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28/06/2013 | FRANCE | N°12MA00510

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 8ème chambre - formation à 3, 28 juin 2013, 12MA00510


Vu la requête enregistrée le 7 février 2012, présentée pour M. E...B..., demeurant..., par Me A...;

M. B...demande à la Cour :

- d'annuler le jugement n° 1004745 du 6 décembre 2011 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 13 septembre 2010 par lequel le ministre de l'intérieur l'a révoqué de ses fonctions ;

- d'annuler ledit arrêté ;

- de mettre à la charge de l'Etat le paiement d'une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il so

utient que :

- les faits qui lui sont reprochés sont matériellement inexacts dès lors qu'il n'...

Vu la requête enregistrée le 7 février 2012, présentée pour M. E...B..., demeurant..., par Me A...;

M. B...demande à la Cour :

- d'annuler le jugement n° 1004745 du 6 décembre 2011 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 13 septembre 2010 par lequel le ministre de l'intérieur l'a révoqué de ses fonctions ;

- d'annuler ledit arrêté ;

- de mettre à la charge de l'Etat le paiement d'une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

- les faits qui lui sont reprochés sont matériellement inexacts dès lors qu'il n'a pas pris l'initiative d'un contact avec une prostituée ; que la médiatisation des faits ne peut lui être imputée ;

- qu'il a été acquitté des faits de viol par arrêt de la Cour d'assises des Alpes-Maritimes en date du 15 décembre 2011 ;

- que la sanction de la révocation n'est pas adaptée à la faute commise ;

- que le principe d'équité a été méconnu dès lors que ses deux collègues ont été sanctionnés d'une exclusion temporaire de fonctions de deux ans ; qu'il a de bons états de services antérieurs ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense enregistré le 26 juillet 2012, présenté pour le ministre de l'intérieur, par MeC... ; Le ministre de l'intérieur demande à la Cour :

- de rejeter la requête de M.B... ;

- de mettre à la charge de M. B...la somme de 1500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que les moyens de la requête sont infondés ;

Vu, en application des dispositions de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative, la lettre en date du 21 décembre 2012 par laquelle les parties ont été informées de la période à laquelle il était envisagé d'appeler l'affaire à l'audience et de ce que l'instruction pourrait être close, au-delà du 10 mai 2013, par l'émission d'une ordonnance de clôture ou d'un avis d'audience ;

Vu la pièce enregistrée le 17 avril 2013, présentée pour le ministre de l'intérieur par Me D...C... ;

Vu la pièce enregistrée le 23 avril 2013, présentée pour M. B...par MeA... ;

Vu l'ordonnance de clôture d'instruction immédiate en date du 14 mai 2013 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée portant droits et obligations des fonctionnaires ;

Vu la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat ;

Vu le décret n° 95-654 du 9 mai 1995 modifié fixant les dispositions communes applicables aux fonctionnaires actifs des services de la police nationale ;

Vu le code de déontologie de la police nationale ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 11 juin 2013 :

- le rapport de Mme Vincent-Dominguez, rapporteur,

- et les conclusions de Mme Hogedez, rapporteur public ;

1. Considérant que, par un arrêté du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales en date du 13 septembre 2010, M.B..., gardien de la paix affecté à la circonscription de sécurité publique de Nice, a été révoqué de ses fonctions ; que M. B...interjette appel du jugement en date du 6 décembre 2011 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté son recours pour excès de pouvoir dirigé contre ledit arrêté ;

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 29 de la loi du 13 juillet 1983 susvisée : " Toute faute commise par un fonctionnaire dans l'exercice de ses fonctions l'expose à une sanction disciplinaire sans préjudice, le cas échéant, des peines prévues par la loi pénale " ; qu'aux termes de l'article 6 du code de déontologie de la police nationale susvisé : " Tout manquement aux devoirs définis par le présent code expose son auteur à une sanction disciplinaire, sans préjudice, le cas échéant, des peines prévues par la loi pénale " ;

3. Considérant que l'arrêté du 13 septembre 2010 est motivé par les faits suivants : " le 24 février 2010, au cours d'une patrouille, chef de bord d'un fourgon de police sérigraphié, M. B...accompagné de trois collègues, tous en tenue d'uniforme, prenait l'initiative d'un contact avec une prostituée pour raison de service selon ses dires ; qu'elle était embarquée dans le fourgon de police ; que la salle d'information et de commandement n'en était, toutefois, pas informée comme elle aurait dû l'être ; que ce fourgon était stationné dans un endroit peu fréquenté et tranquille ; que M. B...et deux de ses collègues bénéficiaient gratuitement des prestations sexuelles de cette prostituée ayant pu ressentir, alors, se trouver être, dans ces circonstances et eu égard à leurs qualités et à la nature de leurs fonctions, sous la pression morale des intéressés ; qu'elle était reconduite ensuite sur le milieu habituel de ses activités ; qu'elle faisait alors, immédiatement, appel à police-secours pour dénoncer cette situation ; que, dans ces circonstances, le gardien de la paix Grégory B...a gravement et délibérément manqué aux obligations statutaires et déontologiques qui s'imposent à tous les fonctionnaires de la police nationale notamment d'intégrité, d'exemplarité, de dignité et de respect absolu des personnes ; que le comportement de ces policiers a été porté à la connaissance du public ; que les agissements de M. B...portent une grave atteinte au crédit et à la réputation du corps auquel il appartient et sont incompatibles avec sa qualité et ses fonctions de policier " ;

4. Considérant, en premier lieu, que si M. B...fait valoir que les faits qui lui sont reprochés sont matériellement inexacts dès lors qu'il n'aurait pas pris l'initiative d'un contact avec l'intéressée, il ressort au contraire de ses propres aveux dans le cadre de l'enquête diligentée par l'inspection générale de la police nationale qu'il a abordée ladite prostituée ; qu'il est constant, d'une part, que celle-ci a été invitée à monter dans le fourgon de police et, d'autre part, que la salle d'information et de commandement n'en a pas été avertie alors qu'il n'est pas contesté que telle est habituellement la procédure ; qu'il est, par ailleurs, également constant que M.B..., ainsi que deux autres de ses collègues, ont eu, pendant leur temps de service, des relations sexuelles avec cette dernière ; que les faits ainsi reprochés à l'intéressé n'étaient pas matériellement inexacts ; qu'en outre, il ne résulte pas des termes de l'arrêté litigieux que le ministre ait imputé la médiatisation de l'affaire au requérant ; que son comportement a été de nature, indépendamment de toute qualification pénale, à porter gravement atteinte au crédit et à la réputation de la police nationale ; qu'il ressort, par ailleurs, des pièces du dossier que si

M. B...a été acquitté des faits de viol par la Cour d'assises des Alpes-Maritimes en première instance par arrêt en date du 15 décembre 2011, il a, au contraire, été reconnu coupable par la Cour d'assises du Rhône statuant en appel, par arrêt en date du 30 novembre 2012, d'avoir, par surprise, menace et contrainte, commis des actes de pénétration sexuelle en abusant de l'autorité que lui conféraient ses fonctions de gardien de la paix en exercice et été condamné à une peine de cinq ans d'emprisonnement avec sursis ;

5. Considérant, en deuxième lieu, que M. B...soutient que les agents qui l'accompagnaient le soir du 24 février 2010 n'ayant fait l'objet que de mesures d'exclusion temporaire de fonctions de deux ans, l'arrêté par lequel le ministre a prononcé sa révocation méconnaît le principe d'égalité ; que cependant, M. B...assurait, lors de la patrouille effectuée la nuit du 24 février 2010, les fonctions de chef de bord du fourgon de police ; qu'ainsi qu'il a été dit, il a pris l'initiative de s'adresser à ladite prostituée et lui a demandé de monter dans le véhicule ; qu'ainsi, eu égard au rôle déterminant qu'il a joué dans la commission des faits et à sa qualité de chef de bord, l'arrêté par lequel le ministre a prononcé sa révocation n'a pas méconnu le principe d'égalité dès lors que lesdits fonctionnaires n'étaient pas dans la même situation que le requérant ;

6. Considérant, en troisième lieu, que si M. B...a pu faire preuve de compétence lors de ses interventions tant comme gardien de la paix que comme sapeur pompier volontaire, il ressort des pièces du dossier qu'il a déjà fait l'objet d'un blâme alors qu'il suivait encore les enseignements de l'école de police ; qu'eu égard à la nature des fonctions exercées par M. B...ainsi qu'à la gravité de la faute commise, la décision par laquelle le ministre a prononcé sa révocation n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il y ait lieu de statuer sur la fin de non-recevoir soulevée par le ministre de l'intérieur, que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa requête ;

Sur les conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation " ;

9. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à payer à M. B...la somme qu'il réclame au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit à la demande présentée par l'Etat au titre de ce même article et de mettre à la charge de M. B...le paiement d'une somme de 1 500 euros ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.

Article 2 : M. B...versera à l'Etat la somme de 1 500 euros (mille cinq cents euros) en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. E...B...et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 11 juin 2013, à laquelle siégeaient :

- M. Gonzales, président de chambre,

- M. Brossier, premier conseiller,

- Mme Vincent-Dominguez, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 28 juin 2013.

Le rapporteur,

A. VINCENT-DOMINGUEZ

Le président,

S. GONZALES

Le greffier,

C. LAUDIGEOIS

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne et à tous les huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier,

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N° 12MA005102


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 8ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12MA00510
Date de la décision : 28/06/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-09-04 Fonctionnaires et agents publics. Discipline. Sanctions.


Composition du Tribunal
Président : M. GONZALES
Rapporteur ?: Mme Aurélia VINCENT-DOMINGUEZ
Rapporteur public ?: Mme HOGEDEZ
Avocat(s) : CARDIX

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2013-06-28;12ma00510 ?
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