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04/07/2013 | FRANCE | N°10MA04548

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2ème chambre - formation à 3, 04 juillet 2013, 10MA04548


Vu, enregistrée le 20 décembre 2010, la requête présentée pour l'Etablissement français du sang (EFS), représenté par son président en exercice, dont le siège est sis 20, avenue du stade de France, à La Plaine St Denis cedex (93218), par la SELARL d'avocats Baffert-Penso et associés ; l'EFS demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0800486 du 18 octobre 2010 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à la condamnation du centre hospitalier de Salon-de-Provence à prendre à sa charge les condamnations prononcées à son encontre

par le tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence le 22 janvier 2007 ;...

Vu, enregistrée le 20 décembre 2010, la requête présentée pour l'Etablissement français du sang (EFS), représenté par son président en exercice, dont le siège est sis 20, avenue du stade de France, à La Plaine St Denis cedex (93218), par la SELARL d'avocats Baffert-Penso et associés ; l'EFS demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0800486 du 18 octobre 2010 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à la condamnation du centre hospitalier de Salon-de-Provence à prendre à sa charge les condamnations prononcées à son encontre par le tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence le 22 janvier 2007 ;

2°) de condamner le centre hospitalier de Salon-de-Provence à prendre à sa charge les condamnations prononcées à l'encontre de l'EFS par arrêt de la Cour d'appel d'Aix-en-Provence le 3 juin 2009 ;

3°) de condamner le centre hospitalier de Salon-de-Provence à lui verser la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi qu'aux entiers dépens ;

L'EFS soutient que :

- Mme B...a engagé devant le tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence une procédure à l'encontre de la compagnie AGF, assureur du responsable de l'accident dont elle a été victime en 1990 et qui serait à l'origine de sa contamination par le virus de l'hépatite C lors d'une transfusion au centre hospitalier de Salon-de-Provence ;

- la compagnie AGF a attrait à cette procédure l'EFS en sa qualité de fournisseur de produits sanguins susceptibles d'être contaminants ;

- saisi à sa demande, le juge des référés a désigné un expert, qui a rendu son rapport le 17 mars 2005 ;

- les conclusions de ce rapport mettent à l'évidence une faute grave et caractérisée dans le fonctionnement de cet établissement de soins ;

- l'EFS a estimé que le centre hospitalier devait ainsi le garantir des condamnations qui seraient éventuellement prononcées par le juge judiciaire à son encontre ;

- le tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence a condamné l'EFS le 22 janvier 2007, confirmé par la Cour d'appel d'Aix-en-Provence le 3 juin 2009, à réparer le préjudice subi par Mme B...;

- le centre hospitalier de Salon a rejeté le 15 janvier 2008 la demande de l'EFS du 20 novembre tendant à la prise en charge par l'établissement des éventuelles condamnations prononcées à son encontre ;

- l'article 102 de la loi du 4 mars 2002 exige que le demandeur apporte un faisceau d'éléments conférant à l'hypothèse de contamination transfusionnelle un degré suffisamment élevé de vraisemblance et qu'en ce cas, la charge de la preuve contraire, et notamment celle de l'innocuité des produits distribués par l'EFS, repose sur le défendeur ;

- en l'espèce, l'expert indique que le centre hospitalier de Salon-de-Provence n'a pas pu fournir les numéros des flacons de sang transfusés, et sans ces numéros, aucune enquête transfusionnelle n'est possible, dès lors que les fournisseurs de sang pouvaient être, soit le centre régional de transfusion sanguine (CRTS) de Marseille, soit des CRTS extérieurs ;

- l'EFS (ancien CRTS de Marseille) livrait au dépôt de sang de l'hôpital de Salon, compte tenu de son éloignement géographique, une certaine quantité de produits sanguins selon les besoins estimés de l'hôpital et c'est ce dernier qui délivrait nominativement aux patients les produits ;

- dans ces conditions, seul l'hôpital est en mesure de savoir quels produits ont été distribués au nom de Mme B...le jour de l'intervention, le 27 juillet 1990 ;

- l'hôpital de Salon a commis une double faute ;

- d'abord, le prélèvement par l'hôpital dans ses stocks devait donner lieu, pour la gestion du stock, à l'élaboration d'un document de distribution, qui aurait dû figurer dans les archives de l'hôpital ;

- les premiers juges ont omis de statuer sur la faute dans la distribution des produits sanguins ;

- c'est à tort que les premiers juges ont déduit de la seule production du dossier médical de la patiente que le centre hospitalier n'avait pas commis de faute, dès lors que les seules mentions apposées dans ce dossier ne peuvent constituer un véritable dossier de transfusions sanguines, pourtant requis par l'arrêté du 11 mars 1968, ni une fiche transfusionnelle au sens de la circulaire du 30 juin 1980 et de celle de 1985, afin de savoir quels produits ont été réellement transfusés à la patiente ;

- ensuite, le centre hospitalier a commis une faute en omettant de conserver et d'archiver les références des produits transfusés ;

- l'EFS n'a ainsi pas pu mener une enquête pour s'exonérer de sa responsabilité, enquête qui aurait été facile, dès lors que, à la date de la transfusion litigieuse en juillet 1990, les produits étaient testés, que le risque de contamination était bien moindre et que l'EFS dispose, pour l'année 1990, des archives des donneurs ;

- le préjudice de l'EFS est constitué par les condamnations prononcées par le juge judiciaire à son encontre ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu, enregistré le 5 mars 2013, le mémoire présenté pour le centre hospitalier de Salon-de-Provence, représenté par son directeur en exercice, par MeC..., qui conclut au rejet de la requête ;

Le centre hospitalier fait valoir que :

- c'est à juste titre que les premiers juges ont estimé qu'à la date de l'intervention litigieuse, le 27 juillet 1990, aucun texte n'imposait au centre hospitalier de Salon de conserver et d'archiver les références des produits transfusés ;

- en effet, la circulaire du 30 juin 1980 prévoyant l'établissement d'une fiche transfusionnelle ne pouvait s'imposer au centre hospitalier en vertu du principe d'autonomie des établissements publics ;

- s'ils sont soumis à la tutelle de l'Etat, les établissements publics de santé sont administrés par un conseil d'administration et par un directeur, qui dispose d'une compétence générale pour assurer la conduite de l'établissement ;

- la circulaire du 17 mai 1985 relative à la prévention des risques transfusionnels devra être écartée pour les mêmes motifs ;

- quant à l'arrêté du 11 mars 1968 portant règlement des archives hospitalières, il ne comporte aucune obligation de conservation et d'archivage des références des produits transfusés ;

- le décret du 17 avril 1943 ne comporte pas non plus d'obligation pour l'établissement de créer une fiche transfusionnelle de nature à permettre la traçabilité des produits sanguins ;

- l'article 38 de ce dossier impose seulement de conserver le dossier médical du patient, mais ne comporte aucune disposition sur une fiche transfusionnelle ;

- la loi du 3 janvier 1979 sur les archives ne comporte pas non plus d'obligation de conservation et d'archivage des références transfusionnelles ;

- l'article R. 710-2-9 du code de la santé publique, issu du décret n° 92-329 du 30 mars 1992, n'était pas applicable à la date des faits ;

- en ne conservant pas les références des produits transfusés à MmeB..., il n'a commis aucune faute de nature à engager sa responsabilité ;

- en tout état de cause, l'EFS n'établit pas un lien de causalité direct et certain entre la faute alléguée et l'impossibilité pour l'Etablissement français du sang d'apporter la preuve de l'innocuité des produits transfusés, dès lors que la Cour d'appel d'Aix-en-Provence a estimé que Mme B...avait pu être contaminée par les produits sanguins qui lui ont été transfusés et la communication des références transfusionnelles n'aurait donc pas permis à l'EFS de s'exonérer de toute responsabilité ;

- le tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence a par ailleurs retenu que le fournisseur de poches de sang transfusées était le CRTS de Marseille aux droits desquels vient l'EFS, comme l'a dit l'expert ;

Vu la lettre du 23 mai 2013 informant les parties de ce que la Cour était susceptible de soulever d'office le moyen d'ordre public tiré de l'irrecevabilité de la requête de l'Etablissement français du sang pour défaut d'intérêt pour agir ;

Vu, enregistrée le 7 juin 2013, la réponse de l'Etablissement français du sang à ce moyen d'ordre public ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de patrimoine ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu la loi n° 79-18 du 3 janvier 1979 sur les archives ;

Vu la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé, notamment son article 102 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 juin 2013 :

- le rapport de Mme Carassic, rapporteure ;

- les conclusions de Mme Fedi, rapporteur publique ;

- et les observations de Me A... du cabinet Campocasso pour l'Etablissement français du sang ;

1. Considérant que, le 25 juillet 1990, Mme B...a été victime, en qualité de passagère transportée dans un véhicule assuré auprès de la compagnie AGF, d'un accident de la circulation ayant notamment provoqué une fracture multi fragmentaire du fémur gauche, qui a impliqué le 27 juillet 1990 au centre hospitalier de Salon-de-Provence une intervention chirurgicale qui a nécessité des transfusions sanguines ; qu'elle a présenté des signes cliniques d'atteinte hépatique au début de l'année 1991 ; que sa sérologie VHC positive a été découverte en avril 1991 ; qu'à la suite du rapport du 17 mars 2005 de l'expert désigné par le juge civil estimant que l'origine transfusionnelle de cette contamination était la plus probable, Mme B...a demandé au tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence la condamnation de la compagnie AGF à indemniser son préjudice résultant de sa contamination du fait de sa transfusion ; que la compagnie AGF a fait assigner l'EFS en tant que responsable de la fourniture du sang contaminé ; que l'EFS a alors fait assigner la société Axa France Assurances Iard, assureur du centre de transfusion sanguine de Marseille, aux droits duquel se trouve l'EFS, afin d'être garanti de toute condamnation qui pourrait être prononcée à son encontre ; que, par jugement du 22 janvier 2007, le tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence a estimé que la contamination de Mme B...avait pour origine la transfusion réalisée le 27 juillet 1990 et a condamné solidairement l'EFS, la compagnie Axa France Iard et la société AGF à verser à Mme B...la somme totale de 186 100 euros au titre de son entier préjudice, à M.B..., son époux, la somme totale de 26 500 euros au titre de son préjudice moral, à la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône la somme de 18 407,68 euros au titre de ses débours et a condamné la société AGF à garantir l'EFS des condamnations prononcées contre lui à hauteur d'un tiers ; que, saisie par la société Axa France Iard, la Cour d'appel d'Aix-en-Provence, par arrêt du 3 juin 2009, a confirmé que la contamination de Mme B...avait pour origine la transfusion réalisée le 27 juillet 1990 au centre hospitalier de Salon-de-Provence et a condamné solidairement l'EFS, la compagnie Axa France Iard et la société AGF à verser à Mme B...la somme totale de 149 150 euros, à son époux la somme de 18 000 euros et à la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône la somme de 49 774,98 euros et a débouté la compagnie AGF de sa demande de garantie contre l'Etablissement français du sang et la société Axa France, au motif que AGF n'établissait pas la faute de l'EFS du fait de la transfusion de la victime par du sang infecté, en l'absence de conservation des archives transfusionnelles par le centre hospitalier de Salon-de-Provence ; qu'estimant, sur le fondement du rapport de l'expert, que le centre hospitalier de Salon-de-Provence avait commis une faute dans la distribution et l'archivage des produits sanguins transfusés à MmeB..., l'EFS a demandé le 20 novembre 2007 à cet établissement de prendre à sa charge les éventuelles condamnations qui seraient prononcées à son encontre par le juge civil ; qu'à la suite du refus du 15 janvier 2008 du centre hospitalier, l'EFS a saisi le tribunal administratif de Marseille d'une demande tendant à la condamnation du centre hospitalier de Salon-de-Provence à prendre à sa charge les condamnations prononcées à son encontre par le tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence le 22 janvier 2007 ; que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa demande ; qu'en appel, l'EFS demande la condamnation du centre hospitalier de Salon-de-Provence à prendre à sa charge les condamnations prononcées à son encontre par l'arrêt susmentionné de la Cour d'appel d'Aix-en-Provence le 3 juin 2009 ; que le centre hospitalier conclut au rejet de la requête ;

Sur la régularité du jugement :

2. Considérant que, devant les premiers juges, l'EFS, qui n'a pas pu mener une enquête transfusionnelle de nature à établir, en application de la présomption d'imputabilité résultant de l'article 102 de la loi du 4 mars 2002, l'innocuité des produits sanguins distribués à Mme B...lors de son opération du 27 juillet 1990 à l'hôpital de Salon-de-Provence, avait invoqué un double fondement de responsabilité pour faute de ce centre hospitalier, à savoir l'absence d'archivage des numéros des poches transfusées à Mme B...et le défaut d'établissement par l'hôpital d'une fiche transfusionnelle comportant des renseignements obligatoires, tels la nature du produit sanguin transfusé, le numéro de flacon et la date de transfusion, afin de savoir quels produits avaient été effectivement transfusés à la patiente ; que les premiers juges ont répondu au moyen tiré de l'absence d'établissement de cette fiche transfusionnelle en indiquant qu'à l'époque des faits, aucun texte n'imposait aux établissements de santé de joindre au dossier médical du patient transfusé une telle fiche ; que, par suite, contrairement à ce que soutient l'EFS, les premiers juges n'ont pas entaché d'irrégularité leur jugement en omettant de statuer sur ce point ;

Sur la responsabilité du centre hospitalier :

3. Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport d'expertise que le centre hospitalier de Salon-de-Provence n'a pas pu fournir les numéros des flacons de sang transfusés à Mme B...et que le fournisseur de poches de sang transfusé pouvait ainsi être le centre régional de transfusion sanguine (CRTS) de Marseille ou de CRTS extérieurs, dès lors que le CRTS de Marseille ne procédait pas à une distribution nominative de sang patient par patient, mais qu'il livrait à l'hôpital de Salon, compte tenu de son éloignement géographique, une quantité de produits sanguins, à charge pour l'hôpital d'assurer la distribution nominative des produits à chaque malade ; que l'expert conclut que, sans les numéros de poches transfusées, aucune enquête transfusionnelle n'est possible et que l'origine transfusionnelle de la contamination est, en l'espèce, la plus probable ;

4. Considérant, d'une part, que l'article 102 de la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé dispose que : "En cas de contestation relative à l'imputabilité d'une contamination par le virus de l'hépatite C antérieure à la date d'entrée en vigueur de la présente loi, le demandeur apporte des éléments qui permettent de présumer que cette contamination a pour origine une transfusion de produits sanguins labiles ou une injection de médicaments dérivés du sang. Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que cette transfusion ou cette injection n'est pas à l'origine de la contamination. Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Le doute profite au demandeur. / Cette disposition est applicable aux instances en cours n'ayant pas donné lieu à une décision irrévocable." ;

5. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 1er de la loi n° 79-18 du 3 janvier 1979, repris depuis aux articles L.211-1 et L.211-2 du code du patrimoine : "Les archives sont l'ensemble des documents, quels que soient leur date, leur forme et leur support matériel, produits ou reçus par toute personne physique ou morale et par tout service ou organisme public ou privé dans l'exercice de leur activité. La conservation des archives est organisée dans l'intérêt public tant pour les besoins de la gestion et de la justification des droits des personnes physiques ou morales, publiques ou privées, que pour la documentation historique de la recherche." ; qu'aux termes de l'article 3 de la même loi, repris à l'article L.211-4 du même code : "Les archives publiques sont : a) Les documents qui procèdent de l'activité de l'Etat des collectivités territoriales des établissements et des entreprises publiques (...). Les archives publiques, quel qu'en soit le possesseur, sont imprescriptibles." ;

6. Considérant qu'en application de ces dernières dispositions, les données transfusionnelles, établies par un centre hospitalier lors de la transfusion d'un patient, et comprenant notamment les numéros des produits sanguins qui ont été transfusés, afin d'assurer la sécurité sanitaire des transfusions sanguines par la traçabilité des produits, sont des archives au sens des dispositions précitées ; qu'il appartenait ainsi au centre hospitalier de Salon-de Provence, dans les circonstances particulières susdécrites de l'espèce, de conserver les numéros des flacons de sang transfusés à MmeB... ; qu'à défaut d'avoir conservé ces documents, le centre hospitalier a commis une faute qui a fait perdre à l'Etablissement français du sang une chance d'établir que la transfusion subie en 1990 par MmeB..., dont la matérialité n'est pas contestée, n'est pas à l'origine de sa contamination au VHC ; que, compte tenu de la date à laquelle a eu lieu cette transfusion, après le 1er mars 1990, date à partir de laquelle les produits sanguins devaient être testés avant d'être effectivement transfusés, de ce que l'EFS soutient sans être contesté que, pour l'année 1990, il dispose de l'ensemble des archives donneurs recueillies auprès des CRTS et que l'enquête transfusionnelle aurait été facile dès lors que le dossier médical de Mme B...ne mentionne que deux donneurs, il y a lieu d'établir cette perte de chance à 30 % ;

Sur le préjudice :

7. Considérant que l'Etablissement français du sang soutient que son préjudice, qu'il ne chiffre pas, est constitué par les condamnations prononcées à son encontre par la Cour d'appel d'Aix-en-Provence le 3 juin 2009 dans le cadre de l'instance qui a opposé Mme B...à la compagnie AGF, à l'EFS et à Axa France Assurances Iard dans les conditions susdécrites ; qu'en réponse à un moyen d'ordre public tiré du défaut d'intérêt pour agir de l'Etablissement français du sang, celui-ci affirme que, si c'est sa compagnie d'assurances Axa, en sa qualité de gestionnaire du contrat GATS, qui a pris en charge la condamnation prononcée à son encontre par le juge judiciaire, en revanche, ce contrat d'assurances couvrant la responsabilité d'EFS, pour l'année 1990, année de contamination de MmeB..., comporte un plafond de garantie fixé à 250 millions de francs (soit 37 millions d'euros) au niveau national pour l'ensemble des centres de transfusion sanguine de France et que son intérêt pour agir réside dans le fait d'éviter que les sommes versées par son assureur soient imputées sur ce plafond contractuel ; que, toutefois, l'EFS, qui n'est pas subrogé dans les droits de la compagnie Axa France Iard, qui, régulièrement mise en cause, n'a pas produit à l'instance, invoque ainsi un préjudice distinct de celui constitué par la perte de chance d'avoir pu éviter sa condamnation par le juge judiciaire ; qu'au surplus, le préjudice invoqué d'un risque d'imputation du montant de la condamnation sur ce plafond assurantiel, est incertain et, au demeurant, non chiffré ; que, dans ces conditions, l'Etablissement français du sang n'est pas fondé à demander la condamnation du centre hospitalier de Salon-de-Provence à prendre à sa charge les condamnations prononcées à son encontre par le juge judiciaire ;

8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'EFS n'est pas fondé à se plaindre de ce que les premiers juges ont rejeté sa demande ;

Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Considérant que les dispositions de cet article font obstacle à ce que le centre hospitalier de Salon-de-Provence, qui n'est pas la partie perdante à la présente instance, soit condamné à verser quelque somme que ce soit à l'EFS au titre des frais non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de l'EFS est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à l'EFS, au centre hospitalier de Salon-de-Provence et à la société Axa France Iard.

Délibéré après l'audience du 13 juin 2013, où siégeaient :

- M. Duchon Doris, président de chambre,

- MmeD..., première conseillère,

- Mme Carassic, première conseillère,

Lu en audience publique, le 4 juillet 2013.

La rapporteure,

M.C. CARASSIC

Le président,

J.C. DUCHON DORIS La greffière,

D. GIORDANO

La République mande et ordonne au ministre des affaires sociales et de la santé en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

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N° 10MA045482

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 10MA04548
Date de la décision : 04/07/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

RESPONSABILITÉ DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - RESPONSABILITÉ EN RAISON DES DIFFÉRENTES ACTIVITÉS DES SERVICES PUBLICS - SERVICE PUBLIC DE SANTÉ - ÉTABLISSEMENTS PUBLICS D'HOSPITALISATION - RESPONSABILITÉ POUR FAUTE SIMPLE : ORGANISATION ET FONCTIONNEMENT DU SERVICE HOSPITALIER - LOI N° 79-18 DU 3 JANVIER 1979 SUR LES ARCHIVES - ARTICLE 1ER DÉFINISSANT LES ARCHIVES - APPLICABILITÉ AUX DOCUMENTS CONTENANT LES RÉFÉRENCES DE PRODUITS SANGUINS TRANSFUSÉS À UNE PATIENTE.

60-02-01-01-01 Article 1er de la loi du 3 janvier 1979 sur les archives définissant les archives comme l'ensemble des documents produits par tout service ou organisme public ou privé dans l'exercice de leur activité et affirmant que la conservation des archives est organisée dans l'intérêt public. Les données transfusionnelles, établies par un centre hospitalier lors de la transfusion d'un patient, et comprenant notamment les numéros des produits sanguins qui ont été transfusés, afin d'assurer la sécurité sanitaire des transfusions sanguines par la traçabilité des produits, sont des archives au sens des dispositions précitées.,,Faute du centre hospitalier pour ne pas avoir conservé les archives transfusionnelles d'une patiente contaminée par le virus de l'hépatite C.

RESPONSABILITÉ DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - RÉPARATION - PRÉJUDICE - -01 PRÉJUDICE RÉSULTANT DE LA PRIVATION - POUR L'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG - D'UNE CHANCE SÉRIEUSE D'ÉTABLIR QU'UNE TRANSFUSION SANGUINE N'EST PAS À L'ORIGINE DE LA CONTAMINATION D'UNE PATIENTE AU VIRUS DE L'HÉPATITE C - EXISTENCE - PRÉJUDICE DISTINCT RÉSULTANT DE LA CONDAMNATION PRONONCÉE À L'ENCONTRE DE L'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG PAR LE JUGE JUDICIAIRE DANS LE CADRE DE L'INSTANCE ENGAGÉE PAR LA PATIENTE DEVANT CE JUGE.

60-04-01 Le centre hospitalier, qui détenait un stock de produits sanguins provenant d'un centre régional de transfusion sanguine et qui n'a pas conservé les archives transfusionnelles d'une patiente atteinte du virus de l'hépatite C a commis une faute qui a fait perdre à l'Etablissement français du sang une chance d'établir, en application de l'article 102 de la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé, que la transfusion subie n'était pas à l'origine de la contamination de la patiente au VHC . La condamnation prononcée à l'encontre de l'Etablissement français du sang par le juge judiciaire dans le cadre de l'instance engagée par la patiente devant ce juge constitue un préjudice distinct de la perte de chance de l'Etablissement français du sang d'établir l'innocuité des produits sanguins distribués.


Composition du Tribunal
Président : M. DUCHON-DORIS
Rapporteur ?: Mme Marie-Claude CARASSIC
Rapporteur public ?: Mme FEDI
Avocat(s) : CABINET D'AVOCATS BAFFERT - PENSO et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2013-07-04;10ma04548 ?
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