Vu la requête, enregistrée le 17 février 2011, au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille, sous le n° 11MA00695, présentée pour M. Mohamed A faisant élection de domicile chez Me Gonand, avocat ;
M. Mohamed A demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0908690 du 14 décembre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 15 juillet 2009 par laquelle le préfet des Bouches-du-Rhône a rejeté sa demande de titre de séjour, à ce qu'il soit enjoint au préfet des Bouches-du-Rhône de lui délivrer un titre de séjour portant droit au travail dans le délai de quinze jours à compter de la décision à intervenir sous astreinte de 150 euros par jour de retard et à la condamnation de l'Etat à lui verser une somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, lesdites décisions ;
3°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de lui délivrer un titre de séjour portant droit au travail dans le délai de trois semaines à compter de la décision à intervenir sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'accord franco-marocain en matière de séjour et d'emploi du 9 octobre 1987 ;
Vu le code du travail ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 juillet 2012 le rapport de Mme Lopa Dufrénot, rapporteur ;
Considérant que M. A, de nationalité marocaine, relève appel du jugement du 14 décembre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 18 août 2009 par laquelle le préfet des Bouches-du-Rhône a rejeté sa demande de titre de séjour ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant que M. A soutient que les premiers juges ont omis de statuer sur le moyen invoqué, tiré de l'erreur dans la qualification des faits dont est entachée la décision contestée ; que, toutefois, en estimant que " le préfet des Bouches-du-Rhône n'a pas commis, alors même que le requérant a travaillé, dans le cadre d'un processus d'immigration de travail contrôlé par les pouvoirs publics sans pour autant que soient respectées les conditions légales et réglementaires en vigueur, sur un emploi permanent dans le secteur agricole des Bouches-du-Rhône, (...) d'erreur manifeste d'appréciation en estimant qu'il ne pouvait se prévaloir ni de motifs exceptionnels ni de considérations humanitaires pour être admis au séjour au titre de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ", le Tribunal a implicitement mais nécessairement écarté le moyen ainsi invoqué ; que par suite, le moyen doit être écarté ;
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 sur le fondement du troisième alinéa de cet article peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 341-7-2 du code du travail, dans sa version issue du décret n° 84-169 du 8 mars 1984 expressément abrogée par le décret n° 2007-801 du 11 mai 2007 : " le contrat d'introduction de travailleur saisonnier visé par les services du ministre chargé du travail donne à son titulaire le droit d'exercer l'activité professionnelle salariée qui y est portée pendant sa durée de validité chez l'employeur qui a signé ce contrat. La durée totale du ou des contrats saisonniers dont peut bénéficier un travailleur étranger ne peut excéder six mois sur douze mois consécutifs. Un même employeur ne peut être autorisé à recourir à un ou des contrats de main-d'oeuvre saisonnière visés à l'article 1er pour une période supérieure à six mois sur douze mois consécutifs. Le décompte est effectué pour chaque établissement d'une même entreprise. A titre exceptionnel, l'employeur peut être autorisé à conclure des contrats saisonniers d'une durée maximum totale de huit mois sur douze mois consécutifs sous la double condition que ces contrats concernent des activités de production agricole déterminées, pour lesquelles cette mesure répond à des exigences spécifiques et que l'employeur intéressé apporte la preuve qu'il ne peut faire face à ce besoin par le recrutement de main-d'oeuvre déjà présente sur le territoire national. " ; et qu'il résulte des dispositions en vigueur depuis le 26 juillet 2006, et notamment de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa version issue de la loi n° 2006-911 du 24 juillet 2006 et de l'article R. 5221-23 du code du travail, que la durée pendant laquelle un étranger peut occuper un ou plusieurs emplois saisonniers ne peut excéder six mois par an ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A a été employé en qualité de travailleur saisonnier sur une exploitation agricole de 1999 à 2009 sous couvert de contrats conclus dans le cadre des dispositions applicables du code du travail et notamment de ses articles L. 122-1 et R. 341-7-2 du code du travail, contrats qui, de 2004 à 2006, ont fait l'objet de prolongations au-delà d'une durée de six mois ; que le requérant est par ailleurs retourné à l'issue de chaque contrat au Maroc où résident, selon le préfet des Bouches-du-Rhône, son épouse et ses trois enfants et l'ensemble de ses attaches familiales ; qu'ainsi, eu égard en particulier au nombre d'années pendant lesquelles M. A est venu travailler en France, et alors même qu'il a travaillé, dans le cadre d'un processus d'immigration de travail contrôlé par les pouvoirs publics sans pour autant que soient respectées les conditions légales et réglementaires en vigueur, le préfet des Bouches-du-Rhône n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en estimant qu'il ne pouvait se prévaloir ni de motifs exceptionnels ni de considérations humanitaires pour être admis au séjour au titre de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Considérant, en deuxième lieu, M. A, bénéficiaire de contrats de travailleur saisonnier, est retourné au Maroc à l'issue de chacun de ses contrats ; qu'il n'a jamais été titulaire d'une carte de séjour portant la mention " salarié " et, au demeurant, n'en a jamais sollicité la délivrance ; qu'il n'appartient pas à l'administration de requalifier des contrats de travailleurs saisonniers en contrats de travail à durée indéterminée ; que par suite, le préfet des Bouches-du-Rhône n'a pas commis d'erreur dans la qualification juridique des faits ;
Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : ... 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République." ; et qu'aux termes de l'article R. 313-21 du même code : " Pour l'application du 7º de l'article L. 313-11, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de la vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine. " ;
Considérant que si M. A fait valoir, ainsi qu'il a été dit précédemment qu'il a travaillé sur le territoire français de 1999 à 2009 comme ouvrier sous couvert de contrats d'introduction de travailleur saisonnier conclus dans le cadre des dispositions applicables du code du travail et notamment de ses articles L. 122-1 et R. 341-7- 2, ses contrats ayant été illégalement prolongés au-delà de la durée de six mois au cours des années 2004 à 2006 et qu'il a désormais le centre de ses intérêts personnels et économiques en France, il se borne à produire à l'appui de cette allégation ses différents contrats de travail et n'établit pas notamment avoir tissé des liens personnels en France alors qu'il n'est pas contesté qu'il a rejoint à l'issue de chacun de ses contrats son pays d'origine où il n'est pas dépourvu d'attaches privées et familiales ; qu'ainsi, alors même que réside en France son père, il ne ressort pas des pièces du dossier que le centre de ses intérêts personnels et familiaux, lesquels s'apprécient dans leur globalité et concrètement, se situe en France ; que, dans ses conditions, l'arrêté attaqué n'a pas porté une atteinte au respect de sa vie privée et familiale disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris, et n'a, par suite, pas méconnu les dispositions précitées de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Considérant, en dernier lieu, que M. A n'a jamais été titulaire d'une carte de séjour portant la mention " salarié " ; que par suite, il ne saurait invoquer une rupture de l'égalité de traitement du fait d'une discrimination entre travailleurs étrangers placés dans la même situation et une violation des stipulations de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande ; que ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte ainsi que celles en application de l'article L.761-1 du code de justice administrative ne peuvent que, par suite, être rejetées ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. A est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A et au ministre de l'intérieur.
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N° 11MA00695