Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 14 mars 2011 sous le n° 11MA01036, présentée par la société d'avocats Kirkyacharian-Yehezkiely pour M. A...T..., demeurant... ;
M. T... demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0903327 rendu le 2 février 2011 par le tribunal administratif de Montpellier en tant que ce jugement, qui a annulé les arrêtés des 17 et
23 juin 2009 du recteur de l'Académie de Montpellier prononçant son abaissement au
4ème échelon de son grade à titre de sanction disciplinaire en prévoyant une absence de "report d'ancienneté", a rejeté le surplus de sa demande tendant à la condamnation de l'État à lui verser la somme de 15 000 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis ;
2°) de condamner l'État à lui verser une indemnité de 15 00 euros ;
3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;
Vu la loi modifiée n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'État ;
Vu le décret n° 84-961 du 25 octobre 1984 relatif à la procédure disciplinaire concernant les fonctionnaires de l'État ;
Vu le décret n° 94-1016 fixant les dispositions statutaires communes applicables à divers corps de fonctionnaires de la catégorie B ;
Vu le décret n° 94-1017 du 18 novembre 1994 fixant les dispositions statutaires communes applicables aux corps des secrétaires administratifs des administrations de l'État et à certains corps analogues ;
Vu le décret n° 2008-1385 du 19 décembre 2008 portant création du corps des secrétaires administratifs de l'éducation nationale et de l'enseignement supérieur ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 février 2013 :
- le rapport de M. Brossier, rapporteur,
- et les conclusions de Mme Hogedez, rapporteur public ;
1. Considérant qu'aux termes de l'article 66 de la loi susvisé n° 84-16 du
11 janvier 1984 : " Les sanctions disciplinaires sont réparties en quatre groupes. Premier groupe : - l'avertissement ; - le blâme. Deuxième groupe : - la radiation du tableau d'avancement ; - l'abaissement d'échelon ; - l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée maximale de quinze jours ; - le déplacement d'office. Troisième groupe : - la rétrogradation ; l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de trois mois à deux ans. (...) "
2. Considérant que M. T..., secrétaire administratif de classe exceptionnelle de l'éducation nationale et de l'enseignement supérieur, muté à compter du 1er septembre 2007 dans l'académie de Montpellier et affecté à l'université de Montpellier I, a été sanctionné d'un abaissement au 4ème échelon de son grade par arrêté du 17 juin 2009 du recteur de Montpellier entrant en vigueur à compter de la notification dudit arrêté ; que cette notification étant intervenue le 20 juin 2009, un nouvel arrêté du 23 juin 2009 précise que l'intéressé est classé au 4ème échelon de son grade au 20 juin 2009, sans reprise d'ancienneté ; que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a annulé ces deux arrêtés pour vice de compétence et a rejeté les conclusions indemnitaires subséquentes de M. T... au motif qu'il n'établissait pas les préjudices qu'il alléguait ; que M. T... demande à la Cour d'annuler ce jugement en tant qu'il rejette ses conclusions indemnitaires ;
En ce qui concerne les illégalités externes invoquées à l'encontre des arrêtés susmentionnés des 17 juin et 23 juin 2009 :
3. Considérant, en premier lieu, que dès lors que des illégalités sont fautives, elles sont, comme telles, et quelle qu'en soit la nature, susceptibles d'engager la responsabilité de l'administration, si elles sont à l'origine des préjudices subis ; qu'ainsi, une illégalité même externe est susceptible de donner à lieu à indemnisation, à la condition qu'il existe un lien de causalité suffisamment direct et certain entre l'illégalité externe fautive et le préjudice invoqué ;
4. Considérant, en deuxième lieu, que si le tribunal a annulé les deux arrêtés susmentionnés des 17 juin et 23 juin 2009 pour vice de compétence de leur signataire, il résulte toutefois de l'instruction qu'il n'existe aucun lien de causalité suffisamment direct et certain entre cette illégalité externe fautive et les préjudices, financier et moral, invoqués par l'appelant ;
5. Considérant, en troisième lieu, qu'à supposer même que ces deux arrêtés aient été pris, comme le soutient l'appelant, à l'issue d'une procédure administrative préalable méconnaissant le principe du contradictoire, en tout état de cause, une telle illégalité externe fautive, à la supposer établie, ne présente non plus aucune lien de causalité suffisamment direct et certain avec le préjudice financier invoqué par l'intéressé né d'une perte de rémunération ; qu'il en est de même en ce qui concerne le préjudice moral invoqué, dès lors qu'il résulte de l'instruction que l'appelant fait état d'un préjudice moral au titre d'un discrédit professionnel, non d'un préjudice moral qui serait spécifiquement en lien avec ses droits de la défense ;
6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'appelant n'est pas fondé à soutenir que les illégalités externes qu'il invoque justifient une indemnisation de ses préjudices moral et financier ;
En ce qui concerne les illégalités internes invoquées à l'encontre des arrêtés susmentionnés des 17 juin et 23 juin 2009 :
S'agissant de l'arrêté du 17 juin 2009 portant sanction :
7. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction qu'il est reproché à l'intéressé, d'une part, son manque d'investissement et d'organisation, sa négligence professionnelle, son travail non réalisé et ses retards non justifiés, d'autre part, une attitude désinvolte et méprisante envers la hiérarchie et les collègues ;
8. Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de l'instruction que la matérialité des faits ainsi reprochés est suffisamment établie par les éléments versés par l'administration au dossier, notamment le rapport disciplinaire circonstancié, la pétition signée par les collègues de travail de l'intéressé, un courrier émanant d'un représentant syndical en date du
12 novembre 2008 et les débats figurant sur le procès-verbal du conseil de discipline réuni le
6 mai 2009, lequel s'est prononcé à l'unanimité en faveur de la sanction finalement infligée ;
9- Considérant, en troisième lieu, que ces faits reprochés sont qualifiables de faute disciplinaire de nature à justifier une sanction ; qu'il résulte de l'instruction que la sanction de l'abaissement au 4ème échelon, soit un abaissement de deux échelons, du 6ème au 4ème échelon du grade de secrétaire administratif de classe exceptionnelle de l'éducation nationale et de l'enseignement supérieur, ne présente aucune disproportion manifeste aux griefs incriminés, dès lors notamment que l'intéressé avait déjà été averti de son comportement inadéquat par une lettre du recteur de l'académie de Créteil du 4 octobre 2006 où il était auparavant affecté, faisant état de difficultés qualifiées de retards systématiques, de refus d'effectuer des tâches, de refus d'obéir et d'une attitude agressive ;
10. Considérant, en quatrième lieu, qu'il résulte de l'instruction que l'appelant, qui se contente de soutenir que la décision du 17 juin 2009 aurait été prise en réalité dans un contexte de harcèlement moral, dans le seul but de sanctionner le fait qu'il a été souvent en congés de maladie ordinaire, n'apporte toutefois aucun élément de nature à étayer cette simple allégation et à établir par suite que la sanction en litige serait entachée d'un détournement de pouvoir ou aurait été prise dans un contexte plus global d'harcèlement moral ;
S'agissant de l'arrêté du 23 juin 2009 portant prise d'effet de la sanction :
11. Considérant que l'appelant soutient que cet arrêté du 23 juin 2009 serait une seconde sanction infligée pour les même faits que ceux déjà sanctionnés par l'arrêté du
17 juin 2009 et qu'il violerait ainsi le principe général "non bis in idem" applicable aux sanctions disciplinaires ;
12. Considérant qu'il résulte toutefois de l'instruction que seul l'arrêté du 17 juin 2009 doit être regardé comme une sanction disciplinaire, consistant en un abaissement de deux échelons du 6ème au 4ème échelon du grade de secrétaire administratif de classe exceptionnelle de l'éducation nationale, et qu'à cet égard, dès lors qu'aucune reprise d'ancienneté n'était explicitement mentionnée dans cet arrêté du 17 juin 2009, l'abaissement au 4ème échelon infligé l'a été, implicitement mais nécessairement, sans reprise d'ancienneté dans ce 4ème échelon ; que par ailleurs, cet arrêté du 17 juin 2009 prévoyait son entrée en vigueur à compter de sa notification ; que dans ces conditions, ladite notification étant par ailleurs intervenue le
20 juin 2009, le second arrêté du 23 juin 2009 doit être regardé, d'une part, comme se contentant de préciser cette absence de reprise d'ancienneté déjà décidée, d'autre part, comme précisant une prise d'effet de la sanction à compter du 20 juin 2009 ;
13. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'appelant n'est pas fondé à soutenir que les arrêtés des 17 et 23 juin 2009 seraient entachés d'illégalités internes fautives de nature à engager la responsabilité de l'administration ;
14. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que l'appelant n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal, par le jugement attaqué, a rejeté sa demande indemnitaire ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
15. Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation " ;
16. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que la partie intimée, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamnée à payer à l'appelant la somme qu'il demande au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
DECIDE :
Article 1er : La requête n° 11MA01036 de M. T... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...T... et au ministre de l'éducation nationale.
''
''
''
''
N° 11MA010362