Vu la requête, enregistrée le 11 juillet 2011, présentée pour M. B... A..., élisant domicile..., par Me C... ;
M. A... demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n°1000392 du 14 avril 2011 par lequel le tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 22 mars 2010 par lequel le préfet de la Haute Corse a décidé la remise de M. A...aux autorités espagnoles, ensemble la décision du même jour le plaçant en rétention dans les locaux du commissariat de police de Bastia ;
2°) d'annuler cet arrêté du 22 mars 2010 et la décision de placement en rétention ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;
.........................................................................................................
Vu les autres pièces du dossier ;
...........................................................................................................
Vu l'accord franco-espagnol du 26 novembre 2002 relatif à la réadmission des personnes en situation irrégulière ;
Vu le règlement (CE) n° 562/2006 du Parlement européen et du Conseil de l'Union européenne du 15 mars 2006 ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et le décret n°91-1266 du 19 décembre 1991 ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 mai 2013,
- le rapport de M. Sauveplane, premier conseiller ;
1. Considérant que M.A..., de nationalité marocaine, est entré en France le 21 mars 2010 selon ses déclarations, sous couvert d'une carte de séjour valable jusqu'au 19 février 2010 délivrée par les autorités espagnoles ; que, n'ayant pu justifier d'une entrée régulière sur le territoire français lors de son interpellation par les services de la police aux frontières le 22 mars 2010, le préfet de la Haute-Corse a, par un arrêté du 22 mars 2010, décidé la remise de M. A... aux autorités espagnoles et, par une décision du même jour, l'a placé en rétention dans les locaux du commissariat de police de Bastia ; que M. A...relève appel du jugement du 14 avril 2011 par lequel le tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions précitées du préfet de Haute-Corse ;
Sur la demande d'admission provisoire à l'aide juridictionnelle :
2. Considérant qu'aux termes de l'article 20 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique : " Dans les cas d'urgence (...), l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle peut être prononcée soit par le président du bureau ou de la section compétente du bureau d'aide juridictionnelle, soit par la juridiction compétente ou son président " ; qu'aux termes de l'article 41 du décret n°91-1266 du 19 décembre 1991 : " Lorsque la demande d'aide juridictionnelle est formée après que la partie concernée ou son mandataire a eu connaissance de la date d'audience et moins d'un mois avant celle-ci, il est statué sur cette demande selon la procédure d'admission provisoire. " ;
3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A...a déposé le 29 avril 2013 une demande d'aide juridictionnelle ; qu'en application des dispositions précitées, il y a lieu de prononcer l'admission provisoire de M. A...au bénéfice de l'aide juridictionnelle ;
Sur la légalité de la décision de remise aux autorités espagnoles :
En ce qui concerne la légalité externe :
4. Considérant que M. A...n'a invoqué devant le tribunal administratif de Bastia que des moyens tirés de l'illégalité interne de la décision attaquée ; que s'il soutient que le préfet de la Haute-Corse, en prenant cette décision, aurait commis une erreur de procédure, cette prétention, fondée sur une cause juridique distincte, constitue une demande nouvelle irrecevable en appel ;
En ce qui concerne la légalité interne :
5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 531-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction alors en vigueur : " Par dérogation aux articles L. 213-2 et L. 213-3, L. 511-1 à L. 511-3, L. 512-2 à L. 512-4, L. 513-1 et L. 531-3, l'étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne qui a pénétré ou séjourné en France sans se conformer aux dispositions des articles L. 211-1, L. 211-2, L. 311-1 et L. 311-2 peut être remis aux autorités compétentes de l'Etat membre qui l'a admis à entrer ou à séjourner sur son territoire, ou dont il provient directement, en application des dispositions des conventions internationales conclues à cet effet avec les Etats membres de l'Union européenne./ L'étranger visé au premier alinéa est informé de cette remise par décision écrite et motivée prise par une autorité administrative définie par décret en Conseil d'Etat./ Cette décision peut être exécutée d'office par l'administration après que l'étranger a été mis en mesure de présenter des observations et d'avertir ou de faire avertir son consulat, un conseil ou toute personne de son choix. " ; qu'à ceux de l'article L. 211-1 : " Pour entrer en France, tout étranger doit être muni : 1° Des documents et visas exigés par les conventions internationales et les règlements en vigueur (...) " ;
6. Considérant qu'il résulte des pièces du dossier que M.A..., ressortissant marocain titulaire d'un permis de séjour périmé délivré par les autorités espagnoles, n'a pu justifier ni d'une entrée régulière sur le territoire français, ni d'un titre de séjour valide l'autorisant à voyager en France ; qu'ainsi il se trouvait dans un cas de figure où le préfet de la Haute-Corse pouvait décider sa remise aux autorités espagnoles ;
7. Considérant qu'aux termes de l'article 5 du règlement (CE) n° 562/2006 du Parlement européen et du Conseil du 15 mars 2006 établissant un code communautaire relatif au régime de franchissement des frontières par les personnes : " 1. Pour un séjour n'excédant pas trois mois sur une période de six mois, les conditions d'entrée pour les ressortissants de pays tiers sont les suivantes :/ a) être en possession d'un document ou de documents de voyage en cours de validité permettant le franchissement de la frontière ;/ b) être en possession d'un visa en cours de validité si celui-ci est requis en vertu du règlement (CE) n° 539/2001 du Conseil du 15 mars 2001 fixant la liste des pays tiers dont les ressortissants sont soumis à l'obligation de visa pour franchir les frontières extérieures des États membres et la liste de ceux dont les ressortissants sont exemptés de cette obligation, sauf s'ils sont titulaires d'un titre de séjour en cours de validité ;/ c) justifier l'objet et les conditions du séjour envisagé, et disposer des moyens de subsistance suffisants, tant pour la durée du séjour envisagé que pour le retour dans le pays d'origine ou le transit vers un pays tiers dans lequel leur admission est garantie, ou être en mesure d'acquérir légalement ces moyens ;/ d) ne pas être signalé aux fins de non-admission dans le SIS ;/ e) ne pas être considéré comme constituant une menace pour l'ordre public, la sécurité intérieure, la santé publique ou les relations internationales de l'un des États membres et, en particulier, ne pas avoir fait l'objet d'un signalement aux fins de non-admission dans les bases de données nationales des États membres pour ces mêmes motifs (...) " ; qu'aux termes de l'article 2 (" Définitions ") du même règlement : " Aux fins du présent règlement on entend par : (...) 15) "titre de séjour":/ a) tous les titres de séjour délivrés par les États membres selon le format uniforme prévu par le règlement (CE) no 1030/2002 du Conseil du 13 juin 2002 établissant un modèle uniforme de titre de séjour pour les ressortissants de pays tiers ;/ b) tous les autres documents délivrés par un État membre aux ressortissants de pays tiers et leur autorisant le séjour ou le retour sur son territoire, à l'exception des titres temporaires délivrés au cours de l'examen d'une première demande de titre de séjour tel que visé au point a) ou au cours de l'examen d'une demande d'asile " ; qu'enfin, aux termes de l'article 13 de ce même règlement : " 1. L'entrée sur le territoire des États membres est refusée au ressortissant de pays tiers qui ne remplit pas l'ensemble des conditions d'entrée, telles qu'énoncées à l'article 5, paragraphe 1, et qui n'appartient pas à l'une des catégories de personnes visées à l'article 5, paragraphe 4. Cette disposition est sans préjudice de l'application des dispositions particulières relatives au droit d'asile et à la protection internationale ou à la délivrance de visas de long séjour " ;
8. Considérant que M. A...soutient qu'il était titulaire d'un droit au séjour dans un pays de l'espace Schengen et qu'il avait ainsi la possibilité de circuler en France pendant trois mois sans être soumis à une obligation de visa, en application de l'article 5 du règlement CE 562/2006 du 15 mars 2006, pendant la procédure de renouvellement de son titre de séjour en Espagne ; qu'il n'est toutefois pas contesté que M. A...n'a pu justifier de la date de son entrée sur le territoire français ; qu'ainsi il n'établit pas séjourner en France depuis une durée inférieure à trois mois à la date de la décision attaquée ; que, dès lors, il ne peut utilement invoquer l'article 5 du règlement n° 562/2006 précité qui dispense de visa les ressortissants étrangers titulaire d'un titre de séjour délivré par un Etat membre pour un séjour de moins de trois mois dont il est au demeurant dépourvu ; que le moyen doit être écarté ;
Sur la légalité de la décision de placement en rétention :
9. Considérant qu'aux termes de l'article L. 551-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction alors en vigueur : " Le placement en rétention d'un étranger dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire peut être ordonné lorsque cet étranger : 1° Soit, devant être remis aux autorités compétentes d'un Etat membre de l'Union européenne en application des articles L. 531-1 et L. 531-2, ne peut quitter immédiatement le territoire français (...) " ;
10. Considérant qu'il résulte des pièces du dossier que M.A..., qui n'a pu justifier ni d'une entrée régulière sur le territoire français, ni d'un titre de séjour valide l'autorisant à voyager en France, doit être remis aux autorités espagnoles en application de l'article L. 531-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il n'a pas davantage justifié être en mesure de quitter immédiatement le territoire français ; qu'ainsi il se trouve dans un cas où le préfet de la Haute-Corse est en droit, en application des dispositions précitées, de le placer en rétention dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire ;
11. Considérant, en premier lieu que si M. A...soutient que les articles L. 551-3 et R. 551-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile imposent à l'administration de respecter la liberté de communication de l'étranger placé en rétention, ce moyen, qui fait référence aux conditions de la rétention, est inopérant à l'appui des conclusions dirigées contre la légalité de la décision de placement en rétention, laquelle s'apprécie à la date de son édiction et non en fonction d'évènements postérieurs ; qu'ainsi les conditions d'exécution de la mesure de placement en rétention sont sans influence sur sa légalité et le moyen ne peut qu'être écarté ;
12. Considérant, en second lieu, que si M. A...soutient que la décision de placement en rétention serait illégale, par voie de conséquence de l'illégalité de la décision de réadmission en Espagne, il résulte de ce qui a été dit au point n°8 que ce moyen n'est pas fondé et que celui dirigé contre la décision de placement en rétention doit ainsi être écarté ;
13. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
DECIDE :
Article 1er : M. A...est admis à titre provisoire au bénéfice de l'aide juridique.
Article 2 : La requête de M. A...est rejetée.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Corse.
''
''
''
''
N°11MA02679 2