Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 23 novembre 2010, sous le 10MA04206, présentée pour Mme Juliette A, demeurant ..., par la SCP d'avocat Scheuer - Vernhet et Associes ;
Mme Juliette A demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0805959 du 24 septembre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Montpellier l'a condamné à payer une amende de 1 000 euros, à retirer les enrochements litigieux et remettre en état les dépendances du domaine public dont l'occupation a été constatée dans le procès-verbal de contravention de grande voirie du 1er octobre 2008, dans un délai de trois mois à compter de la notification du jugement intervenu ;
2°) de rejeter la demande présentée par le préfet de l'Hérault et de condamner l'Etat à lui verser une somme de 1500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme ;
Vu la loi du 16 septembre 1807 relative au dessèchement des marais ;
Vu le code pénal ;
Vu le code général de la propriété des personnes publiques ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 juin 2012 :
- le rapport de Mlle Josset, premier conseiller ;
- les conclusions de M. Deliancourt, rapporteur public ;
- les observations de Me Rigeade de la SCP Scheuer-Vernhet et associés, pour Mme A ;
Considérant qu'un procès-verbal de contravention de grande voirie a été dressé par M. Pagès, contrôleur principal des travaux de l'Etat, après constat les 12 juin 2007 et 14 mars 2008 de la présence sur le domaine public maritime, en limite de la parcelle cadastrée section AC 276 sur la commune de Vias au lieu dit " Trou de Ragout ", d'enrochements et de remblais implantés sans respect des règles de l'art, d'une part entre la protection existante et la bâtisse présente dans cette parcelle sur une surface de 90 m2 en partie sud, d'autre part sur une surface de 30 m 2 en partie nord-ouest, représentant un danger pour les usagers de la plage environnante et faisant obstacle à la libre circulation des piétons le long du littoral ; que ledit procès-verbal a été établi à l'encontre de Mme Juliette B épouse C, propriétaire de la parcelle AC 276 ; que Mme A demande l'annulation du jugement du 24 septembre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Montpellier l'a condamné à payer une amende de 1 000 euros, à retirer les enrochements litigieux et remettre en état les dépendances du domaine public dont l'occupation a été constatée dans le procès-verbal de contravention de grande voirie du 1er octobre 2008, dans un délai de trois mois à compter de la notification du jugement, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
Sur la régularité du jugement :
Considérant qu'il résulte de l'examen de la minute du jugement attaqué que ledit jugement comporte le visa des mémoires, des moyens et des conclusions des parties ; que, par suite, le moyen tiré de son irrégularité manque, en tout état de cause, en fait ;
Sur la recevabilité de la requête de première instance :
Considérant qu'aux termes de l'article L.774-2 du code de justice administrative : " Dans les dix jours qui suivent la rédaction d'un procès-verbal de contravention, le préfet fait faire au contrevenant notification de la copie du procès-verbal. La notification est faite dans la forme administrative, mais elle peut également être effectuée par lettre recommandée avec demande d'avis de réception. La notification indique à la personne poursuivie qu'elle est tenue, si elle veut fournir des défenses écrites, de les déposer dans le délai de quinzaine à partir de la notification qui lui est faite. Il est dressé acte de la notification ; cet acte doit être adressé au tribunal administratif et y être enregistré comme les requêtes introductives d'instance " ;
Considérant que le préfet de l'Hérault a, par arrêté n° 2008-I-2500 du 16 septembre 2008, publié le jour même au recueil des actes administratifs du département, donné délégation de signature à M. Ginesty, chef de bureau de la réglementation pour signer "les correspondances ne constituant ni des décisions générales ni des instructions générales..." ; qu'une telle délégation donnait compétence à M. Ginesty pour notifier la copie du procès-verbal dressé à l'encontre de l'intéressée le 1er octobre 2008 ; qu'au surplus, il est constant le préfet de l'Hérault a compétemment saisi le 19 décembre 2008 le tribunal administratif de Montpellier de conclusions aux fins de condamnation de Mme A au paiement d'une amende et des frais engagés pour l'établissement du procès-verbal en cause ainsi qu'au retrait des enrochements implantés sur le domaine public ; que ces conclusions ont été notifiées à la contrevenante, laquelle a été mise à même de présenter des observations, ce qu'elle a d'ailleurs fait ; qu'ainsi le moyen selon lequel la notification du procès-verbal n'aurait pas été régulière doit être écarté ;
Sur la régularité de la procédure de contravention de grande voirie :
Considérant que le procès-verbal de contravention de grande voirie dressé le 1er octobre 20085 mentionne que M. Pages, contrôleur principal des Travaux publics de l'Etat est assermenté et commissionné conformément à la loi ; qu'à cet égard, le préfet de l'Hérault a produit en outre, la copie de la carte professionnelle de cet agent commissionné et assermenté devant le Tribunal de grande instance de Montpellier, et expressément habilité à constater les infractions portant atteinte au domaine public maritime ; que par suite, le moyen tiré de l'incompétence de M. Pages à dresser ledit procès-verbal ne peut être que rejeté ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que les constats de M. Pages faits sur les lieux les 12 juin 2007 et 14 mars 2008 comportaient chacun trois clichés photographiques, un plan de situation et une vue aérienne ; que ces documents annexés au procès-verbal de contravention de grande voirie dressé le 1er octobre 2008 permettaient de déterminer précisément les ouvrages implantés sur le domaine public maritime ; qu'ainsi le moyen tiré de son irrégularité manque en fait ; que si Mme A fait valoir s'agissant des photos prises le 13 avril 2007 qui ont donné lieu au constat du 12 juin 2007 que la photographie du haut serait un montage et celle du bas ne concernerait pas sa propriété, elle n'apporte en tout état de cause aucun élément au soutien de ces allégations ; qu'il résulte de l'instruction que les photographies jointes au procès-verbal de contravention de grande voirie concernaient bien la parcelle AC 276, propriété de Mme A et non la parcelle AC 272 appartenant à M. De Berthier ;
Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction et notamment pas des documents photographiques produits par l'administration que les agents de la direction départementale des territoires et de la mer auraient pénétré les 13 avril 2007 et 14 mars 2008 sur sa propriété privée ;
Sur le bien-fondé de la contravention de grande voirie :
Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article L.2111-4 du code général de la propriété des personnes publiques : " Le domaine public maritime naturel de L'Etat comprend : / 1° Le sol et le sous-sol de la mer entre la limite extérieure de la mer territoriale et, côté terre, le rivage de la mer. / Le rivage de la mer est constitué par tout ce qu'elle couvre et découvre jusqu'où les plus hautes mers peuvent s'étendre en l'absence de perturbations météorologiques exceptionnelles ; / (...) " ; qu'aux termes des dispositions de l'article L. 2122-1 du code général de la propriété des personnes publiques : " Nul ne peut, sans disposer d'un titre l'y habilitant, occuper une dépendance du domaine public d'une personne publique mentionnée à l'article L. 1 ou l'utiliser dans des limites dépassant le droit d'usage qui appartient à tous " et qu'aux termes de l'article L. 2132-3 du même code : " Nul ne peut bâtir sur le domaine public maritime ou y réaliser quelque aménagement ou quelque ouvrage que ce soit sous peine de leur démolition, de confiscation des matériaux et d'amende. Nul ne peut en outre, sur ce domaine, procéder à des dépôts ou à des extractions, ni se livrer à des dégradations" ;
Considérant qu'ainsi que l'a jugé à bon droit le tribunal, il appartient en tout état de cause au juge administratif, saisi d'un litige pour lequel une contravention de grande voirie a été dressée par procès-verbal, de reconnaître les limites du domaine public naturel, et ce quand bien même, aucune délimitation conforme aux dispositions de l'article L.2111-5 du même code n'aurait été réalisée, avant comme après la demande en ce sens postérieure au procès-verbal, de Mme A ; qu'il résulte de l'instruction, et notamment des constatations et relevés de la limite haute du rivage de la mer opérés par les agents du service maritime et de navigation du Languedoc-Roussillon les 2, 23 et 31 mars 2004 ainsi que les 13 et 14 décembre 2005 assortis de photos et complétés par les données sur l'état de la houle et du niveau marin lors ces périodes, que les ouvrages litigieux sont bien implantés en deçà de la limite des plus hautes eaux en direction de la terre et sont régulièrement submergés en l'absence de toute perturbation météorologique exceptionnelle, ainsi que cela ressort également des clichés photographiques pris les 13 avril 2007 et 14 mars 2008 en dehors de toute perturbation météorologique exceptionnelle et bien après les tempêtes exceptionnelles qui seraient survenues les 20 et 22 février 2004 et les 2 et 3 décembre 2005 ; que l'intéressée ne démontre pas que les points relevés en 2004 et 2005 seraient incorrectement reportés sur le plan annexé au procès-verbal de contravention de grande voirie en se fondant sur un autre plan établi à une échelle très différente et alors que l'administration soutient sans être utilement contredite qu'à la même échelle les plans en cause présentent les mêmes données et donc des indications identiques quant à la délimitation du domaine public maritime ;
Considérant qu'eu égard au principe de l'indépendance de la législation de l'urbanisme et de celle régissant la domanialité publique, le moyen tiré de ce que l'intéressée bénéficie d'une autorisation de clôture est inopérant ; qu'en tout état de cause, l'autorisation de réaliser les travaux ne peut s'entendre que d'une autorisation de les réaliser sur les propriétés privées et non sur le domaine public maritime, ainsi que cela est mentionné dans l'autorisation de clôture en cause ;
Considérant que si Mme A soutient, sans d'ailleurs l'établir, qu'elle bénéficie de l'exemption de servitude de passage sur le littoral sur sa propriété en application du dernier alinéa de l'article L.160-6 du code de l'urbanisme et qu'ainsi elle n'a pas à prévoir la libre circulation des piétons sur sa propriété privée, contrairement à ce qui est mentionné dans le procès-verbal de contravention de grande voirie, cette circonstance en tout état de cause est sans incidence, dès lors que comme il vient d'être dit les ouvrages en litige sont situés sur le domaine public maritime ;
Considérant que dès lors que l'obligation de procéder à la remise en état des lieux résulte uniquement de l'occupation sans titre du domaine public maritime, et que l'intéressé ne peut se prévaloir d'aucun droit réel sur ce domaine, alors même que la partie de parcelle désormais submergée par les flots lui appartenait à l'origine, cette dernière n'est pas fondée à soutenir que les dispositions de l'article L. 2111-4 du code général de la propriété des personnes publiques méconnaîtraient le droit de chacun au respect de ses biens protégé par l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Sur les causes d'exonération :
Considérant que les dispositions de l'article 33 de la loi du 16 septembre 1807, qui mettent à la charge des propriétés protégées les dépenses consenties pour la construction de digues à la mer, dont la nécessité aura été constatée par le gouvernement, n'ont ni pour objet ni pour effet d'autoriser Mme A à réaliser les ouvrages en litige sur le domaine public maritime et ne sauraient ainsi être de nature à l'exonérer de sa responsabilité ;
Considérant que Mme A ne peut pas davantage prétendre qu'elle était fondée à réaliser les aménagements en raison desquels elle a été poursuivie du fait de la carence de l'administration à mettre en place des dispositifs de protection des propriétés privées contre l'action des flots et des intempéries, en ce qui concerne la rive droite du Libron, qui ne saurait être assimilée à un cas de force majeure, seul de nature à permettre de relaxer un contrevenant des poursuites engagées à son encontre ; que le moyen tiré de la méconnaissance du principe d'égalité des citoyens devant les charges publiques est inopérant ;
Considérant que, dès lors, les faits constatés sont bien constitutifs d'une contravention de grande voirie prévue et réprimée par les dispositions des articles L.2122-1 et 2132-3 du code général de la propriété des personnes publiques ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme A n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que par jugement du 24 septembre 2010, le tribunal administratif de Montpellier l'a condamnée à retirer les enrochements et remettre en état les dépendances du domaine public dont l'occupation a été constatée par le procès-verbal de contravention de grande voirie du 1 er octobre 2008, dans un délai de trois mois à compter de la notification du jugement, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
Sur l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'a pas la qualité de partie perdante, verse à Mme A les sommes que celui-ci réclame au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
D E C I D E
Article 1er: La requête de Mme A est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Juliette A et au ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie.
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