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30/05/2011 | FRANCE | N°09MA02456

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre - formation à 3, 30 mai 2011, 09MA02456


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 8 juillet 2009 sous le n° 09MA02456, présentée pour l'ASSOCIATION LANGUEDOCIENNE POUR L'AIDE AUX INSUFFISANTS MENTAUX (ALPAIM), dont le siège est ..., représentée par son président en exercice, par la SCP Coste - Berger - Pons - Daudé, avocat ;

L'ALPAIM demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0700050 du 7 mai 2009 par lequel le Tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 10 novembre 2006 par laquelle l'inspecteur d

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Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 8 juillet 2009 sous le n° 09MA02456, présentée pour l'ASSOCIATION LANGUEDOCIENNE POUR L'AIDE AUX INSUFFISANTS MENTAUX (ALPAIM), dont le siège est ..., représentée par son président en exercice, par la SCP Coste - Berger - Pons - Daudé, avocat ;

L'ALPAIM demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0700050 du 7 mai 2009 par lequel le Tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 10 novembre 2006 par laquelle l'inspecteur du travail de la 5ème section de l'Hérault a refusé d'autoriser le licenciement de M. A, membre titulaire du comité d'entreprise ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cette décision ;

3°) d'enjoindre au ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville de prendre une nouvelle décision à l'issue d'une nouvelle instruction de la demande d'autorisation de licenciement ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

......................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code du travail ;

Vu le décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 relatif au rapporteur public des juridictions administratives et au déroulement de l'audience devant ces juridictions ;

Vu l'arrêté du 27 janvier 2009 fixant la liste des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel autorisés à appliquer, à titre expérimental, les dispositions de l'article 2 du décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 mai 2011 :

- le rapport de M. Chanon, premier conseiller ;

- les conclusions de M. Deliancourt, rapporteur public ;

- les observations de Me Benayoun substituant la SCP Coste - Berger - Pons - Daudé, pour l'ALPAIM ;

- les observations de M. A ;

Considérant que l'ASSOCIATION LANGUEDOCIENNE POUR L'AIDE AUX INSUFFISANTS MENTAUX (ALPAIM) relève appel du jugement du 7 mai 2009 par lequel le Tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande dirigée contre de la décision, en date du 10 novembre 2006, de l'inspecteur du travail de la 5ème section de l'Hérault refusant l'autorisation de licencier M. A, salarié protégé ;

Sur la recevabilité des pièces produites en appel par M. A :

Considérant que M. A n'a pas eu recours à un avocat et n'a pas produit de mémoire en appel ; que, dès lors, les pièces communiquées directement par l'intéressé, en méconnaissance des dispositions de l'article R. 811-7 du code de justice administrative, doivent être écartées des débats comme irrecevables ;

Sur la légalité de la décision du 10 novembre 2006 :

Considérant qu'en vertu des dispositions du code du travail, les salariés légalement investis de fonctions représentatives bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des salariés qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle ; que, lorsque le licenciement d'un de ces salariés est envisagé, ce licenciement ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé ; que, dans le cas où la demande de licenciement est motivée par un comportement fautif, il appartient à l'inspecteur du travail, et le cas échéant au ministre, de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si les faits reprochés au salarié sont d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement, compte tenu de l'ensemble des règles applicables au contrat de travail de l'intéressé et des exigences propres à l'exécution normale du mandat dont il est investi ;

Considérant que l'ALPAIM, qui a pour activité l'accueil, l'hébergement et le travail de personnes handicapées, au sein notamment de l'institut médico-éducatif Les Mûriers , a saisi, le 19 octobre 2006, l'inspecteur du travail d'une demande d'autorisation de licenciement pour faute de M. A, moniteur éducateur depuis 1978 et membre titulaire du comité d'entreprise, en raison d'un comportement portant atteinte à la dignité de la personne, atteinte à la réputation de la personne et atteinte à la personne dans sa fonction ; que, par décision du 10 novembre 2006, l'inspecteur du travail a refusé d'accorder cette autorisation en estimant que la preuve de la matérialité des faits n'était pas rapportée et que la procédure était liée aux activités représentatives de M. A ;

Considérant qu'il est reproché à M. A plusieurs propos et gestes déplacés, à connotation sexuelle, à l'encontre d'une éducatrice stagiaire dont il était le référent ; que M. A a toujours nié en bloc un tel comportement et a fourni en première instance une douzaine d'attestations de salariées de l'ALPAIM indiquant qu'elles n'ont jamais constaté de la part de l'intéressé une atteinte à leur dignité de femme ; que, si la demande d'autorisation de licenciement est exclusivement fondée sur une déclaration de l'éducatrice stagiaire en date du 29 septembre 2006, remise au directeur de l'institut le 5 octobre 2006, celle-ci est précise et circonstanciée, et a fait l'objet d'une confirmation écrite le 25 novembre 2006, sur demande du directeur insistant sur les conséquences juridiques importantes de cette attestation ; que la stagiaire a simultanément déposé une main courante, le 5 octobre 2006, puis une plainte pénale, le 30 octobre 2006, qui a ultérieurement été classée sans suite pour infraction insuffisamment caractérisée ; que l'ALPAIM verse aux débats trois attestations de salariées, rédigées en décembre 2006, rapportant des faits similaires, en particulier à l'encontre d'une autre stagiaire plusieurs années auparavant, lesquelles sont de nature à éclairer le comportement de l'intéressé à l'égard de certaines femmes à l'époque des faits ; que, dans ces conditions, la matérialité des faits sur lesquels s'appuie la demande d'autorisation de licenciement doit être regardée comme établie ; qu'ainsi, le premier motif de la décision contestée est entaché d'inexactitude matérielle ;

Considérant qu'après avoir estimé que la preuve des faits n'était pas rapportée par les seules accusations de la stagiaire alors que la rectitude [du] comportement de M. A était soulignée par de nombreux témoignages, l'inspecteur du travail en a déduit que l'engagement de la procédure ne pouvait s'expliquer que par l'existence d'un lien avec le mandat représentatif exercé par le salarié, en citant plusieurs éléments attestant de relations tendues entre la direction de l'association et le comité d'entreprise ou le syndicat Sud auquel appartient M. A ; que, toutefois, l'ALPAIM conteste fermement tout lien avec la mandat exercé, en faisant valoir que la preuve des circonstances retenues par l'inspecteur du travail dans son analyse n'était pas rapportée ; que l'administration, qui n'a pas non plus présenté de mémoire en défense en appel, et M. A n'ont produit en première instance aucune observation ou pièce sur ce point ; qu'il ressort des pièces du dossier que, lorsqu'il a été consulté, le comité d'entreprise, alors même qu'il a estimé que les faits n'étaient pas établis par la seule déclaration de la stagiaire, n'a pas évoqué un tel lien ou le climat social au sein de l'organisme ; que le directeur de l'institut, qui a personnellement conduit toute la procédure, venait de prendre, le 2 octobre 2006, ses fonctions au sein de l'établissement ; que, dès lors, contrairement à l'appréciation de l'inspecteur du travail, tout lien entre l'engagement de la procédure et les fonctions représentatives de M. A doit être écarté ; que le second motif de la décision critiquée est donc également entaché d'illégalité ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête, que l'ALPAIM est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande ; que, par suite, le jugement et la décision de l'inspecteur du travail doivent être annulés ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article L. 911-2 du code de justice administrative : Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé ;

Considérant que l'exécution du présent arrêt implique nécessairement, compte tenu de ses motifs et conformément aux conclusions dont est saisie la cour, que l'inspecteur du travail prenne une nouvelle décision sur la demande dont il a été saisi ; qu'il convient de lui enjoindre de se prononcer dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de l'Etat le versement à l'ALPAIM d'une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Montpellier du 7 mai 2009 et la décision de l'inspecteur du travail de la 5ème section de l'Hérault du 10 novembre 2006 sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint à l'inspecteur du travail de prendre une nouvelle décision dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à l'ASSOCIATION LANGUEDOCIENNE POUR L'AIDE AUX INSUFFISANTS MENTAUX une somme de 1 500 (mille cinq cents) euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à l'ASSOCIATION LANGUEDOCIENNE POUR L'AIDE AUX INSUFFISANTS MENTAUX, au ministre du travail, de l'emploi et de la santé et à M. Didier A.

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N° 09MA02456

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 09MA02456
Date de la décision : 30/05/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

66-07-01-04 Travail et emploi. Licenciements. Autorisation administrative - Salariés protégés. Conditions de fond de l'autorisation ou du refus d'autorisation.


Composition du Tribunal
Président : M. MOUSSARON
Rapporteur ?: M. René CHANON
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : SCP COSTE - BERGER - PONS - DAUDÉ

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2011-05-30;09ma02456 ?
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