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19/04/2012 | FRANCE | N°10MA04666

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 5ème chambre - formation à 3, 19 avril 2012, 10MA04666


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 23 décembre 2010, sous le n° 10MA04666, présentée pour M. Lofti A, élisant domicile chez Me Jaidane sis ..., par Me Jaidane, avocat ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1002700 du 24 novembre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 10 septembre 2009 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire fr

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2°) d'annuler, pour...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 23 décembre 2010, sous le n° 10MA04666, présentée pour M. Lofti A, élisant domicile chez Me Jaidane sis ..., par Me Jaidane, avocat ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1002700 du 24 novembre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 10 septembre 2009 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé la Tunisie comme pays de destination ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ledit arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet des Alpes-Maritimes de lui délivrer le titre de séjour sollicité dans le délai de huit jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 200 euros par jour de retard ou subsidiairement de procéder à un nouvel examen de sa demande dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour lui permettant de travailler ;

4°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 2 500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

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Vu le jugement et la décision attaqués ;

Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Marseille en date du 10 mars 2011 admettant M. A à l'aide juridictionnelle totale ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu l'accord franco-tunisien en matière de séjour et de travail du 17 mars 1988 modifié ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu l'arrêté du 8 juillet 1999 relatif aux conditions d'établissement des avis médicaux concernant les étrangers malades prévues à l'article 7-5 du décret n° 46-1574 du 30 juin 1946 modifié ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 22 mars 2012 :

- le rapport de Mme Pena, premier conseiller ;

- et les conclusions de Mme Chenal-Peter, rapporteur public ;

Considérant que M. Lofti A, de nationalité tunisienne, relève appel du jugement en date du 24 novembre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté en date du 10 septembre 2009 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé la Tunisie comme pays de destination ;

Considérant que si M. A a sollicité le 23 avril 2009, la délivrance d'un titre de séjour " vie privée et familiale " sur le fondement des dispositions de l'article L.313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il ressort toutefois de l'arrêté litigieux que le préfet des Alpes-Maritimes, après lui avoir refusé la délivrance du titre sur ce fondement, a ajouté " que l'intéressé n'entre dans aucun cas d'attribution d'un titre de séjour en application de l'accord franco-tunisien ou du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile " ; qu'il doit ainsi être regardé comme ayant examiné d'office si l'appelant remplissait les conditions prévues par lesdits textes pour se voir attribuer de plein droit un titre de séjour sur un autre fondement ; que, par suite, une telle mention rend opérant le moyen, soulevé par M. A et tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L.313-11-11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors que ces dispositions constituent un cas d'attribution de plein droit d'un titre de séjour ;

Considérant qu'aux termes de l'article 7 quater de l'accord franco-tunisien susvisé : " Sans préjudice des dispositions du b) et du d) de l'article 7 ter, les ressortissants tunisiens bénéficient, dans les conditions prévues par la législation française, de la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale " ; et qu'aux termes de l'article L.313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sans que la condition prévue à l'article L.311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin inspecteur de santé publique compétent au regard du lieu de résidence de l'intéressé ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police " ; qu'il résulte de ces dispositions, que lorsque un étranger justifie, à l'appui de sa demande de titre de séjour, d'éléments suffisamment précis sur la nature et la gravité des troubles dont il souffre, le préfet est tenu, préalablement à sa décision, de recueillir l'avis du médecin inspecteur de la santé publique qui statue dans les conditions prévues par l'arrêté du 8 juillet 1999 ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A avait invoqué, à l'appui de sa demande, avoir été victime d'un accident en septembre 2007 lui ayant occasionné de multiples fractures et une hospitalisation de plusieurs semaines ; qu'il avait en outre joint à ladite demande les pièces justificatives de son dossier médical ;

que par suite, le PREFET DES ALPES-MARITIMES était tenu, au vu de ces pièces, de recueillir l'avis du médecin inspecteur de santé publique avant de prendre sa décision ; qu'ainsi, le refus de titre de séjour a été pris à la suite d'une procédure irrégulière et est, par suite, entaché d'illégalité ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

Considérant qu'aux termes de l'article L.911-2 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé. " ;

Considérant que, compte tenu du motif de l'annulation de l'arrêté attaqué, cette annulation implique seulement que soit délivrée à l'intéressé une autorisation provisoire de séjour et que le préfet se prononce à nouveau, après une nouvelle instruction, sur la situation de M. A ce qui concerne son droit au séjour, dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt ; qu'il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L.761-1 du code de justice administrative qui reprend les dispositions de l'article 75-I de la loi susvisée du 10 juillet 1991 : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des fais exposés et non compris dans les dépens (...). " ; que l'article 43 de la même loi autorise le bénéficiaire de l'aide juridictionnelle à demander au juge de condamner, dans les mêmes conditions, prévues à l'article 75 précité, la partie perdante " au paiement d'une somme au titre des frais qu'il a exposés " ; que l'article 37 de la même loi dispose que : " (...) l'avocat du bénéficiaire de l'aide juridictionnelle peut demander au juge de condamner, dans les conditions prévues à l'article 75, la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès et non bénéficiaire de l'aide juridictionnelle, à une somme au titre des frais que le bénéficiaire de l'aide aurait exposés s'il n'avait pas eu cette aide. Il peut, en cas de condamnation, renoncer à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat et poursuivre le recouvrement à son profit de la somme allouée par le juge " ;

Considérant qu'il résulte de ces dispositions que le bénéficiaire de l'aide juridictionnelle ne peut demander au juge de condamner à son profit la partie perdante qu'au paiement des seuls frais qu'il a personnellement exposés, à l'exclusion de la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle confiée à son avocat mais que l'avocat de ce bénéficiaire peut demander au juge de condamner la partie perdante à lui verser la somme correspondant à celle qu'il aurait réclamée à son client, si ce dernier n'avait eu l'aide juridictionnelle, à charge pour l'avocat qui poursuit, en cas de condamnation, le recouvrement à son profit de la somme qui lui a été allouée par le juge, de renoncer à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle qui lui a été confiée ;

Considérant que M. A a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que son avocat peut se prévaloir des dispositions combinées des articles L.761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Jaidane, avocat de M. A renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle de mettre à la charge de l'Etat le versement au requérant d'une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1002700 du Tribunal administratif de Nice en date du 24 novembre 2010 et l'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes en date du 10 septembre 2009 sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet des Alpes-Maritimes de procéder à une nouvelle instruction de la demande présentée par M. A dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour.

Article 3 : L'Etat versera, au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative, une somme de 1 500 (mille cinq cents) euros à Me Jaidane, sous réserve qu'il renonce au bénéfice de l'aide juridictionnelle.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. Lofti A, au préfet des Alpes-Maritimes et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 10MA04666
Date de la décision : 19/04/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. POCHERON
Rapporteur ?: Mme Eleonore PENA
Rapporteur public ?: Mme CHENAL-PETER
Avocat(s) : JAIDANE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2012-04-19;10ma04666 ?
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