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30/06/2011 | FRANCE | N°08MA02943

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3ème chambre - formation à 3, 30 juin 2011, 08MA02943


Vu la requête, enregistrée le 18 juin 2008, présentée pour M. Alain A demeurant 15, bis rue Séraphin à Marseille (13015), par Me Cavasino ;

M. Alain A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0602240 du 7 avril 2008 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 1997, 1998 et 1999 et des pénalités y afférentes ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

3°) de mettre à la charg

e de l'Etat la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice adm...

Vu la requête, enregistrée le 18 juin 2008, présentée pour M. Alain A demeurant 15, bis rue Séraphin à Marseille (13015), par Me Cavasino ;

M. Alain A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0602240 du 7 avril 2008 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 1997, 1998 et 1999 et des pénalités y afférentes ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

...............................................................

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré le 26 février 2009 présenté par le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique ;

Le ministre demande à la Cour de rejeter la requête de M. A ;

...............................................................

......................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu l'arrêté du vice-président du Conseil d'Etat en date du 27 janvier 2009 fixant la liste des tribunaux administratifs et cours administratives d'appel autorisés à appliquer, à titre expérimental, les dispositions de l'article 2 du décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 juin 2011,

- le rapport de M. Maury, rapporteur ;

- et les conclusions de M. Dubois, rapporteur public ;

Considérant que M. A a fait l'objet d'un examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle au titre des années 1997, 1998 et 1999 ; que l'administration a rectifié le montant des revenus fonciers, des revenus d'origine indéterminée et des revenus de capitaux mobiliers au titre des années 1998 et 1999 en raison d'encaissements sur ses comptes bancaires personnels ; que M. A demande à la Cour d'annuler le jugement du 7 avril 2008 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 1997, 1998 et 1999 et des pénalités y afférentes ;

Considérant que, comme l'indique l'administration dans sa défense, la notification de redressement n'a concerné que les années 1998 et 1999 et qu'à la suite de la réclamation préalable de M. A la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu afférente à l'année 1999 et les contributions sociales de l'année 1998 ont fait l'objet d'un dégrèvement total ; que, par suite, les conclusions tendant à la décharge de ces impositions et d'impositions relatives à l'année 1997 sont irrecevables ; que, seule reste en litige la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle M. A a été assujetti au titre de l'année 1998 ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant que le mémoire de M. A du 25 mars 2008, a été régulièrement communiqué au directeur des services fiscaux de Marseille ; que, par suite et en toute hypothèse, le requérant ne peut soutenir que le jugement attaqué a méconnu le principe du contradictoire ; qu'en outre les premiers juges ont suffisamment motivé leur jugement en répondant au moyen de M. A tiré du défaut de dialogue au cours des opérations de contrôle fiscal ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales : En vue de l'établissement de l'impôt sur le revenu, l'administration peut demander au contribuable des éclaircissements. (...).Elle peut également lui demander des justifications lorsqu'elle a réuni des éléments permettant d'établir que le contribuable peut avoir des revenus plus importants que ceux qu'il a déclarés (...) ;

Considérant qu'il résulte de ces dispositions que dès lors que les relevés de compte que le service obtient par l'exercice de son droit de communication auprès des établissements bancaires ne constituent pas des documents uniques auxquels le contribuable ne serait pas susceptible d'avoir accès, l'administration n'est pas tenue de communiquer d'elle-même au contribuable les relevés bancaires qu'elle a obtenus exclusivement par l'exercice de son droit de communication auprès de la banque de l'intéressé, avant de lui adresser une demande de justifications ; qu'en conséquence, le fait que l'administration n'ait pas communiqué à M. A les relevés bancaires à partir desquels elle lui a demandé des éclaircissements et des justifications sur les sommes qui y figuraient n'entraîne pas l'irrégularité de la procédure suivie ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de la charte des droits et obligations du contribuable vérifié, rendue opposable à l'administration par l'article L. 10 du livre des procédures fiscales, dans sa version applicable aux opérations de contrôle menées à l'encontre de M. A: Dans le cadre de l'examen contradictoire de la situation fiscale personnelle (ESFP), le dialogue joue un rôle très important tout au long de la procédure. Il vous permet de présenter vos explications sur les discordances relevées par le vérificateur à partir des informations dont il dispose ; que M. A soutient qu'il n'a pu bénéficier d'un débat contradictoire avec le vérificateur avant l'envoi des demandes de justifications ; que, toutefois, les dispositions précitées n'imposent pas au vérificateur d'engager un dialogue portant sur les discordances qu'il a relevées avant l'envoi de la demande de justifications ; qu'au surplus, il résulte de l'instruction qu'au moins deux rencontres ont eu lieu avec le vérificateur avant l'envoi des demandes de justifications, ainsi que le reconnaît le requérant ; que M. A, qui ne soutient pas qu'à ces occasions, tout dialogue a été impossible avec le vérificateur, n'est par suite pas fondé à soutenir que l'administration n'a pas respecté le principe d'un débat contradictoire au cours du contrôle ;

Considérant, en troisième lieu, que M. A soutient qu'il n'a été informé ni du caractère non contraignant de la procédure ni du délai dont il disposait pour répondre à la demande de renseignements que lui a adressée l'administration ; que cependant, aucune disposition ne fait obligation à l'administration d'informer le contribuable du caractère non contraignant de la procédure d'examen contradictoire de la situation fiscale ; qu'en outre la demande de renseignement adressée à M. A, contrairement à ce qu'il soutient l'a informé qu'il disposait d'un délai de deux mois pour fournir les renseignements demandés ;

Sur le bien-fondé de l'imposition :

En ce qui concerne les revenus fonciers :

Considérant qu'aux termes du I. de l'article 31 du code général des impôts : Les charges de la propriété déductibles pour la détermination du revenu net comprennent : 1° Pour les propriétés urbaines : (...). c. Les impositions, autres que celles incombant normalement à l'occupant, perçues, à raison desdites propriétés, au profit des collectivités locales, de certains établissements publics ou d'organismes divers ainsi que la taxe annuelle sur les locaux à usage de bureaux, les locaux commerciaux et les locaux de stockage perçue dans la région Ile-de-France prévue à l'article 231 ter ; qu'il résulte de ces dispositions que pour être admises en déduction les taxes afférentes aux bien loués doivent être justifiées et avoir été réglées au cours de l'année d'imposition ;

Considérant que si M. A soutient que pour déterminer ses revenus fonciers de l'année 1998, l'administration n'aurait pas tenu compte des taxes foncières afférentes aux locaux concernés, il ne justifie ni qu'elles lui aient été réclamées, ni qu'il les ait effectivement payées ; qu'en conséquence il n'est pas fondé à en demander l'imputation pour la détermination de ses revenus fonciers de l'année 1998 ;

En ce qui concerne les revenus d'origine indéterminée :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales : Lorsque l'une des commissions visées à l'article L. 59 est saisie d'un litige ou d'un redressement, l'administration supporte la charge de la preuve en cas de réclamation, quel que soit l'avis rendu par la commission. Toutefois, la charge de la preuve incombe au contribuable (...).Elle incombe également au contribuable à défaut de comptabilité ou de pièces en tenant lieu, comme en cas de taxation d'office à l'issue d'un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle en application des dispositions des articles L. 16 et L. 69 ;

Considérant que, si l'administration ne peut régulièrement taxer d'office, en application de l'article L. 69 du livre des procédures fiscales , les sommes dont elle n'ignore pas qu'elles relèvent d'une catégorie précise de revenus, elle peut en revanche procéder à cette taxation d'office si, au vu des renseignements dont elle disposait avant l'envoi de la demande de justifications fondée sur l'article L. 16 du livre des procédures fiscales et des réponses apportées par le contribuable à cette demande, la nature des sommes en cause, et donc la catégorie de revenus à laquelle elles seraient susceptibles de se rattacher, demeure inconnue ; qu'il est toutefois loisible au contribuable régulièrement taxé d'office sur le fondement de l'article L. 69 du livre des procédures fiscales d'apporter devant le juge de l'impôt la preuve que ces sommes, soit ne constituent pas des revenus imposables, soit se rattachent à une catégorie précise de revenus ; que, dans cette dernière situation, le contribuable peut obtenir, le cas échéant, une réduction de l'imposition d'office régulièrement établie au titre du revenu global, à raison de la différence entre les bases imposées d'office et les bases résultant de l'application des règles d'assiette propres à la catégorie de revenus à laquelle se rattachent, en définitive, les sommes en cause ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'administration après avoir mis en oeuvre la procédure de demande de justification prévue à l'article L. 16 du livre des procédures fiscales concernant la somme de 232 782,97 francs créditée le 17 août 1998 sur le compte bancaire de M. A, l'a taxée d'office sur le fondement de l'article L. 69 du même livre ;

Considérant que M. A, dans ses dernières écritures produit la note de son avocat en date du 18 mars 1998 qui explique la différence, qui correspond à des frais de procédure, entre le montant de la condamnation ordonnée en référé par le Tribunal de grande instance de Marseille le 8 janvier 1998 condamnant un de ses locataires à lui payer la somme de 250 000 francs et la somme de 232 782 francs figurant au crédit de son compte bancaire ; qu'en conséquence, il apporte la preuve qui lui incombe, de l'origine de la somme litigieuse que l'administration a taxée à tort en tant que revenu d'origine indéterminée au titre de l'année 1998 sur le fondement de l'article L. 69 du livre des procédures fiscales ; que M. A soutient à bon droit que la somme de 232 782,97 francs doit être imposée dans la catégorie des revenus fonciers avec le bénéfice de la déduction forfaitaire ; qu'il est fondé à obtenir la réduction de l'imposition dans cette mesure ;

En ce qui concerne l'application des dispositions de l'article 163-0 A du code général des impôts :

Considérant qu'aux termes de l'article 163-0 A du même code : Lorsqu'au cours d'une année un contribuable a réalisé un revenu qui par sa nature n'est pas susceptible d'être recueilli annuellement et que le montant de ce revenu exceptionnel dépasse la moyenne des revenus nets d'après lesquels ce contribuable a été soumis à l'impôt sur le revenu au titre des trois dernières années, l'intéressé peut demander que l'impôt correspondant soit calculé en ajoutant le quart du revenu exceptionnel net à son revenu net global imposable et en multipliant par quatre la cotisation supplémentaire ainsi obtenue (...) ;

Considérant que M. A qui n'a présenté à l'administration aucune demande tendant à l'application des dispositions précitées de l'article 163-0-A du code général des impôts et, par suite, à l'étalement des sommes réintégrées n'est pas recevable à demander pour la première fois à la Cour, le bénéfice de celles-ci ;

Sur l'application des pénalités :

Considérant que contrairement à ce que soutient M. A, la mauvaise foi retenue par l'administration ne repose pas sur des considérations qui seraient postérieures au fait générateur de l'impôt et à l'année d'imposition ; qu'en effet le service, alors que M. A gère de longue date plusieurs biens immobiliers, a constaté qu'il avait omis de déclarer les arriérés de loyers dont il ne pouvait ignorer le caractère imposable et leur rattachement à l'année de leur encaissement ; qu'ainsi, quel que soit le montant de l'insuffisance déclarative, le vérificateur a établi son caractère intentionnel ; que s'agissant des revenus d'origine indéterminée le service établit la mauvaise foi en se référant à l'absence de justifications suffisantes présentées en cours de contrôle par M. A ; que, par ailleurs, la taxation de ces sommes ayant la nature de revenus, n'a pas le caractère d'une sanction à laquelle s'en ajouterait une seconde du fait de l'application de majorations et ne méconnaît donc pas le principe non bis in idem invoqué par le requérant ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à la décharge, en droits et pénalités, de la fraction des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 1998 procédant des rehaussements apportés aux revenus d'origine indéterminée alors que ces rehaussement relevaient de la catégorie des revenus fonciers;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. A et non compris dans les dépens ;

DECIDE

Article 1er : La base de l'impôt correspondant aux revenus d'origine indéterminée assignée à M. A au titre de l'année 1998 est réduite d'une somme de 35 487,53 euros (232 782,97 francs). La base de l'impôt correspondant aux revenus fonciers de la même année est majorée de la somme de 35 487,53 euros (232 782,97 francs) avec le bénéfice de la déduction forfaitaire.

Article 2 : M. A est déchargé, en droits et pénalités, de la différence entre la cotisation d'impôt sur le revenu, restant à sa charge au titre de l'année 1998 et celle résultant de l'article 1er ci-dessus.

Article 3 : Le jugement du Tribunal administratif de Marseille en date du 7 avril 2008 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 4 : L'Etat versera à M. A la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. Alain A et au ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat.

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N°08MA02943


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 08MA02943
Date de la décision : 30/06/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-02 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Revenus fonciers.


Composition du Tribunal
Président : M. BEDIER
Rapporteur ?: M. André MAURY
Rapporteur public ?: M. DUBOIS
Avocat(s) : CAVASINO

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2011-06-30;08ma02943 ?
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