Vu la requête enregistrée le 4 août 2009 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille, sous le n° 09MA02998, présentée pour le centre hospitalier universitaire de Nîmes (CHU de Nîmes) et dont le siège est situé Place du professeur Robert Debré à Nîmes (30029) par Me Monceaux, et le mémoire complémentaire du 10 décembre 2012 ;
Le centre hospitalier universitaire de Nîmes demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0701899 du 4 juin 2009 par lequel le tribunal administratif de Nîmes l'a condamné à verser à la société Iosis management la somme de 347 003,80 euros au titre de l'allongement des délais contractuels avec intérêts contractuels, et une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
2°) de rejeter la demande présentée par la société Iosis management devant le tribunal administratif de Nîmes ;
3°) à titre subsidiaire de condamner solidairement les sociétés SCAU Zublena, Thales développement et coopération, Copibat et GFC construction à le garantir des éventuelles condamnations prononcées à son encontre ;
4°) à titre subsidiaire d'ordonner une expertise pour déterminer l'origine des retards pris et déterminer l'imputabilité de ces retards ;
5°) de condamner solidairement les sociétés Iosis Management, SCAU Zublena, Thales développement et coopération et GFC construction au paiement d'une somme de 4 334 234,22 euros en vertu de leur responsabilité contractuelle ;
6°) de condamner tout défaillant à lui verser une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu le jugement attaqué ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des marchés publics ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 17 décembre 2012,
- le rapport de M. Marcovici, président rapporteur,
- les conclusions de Mme Markarian, rapporteur public,
- et les observations de Me Monceaux représentant le CHU de Nîmes, de Me Escudié représentant la société Iosis management, de Me Griffiths représentant la société GFC construction et de Me Roger représentant la société Thales développement et coopération ;
1. Considérant que par acte d'engagement du 29 mars 1996 la société Copibat a été chargée par le centre hospitalier universitaire de Nîmes de la mission d'ordonnancement, pilotage, coordination (OPC) de l'opération construction et restructuration de l'hôpital Caremeau à Nîmes ; que le marché a été conclu à prix forfaitaire, d'un montant de 2 554 911 F TTC pour la tranche ferme et de 2 503 414,80 F pour la tranche conditionnelle, soit au total 5 058 325,80 F, ou 771 136,80 euros TTC ; que le marché ayant été résilié le 1er avril 2003, à la suite de l'abandon du chantier le 9 décembre 2002 par la société Copibat, un décompte de liquidation, notifié le 22 mai 2006, a fixé la rémunération de cette société Copibat à 760 835,72 euros TTC ; que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a condamné le centre hospitalier universitaire à verser à la société Iosis management, venant aux droits de la société Copibat, la somme de 347 003,80 euros TTC au titre de l'allongement de la durée du chantier, cette somme étant assortie des intérêts au taux du marché ; que le centre hospitalier universitaire demande l'annulation du jugement ; que par la voie de l'appel incident, la société demande à ce que la Cour réforme le jugement en ce qu'il n'a pas fait courir les intérêts à compter du 10 décembre 2002 ;
Sur l'appel principal :
2. Considérant que les difficultés exceptionnelles et imprévisibles rencontrées dans l'exécution d'un marché à forfait ne peuvent ouvrir droit à une indemnité au profit des entrepreneurs que dans la mesure où ceux-ci justifient soit que ces difficultés ont eu pour effet de bouleverser l'économie du contrat, soit qu'elles sont imputables à un fait de l'administration ;
3. Considérant, comme l'a jugé le tribunal administratif de Nîmes, qu'il résulte des pièces du dossier, et notamment du rapport d'expertise, que la société Copibat a dû maintenir ses équipes sur le chantier, par rapport aux délais contractuels, durant 16 mois supplémentaires pour la première tranche, en plus des 22 mois initialement prévus et durant 27,5 mois pour la seconde, en plus des 36,5 mois initialement prévus ; que ces allongements de délais, selon le rapport de l'expert, résultent du fait du centre hospitalier lui-même, mais également des retards pris par les autres entreprises ; qu'il ne résulte pas du rapport, par contre, ni des autres éléments de l'instruction, que la société Copibat ait commis une faute dans l'exercice de sa mission de gestion des interfaces et de coordination du chantier OPC, de nature à engager sa responsabilité pour ces retards ;
4. Considérant, comme l'a jugé le tribunal administratif de Nîmes, que le préjudice subi, dont le montant n'est pas contesté par la société, doit être regardé en l'espèce comme constituant un bouleversement du marché ;
5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le centre hospitalier universitaire de Nîmes n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes l'a condamné à verser à la société Iosis management la somme de 347 003,80 euros au titre de l'allongement des délais contractuels avec intérêts contractuels ;
Sur l'appel incident :
6. Considérant que par la voie de l'appel incident, la société Iosis management demande que les intérêts de la somme à laquelle le centre hospitalier universitaire de Nîmes a été condamné commencent à courir à compter du 2 décembre 2002 ;
7. Considérant qu'aux termes des clauses de l'article 12 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de prestations intellectuelles " 5. (...) Les délais dont dispose la personne publique pour procéder au mandatement des acomptes, du solde et des paiements partiels définitifs sont fixés comme suit :- le mandatement d'un acompte doit avoir lieu dans les quarante-cinq jours comptés à partir de la réception de la demande du titulaire accompagnée des justifications mentionnées au 2 du présent article ;- le mandatement du solde ou des paiements partiels définitifs doit intervenir dans les quarante-cinq jours suivant la réception par la personne publique du projet de décompte " ; qu'aux termes de l'article 178 du code des marchés publics applicable aux faits de l'espèce ; " I. L'administration contractante est tenue de procéder au mandatement des acomptes et du solde dans un délai qui ne peut dépasser quarante-cinq jours ; toutefois, pour le solde de certaines catégories de marchés, un délai plus long peut être fixé par arrêté du ministre chargé de l'économie. Ce délai ne peut être supérieur à trois mois. II. Le défaut de mandatement dans le délai prévu au I. ci-dessus fait courir de plein droit et sans autre formalité, au bénéfice du titulaire et du sous-traitant, des intérêts moratoires, à partir du jour suivant l'expiration dudit délai jusqu'au 15ème jour inclus suivant la date de mandatement du principal " ; qu'ainsi, le défaut de mandatement du solde d'un marché dans les délais qu'il prévoit fait courir de plein droit et sans autre formalité, au bénéfice du titulaire ou du sous-traitant, des intérêts moratoires ; que la circonstance que le solde du marché ne puisse être établi par les parties elles-mêmes est sans incidence sur le point de départ de ces intérêts qui doit être fixé à la date à laquelle ce solde aurait dû être établi ; qu'il n'en va autrement, sans préjudice des stipulations du marché, que lorsque le retard dans l'établissement du solde est imputable au titulaire du marché, le point de départ de ces intérêts étant alors fixé à la date à laquelle le juge est saisi en vue du règlement du litige ; qu'il suit de là que la société est fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a fixé le point de départ des intérêts à la date de la saisine de la juridiction de première instance ; que le point de départ des intérêts moratoires dus par le centre hospitalier de Nîmes doit être fixé au 9 décembre 2002, soit 45 jours après la date, non contestée, du 25 octobre 2002 de présentation par la société de son projet de décompte ;
Sur les appels en garantie :
8. Considérant que la réception est l'acte par lequel le maître de l'ouvrage déclare accepter l'ouvrage avec ou sans réserve et qu'elle met fin aux rapports contractuels entre le maître de l'ouvrage et les constructeurs en ce qui concerne la réalisation de l'ouvrage ; que si elle interdit, par conséquent, au maître de l'ouvrage d'invoquer, après qu'elle a été prononcée, et sous réserve de la garantie de parfait achèvement, des désordres apparents causés à l'ouvrage ou des désordres causés aux tiers, dont il est alors réputé avoir renoncé à demander la réparation, elle ne met fin aux obligations contractuelles des constructeurs que dans cette seule mesure ; qu'ainsi la réception demeure, par elle-même, sans effet sur les droits et obligations financiers nés de l'exécution du marché, à raison notamment de retards ou de travaux supplémentaires, dont la détermination intervient définitivement lors de l'établissement du solde du décompte définitif ; que seule l'intervention du décompte général et définitif du marché a pour conséquence d'interdire au maître de l'ouvrage toute réclamation à cet égard ; que le maître de l'ouvrage peut cependant rechercher la responsabilité du maître d'oeuvre au titre des fautes que ce dernier a commises lors de l'établissement du décompte général et définitif du marché de travaux ; que, dès lors, la fin de non-recevoir opposée par la société Thales développement et coopération et tirée de ce que le maître de l'ouvrage serait irrecevable, du fait de l'intervention du décompte du marché de maîtrise d'oeuvre, à appeler le maître d'oeuvre en garantie dans le cadre d'un litige contractuel opposant le maître de l'ouvrage à l'entrepreneur et relatif à l'établissement, après réception sans réserve de l'ouvrage, du décompte général et définitif doit être écartée ; que la fin de non recevoir opposée par la société GFC construction doit également être écartée ;
9. Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport de l'expert nommé par les premiers juges, que les retards de 38 mois dans les travaux de la société requérante sont dus pour environ 2 mois aux faits de la société GFC construction et de la maîtrise d'oeuvre ; qu'en conséquence ces dernières devront garantir solidairement le centre hospitalier universitaire à hauteur de 5 % de la condamnation d'un montant de 347 003,80 euros TTC prononcée à son encontre, soit 17 350,04 euros TTC, les 95 % restant résultant des difficultés propres au chantier et devant donc demeurer à la charge du centre hospitalier ;
10. Considérant que la société GFC construction demande à se voir garantie par le groupement SCAU Zublena et SNC Sogelerg ingénierie aujourd'hui société Thales développement et coopération et que le groupement demande à se voir garanti par la société GFC construction ; qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport de l'expert nommé par les premiers juges, que le retard de deux mois est imputable pour 60 % à la société GFC construction et pour 40 % au groupement SCAU Zublena et SNC Sogelerg ingénierie aujourd'hui société Thales développement et coopération ; qu'il en résulte que la part de responsabilité de 5 % devra être supportée à hauteur de, respectivement, 60 % par la société GFC construction, soit 10 410,02 euros TTC et 40 % par la maîtrise d'oeuvre, à savoir le groupement SCAU Zublena et SNC Sogelerg ingénierie aujourd'hui société Thales développement et coopération, soit 6 940,02 euros TTC ; qu'il y a lieu de réformer le jugement attaqué dans cette mesure ; qu'en revanche la société GFC construction ne saurait utilement demander à être garantie par la société Iosis management, bénéficiaire de la condamnation principale ;
Sur les conclusions dirigées contre les sociétés Thales développement et coopération et SCAU Zublena :
11. Considérant que la motivation du tribunal administratif de Nîmes, qui a jugé que les conclusions dirigées par le centre hospitalier universitaire de Nîmes contre la société Thales développement et coopération et M. Zublena relèvent d'un litige distinct et sont donc irrecevables, n'est pas contestée en appel ; qu'il y a donc lieu de rejeter ces conclusions ; que le centre hospitalier n'établit pas que la société Copibat, aux droits de laquelle vient la société Iosis management, aurait commis une faute de nature à engager sa responsabilité ; qu'il résulte de ce qui précède que les conclusions mentionnées du centre hospitalier universitaire doivent être rejetées ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
12. Considérant qu'il n'y a lieu, dans les circonstances de l'espèce de faire droit à aucune des conclusions fondées sur les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
D E C I D E :
Article 1er : La somme de 347 003,80 euros que le centre hospitalier universitaire de Nîmes a été condamné à payer à la société Iosis management est majorée des intérêts contractuels à compter du 9 décembre 2002.
Article 2 : La société GFC construction garantira le centre hospitalier universitaire de Nîmes à hauteur de 60 % de la part de 5 % mentionnée à l'article 1er du présent arrêt, soit une somme de 10 410,02 euros TTC (dix mille quatre cent dix euros et deux centimes), et la SCAU Zublena et la société Thales développement et coopération à hauteur de 40 % de la part de 20 %, soit 6 940,02 euros TTC (six mille neuf cent quarante euros et deux centimes).
Article 3 : Le jugement du 4 juin 2009 du tribunal administratif de Nîmes est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 4 : Le surplus des conclusions du centre hospitalier universitaire de Nîmes est rejeté.
Article 5 : Le surplus des conclusions d'appel incident de la société Iosis management et des conclusions d'appel provoqué de la société GFC construction est rejeté.
Article 6 : Les conclusions des parties fondées sur les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 7 : Le présent arrêt sera notifié au centre hospitalier universitaire de Nîmes, à la société Iosis management, à la société GFC construction, à la société Thales développement et coopération et à la SCAU Zublena.
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