La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

25/11/2011 | FRANCE | N°09MA00531

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3ème chambre - formation à 3, 25 novembre 2011, 09MA00531


Vu la requête, enregistrée le 12 février 2009, présentée pour M. et Mme Georges A, demeurant ..., par la SCP Alcade et associés, représentée par Me Amiel ;

M. et Mme A demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0702051 du 2 décembre 2008 du tribunal administratif de Nîmes en tant qu'il ne les a déchargés que partiellement, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 1999 et 2000 ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

3°) de mettre à la

charge de l'Etat la somme de 2 300 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice ...

Vu la requête, enregistrée le 12 février 2009, présentée pour M. et Mme Georges A, demeurant ..., par la SCP Alcade et associés, représentée par Me Amiel ;

M. et Mme A demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0702051 du 2 décembre 2008 du tribunal administratif de Nîmes en tant qu'il ne les a déchargés que partiellement, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 1999 et 2000 ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 300 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

...................................................

Vu le jugement attaqué ;

...................................................

...................................................

Vu le dégrèvement partiel prononcé le 27 juillet 2009 ;

Vu l'ordonnance n° 0901555 du 10 juin 2009 du président de la 3ème chambre du tribunal administratif de Nîmes rejetant le recours en interprétation du jugement n° 0702051 du 2 décembre 2008 présenté pour M. et Mme A ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu l'arrêté du vice-président du Conseil d'Etat en date du 27 janvier 2009 fixant la liste des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel autorisés à appliquer, à titre expérimental, les dispositions de l'article 2 du décret n°2099-14 du 17 janvier 2009 ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 21 octobre 2011 :

- le rapport de Mme Lastier, rapporteur ;

- les conclusions de M. Dubois, rapporteur public ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. A est l'unique associé de l'EURL Sofinvest, elle-même associée, à hauteur de 34,80 % des parts, dans la SNC Via Domitia, le reste de parts étant détenus par quatre autres EURL ; que la SNC Via Domitia, dont M. A est également le gérant, qui a pour objet social la location immobilière, est propriétaire d'un immeuble à usage d'hôtel-restaurant donné en location à la SARL Via Domitia depuis 1991 ; qu'à la suite de la vérification de comptabilité de la SNC Via Domitia portant sur la période du 1er janvier 1999 au 31 décembre 2000, l'administration fiscale a procédé à des redressements portant sur l'abandon de créances sous forme d'un avoir sur loyers consenti par la SNC Via Domitia à la SARL Via Domitia, la déduction d'honoraires et les amortissements des biens loués ; qu'une notification de redressements a été adressée à l'EURL Sofinvest en conséquence de la procédure engagée à l'encontre de la SNC Via Domitia ; qu'à leur tour, M. et Mme A se sont vu notifier les conséquences sur leur imposition personnelle de ces derniers redressements ; qu'ils demandent à la Cour d'annuler le jugement n° 0702051 du 2 décembre 2008 par lequel le tribunal administratif de Nîmes, d'une part, les a déchargés, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 1999 et 2000 à raison de la limitation par l'administration des amortissements pratiqués par la SNC Via Domitia au titre du loyer consenti à la SARL Via Domitia et de la réduction en conséquence du déficit déclaré par M. et Mme A à hauteur de la quote-part de l'EURL Sofinvest dans les résultats de la société en nom collectif, d'autre part, a rejeté le surplus des conclusions de leur demande tendant à la décharge totale de ces cotisations ;

Sur l'étendue du litige :

Considérant que par une décision en date du 27 juillet 2009, le directeur des services fiscaux de l'Hérault a prononcé le dégrèvement, à concurrence de la somme de 78 751 euros en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles les requérants avaient été assujettis au titre de l'année 2000 à raison de la limitation des amortissements des biens loués ; que l'autorité administrative a ainsi corrigé l'erreur qu'elle avait commise pour l'exécution du jugement attaqué en tant qu'il donne partiellement satisfaction aux requérants en les déchargeant totalement des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis, au titre des années 1999 et 2000, à raison de la réintégration dans leur revenu imposable des sommes déclarées au titre des amortissements des biens loués pratiqués par la SNC Via Domitia ;

Sur le bien-fondé de l'imposition :

En ce qui concerne l'abandon de créance :

Considérant que l'abandon de créances accordé par une entreprise au profit d'un tiers ne relève pas, en règle générale, d'une gestion commerciale normale, sauf s'il apparaît qu'en consentant de tels avantages, l'entreprise a agi dans son propre intérêt ; que s'il appartient à l'administration d'énoncer les faits sur lesquels elle se fonde pour estimer qu'un abandon de créances par une entreprise à un tiers constitue un acte anormal de gestion, elle est réputée apporter la preuve de l'anormalité de l'acte, dès lors que cette entreprise n'est pas en mesure de justifier qu'elle a bénéficié, en retour, de contreparties ; que l'administration défenderesse fait valoir en outre qu'en l'espèce, la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires a estimé, le 6 octobre 2003, que l'abandon de créance octroyé par la SNC Via Domitia à la SARL du même nom n'avait pas été faite dans l'intérêt de la société en nom collectif; que toutefois, l'administration précise que la saisine de la commission avait été sollicitée par la SNC Via Domitia, à qui l'avis de la commission a été notifié le 5 novembre 2003 ; que l'avis ainsi émis par la commission à l'occasion de la procédure d'imposition de la société en nom collectif n'est pas opposable à son dirigeant en ce qui concerne son imposition personnelle ; qu'au surplus, M. et Mme A ont fait connaître à l'administration leur désaccord sur les redressements qui leur ont été notifiés le 16 septembre 2002 ; que dans ces conditions, l'administration n'est pas fondée à soutenir que dès lors que l'imposition mise à la charge de la SNC Via Domitia a été établie conformément à l'avis de la commission, il appartient en conséquence à M. et Mme A d'apporter la preuve contraire ;

Considérant que la SNC Via Domitia, dont l'objet social est la location commerciale d'un immeuble à usage d'hôtel restaurant qu'elle a construit à Lunel (Hérault), a consenti à sa locataire, la SARL Via Domitia, par la délivrance d'un avoir du 4 janvier 2000, un abandon de créance d'un montant de 601 214 francs correspondant aux loyers dus au titre de l'année 1999 par la SARL, afin de justifier auprès des organismes bancaires, auprès desquels ces deux sociétés avaient contracté des emprunts et avec lesquels elles menaient des négociations en vue de leur refinancement, le fait que la SNC n'honorait plus les mensualités dues en vue du remboursement de ses emprunts ; que les relations commerciales et financières ainsi entretenues par les deux sociétés justifient l'existence de contreparties éventuelles pour l'une ou l'autre suite à un abandon de créance ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que les deux sociétés étaient en situation déficitaire depuis 1992, mais ont dégagé un bénéfice en 2000, suite à la renégociation de leurs dettes auprès des banques sous forme d'un remboursement forfaitaire partiel des emprunts de 8.185. 000 F et de 2.100. 000 F contractés respectivement en 1991 par la société en nom collectif pour édifier l'immeuble et par la société à responsabilité limitée, qui a pu avoir lieu après un refinancement de ces deux sociétés, lequel n'a été rendu possible qu'en pérennisant l'exploitation de la SARL Via Domitia, mise en mesure de continuer à pouvoir verser des loyers à la SNC Via Domitia grâce à l'effort financier consenti par cette dernière en en limitant le montant ; que les banques ont déclaré que ces deux sociétés n'étaient plus redevables envers elles d'aucune somme au titre des deux crédits mentionnés ci-dessus et procédé au classement définitif des dossiers par lettre du 15 février 2000, dont une copie est annexée à la demande de permière instance ;

Considérant qu'à cet égard il importe peu que la situation financière de la société en nom collectif soit devenue de ce fait plus précaire que celle de la société à responsabilité limitée jusqu'à fin 1999, dès lors qu'en 2000 les résultats des deux sociétés se sont redressés ; qu'un tel développement favorable n'est pas intervenu postérieurement à l'année d'imposition, s'étant produit entre 1998 et l'année 2000, années soumises à contrôle ; que le service ne peut en déduire que la contrepartie serait différée ;

Considérant que si l'administration soutient que la SNC Via Domitia se trouvait dans une situation financière dégradée plus grave que celle de la SARL et qu'elle n'était donc pas en situation d'accorder un abandon de créance eu égard aux déficits respectifs de ces sociétés, il résulte de l'instruction que la société en nom collectif était propriétaire d'un patrimoine immobilier amortissable, à l'origine d'une partie du déficit, alors que la SARL Via Domitia ne bénéficiait pas de cet avantage ;

Considérant que M. et Mme A font état à juste titre du risque de défaillance qu'aurait fait courir une interruption d'exploitation de la SARL Via Domitia, et du manque à gagner qu'aurait induit la recherche d'un autre locataire ; qu'ils justifient ainsi de l'intérêt poursuivi par la société en nom collectif en abandonnant temporairement une partie des loyers dus par la SARL, qui a permis à celle-ci d'éviter la liquidation et de continuer l'exploitation de l'hôtel restaurant qu'elle avait pris à bail et à la société en nom collectif de conserver son patrimoine ; que cette décision ne constitue dès lors pas un acte anormal de gestion ; que par suite, il y a lieu de décharger M. et Mme A du complément d'impôt sur le revenu mis à leur charge à ce titre pour l'année 1999, soit la quote-part de la somme en base de 601. 214 F, s'élevant au montant de 209. 222, 47 F correspondant au nombre de parts qu'ils détiennent dans la société en nom collectif par le biais de l'EURL Sofinvest, soit 8352 sur 24000 parts ;

En ce qui concerne les honoraires :

Considérant qu'aux termes du 1 de l'article 39 du code général des impôts : Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant (...) notamment : 1° Les frais généraux de toute nature (...) ; que si, en vertu des règles gouvernant l'attribution de la charge de la preuve devant le juge administratif, applicables sauf loi contraire, il incombe, en principe, à chaque partie d'établir les faits qu'elle invoque au soutien de ses prétentions, les éléments de preuve qu'une partie est seule en mesure de détenir ne sauraient être réclamés qu'à celle-ci ; qu'il appartient, dès lors, au contribuable de justifier tant du montant des charges qu'il entend déduire du bénéfice net défini à l'article 39 du code général des impôts que de la correction de leur inscription en comptabilité, c'est-à-dire du principe même de leur déductibilité ;

Considérant que l'administration a refusé d'admettre en déduction du résultat imposable de l'exercice clos en 1999 de la SNC Via Domitia une note de 249 218 francs correspondant à des honoraires facturés par la SARL Via Domitia à la société en nom collectif le 31 décembre 2000 et inscrite en charge au titre de cet exercice ; que si les requérants soutiennent que cette facture, au demeurant non produite, correspond à la rémunération de prestations de gestion et de comptabilité réalisées par la SARL Via Domitia pour le compte de la SNC Via Domitia en vue de la renégociation des emprunts bancaires de la société en nom collectif, ils n'apportent pas la preuve que les prestations en cause aient été définitivement réalisées avant cette date ; que, dès lors, et en tout état de cause, cette facture ne pouvait être regardée comme une charge dudit exercice ; qu'au surplus, les dépenses qui auraient été ainsi couvertes ne sont ni précisées ni détaillées ; que c'est donc à bon droit que l'administration fiscale a réintégré le montant de cette facture au résultat imposable de la société en nom collectif au titre de l'exercice clos en 1999 ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par les requérants et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La base de l'impôt sur le revenu assigné à M. et Mme A au titre de l'année 1999 est réduite d'une somme de 209 222,47 F, soit 31 893,67 euros.

Article 2 : M. et Mme A sont déchargés du supplément d'impôt sur le revenu correspondant à la réduction de base visée à l'article 1er.

Article 3 : Le jugement n° 0702051 du 2 décembre 2008 du tribunal administratif de Nîmes est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 4 : L'Etat versera à M. et Mme A une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de M. et Mme A est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme Georges A et à la ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat, porte-parole du Gouvernement.

''

''

''

''

2

N° 09MA00531


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 09MA00531
Date de la décision : 25/11/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Revenus et bénéfices imposables - règles particulières - Bénéfices industriels et commerciaux - Évaluation de l'actif - Créances.

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Revenus et bénéfices imposables - règles particulières - Bénéfices industriels et commerciaux - Détermination du bénéfice net - Acte anormal de gestion.


Composition du Tribunal
Président : Mme LASTIER
Rapporteur ?: Mme Elisabeth LASTIER
Rapporteur public ?: M. DUBOIS
Avocat(s) : SCP ALCADE ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2011-11-25;09ma00531 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award