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28/06/2012 | FRANCE | N°09MA03757

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3ème chambre - formation à 3, 28 juin 2012, 09MA03757


Vu la requête, enregistrée le 20 octobre 2009, présentée pour M. Jacques A, demeurant ...;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0802492 du 15 septembre 2009 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande de décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et des contributions sociales correspondantes, ainsi que des pénalités auxquelles il a été assujetti au titre des années 2003 et 2004 ;

2°) de prononcer la décharge des impositions contestées et des pénalités correspondantes ;

3) de mettre

à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de just...

Vu la requête, enregistrée le 20 octobre 2009, présentée pour M. Jacques A, demeurant ...;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0802492 du 15 septembre 2009 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande de décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et des contributions sociales correspondantes, ainsi que des pénalités auxquelles il a été assujetti au titre des années 2003 et 2004 ;

2°) de prononcer la décharge des impositions contestées et des pénalités correspondantes ;

3) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.........................................................................................................

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 25 mai 2012 :

-- le rapport de M. Haïli, premier conseiller ;

- les conclusions de M. Dubois, rapporteur public ;

Considérant que M. A, gérant de fait de la société Bahmi, marchand de biens à Serviers Labaume, a fait l'objet d'un examen de situation fiscale personnelle au titre des années 2003 et 2004 au cours duquel trois demandes de justifications n°2172 lui ont été adressées ; que l'administration lui a notifié des propositions de rectification selon la procédure de taxation d'office prévue à l'article L. 69 du livre des procédures fiscales concernant des crédits bancaires dont l'origine et la nature n'avaient pas été justifiées, et selon la procédure de rectification contradictoire prévue à l'article L. 55 du même livre, concernant des revenus de capitaux mobiliers pour les sommes identifiées comme correspondant à des distributions de la société Bahmi ; que le requérant interjette régulièrement appel du jugement du tribunal administratif de Nîmes en date du 15 septembre 2009 rejetant sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et des contributions sociales correspondantes, ainsi que des pénalités auxquelles il a été assujetti au titre des années 2003 et 2004 ;

Sur les conclusions à fin de décharge :

En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant que le requérant soutient qu'il a été privé de la garantie tenant au débat contradictoire avec le vérificateur qu'exige un examen de la situation fiscale personnelle d'un contribuable ; que toutefois il résulte de l'instruction qu'un débat contradictoire a été effectivement engagé entre le contribuable et le vérificateur, cinq entretiens ayant eu lieu entre le 16 août 2006, soit avant l'envoi de la première demande de justifications, et le 28 mars 2007 ; que dès lors le moyen tiré de ce qu'en l'absence d'un tel débat, le contrôle aurait été mené en méconnaissance des articles L. 47 à L. 50 du livre des procédures fiscales qui traitent des garanties accordées au contribuable notamment lors d'un examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle au regard de l'impôt sur le revenu, doit être écarté ;

Considérant, par ailleurs, qu'aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation " ; qu'il résulte de ces dispositions qu'une proposition de rectification est suffisamment motivée dès lors qu'elle indique la nature et le montant des redressements envisagés et comporte, chef de redressement par chef de redressement, des indications suffisantes quant aux motifs de ces redressements pour permettre au contribuable de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation ;

Considérant que le requérant allègue que la motivation des redressements concernant les avantages en nature, par référence à la vérification de comptabilité de la SARL Bahmi portant sur les années 2003, 2004 et 2004 est insuffisante ; que toutefois, il résulte de l'instruction, qu'ayant vérifié la comptabilité de cette société dont le requérant est le gérant de fait, l'administration a notifié à celui-ci le montant des distributions de revenus qu'elle estimait avoir été réalisées à son profit et qu'elle proposait de soumettre à l'impôt sur le revenu dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers ; que contrairement à ce que soutient l'appelant, la proposition de rectification en date du 14 décembre 2006, en son paragraphe III, A consacré aux " revenus de capitaux mobiliers ", énonce de façon circonstanciée la nature et le montant des dépenses prises en charge par la SARL Bahmi, que l'administration a écartées des charges déductibles de celle-ci comme personnelles à son gérant de fait et considérées comme des revenus distribués à M. A sur le fondement de l'article 109, 1, 1° du code général des impôts ; que ces énonciations étant suffisamment détaillées pour permettre au requérant d'engager avec l'administration fiscale une discussion contradictoire, le moyen selon lequel la proposition de rectification concernant l'année 2003 aurait méconnu les prescriptions de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales doit être écarté ; qu'en ce qui concerne la proposition de rectification du 3 avril 2007 qui porte sur l'année 2004, le requérant, qui n'a pas versé cette pièce aux débats ni en première instance, ni en appel, ne permet pas au juge d'en contrôler la motivation ;

En ce qui concerne le bien-fondé de l'imposition :

Quant aux revenus de capitaux mobiliers distribués par la société Bahmi :

Considérant que l'article 109, 1, 1° du code général des impôts dispose que sont considérés comme revenus distribués " tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital " ; que les bénéfices retenus pour l'assiette de l'impôt sur les sociétés dû par une société ou une autre personne morale passible de cet impôt ne peuvent être imposés, en tant que revenus de capitaux mobiliers, au nom du gérant de cette société qu'à la condition, d'une part, que celui-ci les ait effectivement appréhendés, soit en argent, soit sous la forme d'avantages en nature, et, d'autre part, qu'il apparaisse que l'addition aux autres rémunérations, directes ou indirectes, perçues par l'intéressé, des sommes ou avantages dont il s'agit, a eu pour effet de porter sa rémunération globale à un niveau excessif eu égard aux services rendus à la société ; qu'à défaut, les mêmes sommes ou avantages doivent être regardés comme des suppléments de salaire trouvant leur origine dans les fonctions exercées par le dirigeant et imposés dans la catégorie des traitements et salaires ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'administration a réintégré dans les bénéfices imposables de la société Bahmi à la suite d'une vérification de comptabilité, des dépenses remboursées à M. A, telles que factures d'eau, ou émanant d'EDF et du SIVOM, taxes d'enlèvement des ordures ménagères, assurance habitation, et inscrites dans ses frais généraux, en estimant que ces dépenses ne pouvaient être regardées comme ayant été engagées dans l'intérêt direct de l'entreprise ; que l'administration a imposé ces sommes, d'un montant de 5 676 euros en 2003 et 8 062 euros en 2004, entre les mains de M. A, gérant de cette société, en tant que revenus distribués ressortissant de la catégorie des revenus de capitaux mobiliers en vertu de l'article 109, 1, 1° du code général des impôts ; qu'en l'absence de toute précision sur ces dépenses de la part du contribuable, lequel ne conteste pas avoir appréhendé ces sommes, l'administration doit être regardée comme apportant la preuve qui lui incombe du montant des sommes redressées et de leur appréhension par M. A, gérant d'entreprise et bénéficiaire des sommes en cause ; que cependant, M. A soutient que celles-ci constitueraient des avantages en nature, alors que l'administration n'établit ni même n'allègue que l'avantage pécuniaire dont a ainsi bénéficié le requérant aurait porté la rémunération globale de celui-ci à un montant excessif ;

Considérant toutefois que l'administration est en droit d'invoquer, comme elle le fait en l'espèce à titre subsidiaire, un nouveau fondement légal, sous réserve que cette substitution n'ait pas pour effet de priver le contribuable des garanties attachées à ce nouveau fondement ; que l'administration intimée demande ainsi que les sommes en litige soient imposées dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers en se prévalant des dispositions de l'article 111 c du code général des impôts, en vertu desquelles " Sont notamment considérées comme revenus distribués : (...) c) Les rémunérations et avantages occultes " ; que le requérant n'étant privé d'aucune garantie procédurale par la substitution de base légale demandée par l'administration, il y a lieu de faire droit à cette demande ;

Considérant qu'aux termes de l'article 54 bis du code général des impôts : "Les contribuables visés à l'article 53 A (...) doivent obligatoirement inscrire en comptabilité, sous une forme explicite, la nature et la valeur des avantages en nature accordés à leur personnel" ; qu'aux termes de l'article 111 du même code : "Sont notamment considérés comme revenus distribués : (...) c - les rémunérations et avantages occultes" ; qu'il résulte de ces dispositions, qu'à défaut de respecter les prescriptions visées à l'article 54 bis, les avantages consentis par l'entreprise de façon occulte ne sont pas déductibles des résultats de la société et sont imposables en tant que revenus de capitaux mobiliers chez le bénéficiaire ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que les avantages accordés par la SARL Bahmi à M. DUMAN, son gérant, n'ont pas été inscrits, sous une forme explicite, dans la comptabilité de la société, en méconnaissance des dispositions précitées de l'article 54 bis du code général des impôts ; que, par suite, et sans qu'il y ait lieu de rechercher si ces avantages ont eu pour effet de porter la rémunération globale de M. DUMAN à un niveau excessif, de tels avantages en litige revêtaient, au sens des dispositions précitées du c) de l'article 111 du même code, un caractère occulte et devaient être imposés, au nom de l'intéressé, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers ; que c'est par suite à bon droit que l'administration a imposé cet avantage pécuniaire, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers ;

Quant aux revenus d'origine indéterminée :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales : " En vue de l'établissement de l'impôt sur le revenu, l'administration peut demander au contribuable des éclaircissements. (...) Elle peut également lui demander des justifications lorsqu'elle a réuni des éléments permettant d'établir que le contribuable peut avoir des revenus plus importants que ceux qu'il a déclarés (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 16 A du même livre : " Les demandes d'éclaircissements et de justifications fixent au contribuable un délai de réponse qui ne peut être inférieur à deux mois. Lorsque le contribuable a répondu de manière insuffisante aux demandes d'éclaircissements ou de justifications, l'administration lui adresse une mise en demeure d'avoir à compléter sa réponse dans un délai de trente jours en précisant les compléments de réponse qu'elle souhaite " ; qu'aux termes de l'article L. 69 du même livre : " (...) Sont taxés d'office à l'impôt sur le revenu les contribuables qui se sont abstenus de répondre aux demandes (...) de justifications prévues à l'article L. 16 " ;

Considérant que comme il a été plus haut, dans le cadre de l'examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle au titre des années 2003 et 2004, M. A a été invité à s'expliquer sur la discordance entre ses revenus déclarés et les sommes portées au crédit de ses comptes bancaires ; qu'à la suite de ces demandes de justifications, en l'absence de réponses suffisantes à ces demandes, il a été taxé d'office à raison des crédits restés inexpliqués, qualifiés de revenus d'origine indéterminée ; qu'il incombe par suite au requérant d'apporter la preuve de l'exagération de ses bases d'imposition en application de l'article L. 193 du livre des procédures fiscales ;

Considérant que s'agissant des crédits bancaires qualifiés de revenus d'origine indéterminée au titre de l'année 2003, le requérant fait grief aux premiers juges d'avoir écarté comme non probant l'extrait du livre de caisse pour le motif qu'il était dépourvu de certification par un expert comptable et, par suite, de ne pas avoir admis le caractère non imposable du crédit bancaire d'un montant de 4 000 euros sur son compte ouvert à la BNP de l'Isle sur Sorgue ; qu'en tout état de cause, le requérant, en produisant un brouillard de caisse faisant état d'un versement en 2003 de l'intéressé au profit de la SCI Castel Immo de 4 000 euros en espèces, ne justifie ni avoir effectué un retrait d'espèces de même montant afin de pouvoir financer cet apport, ni l'origine de ces fonds ; que par ailleurs, si le requérant explique, s'agissant de son compte courant ouvert dans les livres de la SARL Bahmi, que les montants de 1 247, 96 euros et de 2 651, 55 euros faisant l'objet de rehaussements correspondraient à des remboursements de factures de frais payées pour le compte de cette société grâce aux versements de la société Oreco, il n'apporte aucun commencement de preuve de la réalité de ces règlements, la circonstance que dans le cadre de la vérification de comptabilité de la SARL Bahmi, l'administration a admis ces frais comme justifiés et engagés dans l'intérêt de l'entreprise étant sans incidence à cet égard ; que par suite, c'est à bon droit que les premiers juges ont écarté le moyen tiré du caractère non imposable des crédits en cause ;

Considérant que s'agissant de l'année 2004, M A fait valoir que les différents crédits bancaires regardés comme injustifiés correspondraient à des virements venant en contrepartie d'avances ou de prêts qu'il aurait antérieurement consentis à Mme Jacobs, son épouse, à la société Oreco et à la société Cobra, ou bien d'avances consenties par son épouse à son profit ; que toutefois, les pièces fournies par le requérant ne sont pas de nature à établir une concordance de dates et de montants entre les prêts et avances prétendument consentis et les crédits bancaires constatés ; que, par suite, l'origine et la nature des sommes en litige ne sont pas établies ; que dès lors, la contestation des impositions résultant de ces revenus ne saurait être accueillie ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse à M. A la somme qu'il réclame au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Jacques A et au ministre de l'économie et des finances.

Copie en sera adressée au directeur de contrôle fiscal Sud-Est.

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N° 09MA03757


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 09MA03757
Date de la décision : 28/06/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-01-02-03-01 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Règles générales. Impôt sur le revenu. Détermination du revenu imposable. Revenus à la disposition.


Composition du Tribunal
Président : Mme LASTIER
Rapporteur ?: M. Xavier HAILI
Rapporteur public ?: M. DUBOIS
Avocat(s) : AUBANIAC

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2012-06-28;09ma03757 ?
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