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16/04/2013 | FRANCE | N°11MA00621

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 8ème chambre - formation à 3, 16 avril 2013, 11MA00621


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 15 février 2011 sous le n° 11MA00621, présentée par Me D...pour M. B...A..., demeurant ...;

M. A...demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement n° 0903574 du 10 décembre 2010 par lequel le tribunal administratif de Nice, en lui allouant une indemnité d'un montant en principal de 17 000 euros seulement, n'a que partiellement fait droit à sa demande tendant à la condamnation du centre hospitalier universitaire de Nice à lui payer une indemnité en principal de 246 668 euros en réparation des conséquences dommag

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Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 15 février 2011 sous le n° 11MA00621, présentée par Me D...pour M. B...A..., demeurant ...;

M. A...demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement n° 0903574 du 10 décembre 2010 par lequel le tribunal administratif de Nice, en lui allouant une indemnité d'un montant en principal de 17 000 euros seulement, n'a que partiellement fait droit à sa demande tendant à la condamnation du centre hospitalier universitaire de Nice à lui payer une indemnité en principal de 246 668 euros en réparation des conséquences dommageables de sa non-réintégration dans les effectifs de cet établissement hospitalier ;

2°) de condamner le centre hospitalier universitaire de Nice à lui payer une indemnité d'un montant total en principal de 246 668 euros, augmentée des intérêts au taux légal et du produit de leur capitalisation ;

3°) de mettre à la charge dudit centre hospitalier universitaire la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu l'ordonnance du 5 décembre 2012 fixant la clôture de l'instruction, en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative ;

Vu l'ordonnance du 15 janvier 2013 portant réouverture de l'instruction ;

Vu les mesures du 16 janvier 2013 adressées aux parties afin de compléter l'instruction ;

Vu l'avis du 18 janvier 2013 fixant l'audience au 5 février 2013 ;

Vu les mémoires, enregistrés au greffe de la Cour les 17 janvier, 25 janvier, 30 janvier et 1er février 2013, présentés par Me D...pour M.A..., qui conclut aux mêmes fins que celles de ses précédentes écritures, par les mêmes moyens, en produisant de nouvelles pièces ;

Vu le mémoire, enregistré au greffe de la Cour le 29 janvier 2013, présenté par Me C... pour le centre hospitalier universitaire de Nice, qui conclut aux mêmes fins que celles de ses précédentes écritures, par les mêmes moyens ;

Le centre hospitalier universitaire intimé soutient en outre que M.A..., malgré les nouvelles pièces qu'il produit, reste dans l'incapacité de justifier ses revenus au titre des années 1999, 2000, 2001, 2003 et 2004 ; il ne justifie pas non plus de son statut de conjoint collaborateur ; il est, en outre, surprenant que l'administration fiscale ait effectué des prélèvements mensuels pour 3 080 euros en 2004, alors que l'intéressé et son épouse n'avaient déclaré que 9 852 euros au titre de l'année 2002 ; par ailleurs, il existe des contradictions dans le contenu des pièces produites ; l'intéressé n'a jamais demandé le bénéfice de l'allocation chômage ;

Vu l'avis du 1er février 2013 portant renvoi d'audience ;

Vu le mémoire, enregistré au greffe de la Cour le 26 février 2013, présenté par Me D... pour M.A..., qui conclut aux mêmes fins que celles de ses précédentes écritures, par les mêmes moyens ;

Vu l'avis fixant l'audience au 26 mars 2013 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 modifiée relative à la prescription des créances sur l'Etat, les départements, les communes et les établissements publics ;

Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;

Vu la loi modifiée n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière ;

Vu le décret n° 91-45 du 14 janvier 1991 portant statuts particuliers des personnels ouvriers, des conducteurs d'automobile, des conducteurs ambulanciers et des personnels d'entretien et de salubrité de la fonction publique hospitalière, modifié par le décret n° 2007-1185 du 3 août 2007 ;

Vu le décret n° 88-976 du 13 octobre 1988 relatif au régime particulier de certaines positions des fonctionnaires hospitaliers, à l'intégration et à certaines modalités de mise à disposition ;

Vu le décret modifié n° 88-386 du 19 avril 1988 relatif aux conditions d'aptitude physique et aux congés de maladie des agents de la fonction publique hospitalière ;

Vu le décret n° 2006-227 du 24 février 2006 modifié relatif à l'organisation des carrières des fonctionnaires hospitaliers de catégorie C et le décret n° 2006-228 du 24 février 2006 modifié instituant différentes échelles de rémunération pour les fonctionnaires hospitaliers de catégorie C ;

Vu l'arrêté interministériel du 14 janvier 1991 relatif à l'échelonnement indiciaire de certains des personnels régis par le décret n° 91-45 du 14 janvier 1991 portant statuts particuliers des personnels ouvriers, des conducteurs d'automobiles, des conducteurs ambulanciers et des personnels d'entretien et de salubrité de la fonction publique hospitalière et l'arrêté interministériel du 11 mai 2007 fixant l'échelonnement indiciaire des grades et emplois de catégorie C ;

Vu le code civil ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 26 mars 2013 :

- le rapport de M. Brossier, rapporteur,

- les conclusions de Mme Hogedez, rapporteur public,

- puis les observations de Me D...pour M. A...et de MeE..., substituant

MeC..., pour le centre hospitalier universitaire de Nice ;

Après avoir pris connaissance de la note en délibéré enregistrée le 27 mars 2013, présentée par Me D...pour M.A... ;

1. Considérant qu'il résulte de l'instruction que M.A..., ouvrier professionnel qualifié titulaire du centre hospitalier universitaire de Nice exerçant le métier de cuisinier, dont le placement en position de disponibilité pour convenance personnelle expirait au 31 décembre 1999, a été réintégré dans les effectifs dudit centre en juin 2009 ; que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a retenu la faute du centre hospitalier universitaire pour avoir méconnu le délai raisonnable dans lequel l'intéressé devait être réintégré, après avoir notamment tardé à engager la procédure administrative qui a abouti à son reclassement ; qu'après avoir rejeté l'exception de prescription quadriennale opposée par le centre intimé, le tribunal a alloué à ce titre à M. A...une indemnité de 17 000 euros ; que, par son appel principal, M. A...conteste le quantum de son indemnisation ; que, par son appel incident, le centre hospitalier universitaire intimé conteste l'engagement même de sa responsabilité en invoquant l'absence de faute et en opposant en outre, à nouveau, la prescription quadriennale ;

Sur la responsabilité :

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 62 de la loi du 9 janvier 1986 susvisée : " La disponibilité est la position du fonctionnaire qui, placé hors de son établissement, cesse de bénéficier, dans cette position, de ses droits à l'avancement et à la retraite. La disponibilité est prononcée soit à la demande de l'intéressé, soit d'office à l'expiration des congés prévus aux 2°, 3° et 4° de l'article 41 et à l'article 43 et dans les cas prévus aux articles 55 et 56 (...). Un décret en Conseil d'État détermine les cas et conditions de mise en disponibilité, sa durée ainsi que les modalités de réintégration des fonctionnaires intéressés à l'expiration de la période de disponibilité " ; qu'aux termes de l'article 31 du décret du 13 octobre 1988 pris en application des dispositions précitées : " La mise en disponibilité peut être accordée, sur demande du fonctionnaire et sous réserve des nécessités du service, dans les cas suivants : (...) 2° Pour convenances personnelles : la durée de la disponibilité ne peut, dans ce cas, excéder trois ans ; la disponibilité est renouvelable, mais ne peut dépasser au total six années pour l'ensemble de la carrière " ; que l'article 37 de ce même décret précise : " Deux mois au moins avant l'expiration de la période de disponibilité en cours, le fonctionnaire doit solliciter soit le renouvellement de sa disponibilité soit sa réintégration. Faute d'une telle demande, l'intéressé est rayé des cadres, à la date d'expiration de la période de disponibilité. Sous réserve des dispositions des troisième et quatrième alinéas ci-dessous, la réintégration est de droit à la première vacance lorsque la disponibilité n'a pas excédé trois ans. Le fonctionnaire qui refuse l'emploi proposé est maintenu en disponibilité. / Le fonctionnaire qui ne peut être réintégré faute de poste vacant est maintenu en disponibilité jusqu'à sa réintégration et au plus tard jusqu'à ce que trois postes lui aient été proposés (...) " ;

3. Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de ces dispositions que le fonctionnaire hospitalier mis en disponibilité sur sa demande pour convenances personnelles a le droit, sous réserve de la vacance d'un emploi correspondant à son grade, d'obtenir sa réintégration à l'issue de la période de disponibilité ; que si les textes précités n'imposent pas à l'autorité dont relève le fonctionnaire de délai pour procéder à cette réintégration, celle-ci doit intervenir, dans un délai raisonnable, en fonction des vacances d'emplois qui existent ou qui se produisent dans les effectifs du personnel de l'établissement public de santé auquel est rattaché le fonctionnaire à réintégrer, lequel à cet égard ne peut se prévaloir d'un droit à être réintégré par priorité dès la première vacance d'emploi ;

4. Considérant, en troisième lieu, qu'il résulte de l'instruction que M. A...a bénéficié à sa demande d'une mise en disponibilité pour convenance personnelle à compter du 1er janvier 1994, d'une durée de six années, soit la durée maximale autorisée par les dispositions statutaires précitées, expirant au 1er janvier 2000 ; qu'il a sollicité, dans le délai de deux mois prévu par les dispositions statutaires précitées, sa réintégration au 2 janvier 2000 ; que le 17 avril 2000, le centre hospitalier universitaire a rejeté cette demande au motif de l'absence de poste vacant correspondant au grade de l'intéressé et l'a maintenu par voie de conséquence en position de disponibilité à compter du 2 janvier 2000 ; que cette absence de poste vacant au 17 avril 2000 n'est pas sérieusement contestée par M.A... ; qu'en outre, si M. A...soutient devant la Cour que cette décision du 17 avril 2000 serait entachée d'une rétroactivité illégale par son effet au 2 janvier 2000, il appartenait toutefois à l'administration hospitalière de placer rétroactivement l'intéressé dans une position légale et réglementaire, et de le placer par suite d'office en position de disponibilité, dès lors que l'intéressé avait épuisé ses droits à disponibilité pour convenance personnelle et ne pouvait être encore réintégré ; que le centre hospitalier universitaire intimé n'a dans ces conditions commis aucune faute de nature à engager sa responsabilité en prenant la décision du 17 avril 2000 susmentionnée ;

5. Considérant, en quatrième lieu, qu'il résulte de l'instruction que si cette décision du 17 avril 2000 mentionne dans son article 2 qu'un emploi " sera proposé à la première vacance de poste ", M. A...ne se place pas sur le terrain de la promesse non tenue, fondement de responsabilité distinct de la faute qu'il soulève, tirée de la violation par l'administration hospitalière de son droit à être réintégré à l'issue de sa période de disponibilité pour convenance personnelle ; qu'ainsi qu'il a été dit, si un tel droit à réintégration existe effectivement, ce droit n'implique ni une réintégration en surnombre, ni même une réintégration par priorité à la première vacance de poste, mais une réintégration dans un délai raisonnable ; qu'il sera fait une juste appréciation de ce délai dans les circonstances de l'espèce, compte-tenu du nombre de personnels ouvriers parmi les effectifs du centre intimé, en l'évaluant à une durée de

trois années, soit à compter du 1er janvier 2003 ; que si M. A...soutient qu'un poste susceptible de l'accueillir aurait été vacant au cours de l'année 2001, il n'établit pas cette allégation par les trois pièces qu'il produit à cet égard relatives, la première, à la fiche d'un poste vacant d'adjoint au responsable " conditionnement chaud " émise le 3 mai 2005 qui concernait un agent ayant le grade de maître-ouvrier ou de contremaître, la deuxième, à la fiche d'un poste vacant de gérant de cuisine émise le 27 août 2007 qui concernait un agent de maîtrise, la troisième, à la fiche d'un poste vacant de responsable de restauration collective émise le 5 septembre 2007 qui concernait un employé qualifié ;

6. Considérant, en cinquième lieu, qu'il résulte de l'instruction que le centre hospitalier universitaire n'a proposé à M.A..., pour sa réintégration, aucun emploi d'ouvrier professionnel qualifié, non seulement durant les années 2000, 2001 et 2002, mais également sur la période courant du 1er janvier 2003 à la date du grave accident qu'a subi l'intéressé en

mars 2004 ; que dans ces conditions, le délai raisonnable de réintégration ayant expiré au 1er janvier 2003 sans que l'intéressé soit réintégré, le centre hospitalier universitaire a commis une faute de nature à engager sa responsabilité ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le centre hospitalier universitaire a montré une inertie fautive à réintégrer M. A...dans un délai raisonnable de trois ans à l'issue de sa disponibilité pour convenance personnelle ; qu'il résulte toutefois de l'instruction que, face à l'inertie de son employeur, M. A...a lui-même fait preuve d'inertie en ne démontrant aucune envie sérieuse de réintégration dans les effectifs du centre hospitalier universitaire, alors que ses droits à disponibilité pour convenance personnelle étaient épuisés ; qu'en effet et à cet égard, à la suite de sa première demande de réintégration formulée en 1999, l'intéressé ne démontre pas avoir écrit un courrier de relance auprès de son employeur de l'année 2000 à l'année 2003 et, s'il a subi un grave accident en mars 2004, il a attendu le 28 décembre 2004 pour relancer son employeur par un courrier demandant sa réintégration dans des termes au demeurant ambigus quant à son aptitude physique, sans lui donner ensuite, au cours de l'année 2005, des éléments précis relatifs aux séquelles de son accident et, par suite, à son aptitude à occuper tel ou tel poste aménagé ; qu'en outre, après la visite effectuée en 2006 auprès de la médecine du travail qui a conclu à son inaptitude à exercer les fonctions de cuisinier et après la décision du 14 novembre 2006 de l'administration hospitalière refusant la réintégration au motif de cette inaptitude, l'intéressé a décidé, pour des raisons qui doivent être regardées comme ayant été à titre principal des raisons personnelles et familiales, de partir vivre aux Etats-Unis d'Amérique en 2007, avant, finalement, de relancer le centre hospitalier universitaire le 24 avril 2008 par une demande de mise à la retraite pour invalidité ; que, dans ces conditions, le centre hospitalier universitaire est fondé à faire valoir que le fait de la victime l'exonère partiellement de son obligation de réparer les conséquences dommageables du retard pris dans la réintégration de l'intéressé, qui n'a eu lieu finalement qu'en juin 2009, après que le comité médical départemental eut refusé le 24 septembre 2008 la mise à la retraite en estimant que l'intéressé était apte à être réintégré sur un poste aménagé interdisant le port de charge de plus de 5 kg ; qu'il sera fait une juste appréciation du partage de responsabilité à opérer dans les circonstances de l'espèce, en estimant à 50 % la part de responsabilité de l'appelant et à 50 % la part de responsabilité du centre hospitalier universitaire de Nice ;

Sur la prescription quadriennale :

8. Considérant qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 31 décembre 1968 relative à la prescription des créances sur l'Etat, les départements, les communes et les établissements publics : " Sont prescrites, au profit de l'Etat, des départements et des communes, sans préjudice des déchéances particulières édictées par la loi, et sous réserve des dispositions de la présente loi, toutes créances qui n'ont pas été payées dans un délai de quatre ans à partir du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle les droits ont été acquis. Sont prescrites, dans le même délai et sous la même réserve, les créances sur les établissements publics dotés d'un comptable public. " ; qu'aux termes de l'article 2 de cette loi : " La prescription est interrompue par : Toute demande de paiement ou toute réclamation écrite adressée par un créancier à l'autorité administrative, dès lors que la demande ou la réclamation a trait au fait générateur, à l'existence, au montant ou au paiement de la créance, alors même que l'administration saisie n'est pas celle qui aura finalement la charge du règlement. / (...) / Toute communication écrite d'une administration intéressée, même si cette communication n'a pas été faite directement au créancier qui s'en prévaut, dès lors que cette communication a trait au fait générateur, à l'existence, au montant ou au paiement de la créance (...) " ;

9. Considérant que M. A...demande réparation des conséquences dommageables de son absence de réintégration, dans un délai raisonnable, à l'issue de sa disponibilité pour convenance personnelle ; qu'ainsi qu'il a été dit, le centre hospitalier universitaire disposait d'un délai de trois ans pour réintégrer l'intéressé ; que, dans ces conditions, la prescription quadriennale opposée a couru à compter du 1er janvier 2003 ; qu'il résulte de l'instruction que M. A...a adressé à son administration le 28 décembre 2004 un courrier demandant sa réintégration ; que ce courrier, dont la réception n'est pas contestée, doit être regardé comme une réclamation écrite ayant trait au fait générateur et à l'existence de la créance en litige et par suite a interrompu la prescription quadriennale ; que le centre hospitalier universitaire a réitéré son refus de réintégration le 14 novembre 2006 par une communication écrite ayant trait au fait générateur et à l'existence de la créance en litige ; que l'intéressé a formulé sa réclamation préalable le 23 juin 2009 ; que, dans ces conditions, la centre hospitalier universitaire intimé n'est pas fondé à opposer l'exception de prescription quadriennale à M.A... :

Sur la réparation :

10. Considérant qu'aux termes de l'article 12 du décret n° 91-45 du 14 janvier 1991 modifié portant statuts particuliers des personnels ouvriers, des conducteurs d'automobile, des conducteurs ambulanciers et des personnels d'entretien et de salubrité de la fonction publique hospitalière : " Le corps des personnels ouvriers comprend les grades d'agent d'entretien qualifié, d'ouvrier professionnel qualifié, de maître ouvrier et de maître ouvrier principal (...) " ; qu'aux termes de l'article 15 de ce décret : " (...) L'avancement au grade de maître ouvrier s'effectue selon les modalités suivantes : - peuvent être promus au grade de maître ouvrier par voie d'inscription à un tableau annuel d'avancement établi, au choix, après avis de la commission administrative paritaire compétente, les ouvriers professionnels qualifiés ayant atteint au moins le 5e échelon de leur grade et comptant au moins six ans de services effectifs dans leur grade ; - le nombre de promotions dans le grade de maître ouvrier est calculé chaque année, dans chaque établissement, dans les conditions fixées par le décret n° 2007-1191 du 3 août 2007 relatif à l'avancement de grade dans certains corps de la fonction publique hospitalière (...) " ;

En ce qui concerne le préjudice financier afférent au traitement :

Quant à la perte de traitement :

11. Considérant, en premier lieu, qu'en l'absence d'exercice effectif des fonctions dont un agent public a été illégalement privé par l'administration, soit qu'il ait été évincé du service, soit qu'il ait été affecté à d'autres fonctions que celles qui étaient ou auraient dû être les siennes, celui-ci ne peut prétendre au rappel de la rémunération correspondante, mais est fondé à demander la réparation intégrale des préjudices de toute nature qu'il a réellement subis du fait des mesures prises à son encontre dans des conditions irrégulières ; qu'il convient, pour fixer l'indemnité à laquelle le requérant a droit, de tenir compte notamment de l'importance respective des fautes commises par l'administration et l'agent lui-même à l'origine des préjudices de ce dernier, telles qu'elles résultent de l'instruction, et d'en déduire tout élément de rémunération ou tout revenu de remplacement perçu pendant la période durant laquelle il a été privé de l'exercice de ses fonctions ou mis à l'écart du service ; que, pour l'évaluation de l'ensemble des préjudices subis par cet agent, l'indemnité réparant le préjudice financier doit être déterminée en prenant en compte, outre le traitement qui aurait dû lui être versé, d'une part, les primes ou indemnités inhérentes aux fonctions que l'agent aurait exercées en l'absence de la mesure illégale, d'autre part, les primes ou indemnités rétribuant la qualité ou la quantité de son travail, dont il établit qu'il avait une chance sérieuse de les percevoir ; qu'en revanche cette évaluation ne peut inclure les indemnités visant à compenser des frais qui n'ont pas été exposés ;

12. Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de l'instruction que le dernier bulletin de salaire de l'intéressé d'octobre 1993 fait état d'une somme nette versée mensuelle de 7 993 francs, en sa qualité d'ouvrier professionnel qualifié, incluant une indemnité de travail dominical, laquelle doit être prise en compte dans les revenus dont il aurait dû bénéficier s'il avait été régulièrement réintégré, s'agissant en effet d'une indemnité inhérente aux fonctions de cuisinier hospitalier amené à travailler le dimanche dans le cadre d'un service de restauration ouvert tous les jours ;

13. Considérant, en troisième lieu, qu'il y a lieu de prendre pour base de calcul le dernier bulletin de salaire figurant au dossier d'octobre 1993, lequel fait état du 9ème échelon du grade d'ouvrier professionnel qualifié à l'indice majoré 327 ; que, lorsqu'il a été réintégré en juin 2009, l'intéressé a été placé au 8ème échelon du même grade à l'indice majoré de 335, compte tenu de l'intervention de la réforme des grilles indiciaires des agents de catégories de la fonction publique hospitalière instituée par les décrets susvisés n° 2006-227 et n° 2006-228 du 24 février 2006 ;

14. Considérant, en quatrième lieu, que si l'appelant avait été réintégré au 1er janvier 2003, il aurait bénéficié en 2007 d'un avancement d'échelon, lequel, à ce niveau de l'échelle indiciaire des ouvriers professionnels, est obtenu au bout d'une durée de 3 ans minimale et de 4 ans au plus tard ; qu'il y a lieu en outre de prendre en compte l'augmentation de la rémunération du point de l'indice qui a eu lieu depuis l'année 1993 ; qu'aucune perte de chance sérieuse de bénéficier d'une promotion au grade de maître-ouvrier n'est en revanche établie au titre de ces années par les éléments versés au dossier, nonobstant la circonstance que l'intéressé a été promu à ce grade en 2010, un an après sa réintégration en 2009 ;

15. Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'il sera fait une juste appréciation de la perte annuelle de rémunération de l'intéressé en l'évaluant en moyenne à la somme de

16 000 euros par an, de laquelle il convient de déduire les revenus de remplacement que l'intéressé a pu toucher ;

Quant aux revenus de remplacement :

16. Considérant, en premier lieu, qu'il appartient à l'appelant de justifier des revenus de remplacement dont il a pu bénéficier à compter du 1er janvier 2003, le centre hospitalier universitaire intimé soutenant à cet égard que l'appelant ne fournit aucune précision sérieuse sur la nature de ses activités professionnelles sur la longue période en litige et que les pièces qu'il produit sont insuffisamment probantes ;

17. Considérant, en deuxième lieu et s'agissant de l'année 2003, qu'il résulte de l'instruction que M. A...a été employé dans l'entreprise de sa première épouse en qualité de " conjoint-collaborateur " non salarié ; que l'avis d'imposition qu'il produit au titre de cette année, établi au nom de M. et MmeA..., présente un déficit des revenus industriels et commerciaux de 1 140 euros et qu'une attestation du Trésor Public du 5 août 2004 fait état de l'absence d'imposition sur le revenu de M. et MmeA... au titre de l'année 2003 ;

18. Considérant, en troisième lieu et s'agissant de l'année 2004, qu'il résulte de l'instruction que M. A...a subi un grave accident en mars 2004, à la suite de la chute d'une cabine d'ascenseur dans laquelle il se trouvait, ayant entraîné une longue hospitalisation incluant des séjours réguliers dans un centre de rééducation fonctionnelle ; qu'il n'est pas sérieusement contesté que, durant cette longue période, M. A...n'a pu travailler, n'a touché aucune allocation chômage et n'a finalement touché, comme revenus de remplacement au titre de cette année 2004, que la somme de 4 982 euros dont il fait état ;

19. Considérant, en quatrième lieu et s'agissant des années 2005, 2006, 2007 et 2008, qu'il résulte de l'instruction que l'intéressé a obtenu le bénéfice de l'allocation chômage à compter du 31 octobre 2005 pour une durée de 1 095 jours, soit une durée de 36 mois courant de novembre 2005 à octobre 2008 ; qu'il admet avoir perçu à ce titre la somme nette de 28 365 euros ; que les avis d'imposition qu'il produit, établis en son nom propre consécutivement à son divorce, font état des sommes de 6 919 euros au titre de l'année 2005, 13 615 euros au titre de l'année 2006, 15 476 euros au titre de l'année 2007 et 9 025 euros au titre de l'année 2008 ; que si M. A...est parti vivre en 2007 aux Etats-Unis d'Amérique avec sa seconde épouse, dans la résidence de laquelle il a habité, aucun élément versé au dossier ne permet de contester sérieusement l'allégation selon laquelle il n'a pas travaillé aux Etats-Unis d'Amérique mais a pu vivre grâce à l'argent qu'il a touché de son allocation chômage et qu'il a aussi récolté par la vente d'une partie de son patrimoine ;

20. Considérant, en cinquième lieu et s'agissant de l'année 2009, qu'il résulte de l'instruction que l'avis d'imposition versé au dossier par l'intéressé fait état d'un montant de revenus de 9 712 euros ; que l'intéressé ayant été réintégré le 22 juin 2009, les traitements qu'il a touchés à compter de cette date sont inclus dans le montant déclaré ;

21. Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'il sera fait une juste appréciation des circonstances de l'espèce en estimant à 50 000 euros le montant des revenus de remplacement touchés par M. A...sur la période courant du 1er janvier 2003 à la date de sa réintégration du 22 juin 2009 ; que la perte annuelle de traitement ayant été estimée à 16 000 euros par an, l'intéressé aurait dû toucher la somme de 104 000 euros de traitement sur la période courant du 1er janvier 2003 à la date de sa réintégration en juin 2009 ; que la perte différentielle s'établit ainsi à 54 000 euros ;

En ce qui concerne le préjudice financier afférent à la pension à venir :

22. Considérant que M.A..., né en 1955, réclame la somme de 25 000 euros en soutenant que si le centre hospitalier universitaire l'avait réintégré plus tôt, sa pension à venir aurait été liquidée à un montant supérieur à celui qui sera liquidé lors de sa mise à la retraite ;

23. Considérant, en premier lieu, que la période pendant laquelle M. A...a été placé irrégulièrement en position de disponibilité l'a empêché d'accumuler les trimestres qu'il aurait cotisés auprès de la CNRACL s'il avait été position d'activité ; qu'il résulte toutefois de l'instruction que M.A..., qui admet avoir bénéficié du statut " conjoint-collaborateur " lui apportant une couverture sociale, n'apporte aucune précision sur les trimestres qu'il a pu, ou n'a pu cotiser à cet égard au titre d'un régime distinct de celui de la CNRACL ; que l'appelant ne peut être regardé, d'ailleurs, comme invoquant une perte de trimestres cotisés ;

24. Considérant, en second lieu, que l'appelant, né en 1955, soutient que s'il avait été réintégré plus tôt, son avancement aurait été plus rapide, de sorte que son dernier traitement servant de base de calcul à la liquidation de sa pension à venir aurait été plus élevé ; qu'il exact qu'en n'étant pas réintégré à compter du 1er janvier 2003 mais en restant placé en position de disponibilité d'office jusqu'en juin 2009, l'appelant a perdu une chance sérieuse de bénéficier, sur cette période de 7 ans courant de l'année 2003 à l'année 2009 incluse, d'un avancement de deux échelons pour se retrouver, au cours de l'année 2010, à l'échelon 10 de son grade d'ouvrier professionnel qualifié pour un indice majoré 356 ; qu'il résulte toutefois de l'instruction que, nonobstant cet avancement de deux échelons qui n'a pas eu lieu dans son ancien grade, l'intéressé a bénéficié le 7 juin 2010 d'une promotion au grade de maître ouvrier au 9ème échelon pour un indice majoré de 362 ; qu'il n'est pas sérieusement établi que cette promotion de grade aurait pu avoir lieu antérieurement si l'intéressé avait été réintégré le 1er janvier 2003 ; que cette promotion de grade ayant ainsi compensé le retard indiciaire susmentionné de deux échelons, l'intéressé n'est pas fondé à soutenir qu'il aurait perdu des points d'indice sur la base de la liquidation de sa pension à venir ;

En ce qui concerne les frais d'avion et de transport aux Etats-Unis d'Amérique :

25. Considérant que l'appelant réclame les sommes de 8 688,87 euros de frais de déménagement aux Etats-Unis d'Amérique, ainsi que la somme de 16 200 euros correspondant au coût des transports par avion qu'il a effectués en 2008 entre Nice et les Etats-Unis d'Amérique afin de se rendre aux convocations médicales qui lui ont été adressées dans le cadre de sa procédure de reclassement ; qu'il résulte de l'instruction qu'il n'existe toutefois aucun lien de causalité suffisant direct et certain entre ces coûts et l'inertie fautive du centre hospitalier universitaire de Nice, compte tenu du caractère personnel de son choix d'aller vivre aux Etats-Unis d'Amérique avec son épouse de nationalité américaine ;

En ce qui concerne les autres préjudices matériels :

26. Considérant que l'appelant réclame les sommes de 2 000 euros, 4 044,35 euros et 12 000 euros au titre, respectivement, de frais matériels (de transport et de poste et télécommunication), de frais avancés auprès d'une agence immobilière et de frais liés à une caution bancaire ; qu'il résulte toutefois de l'instruction qu'en l'absence de précisions suffisantes de l'intéressé sur les difficultés financières dont il fait état et qui l'auraient conduit à vendre notamment un bien immobilier ;

En ce qui concerne le préjudice moral :

27. Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'il sera fait une juste appréciation des circonstances de l'espèce en estimant à 1 000 euros le préjudice moral subi par l'intéressé du fait de la faute du centre hospitalier universitaire de Nice de ne l'avoir pas réintégré plus tôt ;

28. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le quantum des préjudices subis par l'intéressé s'élève à la somme totale de 55 000 euros (54 000 + 1 000) ; que, compte-tenu du partage de responsabilité susmentionné, l'indemnité à allouer à M. A...s'élève à la somme de 27 500 euros au titre du préjudice financier né de la perte des traitements ; que M. A...est fondé à demander à la Cour de réformer le jugement attaqué en portant à 27 500 euros le montant en principal de 18 000 euros de l'indemnité allouée par le jugement attaqué ; que le surplus des conclusions de M.A..., comme les conclusions incidentes du centre hospitalier universitaire intimé, doivent en revanche être rejetés ;

Sur les intérêts au taux légal :

29. Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. A...a formé une réclamation préalable indemnitaire le 23 juin 2009 ; que la copie versée au dossier de l'accusé de réception postal de cette réclamation ne fait état d'aucune date de réception lisible et que le centre hospitalier universitaire a rejeté explicitement ladite réclamation préalable par un courrier du 4 août 2009 ; que, dans ces conditions et en application de l'article 1153 du code civil, M. A... a droit à ce que la somme susmentionnée de 27 500 euros en principal soit augmentée des intérêts au taux légal à compter du 4 août 2009 ; qu'en application de l'article 1154 du même code, les intérêts porteront intérêts au 4 août 2010 et à chaque échéance annuelle à compter de cette date ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

30. Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation " ;

31. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'appelant, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamné à payer à la partie intimée la somme qu'elle demande au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du centre hospitalier universitaire intimé la somme de 2 000 euros au titre des frais non compris dans les dépens exposés par l'appelant ;

DECIDE :

Article 1er : Le montant en principal de 18 000 euros (dix huit mille euros) de l'indemnité allouée à M. A...par le jugement attaqué est porté à 27 500 euros (vingt sept mille cinq cents euros).

Article 2 : Cette somme de 27 500 euros (vingt sept mille cinq cents euros) portera intérêts au taux légal à compter du 4 août 2009. Les intérêts porteront eux-mêmes intérêts au 4 août 2010 et à chaque échéance annuelle à compter de cette date.

Article 3 : Le jugement attaqué du tribunal administratif de Nice est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 4 : Le centre hospitalier universitaire de Nice versera à M. A...la somme de 2 000 euros (deux mille euros) au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête n° 11MA00621 de M. A...est rejeté.

Article 6 : Les conclusions incidentes du centre hospitalier universitaire de Nice sont rejetées, ensemble ses conclusions tendant au remboursement de ses frais exposés et non compris dans les dépens.

Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A...et au centre hospitalier universitaire de Nice.

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N° 11MA006212


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 8ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 11MA00621
Date de la décision : 16/04/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-13-03 Fonctionnaires et agents publics. Contentieux de la fonction publique. Contentieux de l'indemnité.


Composition du Tribunal
Président : M. GONZALES
Rapporteur ?: M. Jean-Baptiste BROSSIER
Rapporteur public ?: Mme HOGEDEZ
Avocat(s) : PERSICO

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2013-04-16;11ma00621 ?
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