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05/04/2011 | FRANCE | N°08MA03583

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2ème chambre - formation à 3, 05 avril 2011, 08MA03583


Vu la requête et le mémoire, enregistrés le 29 juillet 2008 et le 7 mai 2010, présentés pour Mme Claudette A élisant domicile ..., par Me Tardivel, avocat ; Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0701188 en date du 5 juin 2008 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 513 965 euros en réparation des préjudices qu'elle impute à la vaccination obligatoire contre l'hépatite B qui lui a été administrée ;

2°) à titre principal, de condamner l'Etat, en réparation

des préjudices consécutifs à la vaccination contre l'hépatite B qu'elle a subie, ...

Vu la requête et le mémoire, enregistrés le 29 juillet 2008 et le 7 mai 2010, présentés pour Mme Claudette A élisant domicile ..., par Me Tardivel, avocat ; Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0701188 en date du 5 juin 2008 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 513 965 euros en réparation des préjudices qu'elle impute à la vaccination obligatoire contre l'hépatite B qui lui a été administrée ;

2°) à titre principal, de condamner l'Etat, en réparation des préjudices consécutifs à la vaccination contre l'hépatite B qu'elle a subie, à lui verser la somme de 513 965 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter du 11 mai 2005 et à la capitalisation desdits intérêts ;

3°) à titre subsidiaire, d'ordonner une mesure d'expertise ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat, outre les dépens, la somme de 2 500 euros au titre des frais d'instance ;

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Vu le décret n° 2005-1768 du 30 décembre 2005 ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu le décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 relatif au rapporteur public des juridictions administratives et au déroulement de l'audience devant ces juridictions ;

Vu l'arrêté du vice-président du Conseil d'Etat en date du 27 janvier 2009 fixant la liste des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel autorisés à appliquer, à titre exceptionnel, les dispositions de l'article 2 du décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 14 décembre 2010,

- le rapport de Mme Massé-Degois, rapporteur,

- et les conclusions de Mme Fedi, rapporteur public ;

Considérant que Mme A, qui exerçait la profession de technicienne de laboratoire au centre hospitalier universitaire de Nîmes, relève appel du jugement du 5 juin 2008 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 513 965 euros en réparation des préjudices liés à la myélopathie dont elle est atteinte et qu'elle impute à la vaccination obligatoire contre l'hépatite B qui lui a été administrée en 1981, 1982 et 1983 ;

Sur la responsabilité de l'Etat sur le fondement des dispositions de l'article L. 3111-9 du code de la santé publique :

Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article L. 10 du code de la santé publique, ultérieurement reprises à l'article L. 3111-4 du même code : Une personne qui, dans un établissement ou organisme public ou privé de prévention ou de soins, exerce une activité professionnelle l'exposant à des risques de contamination doit être immunisée contre l'hépatite B, la diphtérie, le tétanos et la poliomyélite. (...) Un arrêté des ministres chargés de la santé et du travail, pris après avis du Conseil supérieur d'hygiène publique de France, détermine les catégories d'établissements et organismes concernés ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 3111-9 du code de la santé publique, dans sa rédaction d'origine : Sans préjudice des actions qui pourraient être exercées conformément au droit commun, la réparation d'un dommage imputable directement à une vaccination obligatoire pratiquée dans les conditions mentionnées au présent chapitre est supportée par l'Etat (...) ; que si le même article, tel qu'il a été modifié par la loi du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique, dispose désormais que cette réparation est assurée par l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales institué à l'article L. 1142-22, au titre de la solidarité nationale , les modalités d'application de ces dispositions devaient être fixées par décret en Conseil d'Etat ; que le décret relatif aux nouvelles missions confiées à l'Office est intervenu à cette fin le 30 décembre 2005 et entré en vigueur le 1er janvier 2006 ; qu'aux termes de l'article 7 de ce décret : Les demandes présentées au titre de l'article L. 3111-9 du code de la santé publique antérieurement à l'entrée en vigueur du présent décret et qui n'ont pas fait l'objet à cette date d'une décision de l'Etat sont instruites par l'Office national des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales, mentionné à l'article L. 1142-22, et examinées par la commission mentionnée à l'article R. 3111-25. L'avis rendu par la commission est transmis sans délai au ministre chargé de la santé qui présente, s'il y a lieu, l'offre d'indemnisation à la victime ou à ses ayants droit par lettre recommandée avec demande d'avis de réception. La victime ou ses ayants droit font connaître au ministre par lettre recommandée avec demande d'avis de réception s'ils acceptent l'offre d'indemnisation qui leur est faite ; qu'il résulte de ces dernières dispositions que, s'agissant des demandes présentées au titre de l'article L. 3111-9 du code de la santé publique antérieurement à l'entrée en vigueur du décret du 30 décembre 2005, comme celle de

Mme A présentée le 12 mai 2005, l'Etat supporte toujours la charge de la réparation des dommages ;

Considérant que, alors même qu'un rapport d'expertise n'établirait pas de lien de causalité, la responsabilité de l'Etat peut être engagée en raison des conséquences dommageables d'injections vaccinales contre l'hépatite B réalisées dans le cadre d'une activité professionnelle ou assimilée, eu égard, d'une part, au bref délai ayant séparé l'injection de l'apparition du premier symptôme constaté d'une pathologie identifiée et comportant des atteintes démyélinisantes et, d'autre part, à la bonne santé de la personne concernée et à l'absence, chez elle, de tous antécédents à cette pathologie antérieurement à sa vaccination ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment des conclusions des deux rapports d'expertises établis les 5 mai 2006 et 31 juillet 2006 par des praticiens neurologues, que Mme A a reçu trois injections de vaccin le 23 novembre 1981, le 22 décembre 1981, le 21 janvier 1982 suivies d'un rappel le 12 janvier 1983 ; qu'il résulte des deux rapports dont celui rédigé le 5 mai 2006 à la demande de la direction départementale des affaires sociales du Gard que les premiers symptômes cliniquement constatés de la pathologie dont l'intéressée est victime, en l'occurrence des symptômes neurologiques multifocaux, sont apparus en juillet 1985 et ont nécessité à cette date une hospitalisation ainsi qu'un suivi dans un service de neurologie, soit environ 29 mois après le rappel de vaccin reçu le 12 janvier 1983 ; que si Mme A établit par la production d'un certificat médical avoir consulté le jour de Pâques de l'année 1984 un médecin généraliste pour un zona intercostal, il ne résulte cependant d'aucune pièce médicale versée aux débats, ni d'aucun élément des expertises que cette dermatose virale, intervenue au demeurant plus de quatorze mois après la dernière injection, présente un lien avec le vaccin administré et la myélopathie diagnostiquée ; qu'enfin, Mme A n'établit pas avoir présenté dès le mois de juillet 1983 un eczéma comme elle l'allègue en se bornant à produire des témoignages rédigés en juin 2008, soit vingt-quatre ans après les faits pour les besoins de la cause par des collègues de travail, et à soutenir que le praticien qui l'avait alors soignée est depuis décédé alors qu'aucun des deux rapports d'expertise ne relate ce type de trouble cutané avant l'apparition du zona intercostal ; que, par ailleurs, cette manifestation cutanée, à la supposer même comme apparue six mois après le dernier rappel, ne présente en tout état de cause aucun lien avec le vaccin administré et la myélopathie diagnostiquée au vu des pièces du dossier ; que, dans ces conditions, alors même que Mme A n'a présenté, antérieurement aux injections de vaccin, aucun signe précurseur de la pathologie dont elle est victime, le délai, qui ne peut être regardé comme suffisamment bref, ayant séparé la dernière injection reçue par l'intéressée et l'apparition des premiers symptômes pouvant être interprétés comme liés à la myélopathie ne permet pas de regarder comme établie l'existence d'un lien direct entre la vaccination et l'affection comme le relève d'ailleurs l'un des deux rapports d'expertise ; que si l'autre rapport d'expertise conclut à la possibilité d'imputer la myélopathie chronique dont est atteinte Mme A à la vaccination en litige, cette circonstance ne permet pas, à elle seule, de regarder comme établie l'existence d'un lien direct entre le vaccin administré et l'affection dont s'agit ;

Sur la responsabilité de l'Etat sur le fondement de l'article L. 1111-2 du code de la santé publique :

Considérant que Mme A soutient que son employeur devait lui dispenser, en application des dispositions de l'article L. 1111-2 du code de la santé publique, l'information sur les risques qu'elle encourait qui étaient normalement prévisibles et présumés depuis le début des années 1980 lors des premières campagnes de vaccination ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 710-2 du code de la santé publique, dans sa rédaction applicable à la date des faits en litige : Les établissements de santé, publics ou privés sont tenus de communiquer aux personnes recevant ou ayant reçu des soins, sur leur demande et par l'intermédiaire du praticien qu'elles désignent, les informations contenues dans leur dossier médical ; qu'aux termes de l'article L.1111-2 du code de la santé : Toute personne a le droit d'être informée sur son état de santé. Cette information porte sur les différentes investigations, traitements ou actions de prévention qui sont proposés, leur utilité, leur urgence éventuelle, leurs conséquences, les risques fréquents ou graves normalement prévisibles qu'ils comportent ainsi que sur les autres solutions possibles et sur les conséquences prévisibles en cas de refus. (...) Cette information incombe à tout professionnel de santé dans le cadre de ses compétences et dans le respect des règles professionnelles qui lui sont applicables. Seules l'urgence ou l'impossibilité d'informer peuvent l'en dispenser. Cette information est délivrée au cours d'un entretien individuel (...) En cas de litige, il appartient au professionnel ou à l'établissement de santé d'apporter la preuve que l'information a été délivrée à l'intéressé dans les conditions prévues au présent article. Cette preuve peut être apportée par tout moyen. ;

Considérant, à supposer que ces dispositions ne dispensaient pas le service public hospitalier, en cas d'identification de risques nouveaux postérieurement à l'exécution d'une investigation, de l'obligation, désormais consacrée à l'article L. 1111-2 du code de la santé publique, d'en informer la personne concernée, sauf impossibilité de retrouver celle-ci, en tout état de cause, en l'absence de lien de causalité démontré entre les vaccinations reçues par

Mme A et les préjudices dont elle demande la réparation, la circonstance qu'elle aurait été victime d'un défaut d'information sur les risques de la vaccination demeure sans incidence sur le bien-fondé de sa demande ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'ordonner l'expertise sollicitée, Mme A n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article R. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'en vertu de l'article R. 761-1 du code de justice administrative, les dépens comprennent les frais d'expertise, d'enquête et de toute autre mesure d'instruction dont les frais ne sont pas à la charge de l'Etat ; que la présente affaire n'a donné lieu à aucun dépens ; que, par suite, les conclusions présentées par Mme A sur le fondement de ces dispositions ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante à la présente instance, la somme que Mme A demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme A est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Claudette A, à la caisse primaire d'assurance maladie du Gard et au ministre du travail, de l'emploi et de la santé.

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N° 08MA035832


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 08MA03583
Date de la décision : 05/04/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

60-02-01-03 Responsabilité de la puissance publique. Responsabilité en raison des différentes activités des services publics. Service public de santé. Service des vaccinations.


Composition du Tribunal
Président : M. GONZALES
Rapporteur ?: Mme Christine MASSE-DEGOIS
Rapporteur public ?: Mme FEDI
Avocat(s) : SCP LOBIER MIMRAN GOUIN LEZER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2011-04-05;08ma03583 ?
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