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14/04/2011 | FRANCE | N°08MA04011

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 6ème chambre - formation à 3, 14 avril 2011, 08MA04011


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 1er septembre 2008, sous le n° 08MA04011, présentée pour le BUREAU D'ETUDES TECHNIQUES MOUTON, dont le siège est au 97 rue Grieg à Nîmes (30900), représentée par son gérant en exercice, par la SCP Delmas Rigaud Levy Balzarini, avocats ;

Le BUREAU D'ETUDES TECHNIQUES MOUTON demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0704531 du 8 juillet 2008 par lequel le Tribunal administratif de Montpellier d'une part, l'a condamné solidairement avec la société Sanit chauffage à payer

à l'hôpital général d'Uzès la somme de 80 232,45 euros TTC, déduction devant ...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 1er septembre 2008, sous le n° 08MA04011, présentée pour le BUREAU D'ETUDES TECHNIQUES MOUTON, dont le siège est au 97 rue Grieg à Nîmes (30900), représentée par son gérant en exercice, par la SCP Delmas Rigaud Levy Balzarini, avocats ;

Le BUREAU D'ETUDES TECHNIQUES MOUTON demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0704531 du 8 juillet 2008 par lequel le Tribunal administratif de Montpellier d'une part, l'a condamné solidairement avec la société Sanit chauffage à payer à l'hôpital général d'Uzès la somme de 80 232,45 euros TTC, déduction devant être faite de la somme ayant pu être versée à titre de provision, assortie des intérêts légaux à compter du 1er août 2005 et de leur capitalisation à compter du 2 août 2006, ainsi qu'à chaque échéance annuelle à compter de cette date et d'autre part, l'a condamné à garantir la société Sanit chauffage des condamnations prononcées à son encontre à hauteur de 75 % ;

2°) subsidiairement, de dire et juger qu'il ne pourra être condamné à garantir la société Sanit Chauffage qu'à hauteur de 50 % ;

3°) de mettre à la charge du centre hospitalier d'Uzès et subsidiairement de la société Sanit chauffage une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code des marchés publics ;

Vu le décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 relatif au rapporteur public des juridictions administratives et au déroulement de l'audience devant ces juridictions ;

Vu l'arrêté du vice-président du Conseil d'Etat en date du 27 janvier 2009 fixant la liste des tribunaux administratifs et cours administratives d'appel autorisés à appliquer, à titre expérimental, les dispositions de l'article 2 du décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 21 mars 2011 :

- le rapport de Mme Carotenuto, rapporteur,

- et les conclusions de M. Marcovici, rapporteur public ;

Considérant que par un marché conclu le 18 mai 1992, l'hôpital général d'Uzès a confié à la société Sanit chauffage, sous la maîtrise d'oeuvre du BUREAU D'ETUDES TECHNIQUES MOUTON, la réalisation du lot n° 16 chauffage-ventilation-rafraîchissement dans le cadre de la construction d'une maison de retraite de 60 lits ; que des désordres ayant affecté la chaufferie de cet établissement hospitalier ont été constatés pour la première fois au mois d'octobre 1994 ; que lesdits désordres ayant donné lieu à réparation, notamment par l'installation d'une chaudière neuve, la réception des travaux correspondants a été prononcée le 1er août 1995 ; que, toutefois, de nouveaux désordres sont apparus aux mois de janvier et février 1996, puis encore aux mois d'octobre et novembre 1997 ; qu'à la suite de l'apparition de ces désordres, l'hôpital général d'Uzès a recherché la responsabilité des constructeurs devant le Tribunal administratif de Montpellier ; que par un jugement du 8 juillet 2008, le Tribunal administratif a, d'une part, condamné solidairement le BUREAU D'ETUDES TECHNIQUES MOUTON et la société Sanit chauffage à payer à l'hôpital général d'Uzès la somme de 80 232,45 euros TTC, déduction devant être faite de la somme ayant pu être versée à titre de provision, assortie des intérêts légaux à compter du 1er août 2005 et de leur capitalisation à compter du 2 août 2006, ainsi qu'à chaque échéance annuelle à compter de cette date et d'autre part, condamné le BUREAU D'ETUDES TECHNIQUES MOUTON à garantir la société Sanit chauffage des condamnations prononcées à son encontre à hauteur de 75 % ; que le BUREAU D'ETUDES TECHNIQUES MOUTON relève appel de ce jugement ; que la société Sanit chauffage demande à être mise hors de cause ;

Sur l'exception de chose jugée :

Considérant que le BUREAU D'ETUDES TECHNIQUES MOUTON oppose à la demande de l'hôpital général d'Uzès présentée devant le Tribunal administratif l'exception de chose jugée dès lors que les premiers juges ont rejeté une précédente action introduite devant lui par l'hôpital général d'Uzès mettant en cause les mêmes constructeurs et portant sur les mêmes désordres ; que par un jugement n° 9904415 du 18 février 2005, le Tribunal administratif de Montpellier a rejeté la demande de l'hôpital général d'Uzès comme irrecevable, faute pour lui d'avoir précisé le fondement juridique de sa demande ; que par suite, la nouvelle demande présentée devant le Tribunal administratif tendant à obtenir la condamnation des constructeurs sur le fondement de la responsabilité décennale ne présente pas une identité de cause avec la demande initiale ;

Sur la réception :

Considérant que l'hôpital général d'Uzès a produit devant les premiers juges le procès-verbal de réception définitive des travaux intervenu le 1er août 1995 ; que par suite, contrairement à ce que soutient l'appelant, la preuve de l'intervention de la réception définitive a été rapportée et l'action en garantie décennale est recevable ;

Sur la régularité du marché :

Considérant que le BUREAU D'ETUDES TECHNIQUES MOUTON soutient que le marché conclu par l'hôpital est irrégulier ;

Considérant d'une part, qu'aux termes de l'article L. 714-12 du code de la santé publique alors applicable : Le directeur (...) est compétent pour régler les affaires de l'établissement autres que celles qui sont énumérées à l'article L. 714-4.(...) ; que la passation des marchés pour le compte de l'établissement ne figure pas au nombre des affaires énumérées à l'article L. 714-4 du code de la santé publique qui sont de la seule compétence du conseil d'administration de l'établissement ; qu'ainsi, le directeur de l'hôpital général d'Uzès qui a signé le marché objet du litige était bien compétent pour le faire ;

Considérant d'autre part, qu'il résulte de l'instruction, et notamment des pièces produites en première instance, que le marché dont s'agit, qui prévoyait une date d'effet au 20 mai 1992, a bien été transmis le 19 mai 1992 au directeur départemental des affaires sanitaires et sociales, autorité de tutelle des établissements hospitaliers, au titre du contrôle de légalité ;

Sur l'exception de prescription opposée :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que les désordres ayant affecté l'installation de chauffage central de l'hôpital général d'Uzès ont été constatés pour la première fois au mois d'octobre 1994 ; que lesdits désordres ayant donné lieu à réparation, notamment par l'installation d'une chaudière neuve, la réception des travaux correspondants a été prononcée le 1er août 1995 ; que, toutefois, de nouveaux désordres sont apparus aux mois de janvier et février 1996, puis encore aux mois d'octobre et novembre 1997, nécessitant la reprise totale des travaux d'installation ; que, par une requête enregistrée au greffe du Tribunal administratif le 20 août 1998, l'hôpital général d'Uzès a demandé que soit désigné un expert afin de déterminer, notamment, l'origine et les causes des désordres constatés ; qu'une telle requête, enregistrée avant la date d'expiration du délai de garantie décennale, a eu pour effet d'interrompre ce délai pour en faire courir un nouveau ; que l'action en garantie décennale de l'hôpital général d'Uzès, enregistrée au greffe du Tribunal administratif le 1er août 2005, n'était donc pas prescrite ;

Sur la responsabilité :

Considérant que les nombreux désordres ayant affecté l'installation de chauffage central de l'hôpital général d'Uzès ont eu pour effet de la rendre hors d'usage à plusieurs reprises ; que ces désordres sont de nature à engager la responsabilité des constructeurs ayant participé à l'exécution des travaux d'installation, sur le fondement des principes dont s'inspirent les articles 1792 et suivants du code civil ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction, notamment du rapport déposé par l'expert désigné par le tribunal par une ordonnance du 20 août 1998, que l'origine des désordres constatés, se manifestant par le bris des corps de chauffe et des fuites d'eau répétées, est un dépôt de magnétite sur la partie hydraulique des chaudières, entraînant des contraintes thermiques différentes sur les corps de chauffe, avec dilatations différentes et rupture ; que le dépôt de boues et oxyde de fer à la partie intérieure de l'installation résulte d'un défaut de conception et de réalisation des travaux ; que le défaut de conception tient à l'absence de vérification de l'état des tuyauteries préexistantes qui auraient dû faire l'objet d'un prétraitement consistant en un désembouage chimique ou dans la mise en place de pots à boues à la partie intérieure des installations existantes ; que les erreurs de réalisation tiennent à la mise en place de dispositifs inadaptés aux caractéristiques de l'installation ; qu'il résulte également du rapport de l'expert qu'a été mise en place une bouteille casse-pression horizontale, qui n'a aucun rapport avec la conception et le schéma de principe , que les pompes de recyclage qui fonctionnent à l'envers n'assurent pas le débit minimum d'irrigation des chaudières préconisé par le constructeur et que la mise en place du super cyclone SC-5 n'assure pas sa fonction, compte tenu de sa mise en place en dérivation sur la canalisation principale et n'étant pas traversé par la totalité du fluide ; que ces désordres sont à la fois imputables au BUREAU D'ETUDES TECHNIQUES MOUTON, chargé de la maîtrise d'oeuvre des travaux et à la société Sanit Chauffage, chargée de l'exécution des travaux d'installation ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le BUREAU D'ETUDES TECHNIQUES MOUTON et la société Sanit chauffage ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de Montpellier les a condamnés solidairement à verser à l'hôpital général d'Uzès la somme non contestée de 80 232,45 euros TTC, assortie des intérêts légaux à compter du 1er août 2005 et de leur capitalisation à compter du 2 août 2006, ainsi qu'à chaque échéance annuelle à compter de cette date ;

Sur les conclusions d'appel en garantie :

Considérant que le Ttribunal administratif a condamné le BUREAU D'ETUDES TECHNIQUES MOUTON à garantir la société Sanit Chauffage à hauteur de 75 % ; qu'il ne résulte par de l'instruction que les manquements de conception commis par l'appelant sont principalement à l'origine des désordres examinés dans le cadre de la présente instance ; que, dans ces conditions, il y a lieu de condamner le BUREAU D'ETUDES TECHNIQUES MOUTON à garantir la société Sanit Chauffage seulement à hauteur de 50 % des condamnations prononcées à son encontre ; qu'il y a lieu de réformer le jugement attaqué dans cette mesure ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions du BUREAU D'ETUDES TECHNIQUES MOUTON et de la société Sanit chauffage présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le BUREAU D'ETUDES TECHNIQUES MOUTON garantira la société Sanit chauffage des condamnations prononcées à son encontre à hauteur de 50 %.

Article 2 : L'article 3 du jugement attaqué est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 4 : Les conclusions d'appel incident présentées par la société Sanit chauffage sont rejetées.

Article 5 : Les conclusions du BUREAU D'ETUDES TECHNIQUES MOUTON et de la société Sanit chauffage tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié au BUREAU D'ETUDES TECHNIQUES MOUTON, à l'hôpital général d'Uzès, à la société Sanit chauffage et au ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement.

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N° 08MA04011

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 08MA04011
Date de la décision : 14/04/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-06-01-04 Marchés et contrats administratifs. Rapports entre l'architecte, l'entrepreneur et le maître de l'ouvrage. Responsabilité des constructeurs à l'égard du maître de l'ouvrage. Responsabilité décennale.


Composition du Tribunal
Président : M. GUERRIVE
Rapporteur ?: Mme Sylvie CAROTENUTO
Rapporteur public ?: M. MARCOVICI
Avocat(s) : SCP DELMAS RIGAUD LEVY BALZARINI SAGNES SERRE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2011-04-14;08ma04011 ?
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