La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

04/07/2011 | FRANCE | N°08MA03778

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3ème chambre - formation à 3, 04 juillet 2011, 08MA03778


Vu la requête, enregistrée le 7 août 2008, présentée pour la SOCIÉTÉ SUPDISAL, dont le siège est 42 Chemin de Bruèges à Alès (30100), représentée par son président-directeur général en exercice, par Me Gougaud ;

La SOCIÉTÉ SUPDISAL demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0407137 du 9 juin 2008 par lequel le Tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à la restitution de la taxe sur les achats de viande à laquelle elle a été assujettie au titre de la période du 1er juillet 2001 au 31 août 2002 pour un montant de 34 736 euros do

nt 32 936 euros avaient fait l'objet d'un dégrèvement ;

2°) de lui accorder la restitut...

Vu la requête, enregistrée le 7 août 2008, présentée pour la SOCIÉTÉ SUPDISAL, dont le siège est 42 Chemin de Bruèges à Alès (30100), représentée par son président-directeur général en exercice, par Me Gougaud ;

La SOCIÉTÉ SUPDISAL demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0407137 du 9 juin 2008 par lequel le Tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à la restitution de la taxe sur les achats de viande à laquelle elle a été assujettie au titre de la période du 1er juillet 2001 au 31 août 2002 pour un montant de 34 736 euros dont 32 936 euros avaient fait l'objet d'un dégrèvement ;

2°) de lui accorder la restitution des droits en litige ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

...................................................................................................

Vu le traité instituant la Communauté européenne ;

Vu la loi n° 96-1139 du 26 décembre 1996 ;

Vu la loi n° 2000-1353 du 30 décembre 2000 ;

Vu l'ordonnance n° 59-2 du 2 janvier 1959 ;

Vu le code rural ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu l'arrêté du vice-président du Conseil d'Etat en date du 27 janvier 2009 fixant la liste des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel autorisés à appliquer, à titre expérimental, les dispositions de l'article 2 du décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 30 juin 2011 :

- le rapport de M. Iggert,

- et les conclusions de M. Dubois, rapporteur public ;

Considérant que la SOCIÉTÉ SUPDISAL, après avoir déclaré conformément aux dispositions de l'article 302 bis ZD du code général des impôts alors en vigueur la valeur de ses achats et payé la taxe sur les achats de viande qu'elle estimait en conséquence devoir au titre de la période du 1er juillet 2001 au 31 août 2002, en a demandé la restitution par une réclamation du 24 octobre 2002 ; que l'administration lui a accordé le dégrèvement de la somme de 32 936 euros par une décision du 27 septembre 2004 ; qu'elle a ensuite informé la société que les taxes ne seraient pas remboursées ; que la société interjette régulièrement appel du jugement en date du 9 juin 2008 par lequel le Tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à la restitution de la taxe sur les achats de viande qu'elle avait acquittée au titre de la période du 1er juillet 2001 au 31 août 2002 ;

Sur les conclusions relatives à la somme de 32 936 euros :

Considérant que, dans le dernier état de ses écritures, la SOCIÉTÉ SUPDISAL conclut au non-lieu à statuer à hauteur de la somme de 32 936 euros, restituée par l'administration à la suite du dégrèvement qui a été constaté ; que ces conclusions tendant au non-lieu à statuer doivent, dans ces conditions, être regardées comme un désistement partiel, pur et simple ; que rien ne s'oppose à ce qu'il en soit donné acte ;

Sur le surplus des conclusions en décharge :

Considérant qu'aux termes du paragraphe 1 de l'article 87 du traité instituant la Communauté européenne : Sauf dérogations prévues par le présent traité, sont incompatibles avec le marché commun, dans la mesure où elles affectent les échanges entre Etats membres, les aides accordées par les Etats ou au moyen de ressources d'Etat sous quelque forme que ce soit, qui faussent ou qui menacent de fausser la concurrence en favorisant certaines entreprises ou certaines productions ; qu'aux termes de l'article 88 du même traité : 1. La Commission procède avec les Etats membres à l'examen permanent des régimes d'aides existant dans ces Etats. (...) / 2. Si (...) la Commission constate qu'une aide accordée par un Etat ou au moyen de ressources d'Etat n'est pas compatible avec le marché commun aux termes de l'article 87 (...) elle décide que l'Etat intéressé doit la supprimer ou la modifier (...) / 3. La Commission est informée, en temps utile pour présenter ses observations, des projets tendant à instituer ou à modifier des aides. Si elle estime qu'un projet n'est pas compatible avec le marché commun, aux termes de l'article 87, elle ouvre sans délai la procédure prévue au paragraphe précédent. L'Etat membre intéressé ne peut mettre à exécution les mesures projetées, avant que cette procédure ait abouti à une décision finale ;

Considérant qu'il résulte de ces stipulations que, s'il ressortit à la compétence exclusive de la Commission européenne de décider, sous le contrôle de la Cour de justice de l'Union européenne, si une aide de la nature de celles mentionnées à l'article 87 du traité est ou non, compte tenu des dérogations prévues par ce traité, compatible avec le marché commun, il incombe, en revanche, aux juridictions nationales de sanctionner, le cas échéant, l'invalidité de dispositions de droit national qui auraient institué ou modifié une telle aide en méconnaissance de l'obligation, qu'impose aux Etats membres le paragraphe 3 de l'article 88 du traité, d'en notifier à la Commission, préalablement à toute mise à exécution, le projet ; que l'exercice de ce contrôle implique, notamment, de rechercher si les dispositions dont l'application est contestée instituent un régime d'aide, ou si une taxe fait partie intégrante d'une telle aide ;

Considérant qu'il résulte de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne, d'une part, que les taxes n'entrent pas dans le champ d'application des stipulations précitées du traité instituant la Communauté européenne concernant les aides d'Etat, à moins qu'elles constituent le mode de financement d'une mesure d'aide, de sorte qu'elles font partie intégrante de cette mesure, d'autre part que, pour que l'on puisse juger qu'une taxe, ou une partie d'une taxe, fait partie intégrante d'une mesure d'aide, il doit exister un lien d'affectation contraignant entre la taxe et l'aide en vertu de la réglementation nationale pertinente, en ce sens que le produit de la taxe est nécessairement affecté au financement de l'aide ;

Considérant que l'article 1er de la loi du 26 décembre 1996 relative à la collecte et à l'élimination des cadavres d'animaux et des déchets d'abattoirs et modifiant le code rural a inséré dans le code général des impôts un article 302 bis ZD instituant, à compter du 1er janvier 1997, une taxe sur les achats de viande due par les personnes qui réalisent des ventes au détail de viande, dont le produit était affecté à un fonds faisant l'objet d'une comptabilité distincte, ayant pour objet de financer la collecte et l'élimination des cadavres d'animaux et des saisies d'abattoirs reconnus impropres à la consommation humaine et animale, activités correspondant au service public de l'équarrissage défini à l'article 264 du code rural en vigueur au cours des années d'imposition en litige ; que le II de l'article 35 de la loi du 30 décembre 2000 de finances rectificative pour 2000, entré en vigueur le 1er janvier 2001, a limité à la période du 1er janvier 1997 au 31 décembre 2000 l'affectation de la taxe sur les achats de viande au fonds mentionné ci-dessus ; qu'en conséquence, à compter du 1er janvier 2001, en l'absence de dispositions prévoyant l'affectation de cette taxe, celle-ci est devenue une recette du budget général de l'Etat ; qu'à compter de cette même date, le service public de l'équarrissage a été financé au moyen d'une dotation inscrite au budget général de l'Etat ;

Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article 18 de l'ordonnance du 2 janvier 1959 portant loi organique relative aux lois de finances, en vigueur au cours des années d'imposition en litige : Il est fait recette du montant intégral des produits, sans contraction entre les recettes et les dépenses. L'ensemble des recettes assurant l'exécution de l'ensemble des dépenses, toutes les recettes et toutes les dépenses sont imputées à un compte unique, intitulé budget général ; qu'en vertu du principe à valeur constitutionnelle d'universalité budgétaire résultant de ces dispositions, les recettes et les dépenses doivent figurer au budget de l'Etat pour leur montant brut, sans être contractées, et l'affectation d'une recette déterminée à la couverture d'une dépense déterminée est interdite, sous réserve des exceptions prévues au second alinéa de l'article 18 ; qu'en application de ce principe et de la législation nationale relative à la taxe sur les achats de viande, et sans qu'il soit besoin de se référer aux travaux parlementaires dont est issu l'article 35 de la loi du 30 décembre 2000, à compter du 1er janvier 2001, il n'existait juridiquement aucun lien d'affectation contraignant entre la taxe et le service public de l'équarrissage, et aucun rapport entre le produit de la taxe et le montant du financement public attribué à ce service ; qu'en exécution des règles ainsi applicables, à compter de cette même date, la taxe sur les achats de viande était une recette du budget général, dépourvue de tout lien avec le budget du ministère de l'agriculture et la dotation inscrite à ce budget servant à financer le service public de l'équarrissage ;

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ce qui précède que, depuis le 1er janvier 2001, il n'existe aucun lien d'affectation contraignant entre la taxe sur les achats de viande et le service public de l'équarrissage ; que la taxe sur les achats de viande n'entrant pas, ainsi, à compter du 1er janvier 2001, dans le champ d'application des stipulations précitées du traité instituant la Communauté européenne concernant les aides d'Etat, la SOCIÉTÉ SUPDISAL ne peut ainsi invoquer, au soutien de sa demande en restitution de l'imposition en litige, une éventuelle méconnaissance par les autorités françaises, à l'occasion de la modification du mode de financement du service public de l'équarrissage résultant des dispositions de l'article 35 de la loi du 30 décembre 2000, des obligations qu'imposent la première et la dernière phrases du paragraphe 3 de l'article 88 du traité instituant la Communauté européenne ;

Considérant, en deuxième lieu, que compte tenu de l'absence de lien d'affectation contraignant entre la taxe sur les achats de viande et le service public de l'équarrissage à compter du 1er janvier 2001, est inopérant au soutien d'une demande en restitution de la taxe sur les achats de viande acquittée au titre des années 2001 à 2003, le moyen tiré de ce que le service public de l'équarrissage méconnaîtrait le principe pollueur-payeur ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 25 du traité instituant la Communauté européenne : Les droits de douane à l'importation et à l'exportation ou taxe d'effet équivalent sont interdits dans les états membres. Cette interdiction s'applique également aux droits de douane à caractère fiscal ; qu'aux termes de l'article 90 du même traité : Aucun Etat membre ne frappe directement ou indirectement les produits des autres Etats membres d'impositions intérieures, de quelque nature qu'elles soient, supérieures à celles qui frappent directement ou indirectement les produits nationaux similaires (...) ; que, pour qu'une taxe puisse être qualifiée de taxe d'effet équivalent à un droit de douane interdite par l'article 25 précité du traité, ou d'imposition intérieure discriminatoire interdite par l'article 90, les recettes procurées par cette taxe doivent être affectées au profit des seuls produits nationaux ; que la taxe sur les achats de viande ayant été, ainsi qu'il a été dit, affectée à compter du 1er janvier 2001 au budget général de l'Etat, compte tenu du principe d'universalité budgétaire, les moyens tirés de ce qu'elle constituerait une taxe d'effet équivalent à un droit de douane ou une imposition intérieure discriminatoire ne peuvent qu'être écartés ;

Considérant, en quatrième et dernier lieu, qu'aux termes de l'article 33 de la 6ème directive du Conseil des communautés européennes, les dispositions de cette directive ne font pas obstacle au maintien ou à l'introduction par un Etat membre (...) de tous impôts, droits et taxes n'ayant pas le caractère de taxes sur le chiffre d'affaires ; que la taxe sur les achats de viande, qui n'est appliquée qu'une seule fois, ne peut être regardée comme un impôt général grevant la circulation des biens et services et frappant les transactions commerciales d'une façon comparable à une taxe sur le chiffre d'affaires ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SOCIÉTÉ SUPDISAL n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande de restitution des droits en litige en ce qui concerne les 1 800 euros de la taxe sur les achats de viande acquittée au titre des années 2001 et 2002 qui n'ont pas fait l'objet d'un dégrèvement ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du Code de justice administrative :

Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à la SOCIÉTÉ SUPDISAL, de la somme qu'elle demande en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E

Article 1er : Il est donné acte du désistement de la SOCIÉTÉ SUPDISAL tendant à la décharge de la somme de 32 936 euros.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SOCIÉTÉ SUPDISAL et au ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat.

Copie en sera adressée à Me Gougaud et au directeur de contrôle fiscal Sud Est.

''

''

''

''

N° 08MA03778 1


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 08MA03778
Date de la décision : 04/07/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Communautés européennes et Union européenne - Règles applicables - Droit de la concurrence - Règles applicables aux États (aides).

Contributions et taxes - Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées - Autres taxes sur le chiffre d'affaires et taxes assimilées.


Composition du Tribunal
Président : M. BEDIER
Rapporteur ?: M. Julien IGGERT
Rapporteur public ?: M. DUBOIS
Avocat(s) : STE D'AVOCATS FIDAL

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2011-07-04;08ma03778 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award