La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

20/02/2012 | FRANCE | N°09MA04142

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2ème chambre - formation à 3, 20 février 2012, 09MA04142


Vu la requête, enregistrée le 22 novembre 2009, présentée pour Mme Veselinka A, demeurant ... (34500), par Me Mazas ; Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0903432 du 20 octobre 2009 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 1er juillet 2009 par laquelle le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligée à quitter le territoire national dans le délai d'un mois, à ce qu'il soit enjoint audit préfet de lui délivrer un titre de séjour ou, à défaut,

de procéder au réexamen de sa situation et de lui délivrer une autorisation p...

Vu la requête, enregistrée le 22 novembre 2009, présentée pour Mme Veselinka A, demeurant ... (34500), par Me Mazas ; Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0903432 du 20 octobre 2009 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 1er juillet 2009 par laquelle le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligée à quitter le territoire national dans le délai d'un mois, à ce qu'il soit enjoint audit préfet de lui délivrer un titre de séjour ou, à défaut, de procéder au réexamen de sa situation et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler, et ce dans le délai de huit jours à compter de la notification du jugement ;

2°) de faire droit à ses conclusions de première instance ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, le versement d'une somme de 1 500 euros à son conseil, lequel renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle ;

..........................

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 7 avril 2010, présenté par le préfet de la région Languedoc-Roussillon, préfet de l'Hérault qui conclut au rejet de la requête ;

...........................

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle, en date du 10 mars 2010, admettant Mme A au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New York le 26 janvier 1990 ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 23 janvier 2012 :

- le rapport de Mme Menasseyre, rapporteure,

Considérant que Mme A, de nationalité croate, relève appel du jugement du 20 octobre 2009 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté en date du 1er juillet 2009 refusant de lui délivrer un titre de séjour et lui faisant obligation de quitter le territoire français ;

Considérant qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ; qu'il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme A s'est installée en 2004 à Béziers, avec son concubin et leurs cinq enfants ; que ce dernier, condamné à une peine d'emprisonnement de cinq ans par jugement du tribunal de grande instance de Béziers du 27 mars 2007 est incarcéré à Perpignan depuis le mois de juin 2007 ; qu'il n'est pas contesté que, malgré les difficultés liées à la très grande précarité dans laquelle vit cette famille, Mme A et ses enfants voient régulièrement l'intéressé en prison, l'appelante apportant beaucoup d'attention aux visites au parloir et au maintien du lien familial et affectif entre ses enfants et leur père ; qu'il ressort également des pièces du dossier que le compagnon de Mme A s'implique, autant que faire se peut, notamment lors de ses permissions, dans le suivi de la scolarité et dans l'éducation de ses enfants ; que, dans ce contexte, l'exécution de l'arrêté litigieux aurait pour effet de priver durablement les enfants de Mme A de la présence de l'un de leurs parents ; que par suite Mme A est fondée à soutenir que l'arrêté litigieux a été pris en méconnaissance des stipulations précitées de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant et à demander pour ce motif l'annulation du jugement du tribunal administratif de Montpellier rejetant sa demande d'annulation et celle de cet arrêté ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service privé prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution ; qu'aux termes de l'article L. 911-2 du même code : Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service privé prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé ;

Considérant qu'il appartient au juge administratif, lorsqu'il est saisi, sur le fondement de ces dispositions, de conclusions tendant à ce que soit prescrite une mesure d'exécution, de statuer sur ces conclusions en tenant compte de la situation de droit et de fait existant à la date de sa décision ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que le concubin de Mme A soit toujours incarcéré à la date de la présente décision ; que dans ces conditions l'exécution de la présente décision n'implique pas nécessairement la délivrance d'un titre de séjour portant la mention vie privée et familiale ; qu'il résulte toutefois de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que si une obligation de quitter le territoire français est annulée par le juge administratif, l'étranger est muni d'une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce que l'autorité administrative ait à nouveau statué sur son cas ; que, dans ces conditions il y a lieu, ainsi que le demande Mme A à titre subsidiaire, d'enjoindre au préfet de l'Hérault de procéder à un nouvel examen de sa demande de titre de séjour dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt et de la munir d'une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce qu'il ait à nouveau statué sur son cas ;

Considérant enfin que, s'agissant des conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Mazas, avocate de Mme A renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État, de mettre à la charge de l'État le versement à Me Mazas de la somme de 2 392 euros au titre des frais exposés tant en première instance qu'en appel ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 20 octobre 2009 est annulé.

Article 2 : L'arrêté du 1er juin 2009 est annulé.

Article 3 : Il est enjoint au préfet de l'Hérault de délivrer à Mme A une autorisation provisoire de séjour et de se prononcer sur sa situation dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 4 : L'Etat versera à Me Mazas, sous réserve que celle-ci renonce au bénéfice de l'indemnité d'aide juridictionnelle, la somme de 1 696 euros, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme A est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Veselinka A et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration.

Copie en sera transmise au préfet de la région Languedoc-Roussillon, préfet de l'Hérault, et au procureur de la république près le tribunal de grande instance de Béziers.

''

''

''

''

2

N° 09MA04142


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 09MA04142
Date de la décision : 20/02/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03-04 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour. Motifs.


Composition du Tribunal
Président : M. LAGARDE
Rapporteur ?: Mme Anne MENASSEYRE
Rapporteur public ?: Mme FEDI
Avocat(s) : MAZAS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2012-02-20;09ma04142 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award