Vu la requête, enregistrée le 9 juillet 2010 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille, sous le n° 10MA02639, présentée pour Me Pierre Delattre, liquidateur judiciaire de la société MGE, dont le siège est au 39 boulevard Carabacel à Nice (06000), par Me Terrazzoni membre de l'association Giraudon Nicolai - Ponti Simonis Di Vallario ;
Me Pierre Delattre, liquidateur judiciaire de la société MGE demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0703504 du 23 avril 2010 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune de Nice à lui verser les sommes de 267 211,30 euros et de 240 134,27 euros en réparation du préjudice causé à la société MGE à la suite de son éviction illégale d'une part, du marché relatif à la mise en place d'une tribune métallique au stade du Ray et d'autre part, du marché de travaux d'équipement, de signalisation routière et de mobilier urbain ;
2°) de condamner la commune de Nice au paiement desdites sommes de 267 211,30 euros et de 240 134,27 euros ainsi qu'au paiement de la somme de 5 000 euros en remboursement des frais exposés pour répondre aux deux appels d'offres ;
3°) de mettre à la charge de le commune de Nice une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des marchés publics ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu la décision en date du 1er septembre 2012 du président de la cour administrative d'appel de Marseille portant désignation, en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative, de M. Laurent Marcovici, président assesseur, pour présider les formations de jugement en cas d'absence ou d'empêchement de M. Guerrive, président de la 6e chambre ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 18 mars 2013 :
- le rapport de Mme Carotenuto, rapporteur,
- et les conclusions de Mme Markarian, rapporteur public ;
1. Considérant que la société MGE a répondu à deux appels publics à la concurrence lancés par la commune de Nice en vue de conclure, d'une part, un marché relatif à la mise en place d'une tribune métallique au stade du Ray et d'autre part, un marché de travaux d'équipement, de signalisation routière et de mobilier urbain ; que la commune de Nice l'a informée, par lettres respectivement du 22 juillet 2002 et du 22 août 2002, que son offre avait été écartée par la commission d'appel d'offres, sans que sa deuxième enveloppe ne soit ouverte, tant pour le marché relatif à la mise en place d'une tribune métallique que pour celui de travaux d'équipement, de signalisation routière et de mobilier urbain ; que, par jugement définitif du 24 novembre 2006, le tribunal administratif de Nice a notamment annulé les deux décisions susmentionnées au motif qu'elles avaient privé, compte tenu de leur date d'intervention et de la date de signature des actes d'engagement, la société MGE de la possibilité d'introduire utilement un référé précontractuel et qu'elles avaient, de ce fait, contrevenu aux dispositions de l'article 76 du code des marchés publics alors en vigueur ; que Me Pierre Delattre remplacé par Me Stéphanie Bienfait, en qualité de liquidateur de la société MGE, a saisi le tribunal administratif de Nice d'une demande tendant à la condamnation de la commune de Nice à lui verser les sommes de 267 211,30 euros et de 240 134,27 euros en réparation du préjudice causé à la société MGE à la suite de son éviction illégale des deux marchés dont s'agit ; que par le jugement attaqué du 23 avril 2010, le tribunal administratif a rejeté cette demande ;
2. Considérant que lorsqu'une entreprise candidate à l'attribution d'un marché public demande la réparation du préjudice né de son éviction irrégulière de ce dernier, il appartient au juge de vérifier d'abord si l'entreprise était ou non dépourvue de toute chance de remporter ce marché ; que, dans l'affirmative, l'entreprise n'a droit à aucune indemnité ; que, dans la négative, elle a droit, en principe, au remboursement des frais qu'elle a engagés pour présenter son offre ; qu'il convient ensuite de rechercher si l'entreprise avait des chances sérieuses d'emporter le marché ; que, dans un tel cas, l'entreprise a droit à être indemnisée de son manque à gagner, incluant nécessairement, puisqu'ils ont été intégrés dans ses charges, les frais de présentation de l'offre qui n'ont donc pas à faire l'objet, sauf stipulation contraire du contrat, d'une indemnisation spécifique ;
3. Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment du procès-verbal de la séance du 16 mai 2002 de la commission d'appel d'offres relatif à l'ouverture des premières enveloppes pour le marché de fourniture et installation d'équipements de signalisation routière et de mobilier urbain que la candidature de la société MGE est non conforme au motif que " Les références de prestations similaires fournies sont celles d'autres entreprises. Aucun document administratif ne permet de constater une fusion avec lesdites entreprises et, de ce fait, cette société ne possède pas de références à son nom. Egalement ne sont pas jointes les pièces attestant de la prise en location gérance des fonds de commerce des entreprises CMM EGS et EGM validées par le tribunal de commerce telles que prévues à l'article 24 du statut. " ; que le rapport de la commission d'appel d'offres du 25 juillet 2002 mentionne pour la société MGE " non conforme/ pièces administratives non conformes " ; que la société MGE avait présenté, dans la première enveloppe de chacun des deux dossiers, des références de travaux et prestations similaires à ceux objets de chacun des deux marchés, réalisés par les sociétés CMM, MGI ou EGS, présentées comme des " sociétés fusionnées par MGE ", sans préciser pour chaque référence le nom de la société ayant effectivement effectué les travaux ou la prestation ; que chacune des deux premières enveloppes comportait notamment l'immatriculation de la société au registre des commerces et des sociétés, les statuts de la société MGE dont l'article 24 prévoyait notamment que son président ou son directeur général pouvait régulariser, après l'obtention de l'accord du tribunal de commerce de Nice, tous actes de prise en location gérance des fonds de commerce des entreprises CMM, EGS et EGM, un " état des actes et engagements accomplis pour le compte de la société en formation " destiné à être annexé aux statuts mentionnant : " gérance de la société en participation GSM constituée depuis le 1er avril 2000 entre les sociétés EGM, EGS et CMM " ainsi qu'une " note de présentation et moyens de la société " indiquant que la société MGE fusionne les activités des sociétés CMM, EGS et MGI ;
4. Considérant que, si une société peut démontrer ses capacités en faisant état de références détenues par d'autres sociétés, il lui appartient néanmoins d'établir qu'elle peut effectivement disposer des moyens des sociétés lorsqu'elle se prévaut des références desdites sociétés ; que cette preuve doit être rapportée par les éléments du dossier établi en réponse à l'appel à candidatures ; que la connaissance éventuelle par les membres de la commission d'appel d'offres des liens susceptibles d'exister entre les entreprises ne peut suppléer l'absence de preuve au dossier de candidature ; que le dossier constitué par la société MGE ne permettait pas d'établir qu'elle pouvait effectivement disposer des moyens des sociétés CMM, MGI et EGS dont elle se prévalait des références, dès lors que, si la note de présentation faisait effectivement état d'une " fusion " de ces trois sociétés par la société MGE, les statuts de celle-ci et l'état des actes et engagements accomplis pour le compte de la société en formation mentionnaient, pour leur part, l'existence de liens avec les sociétés CMM, EGS et EGM ; qu'au surplus, et comme il a également été dit supra, la liste des références ne précisait pas quelle société avait effectué chacune des prestations y figurant ; que la circonstance que la société MGE ainsi que les sociétés CMM, EGS, EGM et MGI ont une implantation locale ancienne et qu'elles exécutaient des marchés pour le compte de la commune de Nice, ne sont pas de nature à pallier l'insuffisance des deux dossiers quant à la possibilité pour la société candidate de disposer effectivement des moyens de l'ensemble des sociétés dont elle a utilisé les références ; qu'enfin, il n'est, en tout état de cause, pas établi que les premières enveloppes présentées pour chacun des deux marchés contenaient des éléments autres que les références susmentionnées de nature à permettre à la commission d'appel d'offres de s'assurer que la société MGE disposait de capacités suffisantes, permettant l'examen ultérieur de ses deux offres ; qu'il résulte donc de l'instruction que la société MGE n'avait, au vu des dossiers constitués en vue de l'examen de ses deux candidatures, aucune chance de remporter l'un ou l'autre des deux marchés en cause ; qu'il suit de là qu'elle ne peut prétendre que l'illégalité entachant les décisions du 22 juillet 2002 et du 22 août 2002 de la commune de Nice est de nature à lui ouvrir droit à réparation ; que ses conclusions tendant à la condamnation de la commune à lui verser la somme totale de 507 345,57 euros au titre de son manque à gagner, ainsi que la somme de 5 000 euros en remboursement des frais exposés pour répondre aux deux appels d'offres, doivent donc être rejetées ;
5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Me Stéphanie Bienfait, liquidateur judiciaire de la société MGE, n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande ;
Sur l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative :
6. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la commune de Nice, qui n'est pas, dans la présente instance la partie perdante, verse à Me Stéphanie Bienfait, liquidateur judiciaire de la société MGE, la somme qu'elle demande à ce titre ; que dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées par la commune de Nice au même titre ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Me Stéphanie Bienfait, liquidateur judiciaire de la société MGE, est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de la commune de Nice tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Me Stéphanie Bienfait, liquidateur judiciaire de la société MGE et à la commune de Nice.
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