet 2010, au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille, sous le n° 10MA02624, présentée pour la société Ingenium, société à responsabilité limitée, représentée par sa gérante en exercice, et dont le siège est zone d'activité de Tragone, lot n° 11 à Biguglia (20620), par la SCP Franc Valluet ;

La société Ingenium demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0901016 du 3 juin 2010 par lequel le tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune d'Ersa à lui ver

ser la somme de 256 300,43 euros TTC assortie des intérêts moratoires à compter du 22 ...

Vu la requête, enregistrée le 12 juillet 2010, au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille, sous le n° 10MA02624, présentée pour la société Ingenium, société à responsabilité limitée, représentée par sa gérante en exercice, et dont le siège est zone d'activité de Tragone, lot n° 11 à Biguglia (20620), par la SCP Franc Valluet ;

La société Ingenium demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0901016 du 3 juin 2010 par lequel le tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune d'Ersa à lui verser la somme de 256 300,43 euros TTC assortie des intérêts moratoires à compter du 22 août 2009, outre la capitalisation des intérêts, au titre du marché de travaux signé le 30 juillet 2007 dans le cadre de la réhabilitation d'une infrastructure d'assainissement, à dire qu'est intervenue la réception tacite des travaux, subsidiairement à fixer la réception au 10 mars 2009, date de mise en service de l'ouvrage et à ce qu'il soit mis à la charge de la commune la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et rejeté le surplus de sa demande ;

2°) de constater la réception tacite des travaux, et subsidiairement, de prononcer la réception des travaux au 10 mars 2009, date de mise en service de l'ouvrage ;

3°) de condamner la commune d'Ersa à lui verser la somme de 256 300,43 euros TTC, assortie des intérêts moratoires à compter du 22 août 2009, outre la capitalisation des intérêts ;

4°) de mettre à la charge de la commune d'Ersa la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code des marchés publics ;

Vu le code de l'environnement ;

Vu le code civil

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 1er juillet 2013 :

- le rapport de Mme Lopa Dufrénot, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Markarian, rapporteur public,

- et les observations de Me A...représentant la société Ingénium et de Me B...représentant la commune d'Ersa ;

Après avoir pris connaissance de la note en délibéré, enregistrée le 3 juillet 2013, présentée pour la société Ingénium, par MeA... ;

1. Considérant que dans le cadre de la réhabilitation et de la restructuration de l'infrastructure d'assainissement et de la réalisation de deux stations d'épuration, la commune d'Ersa a confié, le 30 juillet 2007, au groupement conjoint formé par la société Ingenium et la société Monte Stello, le lot n° 3 relatif à la construction de deux stations à Poggio et Granaggiolo, pour un montant après négociation de 729 385,24 euros HT, soit 787 736,06 euros TTC ; que la maîtrise d'oeuvre a été attribuée au BET Savelli ; que, le 17 octobre 2008, la partie du marché portant sur la station de Granaggiola été résiliée avec effet au 25 octobre 2008 en raison du dépassement du délai par l'entreprise et pour motif d'intérêt général ; que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bastia a rejeté la demande présentée par la société Ingénium tendant à ce que soit constatée la réception tacite de l'ouvrage, subsidiairement prononcée la réception au 10 mars 2009, date de mise en service de l'ouvrage, et à la condamnation de la commune d'Ersa à lui verser la somme de 256 300,43 euros TTC, assortie des intérêts moratoires à compter du 22 août 2009, outre la capitalisation des intérêts, au titre du marché de travaux signé le 30 juillet 2007 dans le cadre de la réhabilitation d'une infrastructure d'assainissement ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L.9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés " ;

3. Considérant que la société Ingenium soutient que le jugement attaqué qui a rejeté sa demande en paiement des plus-values et travaux supplémentaires, est insuffisamment motivé ; que, toutefois, en estimant que le maître d'ouvrage avait refusé à bon droit de lui payer le solde du marché en application de l'article 41 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux et en l'absence de réception définitive, le tribunal a suffisamment motivé son jugement conformément aux dispositions de l'article L. 9 du code de justice administrative ;

Sur les conclusions tendant à voir constater la réception tacite ou prononcer la réception définitive :

4. Considérant qu'aux termes des stipulations du cahier des clauses administratives générales, applicable aux marchés publics de travaux dans sa version applicable au marché en cause : " 50.22. Si un différend survient directement entre la personne responsable du marché et l'entrepreneur, celui-ci doit adresser un mémoire de réclamation à ladite personne aux fins de transmission au maître de l'ouvrage. (..) 50.3. Procédure contentieuse : 50.31. Si, dans le délai de trois mois à partir de la date de réception, par la personne responsable du marché, de la lettre ou du mémoire de l'entrepreneur mentionné aux 21 et 22 du présent article, aucune décision n'a été notifiée à l'entrepreneur ou si celui-ci n'accepte pas la décision qui lui a été notifiée, l'entrepreneur peut saisir le tribunal administratif compétent. Il ne peut porter devant cette juridiction que les chefs et motifs de réclamation énoncés dans la lettre ou le mémoire remis à la personne responsable du marché. " ;

5. Considérant que les stipulations précitées régissent les seuls différends nés entre le titulaire du marché public de travaux et le maître d'oeuvre ou le maître d'ouvrage, relatifs aux droits et obligations financiers nés de l'exécution de ce marché ; qu'en revanche, la demande présentée au juge du contrat, tendant à voir constater la réception tacite de l'ouvrage et subsidiairement d'en prononcer la réception n'est pas soumise aux exigences prévues dans le cadre de la procédure de règlement des différends financiers, prévue aux stipulations des articles 50.22 et 50.31 de ce cahier ;

6. Considérant que pour rejeter les conclusions tendant à voir constater la réception tacite de l'ouvrage en cause, subsidiairement d'en prononcer la réception définitive, le tribunal administratif a estimé après avoir rappelé les stipulations de l'article 50.22 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux que la société Ingenium qui n'avait pas présenté de mémoire de réclamation au maître d'ouvrage, était irrecevable à saisir le juge directement de telles conclusions ; que, toutefois, comme il a été dit, le titulaire du marché est recevable à saisir le juge du contrat de conclusions tendant à voir constater la réception tacite de l'ouvrage, à défaut, à prononcer la réception définitive sans qu'y fasse obstacle le non-respect des prescriptions prévues à l'article 50.22 du cahier précité ; que, dès lors, la société Ingenium est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal s'est fondé sur ce motif pour rejeter les conclusions de la société Ingenium ;

7. Considérant qu'il appartient à la cour, saisie par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les conclusions présentées à ce titre par la société Ingenium devant le tribunal administratif de Bastia ;

8. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 41.1 du cahier des clauses administratives générales - Travaux, applicable au marché dont s'agit : " L'entrepreneur avise à la fois la personne responsable du marché et le maître d'oeuvre, par écrit, de la date à laquelle il estime que les travaux on été achevés ou le seront. Le maître d'oeuvre procède, l'entrepreneur ayant été convoqué, aux opérations préalables à la réception des ouvrages dans un délai qui, sauf stipulation différente du cahier des clauses administratives particulières, est de vingt jours à compter de la date de réception de l'avis mentionné ci-dessus ou de la date indiquée dans cet avis pour l'achèvement des travaux si cette dernière date est postérieure. (...) En cas d'absence de l'entrepreneur à ces opérations, il en est fait mention audit procès-verbal et ce procès-verbal lui est alors notifié. " ; qu'aux termes de l'article 41.2 du même cahier : " Les opérations préalables à la réception comportent : - la reconnaissance des ouvrages exécutés ; - les épreuves éventuellement prévues par le cahier des clauses administratives particulières ; - la constatation éventuelle de l'inexécution des prestations prévues au marché ; - la constatation éventuelle d'imperfections ou malfaçons ; - sauf stipulation différente du cahier des clauses administratives particulières prévue au 11 de l'article 19, la constatation du repliement des installations de chantier et de la remise en état des terrains et des lieux ; - les constatations relatives à l'achèvement des travaux. Ces opérations font l'objet d'un procès-verbal dressé sur-le-champ par le maître d'oeuvre et signé par lui et par l'entrepreneur ; si ce dernier refuse de le signer, il en est fait mention (...) " ; qu'enfin, l'article 41.3 de ce cahier dispose qu'" Au vu du procès-verbal des opérations préalables à la réception et des propositions du maître d'oeuvre, la personne responsable du marché décide si la réception est ou non prononcée ou si elle est prononcée avec réserves. Si elle prononce la réception, elle fixe la date qu'elle retient pour l'achèvement des travaux. La décision ainsi prise est notifiée à l'entrepreneur dans les quarante-cinq jours suivant la date du procès-verbal. A défaut de décision de la personne responsable du marché notifiée dans le délai précisé ci-dessus, les propositions du maître d'oeuvre sont considérées comme acceptées (...) " ;

9. Considérant, d'autre part, aux termes de l'article 10.2 du cahier des clauses administratives particulières : " La réception a lieu à l'achèvement des travaux relevant de l'ensemble des lots ; elle prend effet à la date de cet achèvement. La procédure de réception se déroule (...) comme il est stipulé à l'article 41 du CCAG Travaux. " ; qu'aux termes de l'article 4.11.2 du cahier des clauses techniques particulières : " Conformément au CCAP, après notification officielle par l'entrepreneur de l'achèvement des travaux, celui-ci doit remettre au maître d'oeuvre l'ensemble du plan d'exécution de ses travaux (..) ainsi que les documents visés en 5.11 et conformes à l'exécution. Il est rappelé que le prononcé de la réception est subordonné à la remise de ces plans et documents. " ; que l'article 5.10 du cahier précité stipule que " Lorsque les installations fonctionnent de manière satisfaisante et stabilisée, l'entrepreneur peut demander par écrit la mise en observation de ces dernières, sous réserve qu'il ait remis au maître d'oeuvre le dossier de récolement des ouvrages exécutés. Si ces conditions sont remplies, le maître d'oeuvre doit dans un délai de 15 jours prononcer la mise en observation, donnant lieu à procès-verbal. Celle-ci aura une durée minimale de trois mois. La période d'observation a pour but de vérifier toutes les performances de la station avant que ne soit prononcée la réception des installations. " ; que l'article 5.11.1 du même cahier énonce que les essais doivent réalisés par un organisme de contrôle agréé et sont à la charge de l'entreprise. Les essais de garantie comprennent les essais et épreuves permettant de vérifier les garanties techniques prévues au marché, notamment les débits, (..) le fonctionnement de dispositifs de commande, de contrôle, la détermination des performances de l'ensemble des ouvrages de traitement de eaux et des boues ; que l'article 5.16 de ce cahier prévoit que si dans un délai de douze mois à dater du constat d'achèvement des travaux, l'entrepreneur n'a pas réussi à satisfaire aux conditions permettant la réception, le maître d'ouvrage pourra refuser définitivement les installations défaillantes et appliquer à l'entrepreneur les mesures de coercitives prévues au CCAG ; qu'aux termes de l'article 5.17 du même cahier : " La réception des travaux sera prononcée sans retard dès lors que : - toutes les réserves émises sur les comptes-rendus de chantier au cours de la période de mise au point et d'observation auront été levées ; - les périodes de mise au point et d'observation auront été menées à leur terme (...) ; - après achèvement des travaux et conformément aux prescriptions des différents fascicules du CCTG et aux prescriptions du CCAP article 9-5, l'entreprise établira au maître d'oeuvre trois dossiers complets, comprenant le plans et notices de fonctionnement et d'entretien de tous les appareillages installés pendant les travaux (...) " ;

10. Considérant que contrairement à ce que soutient la société Ingenium, la prise de possession par la commune d'Ersa de la station d'épuration de Poggio le 10 mars 2009 ne révèle pas, par elle-même, son intention de réceptionner l'ouvrage, ni davantage la reconnaissance par la commune, pour les besoins de sa défense dans le cadre de ce litige, d'une dette à l'égard de la société requérante au titre du règlement du marché en cause ; qu'il résulte de l'instruction qu'à la suite de la demande de la société Ingénium le 11 décembre 2008, les opérations préalables à la réception se sont déroulées le 6 janvier 2009 et ont donné lieu à un procès-verbal du même jour, recensant les prestations non réalisées et les prescriptions non-conformes au marché ; que des réserves ont été levées les 20 janvier, 9 et 23 février 2009 ainsi que le 18 septembre 2009 ; que si parmi les réserves non-levées, certaines sont mineures, il ne résulte pas de l'instruction, eu égard aux contestations de la commune d'Ersa, que les réserves relatives notamment aux surfaces actives des filtres des bassins de filtration, aux structures de ces bassins et au bassin de drainage avant rejet à l'aval du canal de comptage revêtiraient ce caractère ; qu'en outre, la société requérante a été mise en demeure les 10 et 24 juillet 2009 respectivement par le BET Savelli, maître d'oeuvre et la commune d'Ersa d'effectuer les travaux afin de lever les réserves précitées ; que, contrairement à ce que soutient la société requérante, eu égard à l'objet et à la portée de l'arrêté préfectoral du 11 mai 2009 portant prescriptions spécifiques à la déclaration de la station d'épuration en litige, requise en application de l'article L. 214-3 du code de l'environnement, le respect de telles prescriptions ne sauraient attesté la conformité des travaux aux stipulations du marché ; qu'en outre, la société Ingenium se prévaut de l'attestation du gérant de la société Alp Bio système du 31 mai 2011 et de la fiche de visite du service d'assistance technique à l'exploitation des stations d'épuration du 21 mars 2012 ; que ces pièces faisant état de ce que la station de Poggio comporte tous éléments, équipements et ouvrages nécessaires au traitement des eaux usées domestiques et que l'effluent traité est de très bonne qualité ne sont toutefois pas de nature à établir que l'ensemble des réserves mentionnées auraient été levées à la date du 10 mars 2009 ; que, de plus, la société requérante n'a transmis qu'en avril 2009 les pièces exigées par les stipulations des articles 4.11.2 et 3.24 du cahier des clauses techniques particulières, préalablement à la réception de l'ouvrage, notamment le plan de récolement ; qu'il n'est par ailleurs pas contesté que si l'ouvrage a été homologué en novembre 2008 par l'APAVE, la société Ingenium n'a pas procédé, ainsi qu'il lui incombait en application des articles 5.9 et 5.10 du même cahier, et ce avant toute réception de la station, aux opérations de mise en route et d'observation préalable ; qu'au surplus, la société Ingenium n'établit pas que l'ensemble des désordres affectant la station d'épuration, survenus postérieurement à son intervention, ne lui serait pas imputable ; que, dès lors, les circonstances que la société n'a pas levé des réserves mentionnées au procès-verbal relatif aux opérations préalables à la réception du 6 janvier 2009, que les pièces dont la transmission au maître d'oeuvre lui appartenait, ont été communiquées tardivement, que les opérations de mise en route et d'observation préalables à la réception, n'ont pas été menées par l'entrepreneur et la survenance de dysfonctionnements de la station s'opposaient à ce que la réception soit regardée comme étant intervenue tacitement ; que, de même, toutes les réserves mentionnées au procès-verbal des opérations préalables à la réception du 6 janvier 2009 ne peuvent être regardées comme ayant été levées au 10 mars 2009, date de la mise en route de la station de Poggio ; que les conclusions présentées à ce titre par la société Ingenium doivent être rejetées ;

Sur les conclusions indemnitaires :

11. Considérant qu'aux termes de l'article 13 du cahier des clauses administratives générales applicable : "13-31. Après l'achèvement des travaux, l'entrepreneur (...) dresse le projet du décompte final établissant le montant total des sommes auxquelles il peut prétendre du fait de l'exécution du marché dans son ensemble, (...) " ; que l'article 13.32 de ce cahier stipule que : " Le projet de décompte final est remis au maître d'oeuvre dans le délai de quarante-cinq jours à compter de la date de notification de la décision de réception des travaux telle qu'elle est prévue au 3 de l'article 41 (...). Toutefois, s'il est fait application des dispositions du 5 de l'article 41, la date du procès-verbal constatant l'exécution des prestations complémentaires est substituée à la date de notification de la décision dès réception des travaux comme point de départ des délais ci-dessus. / (...) " ;

12. Considérant que la réception est l'acte par lequel le maître de l'ouvrage déclare accepter l'ouvrage avec ou sans réserve et qu'elle met fin aux rapports contractuels entre le maître de l'ouvrage et les constructeurs en ce qui concerne la réalisation de l'ouvrage ; que si elle interdit, par conséquent, au maître de l'ouvrage d'invoquer, après qu'elle a été prononcée, et sous réserve de la garantie de parfait achèvement, des désordres apparents causés à l'ouvrage ou des désordres causés aux tiers, dont il est alors réputé avoir renoncé à demander la réparation, elle ne met fin aux obligations contractuelles des constructeurs que dans cette seule mesure ; qu'ainsi la réception demeure, par elle-même, sans effet sur les droits et obligations financiers nés de l'exécution du marché, à raison notamment de retards ou de travaux supplémentaires, dont la détermination intervient définitivement lors de l'établissement du solde du décompte définitif ; que seule l'intervention du décompte général et définitif du marché a pour conséquence d'interdire au cocontractant toute réclamation à cet égard ;

13. Considérant que la société Ingénium demande le paiement de la somme de 256 300,43 euros TTC au titre de la situation n° 8, de la réalisation de travaux supplémentaires, de plus-values, de l'actualisation des situations nos 1 à 7 et de la liquidation partielle du marché ;

En ce qui concerne le solde du marché comprenant la liquidation de la partie du marché portant sur la station de Granaggiolo :

14. Considérant qu'à ce titre, la société requérante demande le paiement de la situation n° 8, d'indemnités au titre de la liquidation de la partie du marché, relative à la station de Granaggiolo et de l'actualisation des situations nos 1 à 7; que, toutefois, ainsi qu'il a été dit, l'ouvrage n'a pas fait l'objet d'une réception définitive ; qu'en outre, il ne résulte pas de l'instruction que le maître d'ouvrage aurait fait preuve d'abus en s'opposant au prononcé de la réception de cet ouvrage ; que, dès lors, les stipulations de l'article 13-32 du cahier des clauses administratives générales-travaux publics faisaient obstacle à ce que la société Ingenium puisse transmettre un projet de décompte final au maître d'ouvrage en vue du règlement du solde du marché ; que dans ces conditions, le tribunal a pu, à juste titre, rejeter les conclusions indemnitaires de la société Ingenium relative au solde du marché ;

En ce qui concerne les conclusions en paiement de plus-values et de travaux supplémentaires :

S'agissant des plus-values :

15. Considérant que la société Ingenium demande le paiement d'indemnités au titre de plus-values résultant du regroupement sur un seul site du traitement les effluents de Poggio et de Granaggiolo, du choix d'une alimentation gravitaire, objet d'un ordre de service du 11 février 2008 aux lieu et place d'une alimentation par filtres par pompage et de l'augmentation de pompage de 5,2 litres/seconde à 6,58 litres/seconde, supérieur à celui prévu au cahier des clauses techniques particulières ; que, toutefois, la société requérante n'établit pas que la résiliation partielle du marché relative à la station d'épuration de Granaggiolo et, en conséquence, la réalisation de la seule station de Poggio auraient entraîné un surcoût réparable alors que le prix du marché n'a fait l'objet d'aucune modification ; que, par suite, la société Ingenium n'établit pas la réalité de son préjudice ;

S'agissant des travaux supplémentaires :

16. Considérant qu'aux termes de l'article 29.11 du cahier des clauses administratives générales, applicables au marché de travaux : " Sauf stipulations différentes du CCAP, l'entrepreneur établit d'après les pièces contractuelles les documents nécessaires à la réalisation des ouvrages, tels que les plans d'exécution, notes de calcul, études de détail. A cet effet, l'entrepreneur fait sur place tous les relevés nécessaires et demeure responsable des conséquences de toute erreur de mesure " ;

17. Considérant que le cocontractant de l'administration peut demander à être indemnisé, sur la base du contrat, des prestations supplémentaires réalisées sans ordre de service, dès lors que ces prestations ont été indispensables à l'exécution du contrat dans les règles de l'art, quel qu'en soit le montant ; que ne font obstacle à cette indemnisation ni le caractère global et forfaitaire du prix du marché, ni les stipulations de l'article 29.11 du cahier des clauses administratives générales exigeant que l'entrepreneur fait sur place tous les relevés nécessaires et demeure responsable des conséquences de toute erreur de mesure ;

18. Considérant que la société Ingenium demande le paiement de travaux relatifs à la réalisation d'un collecteur principal rendue nécessaire à la suite de la demande du maître d'oeuvre de modifier l'implantation de l'ouvrage, à la commande d'une géomembrane d'étanchéité adaptée à la forme de la cuve A1, aux travaux nécessaires à la collecte des eaux sur l'ensemble de la surface de la cuve A 2 pour rejoindre le collecteur principal d'un montant de 34 597,45 euros ; que la société requérante soutient que ces surcoûts ont été validés par le maître d'oeuvre ; qu'en se bornant à faire valoir qu'en réalisant la construction sans études préalables, la société requérante a reconnu la bonne qualité du sol, que le maître d'oeuvre a imposé la reprise des plans d'exécution non conformes et qu'elle aurait dû chiffrer les prestations au stade de son offre, la commune d'Ersa ne conteste pas sérieusement le caractère indispensable des travaux en cause à l'exécution du contrat dans les règles de l'art, alors même qu'aucun ordre de service n'a été notifié à l'entreprise, ni davantage le coût des travaux ; que dans ces conditions, il y a lieu de faire droit à cette demande en condamnant la commune d'Ersa à verser à la société Ingenium la somme non contestée de 34 597,45 euros HT, assortie de la taxe sur la valeur ajoutée de 8 %, soit 37 365,24 euros TTC ;

19. Considérant que la société Ingenium demande le bénéfice des intérêts moratoires à compter du 22 mars 2009 correspondant à la date à laquelle il appartenait à la commune d'Ersa de mandater le solde du marché ; que la société requérante a droit aux intérêts contractuels sur l'indemnité allouée au titre des travaux supplémentaires seulement à compter du 22 mars 2009, ainsi qu'elle le demande ; que la capitalisation des intérêts a été demandée devant le tribunal administratif le 28 octobre 2009 ; qu'à cette date, il n'était pas dû une année d'intérêts ; que, dès lors, conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil, il y a lieu de faire droit à cette demande à compter du 22 mars 2010 ;

20. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société Ingenium est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande en ce qu'elle tendait à la condamnation de la commune d'Ersa à lui verser une indemnité de 37 365,24 euros TTC au titre des travaux supplémentaires ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

21. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la société Ingenium qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la commune d'Ersa demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu de mettre à la charge de la commune d'Ersa la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par la société Ingenium et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La commune d'Ersa versera à la société Ingenium la somme de 37 365,24 euros (trente-sept mille trois cent soixante-cinq euros et vingt-quatre centimes) TTC, avec intérêts contractuels à compter du 22 mars 2009. Les intérêts échus à la date du 22 mars 2010 puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date seront capitalisés à chacune de ces dates pour produire eux-mêmes intérêts.

Article 2 : La commune d'Ersa versera à la société Ingenium la somme de 2 000 euros (deux mille euros) au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Bastia du 3 juin 2010 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de la société Ingenium est rejeté.

Article 5 : Les conclusions de la commune d'Ersa en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à la société Ingenium et à la commune d'Ersa.

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N° 10MA02624

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 10MA02624
Date de la décision : 10/07/2013
Type d'affaire : Administrative

Analyses

Marchés et contrats administratifs - Exécution financière du contrat - Rémunération du co-contractant - Indemnités - Travaux supplémentaires.

Marchés et contrats administratifs - Rapports entre l'architecte - l'entrepreneur et le maître de l'ouvrage - Responsabilité des constructeurs à l'égard du maître de l'ouvrage - Questions générales - Réception des travaux.


Composition du Tribunal
Président : M. GUERRIVE
Rapporteur ?: Mme Micheline LOPA-DUFRENOT
Rapporteur public ?: Mme MARKARIAN
Avocat(s) : SCP FRANC-VALLUET

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2013-07-10;10ma02624 ?
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