La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

13/10/2011 | FRANCE | N°09MA02273

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 5ème chambre - formation à 3, 13 octobre 2011, 09MA02273


Vu la requête, enregistrée le 29 juin 2009 au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille sous le n°09MA02273, présentée par M. Abderrazak A, demeurant ... ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°0901821 du 28 mai 2009 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté, en date du 10 février 2009, par lequel le préfet des Alpes de Haute-Provence a procédé au retrait de sa carte de résident et a assorti cette décision d'une obligation de quitter le territoire français mentionnant le

pays de destination ;

2°) d'annuler l'arrêté précité ;

3°) d'enjoindre au pr...

Vu la requête, enregistrée le 29 juin 2009 au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille sous le n°09MA02273, présentée par M. Abderrazak A, demeurant ... ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°0901821 du 28 mai 2009 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté, en date du 10 février 2009, par lequel le préfet des Alpes de Haute-Provence a procédé au retrait de sa carte de résident et a assorti cette décision d'une obligation de quitter le territoire français mentionnant le pays de destination ;

2°) d'annuler l'arrêté précité ;

3°) d'enjoindre au préfet des Alpes de Haute-Provence, si besoin sous astreinte, de lui restituer son titre de séjour ;

...........................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique ;

Vu la loi n°2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations ;

Vu l'article 1er de l'arrêté du 27 janvier 2009 qui autorise la Cour administrative d'appel de Marseille à appliquer, à titre expérimental, les dispositions de l'article 2 du décret du 7 janvier 2009, situant l'intervention du rapporteur public avant les observations des parties ou de leurs mandataires ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 15 septembre 2011 :

- le rapport de Mme Simon, premier conseiller ;

- et les conclusions de Mme Chenal-Peter, rapporteur public ;

Considérant que, par arrêté du 10 février 2009, le préfet des Alpes de Haute-Provence retiré la carte de résident valable du 26 août 2008 au 25 août 2018 dont M. A, ressortissant marocain, était titulaire en sa qualité de conjoint d'une ressortissante française et a assorti cette décision d'une obligation de quitter le territoire français mentionnant le pays de destination ; que M. A interjette appel du jugement en date du 28 mai 2009 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Sur les conclusions aux fins d'annulation et sans qu'il soit besoin d'examiner la recevabilité de la demande de 1ère instance:

Sur la légalité de l'arrêté du 10 février 2009 en tant qu'il porte retrait de titre de séjour :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 24 de la loi susvisée du 12 avril 2000 : Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application des articles 1er et 2 de la loi nº 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales. Cette personne peut se faire assister par un conseil ou représenter par un mandataire de son choix (...) ; qu'il ressort des pièces du dossier que, par lettre du 24 novembre 2008, le préfet des Alpes de Haute-Provence a informé M. A qu'il envisageait de procéder sur le fondement de l'article L.314-5-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile au retrait de sa carte de résident et qu'il disposait d'un délai de quinze jours à compter de la réception de cette lettre pour présenter ses observations ; que l'appelant ne peut utilement se prévaloir de la circonstance que ladite lettre a été réceptionnée par son épouse qui lui aurait transmis tardivement dés lors que cette notification a été effectuée au domicile commun du couple qui n'étaient pas séparés de corps ; qu'en tout état de cause, M. A a présenté, par l'intermédiaire de son conseil, ses observations écrites sur la décision envisagée par lettre du 6 décembre 2008 ; que, par suite, le moyen tiré du vice de procédure doit être écarté ;

Considérant, en deuxième lieu, que les conditions de notification de la décision querellée sont sans incidence sur sa légalité ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L.313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : (...) 4° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé depuis le mariage, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français ; (...) ; qu'aux termes de l'article L.314-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : La carte de résident peut être accordée : (...) 3° A l'étranger marié depuis au moins trois ans avec un ressortissant de nationalité française, à condition que la communauté de vie entre les époux n'ait pas cessé depuis le mariage, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français. et qu'aux termes de l'article L.314-5-1 du même code : Le retrait, motivé par la rupture de la vie commune, de la carte de résident délivrée sur le fondement du 3° de l'article L.314-9 ne peut intervenir que dans la limite de quatre années à compter de la célébration du mariage, sauf si un ou des enfants sont nés de cette union et à la condition que l'étranger titulaire de la carte de résident établisse contribuer effectivement, depuis la naissance, à l'entretien et à l'éducation du ou des enfants dans les conditions prévues à l'article 371-2 du code civil. Toutefois, lorsque la communauté de vie a été rompue par le décès de l'un des conjoints ou en raison de violences conjugales qu'il a subies de la part de son conjoint, l'autorité administrative ne peut pas procéder au retrait. ;

Considérant, d'une part, qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment du jugement du tribunal de grande instance de Digne-les-Bains du 28 janvier 2009 qui a ordonné la résidence séparée de M. et Mme A, que la communauté de vie entre les époux était rompue à la date de la décision querellée ; que, d'autre part, si l'appelant qui a fait l'objet le 14 janvier 2009 d'un rappel à la loi pour violences conjugales fait valoir qu'il a été aussi victime des mêmes violences de la part de son épouse, il ne produit aucune pièce probante à l'appui de cette allégation ; qu'enfin, la circonstance que son épouse aurait cherché à lui nuire par les courriers qu'elle a adressé au préfet est sans incidence sur la légalité de la décision susvisée ; que, dans ces conditions et alors que moins de quatre ans s'étaient écoulés entre la date de la célébration du mariage le 18 juin 2005 et l'édiction de la décision litigieuse, le préfet des Alpes de Haute-Provence a légalement pu procéder au retrait de la carte dont M. A était titulaire ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ;

Considérant que si M. A fait valoir qu'il réside régulièrement en France depuis six années, justifie d'une parfaite intégration dans la société française, notamment professionnelle, a noué de nombreux liens amicaux intenses avec plusieurs personnes et que certains membres de sa famille sont domiciliés sur le sol national, il ressort des pièces du dossier que l'intéressé, qui est séparé de son épouse comme il a été dit précédemment et sans enfant, est entré en France à l'âge de 26 ans et donc après avoir passé l'essentiel de son existence dans son pays d'origine ; que, dans ses conditions, le Préfet des Alpes de Haute-Provence, en prenant l'arrêté litigieux, n'a, eu égard à la durée et aux conditions de son séjour en France, ni commis d'erreur manifeste en appréciant les conséquences de son arrêté sur sa situation, ni porté une atteinte au respect de sa vie privée et familiale disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris, et n'a, par suite, pas méconnu les stipulations précitées de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant, enfin, que le requérant ne saurait utilement invoquer les dispositions du 7° de l'article L.313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile à l'encontre de cette décision de retrait de la carte de résident prévue à l'article L.314-9 du même code, prise sur le fondement de l'article L.314-5-1 dudit code ;

Sur la légalité de l'arrêté du 10 février 2009 en tant qu'il porte obligation de quitter le territoire français avec mention du pays de destination :

Considérant, en premier lieu, que l'appelant, dont le titre de séjour a été retiré, entrait dans le champ d'application du I de l'article L.511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et pouvait donc faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français ; que les moyens sus analysés, en tant qu'ils visent la décision portant obligation de quitter le territoire français, doivent être écartés pour les mêmes motifs que précédemment, ainsi que celui tiré de l'exception d'illégalité de la décision de retrait de titre de séjour également pour les mêmes motifs ;

Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ; qu'aux termes de l'article L.513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;

Considérant que, d'une part, contrairement à ce que soutient M. A, l'arrêté querellé fixe, en son article 3, le pays à destination duquel la mesure d'éloignement est susceptible d'être exécutée ; que, d'autre part, s'il soutient que ladite mesure d'éloignement compromet définitivement sa volonté d'intégration dans la société française, cette circonstance n'est pas de nature à établir qu'il encourt en cas de retour dans son pays d'origine un traitement inhumain ou dégradant au sens de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal Administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 10 février 2009 ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

Considérant qu'aux termes de l'article L.911-1 du code de justice administrative : Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant d'un délai d'exécution. ;

Considérant que le présent arrêt qui rejette les conclusions aux fins d'annulation présentées par M. A n'implique aucune mesure d'exécution ; qu'il y a lieu par suite de rejeter les conclusions susvisées ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L.761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ;

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, verse à M. A la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié M. Abderrazak A et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration.

Copie en sera adressée au préfet des Alpes de Haute-Provence.

''

''

''

''

N° 09MA02273 2

vt


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 09MA02273
Date de la décision : 13/10/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. FERULLA
Rapporteur ?: Mme Frédérique SIMON
Rapporteur public ?: Mme CHENAL-PETER
Avocat(s) : KISSAMBOU M'BAMBY

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2011-10-13;09ma02273 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award