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18/10/2012 | FRANCE | N°11MA00268

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 5ème chambre - formation à 3, 18 octobre 2012, 11MA00268


Vu la requête, enregistrée le 21 janvier 2011 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille sous le n°11MA00268, présentée pour Mme Marie-France A, demeurant ..., par Me Lanfranchi, avocat ; Mme A demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n°1000318 du 25 novembre 2010 par lequel le tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 12 février 2010 par laquelle le ministre de l'intérieur a retiré six points de son permis de conduire suite à l'infraction commise le 26 septembre 2009, l'a informée de la perte

de validité dudit permis pour solde de points nul, et l'a invitée à ...

Vu la requête, enregistrée le 21 janvier 2011 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille sous le n°11MA00268, présentée pour Mme Marie-France A, demeurant ..., par Me Lanfranchi, avocat ; Mme A demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n°1000318 du 25 novembre 2010 par lequel le tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 12 février 2010 par laquelle le ministre de l'intérieur a retiré six points de son permis de conduire suite à l'infraction commise le 26 septembre 2009, l'a informée de la perte de validité dudit permis pour solde de points nul, et l'a invitée à restituer ce permis dans le délai de dix jours francs à compter de la réception de la décision, ensemble les décisions de retraits de points prises par cette même autorité récapitulées dans cette décision, à ce qu'il soit enjoint à cette même autorité de lui restituer les points retirés de son permis de conduire, et à ce que soit mise à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

2°) d'annuler lesdites décisions ;

3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de lui restituer les points retirés de son permis de conduire ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

.................................................................................................

Vu le jugement et la décision attaqués ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de procédure pénale ;

Vu le code de la route ;

Vu l'arrêté du 29 juin 1992 fixant les supports techniques de la communication par le ministère public au ministère de l'intérieur des informations prévues à l'article L.30 (4°, 5°, 6° et 7°) du code de la route ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 septembre 2012 :

- le rapport de M. Pocheron, président assesseur,

- et les conclusions de M. Salvage, rapporteur public ;

Considérant que Mme A relève appel du jugement en date du 25 novembre 2010 par lequel le tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande dirigée contre la décision en date du 12 février 2010 par laquelle le ministre de l'intérieur l'a informée du retrait de six points de son permis de conduire suite à une infraction commise le 26 septembre 2009, a constaté que le solde de points de son titre de conduite était nul, et lui a demandé de restituer son permis de conduire dans le délai de dix jours francs à compter de la réception de cette décision, et contre les décisions de retraits de points récapitulées par ladite décision ;

Considérant qu'aux termes de l'article L.223-3 du code de la route : " Lorsque l'intéressé est avisé qu'une des infractions entraînant retrait de points a été relevée à son encontre, il est informé des dispositions de l'article L.223-2, de l'existence d'un traitement automatisé de ces points et de la possibilité pour lui d'exercer le droit d'accès conformément aux articles L.225-1 à L.225-9. Lorsqu'il est fait application de la procédure de l'amende forfaitaire ou de la procédure de composition pénale, l'auteur de l'infraction est informé que le paiement de l'amende ou l'exécution de la composition pénale entraîne le retrait du nombre de points correspondant à l'infraction reprochée, dont la qualification est dûment portée à sa connaissance ; il est également informé de l'existence d'un traitement automatisé de ces points et de la possibilité pour lui d'exercer le droit d'accès. Le retrait de points est porté à la connaissance de l'intéressé par lettre simple quand il est effectif. " ; qu'aux termes de l'article R.223-3 du même code : " I.- Lors de la constatation d'une infraction entraînant perte de points, l'auteur de celle-ci est informé qu'il encourt un retrait de points si la réalité de l'infraction est établie dans les conditions définies à l'article L.223-1. II.- Il est informé également de l'existence d'un traitement automatisé des retraits et reconstitutions de points et de la possibilité pour lui d'accéder aux informations le concernant. Ces mentions figurent sur le document qui lui est remis ou adressé par le service verbalisateur. Le droit d'accès aux informations ci-dessus mentionnées s'exerce dans les conditions fixées par les articles L.225-1 à L.225-9 ... " ;

Sur l'absence de notification des retraits de points :

Considérant que si Mme A soutient que les différentes décisions de retrait de points faisant suite aux différentes infractions énumérées dans la décision litigieuse ne lui ont pas été notifiées avant leur notification par cette décision, les conditions de la notification au conducteur des retraits de points de son permis de conduire, prévue par les dispositions précitées de l'article L.223-3 du code de la route, ne conditionnent pas la régularité de la procédure suivie et partant, la légalité de ces retraits ; que, par suite, les conditions de notification de ces décisions sont sans incidence sur leur légalité ; que cette notification a pour seul objet de rendre ces retraits de points opposables à l'intéressée et de faire courir le délai dont elle dispose pour en contester la légalité devant la juridiction administrative ; que la circonstance que l'administration ne soit pas en mesure d'apporter la preuve que la notification des retraits successifs, effectuée par lettre simple, a bien été reçue par son destinataire, ne saurait lui interdire de constater que le permis a perdu sa validité, dés lors que la décision portant retrait des derniers points récapitule les retraits antérieurs et les rend ainsi opposables au conducteur, qui demeure recevable à exciper de leur illégalité ;

Considérant que par la décision du 12 février 2010 par laquelle il a retiré les derniers points du permis de conduire de Mme A et a déclaré la perte de validité de ce titre, le ministre de l'intérieur a récapitulé les retraits de points antérieurs ; que, dés lors, les moyens invoqués tirés de l'inopposabilité des différentes décisions de retrait de points, et de l'illégalité de la décision querellée, doivent être écartés ; que la circonstance que la décision litigieuse ne mentionne pas le numéro du permis de conduire de Mme A est sans incidence sur sa légalité ;

Sur la réalité des infractions :

Considérant qu'il résulte des dispositions des articles L.223-1 et L.225.1 du code de la route, combinées avec celles des articles 529 et suivants du code de procédure pénale, du premier alinéa de l'article 530 du même code et de l'arrêté du 29 juin 1992 susvisé que le mode d'enregistrement et de contrôle des informations relatives aux infractions au code de la route conduit à considérer que la réalité de l'infraction est établie dans les conditions prévues à l'article L.223-1 du code de la route dès lors qu'est inscrite, dans le système national des permis de conduire, la mention du paiement de l'amende forfaitaire ou de l'émission du titre exécutoire de l'amende forfaitaire majorée, sauf si l'intéressé justifie avoir présenté une requête en exonération dans les quarante-cinq jours de la constatation de l'infraction ou de l'envoi de l'avis de contravention ou formé, dans le délai prévu à l'article 530 du code de procédure pénale, une réclamation ayant entraîné l'annulation du titre exécutoire de l'amende forfaitaire majorée, de l'exécution d'une composition pénale ou d'une condamnation judiciaire définitive ;

Considérant qu'il ressort du relevé intégral d'information produit par Mme A et relatif à sa situation que l'infraction commise le 1er juillet 2007 a fait l'objet de l'exécution d'une composition pénale et l'infraction constatée le 26 septembre 2009 d'une condamnation judiciaire définitive ; que la requérante n'apporte aucun élément de preuve susceptible de contredire les mentions ainsi enregistrées par l'officier du Ministère public dans le système automatisé d'information ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la réalité de ces infractions ne serait pas établie doit être écarté ;

Sur l'absence d'information préalable :

Considérant qu'il résulte des dispositions précitées des articles L.223-3 et R.223-3 du code de la route que l'administration ne peut légalement prendre une décision retirant des points affectés à un permis de conduire, à la suite d'une infraction dont la réalité a été établie, que si l'auteur de l'infraction s'est vu préalablement délivrer par elle un document contenant les informations qu'elles prévoient, lesquelles constituent une garantie essentielle lui permettant de contester la réalité de l'infraction et d'en mesurer les conséquences sur la validité de son permis ; qu'aux termes des articles R.49-1 et R.49-10 du code de procédure pénale, quand est constatée une infraction au code de la route à laquelle est applicables la procédure d'amende forfaitaire, un avis de contravention et une carte de paiement dont le modèle est fixé par arrêté du garde des sceaux, ministre de la justice, sont remis immédiatement au conducteur ou adressés postérieurement au titulaire du certificat d'immatriculation ; que si les procès-verbaux établis par les officiers ou agents de police judiciaire pour constater des infractions au code de la route font foi jusqu'à preuve contraire en ce qui concerne la constatation des faits constitutifs des infractions, il appartient au juge d'apprécier, au vu des divers éléments de l'instruction, et notamment des mentions du procès-verbal, si le contrevenant a reçu l'information prévue par l'article L.223-3 du code de la route ;

Considérant en premier lieu que l'infraction du 1er juillet 2007, qui a été constatée avec interception du véhicule, a fait l'objet d'une composition pénale enregistrée par le tribunal de grande instance d'Ajaccio le 8 novembre suivant ; qu'aux termes de l'article L.223-3 précité, l'auteur de l'infraction qui a fait l'objet d'une composition pénale doit avoir été préalablement destinataire des informations prévues par ces mêmes dispositions ; que, toutefois, les articles R.49-1 et R.49-10 du code de procédure pénale ne sont pas applicables au délit en cause, constitué par la conduite sous l'emprise d'un état alcoolique caractérisé par la présence dans l'air expiré d'un taux d'alcool égal ou supérieur à 0,40 milligramme par litre, qui ne peut faire l'objet que d'une condamnation pénale ou d'une composition pénale, et en aucun cas d'une contravention avec paiement d'une amende forfaitaire ou forfaitaire majorée ; qu'en revanche il ressort des dispositions de l'article R.15-33-43 du code de procédure pénale que lorsque la composition pénale intervient à la suite d'un délit prévu aux articles 222-19-1 ou 222-20-10 du code pénal ou aux articles L.234-1 ou L.234-8 du code de la route, ou de tout autre délit donnant lieu au retrait des points du permis de conduire, le procès-verbal mentionné à l'article R.15-33-40 comporte une mention informant la personne de la perte de points qui résultera de l'exécution de la composition pénale, de l'existence d'un traitement automatisé de ces points et de la possibilité pour elle d'exercer son droit d'accès ; que ce procès-verbal précise la nature des faits reprochés ainsi que leur qualification juridique, la nature et le quantum des mesures proposées, indique que la personne a été informée de son droit à se faire assister d'un avocat avant de donner son accord aux propositions du procureur de la République et de son droit de demander le bénéfice d'un délai de dix jours avant de faire connaître sa réponse ;

qu'il est signé par la personne concernée ainsi que par le procureur de la République, son délégué ou son médiateur, et une copie du procès-verbal est remise à l'auteur des faits ; qu'ainsi, dans le cas d'un délit de conduite sous l'emprise d'un état alcoolique avec une concentration d'alcool dans l'air expiré égale ou supérieure à 0,40 milligramme par litre, comme dans le cas de l'espèce, prévu par l'article L.234-1 du code de la route, l'agent verbalisateur a l'obligation d'établir ce procès-verbal comportant les mentions prescrites et d'en délivrer copie à l'auteur des faits ; qu'il appartient par conséquent à l'administration, qui a la charge de la preuve que les informations prévues aux articles L.223-3 et R.223-3 du code de la route ont bien été notifiées à l'auteur du délit, de produire, en cas de litige, copie de ce procès-verbal ; que la requérante conteste avoir reçu cette information préalable et le ministre de l'intérieur ne produit aucun document de nature à établir qu'elle a effectivement été délivrée ; que, par suite, la décision par laquelle six points ont été retirés du permis de conduire de Mme PITTILONI suite à l'infraction commise le 1er juillet 2007 doit être annulée ;

Considérant en second lieu que l'infraction constatée le 26 septembre 2009 a fait l'objet le 1er décembre suivant d'une condamnation, devenue définitive le 22 décembre 2009, prononcée par le juge pénal devant lequel Mme A a pu contester les faits qui lui étaient reprochés ; que, par suite, l'omission de la délivrance de l'information préalable prévue aux articles précités L.223-3 et R.223-3 du code de la route est en tout état de cause sans influence sur la légalité du retrait de points résultant de cette condamnation ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le solde de points du permis de conduire de Mme A n'était pas nul à la date de la décision 48 SI du ministre de l'intérieur du 12 février 2010 ; que Mme A est par suite seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande en tant qu'elle était dirigée contre la décision par laquelle le ministre de l'intérieur du 12 février 2010 a constaté l'invalidité de son permis de conduire, et de la décision par laquelle cette même autorité a retiré six points de son titre de conduite suite à l'infraction constatée le 1er juillet 2007 ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

Considérant que l'exécution du présent arrêt implique nécessairement d'enjoindre au ministre de l'intérieur de restituer six points au permis de conduire de Mme A dans le délai de trois mois à compter de sa notification ;

Sur l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de l'article L.761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme réclamée par Mme A au titre des frais exposés par celle-ci et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Bastia du 25 novembre 2010, en tant qu'il a rejeté la demande de Mme A dirigée contre la décision par laquelle le ministre de l'intérieur a constaté l'invalidité de son permis de conduire, et de la décision par laquelle cette même autorité a retiré six points de son titre de conduite suite à l'infraction commise le 1er juillet 2007, ensemble ces deux décisions, sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au ministre de l'intérieur de restituer six points au permis de conduire de Mme A dans le délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme A est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Marie-France A et au ministre de l'intérieur.

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N° 11MA00268 2

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 11MA00268
Date de la décision : 18/10/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

49-04-01-04 Police administrative. Police générale. Circulation et stationnement. Permis de conduire.


Composition du Tribunal
Président : M. FERULLA
Rapporteur ?: M. Michel POCHERON
Rapporteur public ?: M. SALVAGE
Avocat(s) : SCP RICHARD-LENTALI LANFRANCHI

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2012-10-18;11ma00268 ?
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