Vu la requête, enregistrée le 28 décembre 2012, présentée pour Mme B...D..., demeurant..., par la Selarl Campocasso et associés ; Mme D... demande à la Cour :
1°) d'annuler l'ordonnance n° 1206597 du 29 novembre 2012 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à ce que soit prescrite une expertise portant sur les conditions de sa prise en charge au centre hospitalier de Salon-de-Provence le 25 mars 2010 et en avril 2010, et sur l'évaluation de ses différents préjudices ;
2°) de faire droit à sa demande de première instance ;
3°) de réserver les dépens ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 mai 2013 :
- le rapport de Mme Menasseyre, rapporteure,
- les conclusions de Mme Fedi, rapporteure publique,
- et les observations de Me A...du cabinet Campocasso et associés pour Mme D...et de Me C...pour le centre hospitalier de Salon-de-Provence ;
Après avoir pris connaissance de la note en délibéré, enregistrée le 27 mai 2013, présentée pour le centre hospitalier de Salon-de-Provence ;
1. Considérant que Mme D...relève appel de l'ordonnance du 29 novembre 2012 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à ce qu'il ordonne une expertise médicale relative aux conditions de sa prise en charge par le centre hospitalier de Salon-de-Provence en mars et avril 2010 et à l'évaluation de ses préjudices ;
Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête,
2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 532-1 du code de justice administrative : " Le juge des référés peut, sur simple requête et même en l'absence de décision administrative préalable, prescrire toute mesure utile d'expertise ou d'instruction " ; que, pour décider que l'expertise demandée par Mme D...ne présentait pas le caractère d'utilité requis par ces dispositions, le juge des référés du tribunal administratif de Marseille a jugé que par une décision du 3 juillet 2012, distribuée et reçue par la société Pacifica le 11 juillet 2012, le centre hospitalier de Salon-de-Provence avait rejeté une demande d'indemnité présentée au nom de Mme D...par la société de protection juridique Pacifica qui devait être regardée comme ayant formé une demande préalable d'indemnité en qualité de mandataire de son assurée, que cette décision n'avait pas été contestée dans les deux mois de sa notification à l'intéressée et qu'ainsi cette dernière n'était plus recevable à rechercher la responsabilité de l'établissement ;
3. Considérant qu'aux termes de l'article R. 421-3 du code de justice administrative : " (...) l'intéressé n'est forclos qu'après un délai de deux mois à compter du jour de la notification d'une décision expresse de rejet : / 1° En matière de plein contentieux (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que seule la notification d'une décision expresse du centre hospitalier de Salon-de-Provence rejetant une demande d'indemnité valablement présentée au nom de Mme D...pouvait faire courir à l'encontre de cette dernière le délai pour former une action en réparation devant la juridiction administrative ; qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés que l'assureur auprès duquel Mme D...avait souscrit un contrat de protection juridique a écrit au directeur du centre hospitalier le 16 mai 2012 puis à nouveau le 14 juin suivant ; que le premier de ces courriers, s'il indiquait que la responsabilité de l'hôpital était entièrement engagée, se bornait à demander les coordonnées de l'assureur de l'hôpital ; que le second réitérait cette demande en indiquant " à défaut de réponse sous 10 jours à compter de la réception de la présente, notre cliente sera contrainte de saisir la juridiction compétente " ; que les démarches par lesquelles un patient se borne à signaler à l'administration son intention de se pourvoir devant le juge afin d'obtenir réparation du préjudice qu'il allègue avoir subi ne constituent pas une réclamation indemnitaire préalable ; qu'eu égard aux termes dans lesquels ces courriers étaient rédigés, ils ne pouvaient, en tout état de cause, être considérés comme des réclamations préalables présentées au nom de MmeD... ; que, dès lors, et eu égard aux dispositions de l'article R. 421-3 du code de justice administrative, la notification de la décision du 3 juillet 2012 n'a pas fait courir le délai légal pour la présentation par Mme D...d'un recours indemnitaire contre le centre hospitalier de Salon-de-Provence ; que cette dernière est, par suite, fondée à soutenir que la mesure d'expertise sollicitée n'était pas dépourvue d'utilité et que c'est à tort que le juge des référés du tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande en ce sens ;
4. Considérant que Mme D...fait également valoir qu'une réparation au titre de la solidarité nationale ne saurait être exclue ; qu'en l'état du dossier et dès lors qu'il n'apparaît pas manifeste que les conditions ne seraient pas réunies pour une mise en jeu de l'indemnisation au titre de la solidarité nationale et, qu'ainsi, l'ONIAM n'est pas manifestement étranger au litige, il y a lieu d'ordonner que cette expertise soit également réalisée au contradictoire de l'ONIAM ;
Sur les dépens :
5. Considérant que tant devant les premiers juges qu'en appel, Mme D...a demandé que les dépens soient réservés, le centre hospitalier de Salon-de-Provence demandant pour sa part qu'ils soient mis à la charge de cette dernière ; que l'ONIAM demande pour sa part que les frais d'expertise soient mis à la charge de Mme D...et le surplus réservé ; que le juge des référés du tribunal administratif a mis la contribution à l'aide juridique à la charge de MmeD... ;
6. Considérant qu'aux termes de l'article R. 761-1 du code de justice administrative : " Les dépens comprennent la contribution pour l'aide juridique prévue à l'article 1635 bis Q du code général des impôts, ainsi que les frais d'expertise, d'enquête et de toute autre mesure d'instruction dont les frais ne sont pas à la charge de l'Etat. /Sous réserve de dispositions particulières, ils sont mis à la charge de toute partie perdante sauf si les circonstances particulières de l'affaire justifient qu'ils soient mis à la charge d'une autre partie ou partagés entre les parties. " ;
En ce qui concerne les frais d'expertise :
7. Considérant qu'aux termes de l'article R. 621-13 du code de justice administrative : " Lorsque l'expertise a été ordonnée sur le fondement du titre III du livre V, le président du tribunal ou de la cour, après consultation, le cas échéant, du magistrat délégué, (...) en fixe les frais et honoraires par une ordonnance prise conformément aux dispositions des articles R. 621-11 et R. 761-4. Cette ordonnance désigne la ou les parties qui assumeront la charge de ces frais et honoraires. (...) Dans le cas où les frais d'expertise mentionnés à l'alinéa précédent sont compris dans les dépens d'une instance principale, la formation de jugement statuant sur cette instance peut décider que la charge définitive de ces frais incombe à une partie autre que celle qui a été désignée par l'ordonnance mentionnée à l'alinéa précédent ou par le jugement rendu sur un recours dirigé contre cette ordonnance. " ;
8. Considérant que, dans le cas d'une expertise ordonnée en référé, il appartient au seul président du tribunal de désigner, par ordonnance, la partie qui assumera la charge des frais et honoraires de l'expertise en application du premier alinéa de l'article R. 621-13 du code de justice administrative ; que, dans le cas où les frais et honoraires d'expertise sont compris dans les dépens d'une instance principale, il appartient à la formation de jugement statuant sur l'instance à laquelle se rattache une expertise ordonnée en référé, de se prononcer sur la charge définitive de ces frais et honoraires et de désigner, le cas échéant, une partie autre que celle qui a été désignée par l'ordonnance mentionnée au premier alinéa de l'article R. 621-13 du même code, en application du deuxième alinéa du même article ; qu'il n'appartient au juge des référés ni de déterminer la charge des dépens de la mesure d'instruction qu'il ordonne ni de la réserver pour le futur ; qu'il en résulte que, en tant qu'elles portent sur les frais d'expertise, tant les conclusions du centre hospitalier de Salon-de-Provence et celles de l'ONIAM tendant à ce que les dépens soient mis à la charge de MmeD..., que les conclusions de Mme D...tendant à ce qu'ils soient réservés doivent être rejetées ;
En ce qui concerne la contribution pour l'aide juridique :
9. Considérant qu'aux termes de l'article R. 411-2-1 du code de justice administrative : " La contribution n'est due qu'une seule fois lorsqu'un même requérant introduit une demande au fond portant sur les mêmes faits qu'une demande de référé présentée accessoirement et fondée sur le titre III du livre V du présent code " ; que si la contribution pour l'aide juridique prévue par l'article 1635 bis Q du code général des impôts est au nombre des dépens mentionnés à l'article R. 761-1 du code de justice administrative, il n'appartient pas au juge, en l'absence de conclusions des parties en ce sens, de statuer sur la charge définitive de la contribution acquittée par le requérant ;
10. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, dans l'hypothèse où la contribution pour l'aide juridique acquittée par un requérant lors d'une demande en référé fondée, comme en l'espèce, sur les dispositions de l'article R. 532-1 du code de justice administrative est comprise dans les dépens d'une instance principale, il n'appartiendra pas à la formation de jugement statuant sur cette instance principale, sauf conclusion en ce sens, de statuer sur la charge définitive de la contribution acquittée par le requérant au seul stade de l'introduction de sa demande en référé ; qu'il en résulte que le juge des référés, saisi de conclusions en ce sens, est compétent pour statuer sur de telles conclusions ou sur des conclusions tendant à ce que la charge définitive de cette contribution soit réservée ;
11. Considérant que, tant en première instance qu'en appel, le centre hospitalier de Salon-de-Provence s'est opposé à la mesure d'expertise sollicitée par MmeD... ; qu'il doit, par suite, dans chacune de ces instances, être regardé comme la partie perdante au sens des dispositions de l'article R. 761-1 du code de justice administrative ; qu'il en résulte, d'une part, que c'est à tort que le juge des référés du tribunal a fait droit à ses conclusions tendant à ce que la contribution pour l'aide juridique acquittée en première instance soit mise à la charge de Mme D...et, d'autre part, que ses conclusions tendant à ce que la contribution pour l'aide juridique acquittée en appel soit mise à la charge de l'appelante doivent être rejetées ; qu'il y a lieu en revanche non pas, en l'absence de conclusion en ce sens émanant de l'intéressée, de statuer sur la charge définitive de cette contribution, mais de faire droit aux conclusions de Mme D...tendant à ce que la charge de cette contribution soit réservée ;
12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme D...est fondée à soutenir que c'est à tort que le juge des référés du tribunal administratif de Marseille a refusé de faire droit à sa demande d'expertise et a mis à sa charge la contribution pour l'aide juridique prévue par les dispositions de l'article 1635 bis Q du code général des impôts ;
DÉCIDE :
Article 1er : L'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Marseille en date du 29 novembre 2012 est annulée.
Article 2 : Le Dr Mounal, est désigné pour procéder, en présence de Mme D..., du centre hospitalier de Salon-de-Provence, de la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône et de l'ONIAM, dans les conditions prévues aux articles R. 621-2 à R. 621-14 du code de justice administrative, à une expertise médicale à l'effet :
1°) d'examiner, en tant que de besoin, MmeD..., de prendre connaissance de son dossier médical et d'entendre les parties dans leurs dires ;
2°) de décrire les conditions de la prise en charge par le centre hospitalier de Salon-de-Provence de la grossesse extra-utérine de Mme D...en mars et avril 2010 ; de préciser les traitements administrés, les interventions pratiquées et la durée des hospitalisations ;
3°) de dire si les soins et traitements dont Mme D...a bénéficié au centre hospitalier de Salon-de-Provence ont été conformes aux règles de l'art et aux données acquises de la science médicale de l'époque, s'ils ont été diligents et adaptés à son état de santé ; de préciser si la prise en charge de Mme D...a pu être défaillante et en quoi ; en l'absence de faute, de dire si la situation de Mme D...relève d'un aléa thérapeutique ;
4°) de dire si les complications qui sont apparues dans la prise en charge de Mme D... auraient pu être évitées avec une prise en charge plus adaptée ou différente ;
5°) dans le cas où un quelconque manquement pourrait être reproché au centre hospitalier de Salon-de-Provence, de déterminer les préjudices strictement imputables à ce manquement en les distinguant des conséquences normalement prévisibles de tout état ou pathologie intercurrent ;
6°) d'une manière générale, d'évaluer la durée du déficit fonctionnel temporaire total et partiel en indiquant les périodes pendant lesquelles la victime a été, du fait de son déficit fonctionnel temporaire, dans l'incapacité totale ou partielle de poursuivre ses activités professionnelles habituelles, de fixer la date de consolidation et en cas d'incapacité partielle, en préciser le taux exprimé en pourcentage ;
7°) en cas de faute dans la prise en charge de Mme D...ou d'aléa thérapeutique, d'évaluer, sur une échelle de 1 à 7, son préjudice esthétique éventuel, son pretium doloris, ainsi que les troubles dans ses conditions d'existence, son préjudice moral, son éventuel préjudice d'agrément ;
8°) d'une manière générale, de donner tout renseignement utile pour permettre au juge de statuer s'il est saisi au fond.
Article 3 : L'expert, pour l'accomplissement de sa mission, se fera communiquer tous documents relatifs à l'état de santé de Mme D...et notamment tous documents relatifs aux examens, soins et interventions pratiqués sur l'intéressée lors de sa prise en charge par le centre hospitalier de Salon-de-Provence ; il pourra entendre toute personne du centre hospitalier ayant donné des soins à MmeD....
Article 4 : Le rapport d'expertise sera déposé au greffe en deux exemplaires dans les trois mois suivant la prestation de serment dont, en application des dispositions de l'article R. 621-9 du code de justice administrative, des copies seront notifiées aux parties par l'expert.
Article 5 : L'expert accomplira la mission définie à l'article 2 dans les conditions prévues par les articles R. 621-1 à R.621-14 du code de justice administrative. Les parties devront notamment être averties par l'expert des jours et heures auxquels il sera procédé à l'expertise ; cet avis leur sera adressé quatre jours au moins à l'avance, par lettre recommandée. Les observations faites par les parties dans le cours des opérations devront être consignées dans le rapport, avec les réponses de l'expert.
Article 6 : La charge de la contribution pour l'aide juridique prévue à l'article 1635 bis Q du code général des impôts acquittée par Mme D...tant en première instance qu'en appel est réservée et sera déterminée dans le cadre de l'instance principale.
Article 7 : Le surplus des conclusions de l'ensemble des parties est rejeté.
Article 8 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B...D..., au centre hospitalier de Salon-de-Provence, à la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône et à l'ONIAM.
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N° 12MA04936