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22/03/2013 | FRANCE | N°10MA02439

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3ème chambre - formation à 3, 22 mars 2013, 10MA02439


Vu le recours, enregistré le 29 juin 2010, présenté par le ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat, qui demande à la Cour :

1°) d'annuler l'article 1er du jugement n° 0800920 du 1er avril 2010 par lequel le tribunal administratif de Bastia a déchargé la SARL Garage Lungarella des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier 2002 au 31 décembre 2003 ainsi que des pénalités correspondantes ;

2°) de rejeter la demande de la SARL Garage Lungarella présentée devant le tribunal admin

istratif de Bastia ;

3°) de remettre à la charge de la SARL Garage Lungarella l...

Vu le recours, enregistré le 29 juin 2010, présenté par le ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat, qui demande à la Cour :

1°) d'annuler l'article 1er du jugement n° 0800920 du 1er avril 2010 par lequel le tribunal administratif de Bastia a déchargé la SARL Garage Lungarella des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier 2002 au 31 décembre 2003 ainsi que des pénalités correspondantes ;

2°) de rejeter la demande de la SARL Garage Lungarella présentée devant le tribunal administratif de Bastia ;

3°) de remettre à la charge de la SARL Garage Lungarella les rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er janvier 2002 au 31 décembre 2003 ainsi que les pénalités correspondantes ;

............................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 1er mars 2013 :

- le rapport de M. Sauveplane,

- les conclusions de M. Dubois, rapporteur public ;

1. Considérant que la SARL Garage Lungarella, qui exploite une activité de vente de véhicules automobiles d'occasion, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle l'administration, après avoir remis en cause le régime de la taxe sur la valeur ajoutée à la marge appliqué par la société sur certaines ventes de véhicules d'occasion, a procédé à des rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er janvier 2002 au 31 décembre 2003, qu'elle a assortis de la majoration prévue à l'article 1729 du code général des impôts ; que le ministre chargé du budget relève appel du jugement du 1er avril 2010 par lequel le tribunal administratif de Bastia a déchargé la SARL Garage Lungarella des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités en litige ;

Sur le bien-fondé de l'imposition :

En ce qui concerne la taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 2002 :

2. Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'administration a remis en cause l'application du régime de taxe sur la valeur ajoutée à la marge sur les véhicules acquis en 2002 auprès de la société Eurofleet Car, au motif que la procédure d'assistance administrative avait permis d'établir que les véhicules vendus par la SARL Garage Lungarella avaient été acquis auprès d'assujettis utilisateurs qui étaient en mesure de récupérer la taxe dans les conditions de droit commun, que les fournisseurs de la société Eurofleet Car ne mentionnaient pas sur leurs factures l'application du régime de la taxe sur la valeur ajoutée à la marge, mais soit un prix toutes taxes comprises, soit un prix hors taxes au titre des acquisitions intracommunautaires et, enfin, que la société Eurofleet Car avait enregistré dans sa comptabilité des acquisitions suivies de livraisons intracommunautaires exonérées et non des livraisons soumises au régime de la marge ; que l'administration soutient qu'il avait été ainsi démontré le caractère manifestement irrégulier des factures établies par la société Eurofleet Car ;

3. Considérant, toutefois, que pour ces véhicules acquis auprès de la société Eurofleet Car, les factures adressées à la SARL Garage Lungarella ne mentionnaient pas le régime de taxe sur la valeur ajoutée appliqué ; que cette absence de mention du régime de taxe sur la valeur ajoutée est sans effet sur le droit à pratiquer le régime de taxe sur la valeur ajoutée à la marge lors de la revente du véhicule, lorsque les conditions d'une telle application sont réunies ; que notamment, l'article 242 nonies A de l'annexe 2 du code général des impôts, qui fait obligation aux assujettis-revendeurs qui appliquent le régime de la marge de faire figurer sur leurs factures la référence à la disposition de l'article 297 A du code général des impôts, n'était pas applicable pendant la période en litige ; que contrairement à ce que soutient l'administration, le caractère irrégulier des factures de la société Eurofleet Car n'était nullement manifeste ; que l'administration ne soutient ni même n'allègue que les informations obtenues dans le cadre de la procédure d'assistance administrative et qui lui ont permis d'établir le caractère irrégulier des factures, étaient connues de la SARL Garage Lungarella ; qu'ainsi, l'administration ne pouvait valablement remettre en cause le régime de taxation sur la marge appliqué par la SARL Garage Lungarella aux véhicules vendus pendant la période du 1er au 31 décembre 2002 ; que le ministre chargé du budget n'est, dès lors, pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Bastia a déchargé la SARL Garage Lungarella des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1er au 31 décembre 2002 ;

En ce qui concerne la taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 2003 :

4. Considérant que l'administration a remis en cause l'application du régime de taxe sur la valeur ajoutée à la marge sur les véhicules acquis en 2003 auprès des sociétés TC 52 et Car Emotion au motif que, même si la mention apposée par ces sociétés sur leurs factures pouvaient laisser présumer que le régime d'imposition sur la marge était applicable, les éléments en possession de la SARL Garage Lungarella permettaient d'écarter l'application de ce régime d'imposition ;

5. Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'examen des indications portées sur les lettres de voiture internationales et les indications portées sur les certificats d'immatriculations, qui étaient en possession de la SARL Garage Lungarella, permettaient d'établir que les véhicules avaient été acquis à l'origine auprès de professionnels de l'automobile en Espagne puis avaient fait l'objet d'une revente très rapide à une société portugaise, sans transiter toutefois par le Portugal ; que cette dernière société opérait ensuite la livraison directement d'Espagne en France sans augmentation du kilométrage du véhicule ; qu'il était ainsi manifeste pour un professionnel de l'automobile que les véhicules en cause avaient emprunté un circuit de commercialisation artificiel destiné à masquer l'acquisition auprès d'un professionnel de l'automobile et permettre ainsi la vente en France avec une facture portant la mention de l'application de la taxe sur la valeur ajoutée sur la marge suivant la 7ème directive européenne ; que de surcroit, la SARL Garage Lungarella avait constaté dans sa comptabilité la taxe sur la valeur ajoutée relative à des acquisitions intracommunautaires et l'avait déclarée à ce titre, manifestant ainsi sa connaissance du caractère inapplicable du régime de taxation à la marge aux opérations en cause ; que, dès lors, l'administration établit que les éléments en possession de la SARL Garage Lungarella permettaient d'établir, malgré les mentions contraires des factures de ses fournisseurs, qu'elle n'était pas en droit d'appliquer le régime de la taxe sur la valeur ajoutée à la marge sur les opérations en cause ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que c'est à tort que le tribunal administratif de Bastia s'est fondé sur la circonstance que l'administration ne démontrait pas que la SARL Garage Lungarella ne pouvait ignorer que ses fournisseurs n'étaient pas autorisés à appliquer le régime de taxation sur la marge, pour décharger la SARL Garage Lungarella des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 2003 ;

7. Considérant, toutefois, qu'il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner l'autre moyen soulevé par la SARL Garage Lungarella devant le tribunal administratif de Bastia ;

8. Considérant que l'absence de manquement aux règles de facturation relevée à l'issue d'une enquête réalisée en application de l'article L. 80 F du livre des procédures fiscales ne fait pas obstacle à ce que, le cas échéant, l'administration fiscale relève de tels manquements dans le cadre d'une vérification de comptabilité et en tire les conséquences pour l'établissement des impositions auxquelles le contribuable doit être assujetti ; qu'à supposer que la SARL Garage Lungarella ait entendu invoquer les dispositions de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales, l'absence de manquement aux règles de facturation relevée à l'issue de l'enquête dont elle a fait l'objet ne saurait, en tout état de cause, constituer une prise de position formelle de l'administration sur la situation de la société au regard des textes fiscaux ; que dès lors, le moyen doit être écarté ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le ministre chargé du budget est seulement fondé à demander à ce que soient remis à la charge de la SARL Garage Lungarella les rappels de taxe sur la valeur ajoutée et les pénalités correspondantes au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 2003 ainsi que l'amende de 5 p. cent prévue à l'article 1788 septies du code général des impôts ; qu'il y a lieu d'annuler le jugement du 1er avril 2010 du tribunal administratif de Bastia en tant qu'il a déchargé la SARL Garage Lungarella des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités correspondantes au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 2003 et de remettre à sa charge ces mêmes rappels de taxe sur la valeur ajoutée et les pénalités correspondantes au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 2003 ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. " ;

11. Considérant que l'Etat ne peut être regardé comme la partie perdante dans la présente instance ; qu'il a donc lieu de rejeter les conclusions accessoires de la requérante tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : Les rappels de taxe sur la valeur ajoutée et les pénalités correspondantes au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 2003 ainsi que l'amende de 5 p. cent prévue à l'article 1788 septies du code général des impôts sont remis à la charge de la SARL Garage Lungarella.

Article 2 : Le surplus du recours du ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat est rejeté.

Article 3 : Le jugement du 1er avril 2010 du tribunal administratif de Bastia est réformé en tant qu'il a déchargé la SARL Garage Lungarella des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités correspondantes au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 2003.

Article 4 : Les conclusions présentées par la SARL Garage Lungarella tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'économie et des finances et à la Sarl Garage Lungarella.

Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Est.

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N° 10MA02439


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 10MA02439
Date de la décision : 22/03/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme LASTIER
Rapporteur ?: M. Mathieu SAUVEPLANE
Rapporteur public ?: M. DUBOIS
Avocat(s) : DIONISI-NAUDIN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2013-03-22;10ma02439 ?
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