Vu la requête, enregistrée le 24 novembre 2008, présentée pour la SARL EUROPA, dont le siège est sis à Travers de Fermineau à Carsan (30130), par Me Travert ;
La SARL EUROPA demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0604918 du 16 septembre 2008 par lequel le Tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2001, 2002 et 2003 et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période correspondant aux mêmes années, ainsi que des pénalités y afférentes ;
2°) de prononcer la décharge demandée à concurrence de la somme de 128 811 euros;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu l'arrêté du vice-président du Conseil d'État du 27 janvier 2009 fixant la liste des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel autorisées à appliquer, à titre expérimental, les dispositions de l'article 2 du décret n°2009-14 du 7 janvier 2009 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 mars 2011 :
- le rapport de M. Maury, rapporteur ;
- les conclusions de M. Dubois, rapporteur public ;
- et les observations de Me Travert ;
Considérant que la SARL EUROPA qui exerce une activité d'ingénierie a fait l'objet d'une vérification de comptabilité au titre de la période allant du 1er avril 2000 au 31 mars 2002 prolongée au 31 décembre 2003 en matière de taxe sur la valeur ajoutée ; qu'elle a fait l'objet de redressements tant en matière d'impôt sur les sociétés que de taxe sur la valeur ajoutée ; qu'elle relève appel du jugement du 16 septembre 2008 par lequel le Tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés et des contributions additionnelles sur cet impôt auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2001 et 2002 et des compléments de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été soumise au titre de la période allant du 1er avril 2000 au 31 décembre 2003, ainsi que des pénalités y afférentes ;
Sur la régularité du jugement :
Considérant que la SARL EUROPA fait valoir que le tribunal n'aurait pas fondé légalement son jugement et n'aurait pas répondu aux moyens soulevés dans son mémoire en défense enregistré le 9 mai 2007 ; que, toutefois, ce mémoire reprenait les moyens déjà développés dans les écritures précédentes de la société en les précisant ; que le tribunal a répondu à l'ensemble des moyens soulevés et suffisamment fondé en droit son jugement ; qu'ainsi le jugement querellé n'est pas entaché d'insuffisance de motivation ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
Considérant qu'aux termes de l'article L 59 du livre des procédures fiscales : Lorsque le désaccord persiste sur les redressements notifiés, l'administration, si le contribuable le demande, soumet le litige à l'avis de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires (...) ; qu'aux termes de l'article L 59 A du même livre : La commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires intervient : 1° Lorsque le désaccord porte (...) sur le montant du bénéfice industriel et commercial (...) déterminé selon un mode réel d'imposition (...) ; qu'aux termes de l'article R 59-1 du même livre : Le contribuable dispose d'un délai de trente jours à compter de la réception de la réponse de l'administration à ses observations pour présenter la demande prévue au premier alinéa de l'article L 59. ;
Considérant que la SARL EUROPA se réfère en appel à l'imprimé en date du 12 août 2004 portant réponse aux observations du contribuable ; qu'il n'est plus contesté en appel par le ministre que le service a rayé la mention indiquant à la société requérante qu'elle disposait d'un délai de trente jours à compter de la réception de ce courrier pour l'informer de son intention de saisir la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires ; que le désaccord portait, d'une part, sur des rappels opérés au titre de l'année 2001 ou la procédure de la taxation d'office a été appliquée et sur le droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée ; que dès lors, le différend qui l'opposait à l'administration sur ces points n'est pas relatif à une question relevant, aux termes de l'article L. 59 A du livre des procédures fiscales, de la compétence de cette commission ; que le désaccord qui persistait à la suite des observations présentées par la société était relatif, d'autre part, à la justification de frais de sous-traitance Europ Steel pour un montant de 60 077 euros, de charges non engagées dans l'intérêt de l'entreprise pour un montant de 16 565 euros, de charges de sous-traitance pour 39 521 euros, de charges de locations pour 6 174 euros, de reprise d'une créance pour 9216 euros, et de charges diverses pour 906 euros ; qu'en outre le litige relatif à une provision sur titres, pour 99 092 euros et à une provision sur compte clients pour 5 325 euros ne portait pas sur le principe de la constitution des provisions, mais sur l'existence même et le montant de ces provisions ; que ces questions relevaient d'une appréciation de fait ressortissant à la compétence de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires ; qu'ainsi la SARL Europa est fondée à soutenir pour ces redressements seulement, d'un montant total de 236 876 euros, qu'en rayant la mention précitée, le service l'a privée d'une garantie de procédure et que la procédure d'imposition suivie à son encontre s'agissant des redressements portant sur l'impôt sur les sociétés de l'année 2002 était irrégulière ; qu'elle est donc fondée à demander la décharge de cette somme de 236 876 euros compte-tenu des dégrèvements déjà décidés par la décision d'admission partielle prise sur sa réclamation le 28 juin 2006 .
Sur le bien-fondé de l'imposition :
Considérant, que compte tenu de ce qui précède, demeurent en litige les rappels de taxe sur la valeur ajoutée et en matière d'impôt sur les sociétés, le profit sur le Trésor, les produits non comptabilisés en 2001 et les charges de la même année ;
En ce qui concerne la taxe sur la valeur ajoutée :
Considérant qu'aux termes du II de l'article 271 du code général des impôts alors applicable : 1. Dans la mesure où les biens et les services sont utilisés pour les besoins de leurs opérations imposables, et à la condition que ces opérations ouvrent droit à déduction, la taxe dont les redevables peuvent opérer la déduction est, selon le cas : a) Celle qui figure sur les factures d'achat qui leur sont délivrées par leurs vendeurs, dans la mesure où ces derniers étaient légalement autorisés à la faire figurer sur lesdites factures (...) ; que la loi n° 2002-1576 du 30 décembre 2002 a modifié la rédaction du même article en faisant référence à la taxe qui figure sur les factures établies conformément aux dispositions de l'article 289 et en ajoutant si la taxe pouvait légalement figurer sur lesdites factures ; que la requérante soutient que l'administration n'a pas rapporté la preuve que la somme de 6 494 euros à été récupérée sur la déclaration d'avril 2001, que l'administration ne rapporte pas la preuve de la non déductibilité de la taxe sur la valeur ajoutée grevant la location immobilière d'un montant de 1 713 euros, et que, s'agissant du rappel d'un montant de 11 775 euros le service n'établirait pas le caractère injustifié des facturations de la société Europ Steel ; que, d'une part, pour les montants de 6 494 euros et 1 713 euros, c'est en raison de l'absence de facture que les rappels ont été effectués ; que d'autre part c'est au motif de l'absence de précision sur l'origine et la nature des refacturations du fournisseur Europ Steel que l'administration a rappelé la taxe sur la valeur ajoutée afférente à cette prestation ; qu'en outre, si la SARL EUROPA fait état d'une annulation de cette facturation et d'une régularisation pour la taxe sur la valeur ajoutée au titre du mois de septembre 2003, l'absence d'indication précise sur cette régularisation ne permet pas d'en connaître les motifs ; que, par suite, l'administration apporte la preuve du bien-fondé de ces rappels ; qu'en conséquence, les moyens de la requérante ne peuvent être qu'écartés ;
En ce qui concerne l'impôt sur les sociétés :
S'agissant de la charge de la preuve :
Considérant qu'aux termes du 2° de l'article L.66 du livre des procédures fiscales : sont taxés d'office (...) A l'impôt sur les sociétés, les personnes morales passibles de cet impôt qui n'ont pas déposé dans le délai légal leur déclaration, (...) ; qu'aux termes de l'article L.193 du même livre des procédures fiscales : Dans tous les cas où une imposition a été établie d'office, la charge de la preuve incombe au contribuable qui demande la décharge ou la réduction de l'imposition ; que, par suite, la SARL EUROPA, qui conteste le bien-fondé de l'impôt sur les sociétés mis à sa charge par application de la procédure prévue à l'article L. 66 du livre des procédures fiscales, supporte la charge de prouver l'exagération des impositions en litige ;
S'agissant du profit sur le Trésor :
Considérant qu'aux termes de l'article L.77 du livre des procédures fiscales, dans sa version alors en vigueur : En cas de vérification simultanée des taxes sur le chiffre d'affaires et taxes assimilées, de l'impôt sur le revenu ou l'impôt sur les sociétés, le supplément de taxes sur le chiffre d'affaires et taxes assimilées afférent à un exercice donné est déduit, pour l'assiette de l'impôt sur le revenu ou de l'impôt sur les sociétés, des résultats du même exercice, sauf demande expresse des contribuables, formulée dans le délai qui leur est imparti pour répondre à la notification de redressements (...) ; que lorsqu'un contribuable a fait l'objet de redressements en matière d'impôt sur les bénéfices et de taxe sur la valeur ajoutée, ses bases d'imposition à l'impôt sur les sociétés peuvent être rehaussées d'un profit sur le Trésor chaque fois que le droit qui lui est ouvert de déduire de ces bases la taxe sur la valeur ajoutée rappelée aboutirait, à défaut de la constatation à due concurrence d'un tel profit, à ce que le contribuable soit imposé à l'impôt sur les sociétés sur une assiette plus réduite que celle sur laquelle il aurait été imposé s'il avait acquitté régulièrement la taxe sur la valeur ajoutée ;
Considérant que l'administration a, comme il a été dit, procédé à un rappel de taxe sur la valeur ajoutée irrégulièrement déduite ; que, dès lors, elle était en droit de réintégrer dans les résultats imposables de la société requérante un profit sur le Trésor, égal au montant de la taxe sur la valeur ajoutée rappelée, préalablement à la déduction de la cascade prévue par les dispositions précitées de l'article L.77 du livre des procédures fiscales ; que l'administration a réintégré dans les bénéfices de la SARL EUROPA imposables à l'impôt sur les sociétés au titre de l'année 2002 un profit sur le Trésor d'un montant de 19 982 euros ; que la requérante soutient que la régularisation de la taxe sur la valeur ajoutée qui a été opérée en septembre 2003 d'un montant de 36 165 euros est supérieure aux redressements opérés d'un montant de 33 385 euros et doit entraîner l'annulation du profit constaté sur le Trésor alors que l'administration a prononcé un dégrèvement d'un montant de 13 403 euros correspondant à l'abandon du profit sur le Trésor au titre de l'exercice 2001 ; que la régularisation alléguée qui est postérieure à l'année du rappel est, en toute hypothèse, sans incidence sur le montant des impôts dus et réclamés au titre de l'année 2002 ; que, par suite, la contestation de la SARL EUROPA sur ce point ne peut être que rejetée ;
S'agissant des produits non comptabilisés :
Considérant que l'administration a réintégré la somme de 9 215 euros correspondant au montant d'une facture non comptabilisée au 31 mars 2001 ; que la SARL EUROPA se prévalant de la comptabilité qu'elle a produite en fin de contrôle soutient que ladite facture a été comptabilisée, le compte client Europ Steel étant débiteur de 11 021 euros TTC soit 9 215 euros HT ; qu'elle ne le justifie pas en se référant à une écriture comptable qui ne permet pas de vérifier que la contrepartie a été inscrite dans un compte de produits ; que si la société indique que le service a abandonné le rappel s'agissant de la taxe sur la valeur ajoutée correspondante, ce moyen est inopérant s'agissant d'une facture de prestation de service pour laquelle l'encaissement n'était pas intervenu ;
S'agissant des charges :
Considérant, qu'aux termes du 1 de l'article 39 du code général des impôts : Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant (...) notamment : 1° Les frais généraux de toute nature (...) ;
Considérant, en premier lieu, que l'administration a réintégré dans les résultats de la SARL EUROPA une facture non comptabilisée d'un montant de 35 063 euros ; que la requérante en se bornant à soutenir que la décision de rejet de sa réclamation n'est pas motivée et que l'administration a abandonné le rappel concernant la taxe sur la valeur ajoutée, que le compte client de la société Europ Steel est débiteur et que cette facture a fait l'objet d'une convention entre les sociétés Europa et Europ Steel n'apporte pas la preuve de l'exagération de l'imposition ;
Considérant, en deuxième lieu, que le service a réintégré la somme de 1 975 euros correspondant à des frais de déplacement de M. Breton gérant de la société au titre de l'année 2001 ; que la requérante qui se borne à soutenir qu'il s'agit de règlements effectués par carte bleue et qu'elle a justifié de la totalité des frais, n'apporte pas la preuve qui lui incombe de l'exagération de l'imposition ;
Considérant, en troisième lieu, que la SARL EUROPA soutient qu'elle aurait commis une erreur en comptabilisant une provision pour congés payés d'un montant de 45 078 euros en raison de cotisations dues au 31 mars 2002 alors qu'il s'agit d'une charge déductible ; que si elle a été assignée par la caisse des congés payés devant le Tribunal de grande instance de Carpentras en vue du paiement de cette somme, aucun jugement n'est intervenu au 30 mars 2002 ; qu'ainsi cette somme n'avait pas le caractère d'une dette certaine dans son principe et son montant et ne pouvait dès lors être inscrite dans un compte de charges à payer ; qu'au surplus la SARL EUROPA qui se prévaut d'une comptabilisation de cette somme au titre de ce même exercice dans un compte de provision pour congés payés, ne peut prétendre à ce que cette somme soit aussi constatée dans les charges du même exercice ;
Considérant, en quatrième lieu, que le bordereau des cotisations des caisses ARCCO-MEDERIC indique une date limite de paiement au 6 septembre 2004 ; qu'aucune corrélation n'est établie entre ledit document et la charge d'un montant de 1 237 euros ; que, par suite, la SARL EUROPA n'est pas fondée à demander la déduction de cette charge au titre de l'exercice clos en 2002 ;
Considérant, enfin, que la SARL EUROPA ne peut utilement invoquer, en se fondant sur l'article L 80 A du livre des procédures fiscales, le contenu de l'instruction référencée 13 L-1317 du 1er juillet 1989 qui, traitant de questions touchant à la procédure d'imposition, ne peut pas être regardée comme comportant une interprétation de la loi fiscale au sens de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SARL EUROPA est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nîmes n'a pas fait droit à sa demande tendant à la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés et de la contribution à cet impôt de l'année 2002 et des pénalités dont elle a été assortie au motif de l'absence de saisine de la commission ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la SARL EUROPA en appel et non compris dans les dépens ;
D É C I D E :
Article 1er : La base de l'impôt sur les sociétés et de la contribution sur l'impôt sur les sociétés assignée à la SARL EUROPA au titre de l'année 2002 est réduite d'une somme de 236 876 euros, réduction tenant compte de la décision d'admission partielle prise le 28 juin 2006 sur la réclamation de la société.
Article 2 : La SARL EUROPA est déchargée, au titre de l'année 2002, des droits et pénalités correspondant à la réduction de base d'imposition définie à l'article 1er.
Article 3 : Le jugement du Tribunal administratif de Nîmes en date du 16 septembre 2008 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 4 : L'Etat versera à la SARL EUROPA une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de la SARL EUROPA est rejeté.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL EUROPA et au ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat.
Copie en sera adressée à Me Travert et au directeur de contrôle fiscal Sud-Est. +
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N° 08MA04858
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