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05/05/2011 | FRANCE | N°09MA02922

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 1ère chambre - formation à 3, 05 mai 2011, 09MA02922


Vu la requête, enregistrée le 31 juillet 2009 et confirmée par télécopie le 4 août 2099, présentée pour Mme Caroline A, se domiciliant ..., par Me Boitel, avocat ; Mme A demande à la cour :

1°) d'annuler l'ordonnance du 30 avril 2009 du président du tribunal administratif de Nice qui a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté en date du 3 octobre 2006 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a, d'une part, déclaré d'utilité publique la réalisation d'une aire d'accueil des gens du voyage et cessibles les parcelles concernées et d'autre part, a mis en compatibilité

le plan local d'urbanisme de la commune ;

2°) d'annuler cet arrêté préfec...

Vu la requête, enregistrée le 31 juillet 2009 et confirmée par télécopie le 4 août 2099, présentée pour Mme Caroline A, se domiciliant ..., par Me Boitel, avocat ; Mme A demande à la cour :

1°) d'annuler l'ordonnance du 30 avril 2009 du président du tribunal administratif de Nice qui a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté en date du 3 octobre 2006 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a, d'une part, déclaré d'utilité publique la réalisation d'une aire d'accueil des gens du voyage et cessibles les parcelles concernées et d'autre part, a mis en compatibilité le plan local d'urbanisme de la commune ;

2°) d'annuler cet arrêté préfectoral ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

..............................

Vu le jugement attaqué ;

Vu, enregistré le 26 novembre 2009 le mémoire en défense présenté pour la commune de Cagnes-sur-Mer, représentée par son maire en exercice, par Me Asso, avocat ; la commune conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 2500 euros soit mise à la charge de Mme A au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

............................

Vu, enregistré le 17 février 2010 le mémoire présenté par le ministre d'Etat, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer qui conclut au rejet de la requête ;

.............................

Vu, enregistré le 25 mars 2010 le mémoire présenté pour le ministre de l'intérieur, de l'outre mer et des collectivités territoriales qui conclut au rejet de la requête ;

.............................

Vu, enregistré le 4 avril 2011 le mémoire produite pour Mme A par Me Boitel, qui conclut aux mêmes fins que sa requête et porte sa demande au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative à la somme de 8329, 79 euros ;

............................

Vu, enregistré 7 avril 2011 le mémoire en défense présenté pour la commune de Cagnes-sur-Mer, représentée par son maire en exercice, par Me Asso, avocat ; la commune maintient ses conclusions à fin de rejet, par le rappel de ses moyens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la directive n° 85/337/CEE du 27 juin 1985 modifiée concernant l'évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l'environnement ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ;

Vu le code de l'environnement ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu le décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 relatif au rapporteur public des juridictions administratives et au déroulement de l'audience devant ces juridictions, et notamment son article 2 ;

Vu l'arrêté du 27 janvier 2009 pris par le vice-président du Conseil d'Etat autorisant la cour administrative d'appel de Marseille à appliquer, à titre expérimental, les dispositions de l'article 2 du décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 14 avril 2011:

- le rapport de M. d'Hervé, président assesseur ;

- les conclusions de M. Bachoffer, rapporteur public ;

- et les observations de Me Gillet pour la commune de Cagnes sur Mer ;

Considérant que Mme A fait appel de l'ordonnance par laquelle le président du tribunal administratif de Nice a rejeté, pour défaut d'intérêt à agir, sa demande d'annulation de l'arrêté en date du 3 octobre 2006 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a sur le fondement de l'article L.123-16 du code de l'urbanisme, d'une part, déclaré d'utilité publique la réalisation d'une aire d'accueil des gens du voyage et cessibles les parcelles nécessaires au projet et, d'autre part, mis en compatibilité le plan local d'urbanisme de la commune de Cagnes-sur-Mer ;

Sur la régularité de l'ordonnance attaquée :

Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : Les présidents de tribunal administratif et de cour administrative d'appel, le vice-président du tribunal administratif de Paris et les présidents de formation de jugement des tribunaux et des cours peuvent, par ordonnance : (...) 4° Rejeter les requêtes manifestement irrecevables, lorsque la juridiction n'est pas tenue d'inviter leur auteur à les régulariser ou qu'elles n'ont pas été régularisées à l'expiration du délai imparti par une demande en ce sens ;

Considérant que devant le tribunal, Mme A avait indiqué, dans sa demande enregistrée le 15 décembre 2006, être domiciliée chemin de la Minoterie à Cagnes-sur-Mer ; que tant le préfet des Alpes Maritimes que le maire de la commune de Cagnes-sur-Mer ont opposé à sa demande des fins de non recevoir, respectivement le 12 février 2007 et le 10 octobre 2007, en soutenant que l'intérêt dont elle se prévalait ne lui donnait pas qualité à agir, dès lors qu'elle déclarait résider dans un quartier éloigné de celui où sont situés les terrains devant être aménagés en zone d'accueil pour les gens du voyage, projet qui fait l'objet de la déclaration d'utilité publique en litige et qui nécessite la mise en conformité du plan local d'urbanisme ; que si Mme A n'avait pas répliqué à cette fin de non recevoir à la date de l'ordonnance attaquée, cette circonstance n'autorisait toutefois pas le président du tribunal administratif de Nice, même s'il ne soulevait pas d'office cette irrecevabilité, à rejeter par une ordonnance prise sur le fondement des dispositions précitées cette demande qui pouvait faire l'objet d'une régularisation à tout moment de l'instance ;

Considérant qu'il y a lieu pour la cour d'annuler l'ordonnance attaquée et de statuer par la voie de l'évocation sur les conclusions de Mme B;

Sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la recevabilité de la demande de Mme B;

Sur la légalité de la procédure d'enquête publique :

Considérant qu'aux termes de l'article L.11-4 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique et de l'article L.123-16 du code de l'urbanisme dans sa rédaction alors applicable : La déclaration d'utilité publique ou, si une déclaration d'utilité publique n'est pas requise, la déclaration de projet d'une opération qui n'est pas compatible avec les dispositions d'un plan local d'urbanisme ne peut intervenir que si : a) L'enquête publique concernant cette opération a porté à la fois sur l'utilité publique ou l'intérêt général de l'opération et sur la mise en compatibilité du plan qui en est la conséquence. (...) ;

Considérant, en premier lieu, que l'ancien terrain de camping faisant l'objet de la procédure combinée d'expropriation et de mise en conformité du plan d'occupation des sols est situé dans un quartier de la commune à dominante résidentielle et éloigné des sites balnéaires de son territoire ; que la tenue de l'enquête, entre le 27 février et le 28 mars 2006, en dehors d'une période de fréquentation estivale par les touristes mais au cours de laquelle plus de 300 observations et remarques ont été recueillies, n'a pas constitué une circonstance de nature à nuire à la complète information du public concerné par l'opération ;

Considérant, en deuxième lieu, que les pièces produites au dossier par la commune établissent que, contrairement à ce qu'affirme seulement la requérante, une information suffisante et complète, respectant les obligations réglementaires de publication, et adaptée à la localisation du projet a été donnée à l'enquête ; que la circonstance qu'il n'était prévu dans l'arrêté portant ouverture de l'enquête conjointe que trois journées de réception du public par le commissaire enquêteur n'est pas de nature à démontrer une irrégularité substantielle de la procédure, alors que ce dernier a pu recevoir toute personne intéressée et que les registres d'observations, qui ont été disponibles pendant toute la durée de l'enquête, ne font état d'aucune doléance sur ce point ;

Considérant, en troisième lieu, que le dossier soumis à enquête comportait, dans le respect de l'article R.11-3 du code de l'expropriation, une notice explicative présentant le projet en détaillant précisément son objet consistant à créer, dans le respect de la loi du 31 mai 1990 et des prévisions du schéma départemental élaboré en application de la loi du 5 juillet 2000, une aire de stationnement pour les gens du voyage de 50 emplacements ; qu'il était joint au même dossier un plan de division foncière précis faisant apparaître la configuration générale de l'aménagement de l'aire d'accueil à créer et les plans détaillés des bâtiments à réhabiliter et à construire ; que l'étude d'impact fait un descriptif complet de l'environnement du site, où était déjà présent un terrain de camping en partie abandonné et des conditions d'insertion du projet dans le site, en insistant sur le respect du cadre naturel et des mesures prises pour assurer la salubrité en améliorant les conditions d'assainissement et les moyens de prévenir le risque d'incendie ; que ce dossier régulièrement composé au regard des exigences du code de l'expropriation pour utilité publique permettait au public d'avoir une idée précise et complète de l'ensemble des aspects de l'opération ;

Considérant, en dernier lieu, qu'au terme d'une analyse du projet effectuée après examen et synthèse des observations déposées, et qui est notamment l'occasion pour le commissaire enquêteur d'aborder les inconvénients signalés dans certaines d'entre elles et de les confronter dans son rapport aux autres aspects du projet, ce dernier a émis ensuite un avis favorable argumenté sur le projet en faisant part de son sentiment personnel pour motiver sa position ;

Considérant qu'il suit de ce qui précède que l'arrêté en litige est intervenu à l'issue d'une procédure d'enquête publique régulière ;

Sur la motivation de l'arrêté du 3 octobre 2006 relatif à l'utilité publique :

Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L.11-1-1 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique, qui concerne les seuls projets mentionnés à l'article L.11-1-II du même code, 3. L'acte déclarant l'utilité publique est accompagné d'un document qui expose les motifs et considérations justifiant le caractère d'utilité publique de l'opération. ; que l'opération de création d'une aire d'accueil de l'importance de celle en litige n'entre dans aucune des catégories de celles, limitativement énumérées par la liste annexée à l'article R.123-1 du code de l'environnement auquel renvoie, pour l'application de l'article précité du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique, L.11-1-II de ce code ; que d'autre part, le 1 de l'article 9 de la directive n° 85/337/CE, du Conseil du 27 juin 1985 dont se prévaut également la requérante et en vertu duquel les autorités compétentes... informent le public selon les modalités appropriées et mettent à sa disposition les informations suivantes : (...) - les motifs et considérations principaux qui ont fondé la décision , n'impose pas une motivation en la forme de la décision se prononçant sur l'utilité publique d'une opération et qui serait une condition de légalité de cette dernière ; qu'ainsi Mme A n'est pas fondée à soutenir que l'arrêté est illégal pour ne pas être formellement motivé ;

Considérant que la requérante ne peut en outre utilement soutenir que la déclaration de projet , exigée par l'article L.126-1 du code de l'environnement alors en vigueur, ne serait pas intervenue dès lors que cette intervention du responsable du projet n'est exigée, en tout état de cause, que pour les projets entrant dans la liste annexée à l'article R.123-1 du code de l'environnement ;

Sur l'utilité publique du projet :

Considérant qu'une opération ne peut être déclarée légalement d'utilité publique que si les atteintes à la propriété privée, le coût financier et éventuellement les inconvénients d'ordre social ou l'atteinte à d'autres intérêts publics qu'elle comporte ne sont pas excessifs eu égard à l'intérêt qu'elle présente ;

Considérant qu'il ressort de pièces du dossier que le projet en litige consiste à réaménager un ancien terrain de camping dont l'exploitation et le gardiennage ne sont plus assurés, et qui est en partie occupé sans titre par des résidents permanents ou occasionnels, dans des conditions de salubrité insuffisantes, pour permettre à la commune de créer dans le respect du schéma départemental une aire d'accueil gardée de 50 places pour les gens du voyage ; qu'une telle opération, qui est l'occasion de mettre fin à une occupation incontrôlée des lieux, en assurant un accueil décent temporaire aux utilisateurs et conforme aux obligations légales de la commune, s'accompagne d'une rénovation du réseau d'assainissement, permettant à terme d'être étendu aux habitations individuelles du secteur ; que l'aménagement du secteur doit également, ainsi qu'il ressort des notices de présentation et d'impact, permettre d'assurer la protection de la zone contre le risque d'incendie auquel elle est exposée en réalisant une zone tampon déboisée et spécialement équipée ; qu'une telle opération présente un caractère d'utilité publique, sans que la requérante puisse faire valoir pour le contester, ni les conditions de desserte du terrain, qui ne constituent pas un obstacle à cette affectation qui n'est pas susceptible de bouleverser les conditions antérieures de circulation sur le chemin des Salles, qui permet déjà l'accès à plusieurs terrains de camping, ni les conditions actuelles dans lesquelles l'assainissement du terrain est réalisé ;

Sur la légalité du changement de zonage :

Considérant que la réalisation du projet nécessite de modifier le zonage du site du camping les Caraïbes , classé en zone naturelle NC et NDTc, pour l'inclure dans une nouvelle zone UN dédiée à l'aire d'accueil permettant exclusivement la réalisation des travaux nécessaires à son aménagement ; qu'ainsi qu'il ressort des pièces du dossier et notamment des constatations du commissaire enquêteur à l'issue de l'enquête relative à cet aspect de la procédure combinée, ce changement de zonage n'est pas susceptible de compromettre, eu égard à l'occupation actuelle du secteur, la vocation naturelle et agricole induite par le classement antérieur ; que dans ces conditions, Mme A n'est pas fondée à soutenir que la modification du zonage du plan local d'urbanisme est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A n'est pas fondée à soutenir que l'arrêté du 3 octobre 2006 est illégal ; que ses conclusions d'annulation doivent être en conséquence rejetées ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative ; qu'en revanche, il y a lieu, sur le fondement de ces dernières dispositions, de mettre à la charge de Mme A le paiement à la commune de Cagnes-sur-Mer de la somme de 1 500 euros au titre des frais qu'elle a exposés et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : L'ordonnance n° 0606588 du 30 avril 2009 du président du tribunal administratif de Nice est annulée.

Article 2 : La demande présentée par Mme LAFFONT devant le tribunal administratif et le surplus de sa requête sont rejetés.

Article 3 : Mme A versera la somme de 1 500 euros à la commune de Cagnes-sur-Mer au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A, à la commune de Cagnes-sur-Mer, au ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable, des transports et du logement et au ministre de l'intérieur, de l'outre mer, des collectivités territoriales et de l'immigration.

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N° 09MA029222


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 09MA02922
Date de la décision : 05/05/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-01-01-01-02-03 Urbanisme et aménagement du territoire. Plans d'aménagement et d'urbanisme. Plans d'occupation des sols et plans locaux d'urbanisme. Légalité des plans. Modification et révision des plans. Modification du plan par une déclaration d'utilité publique.


Composition du Tribunal
Président : M. LAMBERT
Rapporteur ?: M. Jean-Louis D'HERVE
Rapporteur public ?: M. BACHOFFER
Avocat(s) : CABINET CHRISTIAN BOITEL

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2011-05-05;09ma02922 ?
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