La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

07/02/2012 | FRANCE | N°09MA00113

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4ème chambre-formation à 3, 07 février 2012, 09MA00113


Vu la requête, enregistrée le 13 janvier 2009, présentée pour la SARL LIDO PLAGE, dont le siège est 15 Promenade des Anglais à Nice (06000), par Mes Duceux et Laurant ; la SARL LIDO PLAGE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0601810 en date du 12 novembre 2008 par lequel le Tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à la décharge, en droits et pénalités, d'une part, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contributions additionnelles auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2001 et 2002 et, d'a

utre part, des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée qui l...

Vu la requête, enregistrée le 13 janvier 2009, présentée pour la SARL LIDO PLAGE, dont le siège est 15 Promenade des Anglais à Nice (06000), par Mes Duceux et Laurant ; la SARL LIDO PLAGE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0601810 en date du 12 novembre 2008 par lequel le Tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à la décharge, en droits et pénalités, d'une part, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contributions additionnelles auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2001 et 2002 et, d'autre part, des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier 2001 au 31 décembre 2002 ;

2°) de prononcer la décharge des impositions contestées et des pénalités y afférentes ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.......................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 janvier 2012,

- le rapport de M. Emmanuelli, rapporteur ;

- et les conclusions de M. Guidal, rapporteur public ;

Considérant que la société à responsabilité limitée (SARL) LIDO PLAGE, qui exerce une activité de restaurant-bar de plage à Nice (06000), a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant, en matière d'impôt sur les sociétés et de contributions additionnelles à l'impôt sur les sociétés, sur les exercices clos en 2001 et 2002, et, en matière de taxe sur la valeur ajoutée, sur la période comprise entre le 1er janvier 2001 et le 31 décembre 2002, à l'issue de laquelle divers redressements lui ont été notifiés ; qu'elle conteste le jugement par lequel le Tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à la décharge des compléments d'imposition auxquels elle a été assujettie ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : L'administration adresse au contribuable une notification de redressement qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation ; qu'aux termes de l'article R.* 57-1 du même livre : La proposition de rectification prévue par l'article L. 57 fait connaître au contribuable la nature et les motifs de la rectification envisagée. L'administration invite, en même temps, le contribuable à faire parvenir son acceptation ou ses observations dans un délai de trente jours à compter de la réception de la proposition (...) ;

Considérant, en premier lieu, qu'en cas de retour à l'administration fiscale du pli recommandé contenant une notification de redressement, la preuve qu'il lui incombe d'apporter que le contribuable en a reçu notification régulière peut résulter soit des mentions précises, claires et concordantes portées sur les documents retournés à l'expéditeur, soit d'une attestation de l'administration postale ou d'autres éléments de preuve établissant la délivrance par le facteur, conformément à la règlementation postale en vigueur, d'un avis de passage prévenant le destinataire de ce que le pli est à sa disposition au bureau de poste ;

Considérant que, par une proposition de rectification du 26 juillet 2004 adressée à la SARL LIDO PLAGE par lettre recommandée avec avis de réception le 30 juillet 2004, le service des impôts a fait connaître à la société les modifications qu'il entendait apporter à ses bases imposables à l'impôt sur les sociétés et à la taxe sur la valeur ajoutée pour les années 2001 et 2002 et que le pli contenant ce document a été retourné à l'administration avec la mention non réclamé, retour à l'envoyeur ; que l'enveloppe renvoyée à l'administration porte la mention, parfaitement lisible, selon laquelle le préposé des postes a, conformément à la règlementation postale, avisé celui-ci que le pli pouvait être retiré par lui au bureau de poste Nice-France , dépositaire de ce courrier ; que cette mention avisé , dépourvue d'ambiguïté, et alors même que l'absence du destinataire n'est pas indiquée, suffit par elle-même à consacrer la preuve, qui incombe à l'administration, que le facteur a rempli son office en déposant dans la boîte aux lettres de la société un avis de passage informant cette dernière de l'existence d'une lettre recommandée et de sa mise en instance au bureau de poste territorialement compétent ; qu'ainsi, la proposition de rectification a été régulièrement notifiée à la SARL LIDO PLAGE le 2 août 2004 et, s'étant abstenue d'y répondre dans le délai de trente jours qui lui était imparti, la société doit être regardée comme ayant tacitement accepté les redressements et ne saurait soutenir utilement que l'envoi ultérieur, à titre d'information, d'une copie de la proposition de rectification lui offrait, à nouveau, les garanties prévues par la loi en cas de redressement contradictoire ;

Considérant, en second lieu, qu'il résulte de l'instruction que la proposition de rectification en date du 26 juillet 2004 indique les années d'imposition, les montants, ainsi que les motifs des rehaussements envisagés, et mentionne, au surplus, les articles du code général des impôts servant de base légale à ces rectifications ; que, contrairement à ce que soutient la SARL LIDO PLAGE, elle précise, en particulier, de manière détaillée, les méthodes de reconstitution des chiffres d'affaires restaurant et plage ; que, s'agissant de la détermination du pourcentage des vins de 20,19 %, la proposition précise que le vérificateur a utilisé le pourcentage des seules données de la société du 28 mars au 31 décembre 2002 et a totalisé le chiffre d'affaires afférent aux vin, kirs, et champagne (40 000 euros) avant de le diviser par le chiffre d'affaires restaurant ressortant des bandes de caisse (198 094 euros) ; que la circonstance que la copie d'extraits de bande de caisse par zone et par produit, regroupée sur six feuillets, n'ait pas fait apparaître le détail des ventes de champagne et de kirs pris en compte par le vérificateur est sans incidence dès lors que les extraits fournis ne pouvaient revêtir un caractère exhaustif et que les indications fournies au contribuable étaient suffisamment explicites pour lui permettre d'engager, éventuellement, une discussion contradictoire avec l'administration fiscale et de présenter utilement ses observations ; que, par suite, la proposition de rectification adressée à la société requérante répond aux exigences des dispositions précitées de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales ;

Sur le bien-fondé des impositions :

En ce qui concerne la charge de la preuve :

Considérant qu'aux termes de l'article R.* 194-1 du livre des procédures fiscales : Lorsque, ayant donné son accord à la rectification ou s'étant abstenu de répondre dans le délai légal à la proposition de rectification, le contribuable présente cependant une réclamation faisant suite à une procédure contradictoire de rectification, il peut obtenir la décharge ou la réduction de l'imposition, en démontrant son caractère exagéré (...) ;

Considérant que, comme il a été dit, la SARL LIDO PLAGE s'est abstenue de répondre à la proposition de rectification dans le délai de trente jours qui lui était imparti ; qu'il lui appartient donc d'apporter la preuve de l'exagération des impositions en litige ;

En ce qui concerne les méthodes de reconstitution et le bien-fondé des redressements opérés :

Considérant qu'après avoir écarté la comptabilité dont il n'est pas contesté qu'elle était dépourvue de valeur probante, le vérificateur a reconstitué le chiffre d'affaires, d'une part, de l'activité bar-restaurant en utilisant la méthode dite des vins et, d'autre part, de l'activité plage en déterminant, uniquement pour les mois de juillet et août 2001 et juillet 2002, le nombre de matelas loués quotidiennement en fonction des conditions météorologiques et des taux d'occupation indiqués par le gérant ; que l'utilisation, au titre de chacune des activités exercées, de plusieurs méthodes de reconstitution des bases imposables ne constitue nullement une obligation pour l'administration ;

Considérant que la méthode dite des vins , qui repose sur les données propres de l'entreprise, ne saurait être qualifiée, de façon générale, d'aléatoire ou de sommaire ; que si la requérante fait grief au vérificateur de ne pas avoir tenu compte de l'augmentation des prix entre 2001 et 2002, elle n'apporte aucun élément permettant d'établir l'existence d'une variation de prix entre lesdites années ; que la proportion du vin consommé par rapport à l'ensemble du chiffre d'affaires généré par l'activité restaurant a, comme il a été dit, été arrêtée à 20,19 % d'après les bandes de la caisse enregistreuse utilisée à compter du 28 mars 2002 ; qu'il en est de même pour la répartition entre les recettes provenant du bar et celles provenant du restaurant ; que, contrairement à ce qui est soutenu, les ventes de champagne et de kir apparaissent dans les bandes de caisse de l'année 2002 qui ont été présentées dans le cadre du débat contentieux, étant souligné que la SARL LIDO PLAGE n'ayant pas récupéré le pli contenant la proposition de rectification dans les délais qui lui étaient impartis, ne saurait reprocher à l'administration de lui avoir transmis tardivement les extraits de bande de caisse comportant les rubriques champagne et apéritif qu'elle détenait au demeurant ; que la circonstance que le vérificateur ait mentionné, par erreur, dans la ligne du tableau consacré aux kirs, l'année 2003 au lieu de l'année 2002 est sans incidence sur la validité de la méthode employée ; que le gérant ayant précisé, sans fournir aucun justificatif, que 2 à 3 litres de vin étaient utilisés quotidiennement pour la cuisine, il ne saurait être reproché au service d'avoir retenu 2,5 litres en 2001 et 2,3 litres en 2002, année au cours de laquelle l'établissement a connu une période de fermeture ; que la méthode ne peut donc être qualifiée d'incompréhensible ou d'incohérente de ce fait ; que la consommation du gérant et du personnel de la SARL LIDO PLAGE a été fournie par le gérant lui-même et le taux des offerts, ressortant à 0,70 % d'après les bandes de caisse de l'année 2002, a été porté à 5 % ; que la société requérante n'établit pas que l'administration aurait insuffisamment évalué ces données ; que s'il est vrai que le vérificateur a commis, dans le corps de la proposition de rectification, quelques erreurs de calcul s'agissant du vin utilisé en cuisine, de la détermination des chiffres d'affaires brut et net ou du renvoi aux lignes des tableaux figurant en annexe, lesdits tableaux ne comportent pas ces erreurs ou comportent des erreurs vénielles d'intitulé des lignes ; qu'il est constant que ce sont les chiffres desdits tableaux qui ont servi à asseoir les redressements ; que, contrairement à ce que soutient la SARL LIDO PLAGE, le vérificateur n'a pas procédé à un changement de méthode entre 2001 et 2002 mais a utilisé davantage de données propres à l'entreprise en 2002 dans la mesure où une caisse enregistreuse a été utilisée à compter du 28 mars 2002 ;

Considérant, par ailleurs, que la requérante n'est pas fondée à soutenir que le vérificateur n'aurait pas dû multiplier les locations de matelas à la demi-journée par deux dès lors que, pour parvenir à une cohérence avec les indications du gérant sur le nombre de matelas loués par type de temps à la journée entière, il convenait de multiplier par deux les demi-journées ; que la SARL LIDO PLAGE ne peut soutenir utilement, a posteriori, que les indications données par le gérant ont été mal interprétées ; que, si la requérante fait valoir que la méthode de reconstitution du chiffre d'affaires de l'activité plage serait sommaire, il résulte de l'instruction que le vérificateur a retenu les taux d'occupation fournis par le gérant selon lequel, notamment, dix matelas en semaine et vingt le week-end étaient loués par mauvais temps ; que cette dernière notion a été définie, en fonction des informations communiquées par Météo France, pour l'ensemble d'une journée où la pluviométrie a été constatée, même pour une brève durée, supérieure à 10 mm ou lorsque la force maximale du vent était supérieure à 50 km/h ; que si la SARL LIDO PLAGE critique cette méthode, elle propose des chiffres reposant essentiellement sur des données de météorologie marine prenant en compte une force du vent moyenne et non la notion utilisée par Météo France de vent maximal instantané ; qu'au demeurant, les résultats auxquels parvient la requérante s'avèrent, pour deux mois sur trois, inférieurs aux recettes déclarées au titre de l'activité de plage ; que, contrairement à ce qui est soutenu, le tableau figurant dans la proposition de rectification n'est nullement obscur et illustre clairement, pour chaque type de temps et de période, la méthode exposée ; qu'en outre, des tableaux très détaillés figurent en annexe ; qu'enfin, si la société requérante produit une étude comparant ses résultats à ceux de ses concurrents, cette étude, loin de démontrer l'exagération des bases d'imposition assignées par l'administration, confirme que ses déclarations étaient les plus faibles ; qu'au demeurant, la SARL LIDO PLAGE peut difficilement expliquer les différences relevées par la circonstance qu'elle ne bénéficierait pas de contrats avec des hôtels alors qu'elle revendique, par ailleurs, des accords passés avec des tour-opérateurs ;

Considérant, enfin, que la SARL LIDO PLAGE demande, pour les années soumises à imposition, l'application d'un abattement de 5 % des achats consommés pour tenir compte des pertes et casses qui sont inévitables lors de l'exploitation d'un restaurant ou d'un bar ; que la société requérante soutient que la manipulation de bouteilles occasionne en moyenne la casse d'une bouteille sur cent et qu'elle ne vend pas nécessairement six (ou un multiple de six) coupes de champagne par jour et que le champagne entamé ne peut pas être conservé très longtemps ; que l'administration ne conteste pas utilement la position de la SARL LIDO PLAGE en se bornant à faire valoir que ses allégations sont tardives, générales, et trop imprécises ; que, dans ces conditions, il y a lieu d'appliquer ledit abattement aux recettes bar et restaurant reconstituées au titre des exercices clos en 2001 et 2002 ;

Sur les pénalités exclusives de bonne foi :

Considérant qu'en se prévalant de l'absence de pièces justificatives des recettes, de l'incohérence entre le contenu des bandes de caisse et les chiffres déclarés, de l'existence d'une clé dans la caisse enregistreuse permettant d'effacer des entrées, de l'absence d'utilisation de tickets de plage pouvant justifier des recettes, de l'existence de locations non facturées lors de l'organisation de soirées ayant lieu sur la plage, l'administration justifie, dans les circonstances de l'espèce, la volonté de la requérante de dissimuler une partie de ses recettes ; que la SARL LIDO PLAGE n'est donc pas fondée à demander la décharge des pénalités exclusives de bonne foi qui lui ont été appliquées ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SARL LIDO PLAGE n'est que partiellement fondée à demander la décharge des impositions demeurant en litige ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, principalement partie perdante, verse à la SARL LIDO PLAGE la somme que celle-ci réclame au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Les recettes bar et restaurant reconstituées au titre des exercices clos en 2001 et 2002 de la SARL LIDO PLAGE seront déterminées par application d'un abattement de 5 % conformément aux motifs du présent arrêt.

Article 2 : La SARL LIDO PLAGE est déchargée, en droits et pénalités, de la différence entre le montant des cotisations d'impôt sur les sociétés, de contributions additionnelles, et de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre des exercices clos en 2001 et 2002 et celui qui résulte de l'application de l'article 1er ci-dessus.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de la SARL LIDO PLAGE est rejeté.

Article 4 : Le jugement du Tribunal administratif de Nice en date du 12 novembre 2008 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL LIDO PLAGE et au ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat.

''

''

''

''

2

N° 09MA00113


Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award