Vu la requête, enregistrée le 10 novembre 2010, présentée pour M. Abdelkader A, demeurant ..., par Me Jegou-Vincensini ;
M. A demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1001829 du 7 octobre 2010 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande aux fins d'annulation de l'arrêté en date du 1er juillet 2010 par lequel le préfet de Vaucluse lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français ;
2°) d'annuler les décisions attaquées ;
3°) d'enjoindre au préfet de Vaucluse, sur le fondement de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, de lui délivrer une carte de séjour temporaire, dans un délai de 15 jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, en application de l'article L. 911-3 du code de justice administrative ;
4°) à défaut, d'enjoindre au préfet de Vaucluse, sur le fondement des articles L. 911-2 du code de justice administrative et L. 512-1, dernier alinéa, du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de réexaminer sa situation, dans un délai de 15 jours à compter de la notification du présent arrêt et de lui délivrer durant cet examen une autorisation provisoire de séjour valant autorisation de travail, injonction assortie d'une astreinte de 100 euros par jour de retard, en application de l'article L. 911-3 du code de justice administrative ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;
Vu la convention internationale signée à New York le 26 janvier 1990, relative aux droits de l'enfant, publiée par décret du 8 octobre 1990 ;
Vu l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 novembre 2012 :
- le rapport de M. Haïli, premier conseiller,
Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête ;
1. Considérant qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention de New York relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les instances qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ; qu'il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ;
2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A, ressortissant marocain, est le père de cinq enfants, Mohamed né au Maroc le 18 mai 1996, Ahmed né au Maroc le 9 janvier 2000, Bilal né au Maroc le 10 février 2001, dont il n'est pas contesté qu'ils sont tous trois entrés en France en février 2004 avec leur mère et y étaient scolarisés en collège ou en école élémentaire à la date de l'arrêté préfectoral du 1er juillet 2010 attaqué, Salma née en France le 2 novembre 2005 et Abdellah né en France le 16 janvier 2009 ; que la mère de ces enfants, de nationalité marocaine, mariée avec le requérant le 3 août 1995, divorcée le 18 février 2003 puis remariée en France avec ce dernier le 22 janvier 2007, après un remariage et un divorce avec un ressortissant possédant la double nationalité marocaine et britannique, est titulaire d'une carte de résident valable jusqu'au 15 août 2014 ; que l'administration intimée ne conteste pas que le requérant s'assure du développement affectif et de l'éducation de ses enfants ; que dans ces conditions, compte tenu notamment de l'âge des enfants dont trois sont depuis 2004 scolarisés en France et poursuivaient leur scolarité, à la date de l'arrêté critiqué, dans l'enseignement primaire ou secondaire de premier cycle, la reconstitution de la cellule familiale au Maroc paraît fort incertaine ; que, dès lors, l'arrêté contesté, dont l'exécution comporterait un risque sérieux de priver ces cinq enfants de la présence de leur père, doit être regardé comme ayant méconnu leur intérêt supérieur au sens de l'article 3-1 de la convention de New York relative aux droits de l'enfant ;
3. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le requérant est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 1er juillet 2010 refusant son admission au séjour et l'obligeant à quitter le territoire et à demander à la Cour, par l'effet dévolutif de l'appel, d'annuler cet arrêté ;
Sur les conclusions aux fins d'injonction :
4. Considérant que l'article L. 911-1 du code de justice administrative dispose que "Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (...) prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure, assortie, le cas échéant d'un délai d'exécution" ;
5. Considérant qu'eu égard au motif énoncé ci-dessus, le présent arrêt implique nécessairement, sous réserve d'un changement dans les circonstances de droit ou de fait, que soit délivrée à M. DEBRAOUI une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ; qu'il y a lieu, par suite, d'enjoindre au préfet de Vaucluse de procéder à cette délivrance dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt ; qu'il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
6. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. " ; que l'appelant a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle ; qu'ainsi, son avocat peut se prévaloir des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ; que, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Jegou-Vincensini renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du 7 octobre 2010 du tribunal administratif de Nîmes et l'arrêté du 1er juillet 2010 du préfet de Vaucluse sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet de Vaucluse de délivrer à M. A une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : L'État versera à Me Jegou-Vincensini la somme de 1 500 euros en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que cette dernière renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. Abdelkader A et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de Vaucluse.
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N° 10MA04085