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05/07/2011 | FRANCE | N°09MA00404

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2ème chambre - formation à 3, 05 juillet 2011, 09MA00404


Vu la requête, enregistrée le 2 février 2009, présentée pour M. Jean-Luc A élisant domicile ..., par Me Lambert, avocat ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0606825 en date du 7 novembre 2008 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du ministre de l'intérieur du 18 octobre 2006 le rétrogradant au 8ème échelon du grade de lieutenant de police ;

2°) d'annuler ladite décision ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au titre des frais d'instance ; r>
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Vu la requête, enregistrée le 2 février 2009, présentée pour M. Jean-Luc A élisant domicile ..., par Me Lambert, avocat ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0606825 en date du 7 novembre 2008 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du ministre de l'intérieur du 18 octobre 2006 le rétrogradant au 8ème échelon du grade de lieutenant de police ;

2°) d'annuler ladite décision ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au titre des frais d'instance ;

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Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée portant droits et obligations des fonctionnaires ;

Vu la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique d'Etat ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu le décret n° 84-961 du 25 octobre 1984 relatif à la procédure disciplinaire concernant les fonctionnaires de l'Etat ;

Vu le décret n° 86-592 du 18 mars 1986 portant code de déontologie de la police nationale ;

Vu le décret n° 95-654 du 9 mai 1995 modifié fixant les dispositions communes applicables aux fonctionnaires actifs des services de la police nationale ;

Vu le décret n° 95-656 du 9 mai 1995 portant statut particulier du corps de commandement et d'encadrement de la police nationale ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu le décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 relatif au rapporteur public des juridictions administratives et au déroulement de l'audience devant ces juridictions ;

Vu l'arrêté du vice-président du Conseil d'Etat, en date du 27 janvier 2009, fixant la liste des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel autorisés à appliquer, à titre expérimental, les dispositions de l'article 2 du décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 juin 2011 :

- le rapport de Mme Massé-Degois, rapporteur,

- et les conclusions de Mme Fedi, rapporteur public ;

Considérant que, par un arrêté du ministre de l'intérieur en date du 18 octobre 2006, M. A, alors capitaine de police affecté à la DDRG Carcassonne, a été rétrogradé au grade de lieutenant de police au 8ème échelon ; que M. A relève appel du jugement du 7 novembre 2008 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du ministre de l'intérieur du 18 octobre 2006 ;

En ce qui concerne la légalité externe de l'arrêté portant rétrogradation :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 susvisée : Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : (...) infligent une sanction ; que l'article 3 de ladite loi dispose que : La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ;

Considérant, d'une part, que la décision attaquée du 18 octobre 2006 expose de manière précise les différents manquements relevés à l'encontre de M. A et notamment que l'intéressé, fonctionnaire de police de surcroit capitaine, avait organisé un gala de variétés pour lequel il s'était assuré la participation de plusieurs artistes auxquels il avait garanti la prise en charge des frais de transport et d'hébergement ainsi que les cachets et qu'à cette occasion, il avait émis des chèques sans provision ; que cette décision précise, également, que le gala n'ayant pas eu lieu, certains des artistes n'avaient pas été défrayés, que ceux-ci s'en étaient plaints et que cette situation, portée à la connaissance du public, avait porté atteinte à la dignité de ses fonctions et à la réputation du corps auquel il appartenait ;

Considérant, d'autre part, que la décision attaquée énumère les dispositions législatives et règlementaires sur lesquelles elle se fonde et notamment le code de déontologie de la police nationale ainsi que le décret du 9 mai 1995 fixant les dispositions communes applicables aux fonctionnaires actifs des services de la police nationale ;

Considérant que, par suite, M. A n'est pas fondé à soutenir que la décision qu'il conteste est insuffisamment motivée dès lors qu'elle comporte, conformément aux dispositions de l'article 3 sus-rappelé de la loi du 11 juillet 1979, l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent son fondement ;

Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 4 du décret susvisé du 25 octobre 1984 : Le fonctionnaire poursuivi est convoqué par le président du conseil de discipline quinze jours au moins avant la date de réunion, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception. / Ce conseil peut décider, à la majorité des membres présents, de renvoyer à la demande du fonctionnaire ou de son ou de ses défenseurs l'examen de l'affaire à une nouvelle réunion. Un tel report n'est possible qu'une seule fois. ;

Considérant que M. A s'est vu refuser le report qu'il a sollicité le 7 septembre 2006 par télécopie de la date de réunion du conseil de discipline et soutient que ce refus l'a empêché de préparer utilement sa défense ; que, d'une part, il ressort des dispositions réglementaires précitées que le report de la séance du conseil de discipline à la demande du fonctionnaire n'est pas de droit mais constitue une simple faculté soumise à l'appréciation du conseil ; qu'en l'espèce, les mentions du procès-verbal du conseil de discipline dans sa séance du 14 septembre 2006 précisent que la demande de report formulée par M. A a été examinée, soumise au vote et a été refusée à l'unanimité des membres de la commission ; qu'il ressort également du procès-verbal que les membres du conseil avaient en leur possession, avant de rejeter la demande de report, la lettre de M. A du 29 août 2006 adressée au ministre de l'intérieur exposant de manière détaillée ses observations sur les faits qui lui étaient

reprochés ; que, d'autre part, il ressort des pièces du dossier que M. A a réceptionné le

12 août 2006 le pli recommandé contenant la convocation devant la commission administrative paritaire siégeant en conseil de discipline le 14 septembre suivant et qu'il a ainsi disposé d'un mois pour consulter son dossier ; que M. A n'établit ni n'allègue s'être vu refuser l'accès à son dossier faisait apparaître les griefs émis à son encontre ; que, par suite, nonobstant l'engagement de la procédure discipline en période estivale, le moyen tiré de la prétendue violation des droits de la défense doit être écarté ;

En ce qui concerne la légalité interne de l'arrêté portant rétrogradation :

Considérant qu'aux termes de l'article 66 de la loi du 11 janvier 1984 susvisée : Les sanctions disciplinaires sont réparties en quatre groupes. Premier groupe : - l'avertissement ; - le blâme. Deuxième groupe : - la radiation du tableau d'avancement ; - l'abaissement d'échelon ; - l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée maximale de quinze jours ; - le déplacement d'office. Troisième groupe : - la rétrogradation ; - l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de trois mois à deux ans. Quatrième groupe : - la mise à la retraite d'office ; - la révocation ; qu'aux termes de l'article 7 du décret du 18 mars 1986 portant code de déontologie de la police nationale : Le fonctionnaire de police (...) ne se départit de sa dignité en aucune circonstance. Placé au service du public, le fonctionnaire de police se comporte envers celui-ci d'une manière exemplaire (...) et qu'aux termes de l'article 6 du même décret : Tout manquement aux devoirs définis par le présent code expose son auteur à une sanction disciplinaire, sans préjudice, le cas échéant, des peines prévues par la loi pénale ; qu'enfin, aux termes de l'article 29 du décret susvisé n° 95-654 du 9 mai 1995 : Le fonctionnaire actif des services de la police nationale doit, en tout temps, qu'il soit ou non en service, s'abstenir en public de tout acte ou propos de nature à porter la déconsidération sur le corps auquel il appartient ou à troubler l'ordre public et de l'article 30 du même décret : Le fonctionnaire actif des services de la police nationale, quelle que soit sa position, ne peut exercer une activité de nature à jeter le discrédit sur la fonction ou à créer une équivoque préjudiciable à celle-ci (...) ;

Considérant que, sur proposition du conseil de discipline, le ministre de l'intérieur a infligé à M. A, capitaine de police, la première des sanctions du groupe III, en l'espèce la rétrogradation au grade de lieutenant de police, en raison de l'émission de chèques sans provision lors de l'organisation d'un gala de variétés pour lequel il s'était assuré la participation de plusieurs artistes auxquels il avait garanti la prise en charge de l'ensemble des frais y compris les cachets, de l'absence de paiement de certains des artistes et de la portée à la connaissance du public desdits agissements ; que le ministre a qualifié le comportement sus-décrit de M. A d'atteinte à la dignité de ses fonctions et à la réputation du corps de la police ; que, d'une part,

M. A admet dans ses écritures avoir émis des chèques sans provision à l'occasion de l'organisation en mai 2006 d'un gala de variétés et n'établit par aucun élément que des défaillances bancaires seraient à l'origine des chèques impayés ; que l'intéressé ne conteste pas avoir fait valoir sa qualité de policier lors de la préparation de ce gala artistique ; que, d'autre part, si M. A conteste les accusations d'escroqueries à l'appui de sa demande d'annulation de la décision du 18 octobre 2006, il est constant que la sanction contestée n'est pas fondée sur ce motif ; que, par ailleurs, le classement sans suite de la plainte déposée contre M. A pour escroquerie, le procureur de la République ayant estimé les faits reprochés insuffisamment caractérisés, est sans incidence sur la légalité de la sanction disciplinaire contestée ; qu'enfin, il n'est pas établi par les pièces du dossier, contrairement à ce que fait valoir M. A, que les faits en litige ont été portés à la connaissance du public par des actes malveillants de la police qui aurait informé la presse ni qu'il a sollicité sa démission avant l'engagement de la procédure disciplinaire à l'origine de la sanction ; que, dès lors, les manquements au code de déontologie et au décret précité du 9 mai 1995 ainsi établis et rendus publics par la presse locale, de nature à porter une atteinte à la dignité de ses fonctions et à la réputation du corps auquel M. A appartient, constituent des fautes de nature à justifier une sanction disciplinaire ;

Considérant, que si M. A soutient que la sanction est entachée d'un détournement de pouvoir et qu'elle est fondée sur une animosité personnelle à son égard, ces allégations ne sont pas corroborées par les éléments du dossier ; que les conséquences financières de la sanction sur le calcul de sa pension de retraite ne peuvent être regardées comme participant d'une volonté de lui nuire de la part de son administration et de sa hiérarchie ;

Considérant enfin que la sanction de rétrogradation prise par le ministre de l'intérieur le 18 octobre 2006 n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation eu égard aux manquements dont s'est rendu coupable M. A ; qu'il n'est dès lors pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante à la présente instance, la somme que M. A demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Jean-Luc A et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration.

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N° 09MA004042


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 09MA00404
Date de la décision : 05/07/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Fonctionnaires et agents publics - Discipline - Motifs - Faits de nature à justifier une sanction.

Fonctionnaires et agents publics - Discipline - Sanctions.


Composition du Tribunal
Président : M. FEDOU
Rapporteur ?: Mme Christine MASSE-DEGOIS
Rapporteur public ?: Mme FEDI
Avocat(s) : SELARL VALERIE LAMBERT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2011-07-05;09ma00404 ?
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