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17/05/2011 | FRANCE | N°09MA00668

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2ème chambre - formation à 3, 17 mai 2011, 09MA00668


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 23 février 2009, présentée par Me Szwarc, avocat, pour M. René A, demeurant ..., Mme Anne GAVANON épouse A, demeurant ..., M. Pascal A, demeurant ..., M. Philippe A, demeurant ..., Mme C née A, demeurant ... ;

Les CONSORTS A demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0601166 du 22 janvier 2009 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté leur demande tendant :

- à titre principal, à la condamnation du centre hospitalier universitaire de Montpellier à les indemniser des préjudices qu

'ils estiment avoir subis du fait, d'une part, des nombreuses hospitalisations et...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 23 février 2009, présentée par Me Szwarc, avocat, pour M. René A, demeurant ..., Mme Anne GAVANON épouse A, demeurant ..., M. Pascal A, demeurant ..., M. Philippe A, demeurant ..., Mme C née A, demeurant ... ;

Les CONSORTS A demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0601166 du 22 janvier 2009 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté leur demande tendant :

- à titre principal, à la condamnation du centre hospitalier universitaire de Montpellier à les indemniser des préjudices qu'ils estiment avoir subis du fait, d'une part, des nombreuses hospitalisations et interventions chirurgicales subies par M. Lionel A, d'autre part, du décès le 11 février 1999 de ce dernier, ensemble à la désignation d'un expert afin d'évaluer les préjudices de toute nature subis par M. Lionel A avant son décès, ensemble à ce que la somme de 2 000 euros soit mise à la charge dudit centre hospitalier universitaire ;

- à titre subsidiaire, à l'annulation de l'expertise rendue par le Pr Ninet et à la désignation d'un nouvel expert afin de déterminer les fautes commises par le service des urgences lors de la prise en charge de M. Lionel A ainsi que les fautes commises dans les soins prodigués à ce dernier depuis 1993 ;

2°) de condamner ledit centre hospitalier universitaire de Montpellier à les indemniser des préjudices qu'ils estiment avoir subis du fait, d'une part, des nombreuses hospitalisations et interventions chirurgicales subies par M. Lionel A, d'autre part, du décès le 11 février 1999 de ce dernier, à hauteur respectivement :

- pour M. René A, son père, de 30 000 euros à titre de provision en qualité d'ayant-droit, ensemble et à titre personnel, de 30 000 euros au titre du préjudice d'accompagnement et de 30 000 euros au titre du préjudice moral,

- pour Mme Anne GAVANON épouse A, sa mère, de 30 000 euros à titre de provision en qualité d'ayant-droit, ensemble et à titre personnel, de 30 000 euros au titre du préjudice d'accompagnement et de 30 000 euros au titre du préjudice moral,

- pour M. Pascal A, son frère, la somme de 25 000 euros au titre du préjudice moral,

- pour M. Philippe A, son frère, la somme de 25 000 euros au titre du préjudice moral,

- pour Madame C née A, sa soeur, la somme de 25 000 euros, au titre du préjudice moral ;

- à la désignation d'un expert afin d'évaluer les préjudices de toute nature subis par M. Lionel A avant son décès ;

- à titre subsidiaire, à l'annulation de l'expertise rendue par le Pr Ninet et à la désignation d'un nouvel expert afin de déterminer les fautes commises par le service des urgences lors de la prise en charge de M. Lionel A, ainsi que les fautes commises dans les soins prodigués à ce dernier depuis 1993 ;

3°) d'ordonner l'exécution provisoire de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge du centre hospitalier universitaire de Montpellier les dépens ;

5°) de condamner le centre hospitalier universitaire de Montpellier à verser à Me Szwarc, avocat, en cas d'admission à l'aide juridictionnelle, la somme de 3 000 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens, ce règlement portant renonciation de l'avocat à l'indemnité versée au titre de l'aide juridictionnelle ;

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Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

Vu le code civil ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu le décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 relatif au rapporteur public des juridictions administratives et au déroulement de l'audience devant ces juridictions ;

Vu l'arrêté du vice-président du Conseil d'Etat, en date du 27 janvier 2009, fixant la liste des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel autorisés à appliquer, à titre expérimental, les dispositions de l'article 2 du décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 avril 2011 :

- le rapport de M. Brossier, rapporteur,

- les conclusions de Mme Fedi, rapporteur public,

- et les observations de Me Swarc pour les CONSORTS A ;

Considérant que le jeune Lionel A, alors âgé de cinq ans, a subi en

septembre 1982 au centre hospitalier universitaire de Montpellier l'exérèse chirurgicale partielle d'un craniopharyngiome, ainsi que la mise en place côté droit d'une dérivation ventriculo-péritonéale de son liquide céphalo-rachidien, qui a correctement fonctionné jusqu'au 9 janvier 1993, date à laquelle, en raison d'un dysfonctionnement de ce shunt destiné à prévenir des épisodes d'hydrocéphalies et d'hypertension intra-crânienne, est réalisée en urgence une dérivation externe le 9 janvier 1993 ; qu'est installée le 15 janvier 1993 une nouvelle dérivation ventriculo-péritonéale, cette fois sur le côté gauche ; qu'à la suite de ces deux interventions chirurgicales de janvier 1993, sept autres interventions chirurgicales seront réalisées au centre hospitalier universitaire les 22 janvier 1993, 21 avril 1993, 17 août 1993, 2 septembre 1993, 14 septembre 1993, 21 octobre 1993 et 27 juillet 1994, soit un total de neuf interventions chirurgicales pratiquées au centre hospitalier universitaire sur la période courant du mois de janvier 1993 au mois de juillet 1994 ; qu'à compter de janvier 1995, les parents de Lionel A ont décidé de confier le suivi médical de l'enfant à l'équipe médicale de la clinique privée Rech où il sera hospitalisé du 31 janvier 1995 au 3 février 1995 ; qu'il sera opéré à nouveau à plusieurs reprises, le 26 décembre 1995 à la clinique Rech, le 1er mai 1996 à la clinique du Grand Sud, puis à nouveau à la clinique Rech les 14 mai 1996, 21 mai 1996, 11 juin 1996 et pour la dernière fois le 22 décembre 1998, soit six interventions chirurgicales en clinique privée, dont cinq à la clinique Rech ; que les CONSORTS A recherchent la responsabilité du centre hospitalier universitaire en soutenant que, lors des nombreuses hospitalisations de Lionel A au sein de ce centre, il aurait contracté une ou plusieurs infections nosocomiales, que les matériels de dérivation implantés pour évacuer l'excédent de son liquide céphalo-rachidien auraient été défectueux et que son suivi médico-chirurgical révèlerait des fautes médicales, notamment dans le traitement des complications endurées ; que les parents de Lionel A réclament à ce titre réparation, en leur nom propre, des troubles dans les conditions d'existence qu'ils estiment avoir subis du fait de la multiplication de ces interventions chirurgicales et des hospitalisations subséquentes, lesquelles n'auraient pas dû avoir lieu selon eux si l'enfant avait été correctement soigné au centre hospitalier universitaire ; que les parents de Lionel A réclament en outre réparation à titre provisionnel, en leur qualité d'ayant-droits, des préjudices propres subis par leur enfant ;

Considérant, par ailleurs, que dans la nuit du 10 février 1999, compte tenu d'un état instable et fiévreux de Lionel A, ses parents ont contacté à plusieurs reprises le médecin régulateur du service d'aide médicalisée d'urgence (SAMU), service du centre hospitalier universitaire de Montpellier ; qu'au matin du 11 février 1999, Lionel A décédera durant son transfert, effectué par les sapeurs-pompiers du domicile de ses parents à la clinique privée Rech ; que les parents de Lionel A et ses frères et soeurs invoquent la faute dans l'organisation du SAMU, ensemble le défaut d'information fautif de la part du médecin régulateur dudit SAMU, qui seraient à l'origine directe du décès de Lionel A et réclament à ce titre réparation de leur préjudice moral ;

Sur la régularité des opérations d'expertise :

Considérant que les consorts A avaient tout d'abord intenté une action en justice devant le tribunal de grande instance de Montpellier, lequel a désigné un expert par ordonnance du 24 janvier 2002 ; que cet expert, le Pr Ninet, professeur de médecine interne aux hospices civils de Lyon, a rédigé son rapport le 21 juillet 2005 ;

Considérant, en premier lieu, que les appelants demandent à la Cour d'écarter le rapport d'expertise susmentionné et de diligenter une nouvelle expertise, au motif que l'expert aurait été radié du tableau des experts près la Cour d'appel de Lyon par mesure disciplinaire pour ses manquements ; qu'en l'absence de toute autre précision, et dès lors qu'il n'est pas établi que l'expert aurait été radié antérieurement à la date de remise de son rapport, le moyen tel qu'il est soulevé doit être écarté ;

Considérant, en deuxième lieu, que les appelants demandent également à la Cour d'écarter le rapport d'expertise susmentionné et de diligenter une nouvelle expertise, au motif que l'expert a mis trois années pour rendre son rapport ; qu'il résulte toutefois de l'instruction que, compte tenu du nombre important d'hospitalisations et d'interventions chirurgicales en litige, du nombre également important d'opérateurs médicaux que l'expert a dû contacter, des difficultés auxquelles il a été confronté pour obtenir communication de l'ensemble des pièces médicales du dossier qu'il n'a pas pu toutes obtenir, de la difficulté propre du dossier liée à la pathologie grave de Lionel A et de ses complications médicales subséquentes, l'expert a fait état dans son rapport des difficultés extrêmes auxquelles il a été confrontées lors des opérations d'expertise ; que, dans ces conditions, ne saurait entacher le rapport d'expertise d'une quelconque irrégularité la circonstance que l'expert a mis trois ans à rendre son rapport, lequel a nécessité, simplement pour exposer la chronologie de l'affaire, 38 pages très précises, avant même d'aborder la discussion et les réponses aux questions posées ;

Considérant, en troisième lieu, que les appelants demandent également à la Cour d'écarter le rapport d'expertise susmentionné et de diligenter une nouvelle expertise, au motif qu'un vice du contradictoire aurait entaché le déroulement des opérations d'expertise en tant qu'elles concernent la partie du litige relative à la faute alléguée du SAMU, dès lors que les déclarations téléphoniques du médecin régulateur, le Dr Benatia, et du médecin libéral de garde qui s'est déplacé, le Dr Lautier, faisant état du refus de la famille d'hospitaliser Lionel A pendant la nuit, n'auraient été ni vérifiées ni débattues de façon contradictoire ; qu'il résulte toutefois de l'instruction, d'une part, que l'expert n'a pu se faire communiquer les bandes sonores d'enregistrement du SAMU au motif allégué par le centre hospitalier universitaire qu'elles étaient inaudibles, d'autre part, que les médecins Benatia et Lautier ont refusé de se déplacer et que, dans ces conditions, l'expert, comme il l'indique, ne pouvait recueillir leur version que par téléphone ; que ces difficultés matérielles n'entachent pas par elles-mêmes le rapport d'expertise d'une irrégularité, nonobstant la circonstance que les dates de ces appels téléphoniques ne soient pas connues, dès lors que la version orale contestée de ces deux médecins a été communiquée à la partie adverse lors des opérations d'expertise, afin qu'elle produise un éventuel dire à ce sujet ; qu'en effet, les CONSORTS A admettent dans leurs écritures qu'ils n'ont pu contester ce prétendu refus d'hospitalisation figurant dans le pré-rapport, au motif que leur avocat d'alors n'a pas envoyé le dire à l'expert (requête introductive d'appel page 17) ; qu'il s'ensuit que doit être écartée le moyen tiré d'un vice du contradictoire qui entacherait les opérations d'expertise en tant qu'il concerne la partie du litige relative à la faute alléguée du SAMU ;

Considérant, en quatrième lieu, que les consorts A sollicitent, à titre subsidiaire, une contre-expertise aux motifs que l'expert n'aurait pas totalement accompli sa mission en ce qui concerne la nature des germes contractés en janvier 1993, la raison du dysfonctionnement des shunts de dérivation, les alternatives au maintien du matériel prothétique, le contenu des bandes du SAMU dans la nuit du 10 février au 11 février, l'obligation d'information du médecin régulateur lors du premier appel, les raisons de la

non-hospitalisation cette même nuit au centre hospitalier universitaire de Nîmes, les horaires d'ouverture des urgences de la clinique Rech cette même nuit, les raisons de l'absence d'envoi d'un premier médecin dès le premier appel, les raisons de l'absence d'un médecin lors du transport et l'ouverture non expliquée du corps de la victime au niveau de l'abdomen constatée après son décès ; que toutes ces questions ne remettent pas en cause la régularité du rapport d'expertise du Pr Ninet mais, concernant le bien-fondé de la demande indemnitaire, sont seulement susceptibles d'amener la Cour à diligenter éventuellement une expertise complémentaire sur les points particuliers sur lesquels elle estimerait qu'elle ne disposerait pas d'éléments suffisants versés au dossier pour l'éclairer ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les appelants ne sont pas fondés à mettre en cause la régularité des opérations d'expertise ;

Sur la partie du litige relative aux complications invoquées lors des hospitalisations de Lionel A à compter de 1993 :

En ce qui concerne la défectuosité des matériels prothétiques :

Considérant que les appelants invoquent la responsabilité sans faute du centre hospitalier universitaire au motif que les nombreux dysfonctionnements des matériels prothétiques mis en place seraient à l'origine de douze interventions chirurgicales, qui n'auraient pas eu lieu selon eux sans ces dysfonctionnements, d'où les troubles dans les conditions d'existence invoqués qui en résulteraient ; que le centre hospitalier universitaire admet que ces dysfonctionnements seraient à l'origine de quatre interventions chirurgicales seulement, dont une seule au centre hospitalier universitaire et trois à la clinique privée Rech ;

Considérant, d'une part, que sans préjudice d'éventuels recours en garantie, le service public hospitalier est responsable, même en l'absence de faute de sa part, des conséquences dommageables pour les usagers de la défaillance des produits et appareils de santé qu'il utilise ;

Considérant, d'autre part, que la réponse à la question du caractère éventuellement défectueux des matériels prothétiques implantés n'a pas été expressément apportée par le rapport d'expertise, l'expert n'ayant pas eu en effet à répondre à cette question qui ne lui a pas été soumise et qui est abordée pour la première fois en première instance devant le tribunal administratif de Marseille ; que toutefois, l'historique détaillé des faits contenu par ledit rapport d'expertise, ainsi que les comptes-rendus opératoires produits, apportent des éléments suffisants qui permettent à la Cour de se prononcer ;

S'agissant de la dérivation ventriculo-péritonéale droite :

Considérant que ce matériel prothétique a été implanté en 1982 alors que Lionel A avait l'âge de 5 ans ; qu'il a fonctionné sans difficulté pendant une dizaine d'années, mais a présenté un dysfonctionnement en janvier 1993 nécessitant son retrait ; que lors de la tentative d'ablation totale de ce matériel le 24 avril 1993, l'opérateur a rencontré des difficultés dues à la cassure dans le corps du patient d'une partie dudit matériel ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction, notamment du rapport d'expertise, que l'expert que le dysfonctionnement initial de la dérivation ventriculo-péritonéale droite a été causé par un problème non infectieux, mais matériel ; que toutefois, compte tenu de la durée de vie intrinsèquement limitée de tout matériel prothétique, de la croissance physique de l'enfant sur la période courant de 1982 à 1993, soit de l'âge de 5 à 16 ans, et de l'élasticité limitée de ce matériel mis en place le long du corps, aucune défectuosité de ce matériel âgé de plus de 10 ans ne peut être retenue lors du dysfonctionnement constaté en janvier 1993 et de la cassure subie en avril 1993 ;

S'agissant de la dérivation ventriculo-péritonéale gauche :

Considérant qu'à la suite du dysfonctionnement de la dérivation ventriculo-péritonéale droite, une dérivation ventriculo-péritonéale gauche a été implantée le 15 janvier 1993 ; qu'il résulte de l'instruction que la pose du bout de la sonde abdominale a créé par deux fois des difficultés à l'opérateur ; que la première fois, peu après la pose du 15 janvier 1993, le bout de la sonde abdominale est sorti hors du péritoine, nécessitant une reprise locale le 22 janvier 1993 sous anesthésie locale ; que la seconde fois, sept mois plus tard, le bout de la sonde s'est bouché, empêchant l'écoulement du liquide céphalo-rachidien, nécessitant une intervention chirurgicale le 17 août 1993 afin de l'extérioriser en urgence et de couper la partie obstruée, puis une intervention chirurgicale le 2 septembre 1993 afin de réintroduire dans le péritoine le bout de la sonde réparé ;

Considérant, d'une part, qu'il ne ressort pas du compte-rendu opératoire du 22 janvier 1993 que la sortie du bout de la sonde hors du péritoine ait été provoquée par un premier dysfonctionnement de ce bout de sonde qui a été immédiatement réintroduit sans aucune réparation ou remplacement ;

Considérant, d'autre part, à supposer même que le second dysfonctionnement dudit bout abdominal de la sonde soit imputable à une défectuosité de celui-ci, ce qui ne ressort d'aucun des comptes-rendus opératoires versés au dossier, mais est cependant admis par le centre hospitalier universitaire s'agissant de l'intervention chirurgicale en urgence du 17 août 1993 qui a réparé ce bout obstrué avant de le réintroduire, à supposer donc cette imputabilité, en tout état de cause, il ressort du compte-rendu opératoire du 2 septembre 1993 que l'opérateur a rencontré, en raison de l'adiposité des tissus du patient, des difficultés de ré-implantation telles qu'il a immédiatement envisagé de mettre en place une nouvelle dérivation d'écoulement du liquide céphalo-rachidien, non via le péritoine, source de complications déjà rencontrées par deux fois, mais via le coeur, par la technique de dérivation ventriculo-atriale, ce qui sera fait rapidement le 14 septembre 1993 ; qu'ainsi donc et en tout état de cause, en raison de l'adiposité des tissus abdominaux du patient que les troubles hormonaux consécutifs à l'exérèse partielle en 1982 de sa tumeur à l'hypophyse avait rendu obèse, la technique même de la dérivation ventriculo-péritonéale était devenue inadaptée et aurait conduit de toute façon à terme, si la décision de la dérivation ventriculo-atriale n'avait été prise rapidement, à de nouvelles complications nécessitant de nouvelles interventions chirurgicales ; que dans ces conditions, aucun trouble dans les conditions d'existence n'est à indemniser du fait des interventions chirurgicales susmentionnées des 17 août 1993, 2 septembre 1993 et 14 septembre 1993 ;

S'agissant de la dérivation ventriculo-atriale :

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction, notamment du rapport d'expertise, que la technique de dérivation ventriculo-atriale, décidée compte-tenu de l'inadaptation de la dérivation ventriculo-péritonéale, a été mise en place le 14 septembre 1993 et n'a rencontré aucune complication particulière pendant la période où le patient était encore suivi au centre hospitalier universitaire ; qu'en janvier 1995, si un dysfonctionnement du shunt est apparu, il a été traité à la clinique Rech sans intervention chirurgicale et le compte-rendu médical indique qu'une manoeuvre manuelle a permis de purger la pompe par expulsion d'un petit fragment fibrineux qui obstruait l'extrémité distale, sans révéler une défectuosité du matériel prothétique ;

Considérant, en deuxième lieu, que la première intervention chirurgicale pratiquée à la clinique Rech a eu lieu le 26 décembre 1995 ; qu'il ressort d'un courrier du 14 décembre 1995 Dr Fuentes que la sonde de dérivation ventriculo-atriale semble parfaitement fonctionner. Il reste le problème de la sonde abandonnée dans la cavité abdominale. Je crois que nous allons nous résoudre quand même à l'enlever ; que le compte-rendu opératoire de cette intervention du 26 décembre 1995, intitulé révision d'un système de dérivation ventriculo-péritonéale et ventriculo-atriale, retire dans un premier temps la partie abdominale abandonnée de la dérivation ventriculo-péritonéale et, se reportant sur la zone cervicale, constate, non une défectuosité du matériel, mais l'infection de la partie ventriculaire de la dérivation ventriculo-atriale nécessitant une reprise des raccords ; qu'à la suite d'une nouvelle complication de la dérivation ventriculo-atriale, l'intervention chirurgicale pratiquée à la clinique le 21 mai 1996 ne permet pas non plus d'incriminer le matériel, dès lors que cette opération a mis en évidence une récidive du cranio-carcinome, constatée par une volumineuse tumeur kystique dans le ventricule V3 du cerveau, qui sera retirée par exérèse du 11 juin 1996 ; qu'enfin, l'ultime intervention chirurgicale du 22 décembre 1998 n'a pas pour origine une défectuosité établie du matériel prothétique resté en place, mais avait pour but de le retirer intégralement, le patient n'étant plus à cette date shunt dépendant ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'aucun élément versé au dossier ne permet de retenir une défectuosité des matériels implantés par le centre hospitalier universitaire, tant en ce qui concerne la dérivation ventriculo-péritonéale droite, qu'en ce qui concerne la dérivation ventriculo-péritonéale gauche ainsi que la dérivation ventriculo-atriale ; qu'il s'ensuit que les appelants ne sont pas fondés à rechercher la responsabilité sans faute dudit centre hospitalier universitaire, sans qu'il soit besoin pour la Cour de surseoir à statuer en diligentant une expertise à ce titre ;

En ce qui concerne les infections dont le caractère nosocomial est invoqué :

S'agissant de la charge de la preuve :

Considérant que le régime de la responsabilité d'un centre hospitalier public, mis en cause pour une infection dont le caractère nosocomial est allégué, est un régime de responsabilité pour faute présumée ; qu'il incombe en effet au service public hospitalier de fournir au personnel médical un matériel et des produits stériles et que, dans ces conditions, il appartient à la victime, non de démontrer qu'une faute d'aseptie a été commise par l'équipe médicale ou soignante, mais d'apporter un faisceau d'indices constitutif d'un commencement de preuve permettant de présumer du caractère nosocomial de l'infection ; que parmi ces indices figure notamment le délai d'apparition de l'infection après l'acte médical incriminé ; que si la victime réunit un faisceau d'indices suffisamment convaincant, il incombe alors au centre hospitalier d'apporter devant le juge la preuve contraire, en produisant notamment des analyses bactériologiques et antibiogrammes permettant de déterminer avec certitude que le germe en cause ne peut avoir une origine nosocomiale ; qu'en l'espèce, et malgré la demande de l'expert auprès du centre hospitalier universitaire, la partie communiquée du dossier médical de Lionel A ne comprend aucune analyse bactériologique ;

S'agissant de l'infection apparue en avril 1993 :

Considérant, en premier lieu, que la première infection s'est manifestée en avril 1993 où est apparu localement un abcès abdominal sur le côté droit où avait été implantée en 1982 la dérivation ventriculo-péritonéale initiale, qui a nécessité la quatrième intervention chirurgicale du 21 avril 1993 ;

Considérant qu'il n'est pas contesté, comme le soutiennent les appelants, que selon les données actuelles de l'art telles qu'énoncées par le comité technique national sur les infections nosocomiales, l'apparition d'une infection dans le délai d'un mois suivant un acte chirurgical, et dans le délai d'un an en cas d'implantation chirurgicale d'un matériel prothétique, laisse présumer son caractère nosocomial ; que le matériel prothétique constituant la dérivation ventriculo-péritonéale droite avait cependant été implanté en 1982 ; qu'il résulte de l'instruction, notamment du rapport d'expertise, que cette zone à droite n'avait été touchée par aucune des trois premières interventions chirurgicales des 9 janvier, 15 janvier, 22 janvier 1993, lesquelles ont consisté respectivement à réaliser en urgence une dérivation externe suite au dysfonctionnement de cette dérivation droite, puis à installer une dérivation ventriculo-péritonéale sur le côté gauche ; que si l'expert fait part d'un doute possible sur la question de savoir si les gestes chirurgicaux pratiqués à gauche en janvier ont pu être la porte d'entrée de l'infection qui s'est manifestée à droite en avril, il relativise toutefois fortement cette hypothèse, dès lors que l'ancienne sonde droite n'a été ni touchée ni enlevée et que le germe est apparu à droite près de trois mois après les opérations à gauche ; que si les appelants soutiennent que les interventions chirurgicales de janvier 1993 n'auraient pas été accompagnées d'un traitement antibiotique adapté, ce qui expliquerait l'apparition du germe en avril, un tel argument n'est pas corroboré par l'analyse de l'expert qui indique, d'une part, que le dysfonctionnement de la dérivation droite, qui n'a pas encore été touchée chirurgicalement, n'avait pas d'origine infectieuse, d'autre part, que la mise en place chirurgicale de la dérivation gauche a été accompagnée d'un saupoudrage local d'antibiotiques ;

Considérant que dans ces conditions, aucun faisceau d'éléments suffisant n'est apporté par les appelants permettant d'établir un commencement de preuve du caractère nosocomial de l'infection d'avril 1993, sans que ne puisse s'y opposer la circonstance, dans la dialectique de la charge de la preuve, que la partie intimée ne peut démontrer avec certitude l'absence d'origine hospitalière du germe responsable en cause, en l'absence de production de l'entier dossier médical et des éventuels analyses bactériologiques et antibiogrammes qu'il contiendrait ;

S'agissant de l'infection apparue en août 1993 :

Considérant qu'il résulte de l'instruction, notamment du rapport d'expertise, que le nouvelle dérivation ventriculo-péritonéale gauche implantée en janvier 1993 s'est bouchée au niveau du bout de la sonde abdominale, nécessitant une intervention chirurgicale en urgence le 17 août 1993 pour extérioriser ce bout de sonde et le réparer, puis le 2 septembre 1993 pour le réimplanter ; que lors de cette intervention du 17 août 1993, une infection s'est manifestée au niveau du liquide céphalo-rachidien ; qu'il s'agit de la première manifestation d'une infection de ce liquide ;

Considérant qu'il est exact que l'implantation de la dérivation ventriculo-péritonéale gauche ayant été réalisée en janvier 1993, sept mois auparavant, le germe est donc apparu moins d'une année après implantation du matériel prothétique dans lequel circule le liquide céphalo-rachidien ; que cette circonstance constitue un élément en faveur de l'argumentation des appelants ;

Considérant, toutefois, que ne peut non plus être écartée l'hypothèse du passage possible dans le liquide céphalo-rachidien du premier germe révélé par l'abcès à droite susmentionné, traité quatre mois plus tôt en avril, et dont il a été vu que l'origine nosocomiale ne peut quant à elle être présumée ; que par ailleurs et ainsi qu'il a été dit, si le centre hospitalier universitaire admet que l'origine de la complication du 17 août 1993 est un dysfonctionnement du bout de la sonde, aucun compte-rendu opératoire ne permet de le confirmer et d'écarter l'hypothèse d'une complication provoquée en réalité par l'adiposité des tissus du patient et par le caractère inadapté de la technique de la dérivation ventriculo-péritonéale ; qu'aucun élément versé au dossier ne permet d'affirmer ou d'infirmer que l'infection constatée serait à l'origine de l'obstruction du bout de la sonde ou qu'au contraire cette obstruction et le bouchon qui l'a suivi auraient généré l'infection ; qu'en outre et enfin, l'infection a été traitée par antibiothérapie administrée sur plusieurs semaines dès le 17 août 1993 et que, lors de l'intervention chirurgicale du 29 octobre 1993, aucune infection du liquide céphalo-rachidien n'a été repérée, montrant le caractère non résistant du germe ;

Considérant que dans ces conditions, aucun faisceau d'éléments suffisant n'est apporté par les appelants permettant d'établir un commencement de preuve du caractère nosocomial de l'infection en août 1993, sans que puisse s'y opposer la circonstance, dans la dialectique de la charge de la preuve, que la partie intimée ne peut démontrer avec certitude l'absence d'origine hospitalière du germe responsable en cause, en l'absence de production de l'entier dossier médical et des éventuels analyses bactériologiques et antibiogrammes qu'il contiendrait ;

S'agissant de l'infection constatée en juillet 1994 :

Considérant qu'une infection locale est apparue au niveau du cou en juillet 1994, nécessitant le retrait par intervention chirurgicale le 27 juillet 1994 du bout distal cervical de la dérivation ventriculo-péritonéale gauche, matériel prothétique dont il avait été prévu qu'il soit intégralement retiré lors de l'intervention chirurgicale du 29 octobre 1993, ce qui n'a pas été le cas ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction, notamment du rapport d'expertise, que cette infection est apparue localement au niveau de la cicatrice cervicale gauche qui avait été réalisée lors de la mise en place en janvier 1993 de la dérivation ventriculo-péritonéale gauche et que, par suite, l'infection est apparue plus d'un an après la mise en place du matériel prothétique ; qu'aucun élément du dossier ne permet d'affirmer que cette infection locale serait en lien avec la précédente infection du liquide céphalo-rachidien d'août 1993 dont il a été vu qu'elle a été traitée efficacement par antibiothérapie et dont il a été aussi dit que le caractère nosocomial ne pouvait être présumé ; que cette infection constatée en juillet 1994 a elle-même été traitée sans complication par une antibiothérapie post-opératoire, ne révélant notamment aucune résistance du germe aux antibiotiques ;

Considérant que dans ces conditions, aucun faisceau d'éléments suffisant n'est apporté par les appelants permettant d'établir un commencement de preuve du caractère nosocomial de l'infection en juillet 1994, sans que puisse s'y opposer la circonstance, dans la dialectique de la charge de la preuve, que la partie intimée ne peut démontrer avec certitude l'absence d'origine hospitalière du germe responsable en cause, en l'absence de production de l'entier dossier médical et des éventuels analyses bactériologiques et antibiogrammes qu'il contiendrait ;

S'agissant enfin des germes analysés à la clinique Rech après les hospitalisations au centre hospitalier universitaire :

Considérant, en premier lieu, qu'il ne résulte pas de l'instruction que l'hospitalisation à la clinique Rech du 31 janvier 1995 au 3 février 1995, au cours de laquelle aucune intervention chirurgicale n'a été pratiquée, ait pour origine un phénomène infectieux ; que la première intervention chirurgicale aura lieu dans la même clinique le 26 décembre 1995 ; qu'il résulte de l'instruction, notamment du rapport d'expertise, que cette intervention a été pratiquée afin de retirer la partie abandonnée de l'ancienne dérivation abdominale et de vérifier la dérivation ventriculo-atriale, dernière dérivation fonctionnelle installée au centre hospitalier universitaire, au sujet de laquelle l'opérateur avait écrit le 14 décembre 1995 qu'elle semblait parfaitement fonctionner ; que sur le compte-rendu opératoire, l'opérateur de la clinique a remarqué une anormalité du liquide céphalo-rachidien issu de la dérivation ventriculo-atriale qu'il a qualifiée de louche et a demandé une analyse bactériologique qui révèlera la présence, sur le liquide céphalo-rachidien de la valve atriale d'une flore microbienne peu importante avec colonies de staphylocoques simulans, sur le liquide céphalo-rachidien de la valve péritonéale d'une colonie de staphylocoques simulans non multi-résistantes aux antibiotiques, et sur le liquide céphalo-rachidien de la sonde péritonéale d'une flore microbienne peu importante avec colonies de staphylocoques simulans ; que cette intervention chirurgicale a été réalisée, d'une part, 17 mois après la dernière intervention chirurgicale susmentionnée du 27 juillet 1994 réalisée au centre hospitalier universitaire et qui était afférente à une infection locale dont il ne ressort pas des pièces du dossier qu'elle concernait aussi le liquide céphalo-rachidien, d'autre part, 28 mois après l'intervention chirurgicale susmentionnée du 17 août 1993 où l'infection repérée, si elle concernait ledit liquide céphalo-rachidien, avait été traitée sans complication ; que le traitement antibiotique administré sur deux mois à partir de janvier 1996 par le praticien de la clinique se révélera efficace, le chirurgien écrivant au médecin traitant en avril 1996 que l'infection est stabilisée, ce qui sera confirmé par l'analyse bactériologique négative du liquide céphalo-rachidien réalisée lors de l'intervention chirurgicale du 11 juin 1996 ; que dans ces conditions, compte tenu des délais de 17 et 28 mois susmentionnés, du caractère peu important de la flore microbienne analysée et du caractère non multi-résistant du germe staphylocoques simulans découvert et éliminé, aucun faisceau d'indices apporté n'établit l'origine hospitalière présumée des germes découverts à la clinique ;

Considérant, en second lieu, que lors de l'ultime intervention chirurgicale du 22 décembre 1998 décidée afin de retirer toute la dérivation restant en place, le patient n'étant plus shunt dépendant, l'analyse bactériologique a montré sur le cathéter la présence de germes staphylococcus épidermis non multi-résistants, qui seront traités par antibiothérapie sur 10 jours ; que compte tenu du caractère courant de ce germe, de sa découverte plus de quatre années après la dernière intervention chirurgicale au centre hospitalier universitaire et de son caractère non-multirésistant à l'antibiothérapie, aucun faisceau d'indices apporté n'établit là encore l'origine hospitalière présumée des germes découverts à la clinique ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la responsabilité du centre hospitalier universitaire ne peut être retenue en ce qui concerne les conséquences dommageables des infections sus-analysées, sans qu'il soit besoin, ni de diligenter une nouvelle expertise à ce sujet, ni d'ordonner au centre hospitalier universitaire par mesure d'instruction de produire l'entier dossier de Lionel A, incluant les analyses bactériologiques qu'il est supposé contenir ;

En ce qui concerne les fautes médicales :

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction, notamment du rapport d'expertise, qu'en raison d'un dysfonctionnement de la dérivation ventriculo-péritonéale droite mise en place depuis 1982, ayant pour origine selon l'expert un problème matériel et non infectieux, et ayant provoqué par suite une augmentation de l'hypertension intracrânienne, une dérivation externe a été réalisée en urgence par intervention chirurgicale du 9 janvier 1993, avant que ne soit posée par intervention chirurgicale du 15 janvier 1993 une nouvelle dérivation ventriculo-péritonéale, à gauche cette fois ; qu'il ressort du compte-rendu opératoire du 15 janvier 1993 que l'opérateur avait initialement l'intention, lors de cette intervention mettant en place la nouvelle dérivation gauche, de retirer aussi en même temps l'ancienne dérivation ventriculo-péritonéale droite ne fonctionnant plus, mais qu'en raison du positionnement du sujet sur la table opératoire, installé pour être opéré d'abord à gauche, cette ablation de la dérivation droite, qui aurait imposé une modification totale des champs opératoires afin d'inverser le positionnement du sujet, a été reportée ; qu'il ne ressort pas du rapport d'expertise que cette décision prise en cours d'intervention par le chirurgien constitue un manquement aux règles de l'art ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de l'instruction, notamment du rapport d'expertise, que la mise en place de la nouvelle dérivation ventriculo-péritonéale gauche a provoqué une légère complication immédiate liée à la sortie hors du péritoine du bout de la sonde de dérivation, laquelle a été reprise rapidement le 22 janvier 1993 sous anesthésie locale ; que les appelants, qui invoquent la défectuosité du matériel prothétique, n'allèguent pas que l'opérateur du 15 janvier 1993 aurait commis un geste inapproprié lors de la pose de la sonde dans le péritoine, laquelle pose s'est avérée en tout état de cause délicate en raison d'une forte adiposité de la région abdominale du patient ;

Considérant, en troisième lieu, que l'acte de retrait de l'ancienne dérivation ventriculo-péritonéale droite a eu lieu par intervention chirurgicale du 21 avril 1993, après qu'un abcès abdominal eut été repéré à droite ; qu'il résulte de l'instruction, notamment du compte-rendu opératoire de cette intervention chirurgicale et d'un courrier du chirurgien au médecin traitant du 18 mai 1993, que cette ablation n'a pu toutefois être réalisée intégralement en raison d'un cassure du matériel, laissant ainsi persistante une partie du matériel de dérivation sous-cutané au niveau abdominal ; qu'il n'est pas établi par les pièces versées au dossier que soit constitutif d'une faute médicale le fait de n'avoir pas, après la tentative du 15 janvier 1993, pris la décision de réopérer très rapidement pour retirer l'ancienne dérivation ventriculo-péritonéale droite dès lors, comme le souligne l'expert, qu'aucun problème infectieux n'avait été repéré en

janvier 1993 sur ce matériel, lequel, implanté en 1982, était resté sans complication dans le corps du patient, et que, par suite, aucune urgence ne s'imposait à l'opérateur pour l'ablation finalement décidée le 24 avril 1993 ;

Considérant, en revanche et en quatrième lieu, que cette ablation n'a été que partielle lors de l'intervention chirurgicale du 21 avril 1993 où il a été constaté un problème infectieux ; que si le caractère partiel de l'ablation n'est pas imputable à l'opérateur, mais au matériel prothétique ayant une vétusté de 10 ans et donc fragilisé, toutefois, dès lors qu'un problème infectieux a été repéré, la bonne pratique de l'art selon l'expert dans ce cas de figure est de retirer chirurgicalement tout le reste du matériel non retiré ; qu'il résulte de l'instruction que le reste du matériel non retiré sera laissé en place, sans qu'une décision d'ablation ait été prise au centre hospitalier universitaire ; cette décision ne le sera qu'à la clinique Rech ;

Considérant, en cinquième lieu, qu'à la suite d'un nouvel épisode d'hydrocéphalie en août 1993 faisant suspecter la fonctionnalité de la dérivation ventriculo-péritonéale gauche mise en place en janvier 1993, vont se succéder deux interventions chirurgicales des 17 août 1993 et 2 septembre 1993, la première où le bout de cette sonde est extériorisé et coupé afin d'évacuer le liquide céphalo-rachidien dont l'écoulement était bloqué par un bouchon, la seconde réintroduisant dans le corps ledit bout de sonde après réparation, le compte-rendu opératoire mentionnant alors une dissection délicate en raison de l'adiposité du patient et une réintroduction qualifiée de très difficile par l'opérateur qui envisage déjà, le jour même de l'opération, que la dérivation ventriculo-péritonéale soit remplacée par une dérivation ventriculo-atriale ; qu'ainsi, après une première complication déjà constatée en janvier 1993 consécutive à l'introduction dans l'abdomen de la sonde, une seconde complication gênant la fonctionnalité du même bout de cette sonde dans l'abdomen est constatée 7 mois plus tard ; que les appelants, qui se bornent à invoquer la défectuosité du matériel prothétique, n'allèguent pas, d'une part, que cette seconde complication aurait été causée par un geste inapproprié de l'opérateur, lequel au contraire fait état de ses difficultés chirurgicales compte tenu de la corpulence du patient en envisageant un changement de technique de dérivation, d'autre part, que la technique de dérivation ventriculo-atriale aurait été inadaptée ou aurait été mise en place tardivement ;

Considérant, en sixième lieu, que, lors de ces deux interventions chirurgicales des 17 août 1993 et 2 septembre 1993, une infection du liquide céphalo-rachidien a été constatée ; qu'est rapidement prise la décision de réopérer le 14 septembre 1993 pour retirer la dérivation ventriculo-péritonéale gauche devenue inadaptée et la remplacer par une dérivation ventriculo-atriale, ce qui avait envisagé dès le 2 septembre 1993 comme il a été dit ; qu'il est en effet de bonne pratique médicale, comme le souligne l'expert, de retirer intégralement un matériel prothétique infecté ; que le compte-rendu opératoire de l'intervention chirurgicale du 14 septembre 1993, destinée donc à la mise en place de la dérivation ventriculo-atriale et à l'ablation de cette dérivation ventriculo-péritonéale gauche, fait état de difficultés importantes pour retirer cette dernière, de sorte cette intervention chirurgicale sera complétée par une intervention chirurgicale du 29 octobre 1993 ; que si le compte-rendu opératoire du 29 octobre 1993, par sa mention ablation de la sonde au niveau abdominal jusqu'au niveau cervical, laisse à penser que le matériel prothétique gauche a été entièrement retiré, toutefois et comme le soutiennent les appelants, cette ablation n'a été que partielle dès lors, d'une part, qu'un résidu de la sonde oublié le 29 octobre 1993 ne sera finalement retiré que lors de la dernière intervention chirurgicale réalisée au centre hospitalier universitaire le 27 juillet 1994, d'autre part, qu'une intervention chirurgicale à la clinique Rech retirera à nouveau une partie du matériel laissé en place ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le fait d'avoir laissé du matériel prothétique dans le corps du patient, à droite, alors qu'un phénomène infectieux local avait été repéré à gauche, alors qu'une infection du liquide céphalo-rachidien s'était manifestée, est constitutif d'un manquement aux règles de l'art et par suite d'une faute médicale de nature à engager la responsabilité du centre hospitalier universitaire ; que toutefois, selon l'expert, lesdites règles de l'art s'imposent en cas d'infection sur matériel prothétique à titre préventif, pour prévenir un risque de récidive de l'infection, un traitement antibiotique n'étant pas systématiquement efficace si des germes se sont fixés sur ledit matériel ; qu'en l'espèce, les traitements antibiotiques administrés ont été efficaces, tant en ce qui concerne l'abcès abdominal côté droit que l'infection du liquide céphalo-rachidien repéré côté gauche ; qu'il ne ressort d'aucune pièce versée au dossier, ni que l'infection suivante de juillet 1994, qui était une infection locale au niveau cervical côté gauche, soit une réapparition des germes antérieurement traités, ni que l'infection constatée du liquide céphalo-rachidien en décembre 1995 soit une récidive de l'infection du même liquide ayant eu lieu 28 mois plus tôt, compte tenu de cette durée ; qu'ainsi, le non-respect des règles de l'art n'a eu, en l'espèce, aucune conséquence dommageable particulière ;

Sur la partie du litige relative au décès de Lionel A lors de son transport au matin du 11 février 1998 :

Considérant qu'il résulte de l'instruction, notamment du rapport d'expertise, qu'à la suite d'un état fortement fébrile à plus de 40° constaté dans la soirée du 10 février 1998, accompagné d'une perte de connaissance, la famille de Lionel A a appelé une première fois, entre 22h et 23h, le médecin régulateur du SAMU, le Dr Benatia, lequel a déclaré à l'expert avoir conseillé à la famille une hospitalisation immédiate, compte-tenu de la sévérité du tableau et des antécédents du patient, mais qu'il a rencontré des difficultés de régulation à ce moment précis de la nuit pour dépêcher sur place un médecin de garde ; qu'à la suite d'un second appel, entre 23h et 24h, le médecin régulateur a pu cette fois dépêcher sur place le médecin généraliste de garde, le Dr Lautier ; que ce dernier est intervenu immédiatement, vers 23h15 selon Mme A, entre 23h et 24h selon l'intéressé lui-même, a prescrit un traitement symptomatique contre la fièvre et a déclaré à l'expert avoir également proposé à la famille une hospitalisation immédiate, mais s'être vu opposer une refus ; que lors d'un troisième appel auprès du SAMU, vers 6h45, juste après une crise convulsive, le Dr Benatia a déclaré à l'expert avoir indiqué à la famille d'appeler au plus vite le médecin de famille en réitérant la nécessité d'une hospitalisation ; que le Dr Cuniah est venu sur place vers 7h30 et a rappelé le Dr Benatia pour que soit finalement décidé un transfert de Lionel A à la clinique Rech, par véhicule de secours aux asphyxiés et blessés (VSAB) des sapeurs-pompiers avec relais médicalisé du service mobile d'urgence (SMUR) ; qu'en cours de transport, les sapeurs-pompiers ont appelé le SAMU à 8h17 ; que, malgré la jonction SMUR qui a eu lieu à 8h32, Lionel A ne pouvait être ranimé par le médecin du centre hospitalier universitaire et décédait ;

Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des opérations d'expertise que tant le médecin régulateur, le Dr Benatia, que le médecin généraliste de garde, le Dr Lautier, ont confirmé par voie téléphonique à l'expert avoir proposé une hospitalisation immédiate dans la nuit et que la famille l'a toutefois refusée au motif qu'il était préférable d'attendre l'ouverture au matin de la clinique privée Rech où était suivi Lionel A ; que si les appelants soutiennent que ces propos tenus par les Dr Benatia et Lautier devant l'expert n'auraient été ni vérifiés, en l'absence notamment de communication des bandes sonores enregistrées du SAMU, ni débattus de façon contradictoire, toutefois, et ainsi qu'il a été déjà dit en ce qui concerne la régularité des opérations d'expertise, les appelants reconnaissent dans leurs écritures que leur ancien avocat avait oublié de communiquer un dire de réplique à ce sujet ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'il ressort des opérations d'expertise que le médecin généraliste de garde, qui ne connaissait pas le patient, ne pouvait que proposer une hospitalisation immédiate, compte tenu du tableau grave, inhabituel, complexe et potentiellement mortel devant lequel il s'est trouvé ; qu'en effet, outre que le carcinome au cerveau de Lionel A, retiré partiellement en 1982 mais qui a récidivé, a provoqué depuis l'enfance des troubles endocriniens structurels et était susceptible de provoquer des troubles neurologiques majeurs, le patient avait eu au surplus, dans un passé récent, des désordres électrolytiques graves (telle une hypernatrémie), plusieurs épisodes infectieux de son liquide céphalo-rachidien et sortait enfin d'un épisode d'infection pulmonaire sévère ; qu'ainsi, selon l'expert, avec de tels antécédents et face à une fièvre à plus de 40° accompagnée d'une perte de connaissance, avant même la crise convulsive du matin, l'hospitalisation immédiate pendant la nuit ne pouvait qu'être proposée par le médecin généraliste de garde et le médecin régulateur, lequel a ainsi satisfait à son obligation d'information ; que la gravité du tableau est en outre confirmée a posteriori par l'indication de l'expert selon laquelle il est impossible de connaître la cause exacte du décès, même si une autopsie avait été réalisée, tant l'état général de la victime était dégradé et les causes potentielles de la mort multiples ; que si les appelants soutiennent qu'il ne leur a pas été proposé une hospitalisation au centre hospitalier universitaire de Nîmes au lieu du centre hospitalier universitaire de Montpellier, reconnaissant ainsi implicitement qu'une hospitalisation à Montpellier avait été évoquée, toutefois, leur refus d'hospitalisation immédiate pendant la nuit doit être regardé, compte-tenu des pièces versées au dossier, comme ayant pour origine leur souhait d'hospitaliser au matin la victime à la clinique Rech où il était suivi ;

Considérant, en troisième lieu, que si, malgré l'intervention sur place du médecin généraliste de garde et le traitement symptomatique administré, le patient n'a pas vu sa fièvre baisser et a connu une crise convulsive vers 6h45 du matin, toujours au domicile de ses parents, ce n'est finalement qu'après cette crise et lors de la venue sur place du Dr Cunia vers 7h30, soit plusieurs heures après que le médecin régulateur du SAMU et ledit médecin de garde eurent proposé une hospitalisation immédiate, que la famille de Lionel A a finalement accepté le transport vers la clinique Rech ; que l'état du patient ayant toutefois empiré, sa réanimation n'a pu être réalisée en cours de transfert ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'existence d'une faute dans l'organisation du service du SAMU du centre hospitalier de Montpellier, qui serait à l'origine du décès de Lionel A n'est pas établie, dès lors que le refus d'une hospitalisation immédiate pendant la nuit est à l'origine directe de l'aggravation irréversible de l'état de santé du patient ; que la circonstance qu'au matin, le transport n'ait pas été décidé avec une médicalisation dès le départ du domicile, au lieu d'un transport avec relais-jonction du SMUR, est à cet égard sans influence ; qu'il s'ensuit qu'il y a lieu pour la Cour de confirmer la réponse des premiers juges sur l'absence de faute dans l'organisation du service du SAMU du centre hospitalier universitaire intimé, sans qu'il soit besoin de demander au centre hospitalier universitaire par mesure d'instruction la production des bandes sonores des urgences dans la nuit du 10 février au 11 février, sans qu'il soit besoin non plus de diligenter une nouvelle expertise aux fins d'apporter des précisions complémentaires sur les horaires d'ouverture de la clinique Rech et de son éventuel service d'urgence de nuit, sur l'absence d'envoi d'un premier médecin dès le premier appel, sur les raisons de l'absence d'un médecin lors du transport ou sur l'ouverture non expliquée du corps de la victime au niveau de l'abdomen constatée lors du décès ;

Considérant qu'il résulte de tout de ce qui précède que les appelants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Montpellier a rejeté leur requête, sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non-recevoir opposées par la partie intimée tirées de la tardiveté de la requête introductive d'appel ou du caractère nouveau en appel des conclusions des frères et soeurs de Lionel A ;

Sur les dépens et les frais exposés non compris les dépens :

Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ;

Considérant que les CONSORTS A, partie perdante, sont tenus aux dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge des appelants les frais non compris dans les dépens exposés par la partie intimée ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête n° 09MA00668 des CONSORTS A est rejetée.

Article 2 : Les conclusions du centre hospitalier universitaire de Montpellier tendant au remboursement des frais non compris les dépens qu'il a exposés sont rejetés.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié aux CONSORTS A, au centre hospitalier universitaire de Montpellier, à la caisse primaire d'assurance maladie de Montpellier et au ministre du travail, de l'emploi et de la santé.

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N° 09MA00668 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 09MA00668
Date de la décision : 17/05/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. GONZALES
Rapporteur ?: M. Jean-Baptiste BROSSIER
Rapporteur public ?: Mme FEDI
Avocat(s) : SZWARC

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2011-05-17;09ma00668 ?
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